Texte intégral
Mesdames, Messieurs, Monsieur le Président, Messieurs les conseillers, je voudrais dabord commencer par des remerciements à vous, Monsieur le Président Delevoye pour la qualité des relations qui sont celles du CESE avec le gouvernement et, ce dans un travail partagé, qui concourt aujourdhui à revitaliser la démocratie sociale et le dialogue social dans notre pays.
Je voudrais saluer votre implication personnelle dans cette tâche.
Je salue et remercie, Madame Christine Dupuis, la Présidente de cette commission temporaire sur léconomie sociale et solidaire même si je pense que cette commission laissera une trace pas temporaire du tout mais durable dans la façon dont nous nous inspirerons par la loi des travaux et du projet davis de votre conseil.
Je voudrais remercier les membres de cette commission qui se sont beaucoup impliqués dans ce travail, jai eu loccasion de les rencontrer, lors dune audition qui était extrêmement intéressante qui nous a permis de balayer des sujets bien au-delà des termes de la saisine comme dailleurs les rapporteurs sen sont saisis eux-mêmes et ont relaté un certain nombre de réflexions et de préconisations qui sont celles du conseil.
Cest un grand honneur pour moi, au nom du gouvernement, non pas dassister à la remise de votre premier avis puisque ce nest pas le premier avis, mais à vos conclusions à partir de la première saisine du gouvernement à légard du conseil qui portait sur deux chapitres de la loi sur léconomie sociale et solidaire.
Je voudrais pour commencer saluer la façon dont les uns et les autres se sont engagés dans ce travail sans a priori idéologique, jespère dailleurs que nous pourrons retrouver cette même unanimité derrière, mais sans a priori idéologique à légard du secteur de léconomie sociale et solidaire dont on véhicule aujourdhui beaucoup de caricatures et qui méritent bien mieux que ces caricatures au regard du poids qui est le sien dans le produit intérieur brut, dans lemploi en France, du poids qui est le sien dans les services dintérêt général ou dutilité sociale. Il mérite mieux que les caricatures ou les a priori que lon a parfois pu entendre ou colporter sur elle.
Merci à vous de cette implication et de cette contribution qui pèsera de façon capitale dans la préparation du projet de loi que je soumettrai au conseil des ministres pour la fin du premier semestre 2013 ; lengagement du gouvernement que ce texte soit déposé au premier semestre 2013 sera tenu.
Pourquoi avoir saisi le CESE ?
Pour deux raisons, à la fois parce que nous voulions donner une illustration de la volonté du gouvernement de revitaliser, de revigorer la démocratie sociale de tous les acteurs économiques, sociaux et environnementaux qui ont une contribution qui est utile au travail et à la réflexion du gouvernement sur sa stratégie de croissance en faveur de léconomie sociale et solidaire. Et parce que, deuxième raison, nous voulons mettre en oeuvre une politique publique, une stratégie de croissance en faveur de lESS ; stratégie de croissance qui se fixe cet objectif de faire de lESS à la fois un moyen de sortir de la crise mais aussi un objectif. Non pas pour opposer les économies dites classiques à léconomie sociale et solidaire, mais pour avoir une stratégie complète de croissance qui se préoccupe des capacités, des potentiels de croissance et de développement de tous les secteurs en particulier celui de léconomie sociale et solidaire.
Je voudrais rappeler le contexte de cette saisine. Il est incontestablement celui dune économie en difficulté ou déprimée pour la zone euro et celle de lUnion européenne. Ce matin, je siégeais à lEcofin au nom de la France ; nous avons examiné les préconisations de la commission en matière de croissance et ladoption dune coopération renforcée en faveur de la taxe sur les transactions financières, mais ce qui est intéressant aujourdhui et qui se passe dans lUnion européenne, cest quà partir dune situation particulièrement déprimée se posent les termes dun débat nouveau notamment sur la nécessité de prendre en compte les déficits structurels, de regarder dans les dépenses publiques et dans la consolidation budgétaire ce qui relève dune dépense qui stimule la croissance, dune dépense qui est neutre pour la croissance, ce qui montre quà laulne dun contexte récessif, tout le monde évolue, y compris la Commission européenne, y compris le FMI.
