Entretien de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des Français de l'étranger, dans "Le Journal du Dimanche" du 6 février 2013, sur la sécurité des Français au Mali et au Niger.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Le Journal du Dimanche

Texte intégral

Q - Avec quel sentiment repartez-vous à Paris?
R - La gestion de la crise malienne et de la sécurité au Niger et au Mali sont complètement différentes. À Bamako, j'ai eu l'impression d'une vie normale avec une menace invisible. La guerre est loin. Mais cette liberté peut conduire à une prise de risques. On en a la preuve avec l'organisation de cours improvisés en plein air, suite à la fermeture du lycée français. C'est une situation très inquiétante. La menace à Bamako est la même que celle à Niamey mais la réponse nigérienne est dans la prévention. Il y a eu une prise de conscience et il y a une certaine angoisse que je n'ai pas ressentie à Bamako. L'enlèvement de deux jeunes à Niamey est dans la mémoire collective. À Bamako, il n'y a pas ce genre de souvenirs, les gens n'ont pas été choqués par ce qu'il s'est passé. Heureusement pour eux.
Q - À Niamey, certains résidents ou expatriés Français évoquent un trop-plein sécuritaire...
R - Ce sont des mesures de transition. Je comprends leurs angoisses. C'est un moment difficile à traverser. Mais je préfère la prévention à la réaction. Est-ce que sa propre vie ne vaut pas la peine de se priver de quelques libertés pendant une certaine période ? Niamey est géographiquement très proche du conflit. Les terroristes traversent les frontières et rentrent au Niger.
Q - Les parents d'élèves du lycée français de Bamako demandent la réouverture de l'établissement. Concrètement, qu'allez-vous faire?
R - J'ai discuté avec l'ambassadeur de France à Bamako, je lui ai donné la feuille de route. Nous allons tout mettre en place pour que le lycée puisse rouvrir. Ce qui m'inquiète beaucoup, c'est la mise en place de classes un peu sauvages dans la ville. C'est complètement inconscient, pratiquement criminel. Il faut que les gens prennent leur responsabilité, ce n'est plus de notre ressort. Le lycée de Bamako restera fermé jusqu'à ce que nous ayons les garanties que la sécurité de l'établissement soit complètement assurée.
Q - Selon vous, quel rôle doit jouer la France au Mali dans les mois à venir?
R - La France restera le temps qu'il faut pour affaiblir les terroristes et redonner aux Maliens le contrôle de leur pays. Une fois que cela sera fait, les mécanismes normaux d'aide au développement se mettront en place. L'accompagnement passera par des aides à la formation, à l'éducation, à la santé, mais aussi dans l'organisation de l'administration et de la sécurité à tous les niveaux. Les Maliens ont été un peu bousculés par mon message et ma demande de laisser le lycée français fermé parce qu'ils ont pris conscience, je crois, de l'importance de la sécurité pour nous et pour eux.
Q - Quelle attitude faut-il avoir par rapport aux touaregs du MNLA ?
R - Des élections vont avoir lieu et la commission va être mise en place. Serons invité autour de la table - c'est ce que m'a dit le Premier ministre - l'ensemble de ceux qui ont vocation à participer à la réorganisation et à la reconstruction du Mali. Laissons aux Maliens le soin de réorganiser leur armée et de tenir leurs élections.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 février 2013