De ce point de vue, il est important de mettre en place des politiques publiques qui tiennent compte de ce contexte particulièrement difficile pour léconomie européenne et à lintérieur de celle-ci léconomie française.
LESS crée de lemploi et dans un pays qui a autant de chômeurs, nous avons la responsabilité de tout faire pour consolider et développer léconomie sociale et solidaire.
Dans les dix dernières années, ce secteur a créé 23 % des emplois supplémentaires quand léconomie classique nen créait que 7 %. Cela justifie à nos yeux de mettre en place une véritable stratégie de croissance pour ce secteur de façon quun modèle qui sest révélé robuste, tempérant et patient durant la crise puisse disposer demain des moyens de se développer.
Cest tout lenjeu des politiques que nous avons voulu mettre en place depuis la constitution du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Elles ne se limiteront pas à un texte de loi sur léconomie sociale et solidaire et elles iront bien plus loin : la mise en place du programme emploi davenir concerne pour moitié dores et déjà les acteurs de léconomie sociale et solidaire, le pré-positionnement de la banque publique dinvestissements en faveur de léconomie sociale et solidaire et de produits financiers adaptés à la structure capitalistique ou aux spécificités des acteurs de léconomie sociale et solidaire ; bien sûr une loi dont vous avez examiné plusieurs des objectifs, qui sera votée par le parlement et, bien au-delà, toute une série de mesures qui aujourdhui concourent au développement de ce secteur.
Je me réjouis que dans le cadre des annonces faites par le Premier ministre sur le programme investissements davenir, il ait été annoncé le lancement dun nouvel appel à projet en direction des acteurs de léconomie sociale et solidaire doté à minima de 20 millions deuros destinés à financer des moyens et gros « tickets » comme l on dit, à partir de 500 000 euros pour favoriser la structuration de ces acteurs dès lors quils ont des projets qui sont des projets lourds de développement en réponse aux difficultés quils rencontrent avec la crise.
Que lon ne sy trompe donc pas : lambition du gouvernement nest pas de faire un ministère en plus, doù le fait que nous layons logé à Bercy en quelque sorte, ni de faire un texte de loi déclamatoire sur léconomie sociale et solidaire mais bien de poser les termes, les normes dune politique publique en faveur dun secteur qui justifie en raison de ces statuts, de ces spécificités, de ces fonctions, de ces missions quil y ait aujourdhui une politique du gouvernement en sa faveur.
Venons-en au contenu de votre projet davis et sur ma proposition. Le Premier ministre avait sollicité votre institution sur deux aspects que jentends traiter dans le cadre de mon projet de loi : la territorialisation de léconomie sociale et solidaire dune part, et les conditions de reprise dune entreprise en forme de coopérative par ses salariés, dautre part.
Vos rapporteurs ont certes étendu leurs travaux en élargissant quelque peu le spectre afin dillustrer sans doute la richesse de vos débats en commission mais à cette étape de nos discussions, je vais me contenter dévoquer le sujet de la saisine originelle avant de laisser à chaque groupe le soin dexprimer sa position qui dépassera sans doute lobjet de la saisine.
Le projet davis répond donc à la demande du gouvernement qui souhaitait pour commencer une synthèse de vos travaux passés en lien avec les enjeux de léconomie sociale et solidaire. Japprécie le rappel de vos contributions et celle des CESER qui ont valorisé la participation des salariés dans lentreprise, ainsi que les singularités de la gouvernance des entreprises de lESS et leur implication décisive dans les politiques sanitaires et sociales. Il ny a pas de miracle dans le fait quune entreprise de lESS soit plus robuste quune autre. Cest bien en raison de sa gouvernance ou de sa structure capitalistique que lon a aujourdhui un modèle plus tempérant.
Jindique cela, mais il ny a pas pour nous da priori idéologique vis-à-vis de léconomie sociale et solidaire.
Cest seulement le souci pragmatique de regarder ce qui marche, tout ce qui marche : de la PME classique comme de la PME de léconomie sociale et solidaire ; de la petite entreprise qui se crée dans le secteur des hautes technologies comme de la petite SCOP qui va faire de la charpente. Tout nous intéresse. Il ny a pas de petits et de grands emplois. Il ny a pas de bons et de mauvais emplois. Il ny a pas de bonnes et de mauvaises entreprises. Tout nous intéresse, surtout dans un pays qui, aujourdhui, est confronté au fléau du chômage et à la nécessité de relancer son économie. Cest pourquoi nous nous sommes concentrés sur léconomie sociale et solidaire et la raison pour laquelle ce gouvernement se mobilise sur ce secteur.
Bon nombre de vos analyses et préconisations sont étudiées de près. Ainsi, par exemple, je travaille actuellement à ce quun enseignement soit dispensé sur les modèles dentrepreneuriat de léconomie sociale et solidaire. Il y a 75 Masters 2 en lien avec léconomie sociale et solidaire ; je me réjouis de ce développement. Également, dans bon nombre de chaires de lentreprenariat social, léconomie sociale se développe dans nos grandes écoles de commerce. Je me réjouis donc du travail que vous aviez fait, je pense à la recommandation de M. Jean-Baptiste Prévost, qui figure dans son rapport récent sur lemploi des jeunes.
Par ailleurs, le projet davis mentionne très opportunément vos réflexions sur les incertitudes introduites en raison de lemprise croissante du droit de lUnion européenne dans les relations entre les collectivités publiques et les entreprises de léconomie sociale et solidaire, notamment celles impliquées dans des missions de service public. Au demeurant, dans cette affaire, il nest pas toujours juste de mettre en cause Bruxelles. Il est arrivé aussi quà Paris, on nait pas su ou pas voulu exploiter toutes les marges de manoeuvre quoffre le droit communautaire. Jai bien lintention dinviter le législateur à traiter une partie de ces questions en proposant, par exemple, de clarifier par la loi la frontière entre les marchés publics et les subventions. Jai bien noté que cette démarche correspondait à une des recommandations du projet davis qui constituera donc, pour moi, un point dappui précieux.
Je proposerai également au gouvernement que la loi facilite le recours aux marchés publics, pour lesquels les entreprises de léconomie sociale et solidaire sont des partenaires performants des pouvoirs publics. Je pense notamment aux marchés comportant des clauses dinsertion.
Votre projet davis revient également sur vos positions répétées en faveur dun statut européen, tant pour les associations que pour les mutuelles. Ma collègue, Mme Fourneyron, sera attentive à ce rappel concernant le champ associatif. Je suis quant à moi mobilisé pour que les travaux sur le statut de la mutualité européenne avancent vraiment, mais ce nest pas un sujet facile. Nous savons où se trouvent les verrous ; nos amis et partenaires allemands ne sont pas forcément naturellement favorables à un statut de la mutualité européenne, mais nous travaillons à les convaincre afin que, dans le sillage du Parlement européen qui avance sur ce sujet, demain, le Conseil également puisse avancer. Dailleurs, ce sera le thème dun entretien que jaurai au cours du mois prochain avec le commissaire européen chargé de lindustrie et de lentreprenariat, M. Tajani et je me réjouis dores et déjà du soutien que nous a apporté le commissaire Barnier, qui a la volonté de faire avancer le statut de la mutuelle européenne.
Jen viens à vos recommandations relatives au développement local de léconomie sociale et solidaire. Jobserve une grande convergence de points de vue entre le projet de votre commission temporaire et les orientations du gouvernement. De manière générale, nous sommes probablement dans un moment, que jhésite à qualifier dhistorique, car on met ce mot à toutes les sauces, mais en tout cas, il y a un bon alignement des planètes. Cest, dabord, la disponibilité des acteurs de léconomie sociale et solidaire. Cest, aussi, la disponibilité de lÉtat, celle des collectivités locales et même, récemment, à travers un séminaire organisé par la Garde des sceaux avec les procureurs, celle de lautorité judiciaire qui se préoccupe des conditions de reprises dentreprises. Lorsque lon voit un certain nombre de décisions prises par les tribunaux de commerce - et je respecte ces derniers, ils sont souverains - qui ont parfois pu être motivées par lignorance de la spécificité du modèle des SCOPS, il mapparait nécessaire, de faire un travail, jose le dire, dacculturation à léconomie sociale et solidaire. Je considère quil faut collectivement, décideurs économiques comme décideurs politiques, être plus acculturé à la diversité de ce modèle. Je pense très honnêtement que la biodiversité est bonne pour léconomie, pour les entreprises et pour la nature, et que lon a tout à gagner à ce que, dans notre pays, on valorise la biodiversité économique.
Jen viens à vos recommandations relatives au développement local de léconomie sociale et solidaire. Jai parlé du bon alignement des planètes. Je me réjouis que le Conseil économique, social et environnemental rejoigne cet alignement des planètes, mais je le trouve là naturellement à sa place.
Je veux insister sur un point que vous avez identifié, le fait que les entreprises de léconomie sociale et solidaire soient à ce point solidement ancrées dans nos territoires. Ça nest pas le fait du hasard. Vous lavez bien remarqué. Ce sont bien les traits identitaires de léconomie sociale et solidaire qui sont à lorigine de sa robustesse et de son ancrage territorial. Je pense, notamment, au fait que beaucoup dacteurs de léconomie sociale et solidaire répondent par linnovation sociale à des besoins sociaux liés à des territoires. Cest ce qui explique, aussi, leur place actuelle dans nos territoires et lattachement des acteurs de ces territoires au développement de léconomie sociale et solidaire.
En matière de développement local, je trouve dans votre projet davis des préconisations très pertinentes et partage la plupart des constats qui y figurent. Je souhaite en évoquer quelques-uns.
Oui, les chambres régionales de léconomie sociale et solidaire, les CRESS, doivent voir leur existence reconnue et leurs missions stabilisées par la loi. Je rejoins totalement les auteurs du projet davis sur lidentification des missions des CRESS, lobservation de léconomie sociale et solidaire, la promotion, donc faire connaître léconomie sociale et solidaire, et le développement de léconomie sociale et solidaire. Je les rejoins également sur la nécessité dune collaboration formalisée, non seulement avec les régions et lÉtat, cest évident, mais également avec les organismes consulaires investis dans le développement économique et laide aux entrepreneurs.
Mais je rejoins aussi votre projet davis sur linopportunité dune consularisation des CRESS. Outre quelle serait très lourde au plan institutionnel et budgétaire, et quelle nest donc pas à notre portée, une telle mutation nest pas souhaitable, car je pense que léconomie sociale et solidaire est confrontée à un défi paradoxal : le besoin de faire reconnaître ses différences mais, aussi, celui dêtre banalisée. Introduire une forme de césure un peu étanche entre léconomie sociale et solidaire et le reste de léconomie à travers la consularisation des CRESS ne contribuerait pas à un développement forcément aussi efficace que nous le souhaitons de lESS dans les territoires.
Je suis plus réservé, cependant, sur la place quil faudrait accorder au dialogue social dans les CRESS. Dans mon esprit, les CRESS demeureront constitués sous un régime associatif et si le législateur peut stabiliser les missions des chambres avec lesquelles lÉtat et les régions seront invitées à contractualiser, je doute que la loi puisse également fixer des exigences quant à la composition de ces associations.
Quoi quil en soit, les CRESS doivent être conçues - et le sont le plus souvent ainsi déjà - comme des opérateurs investis de missions techniques et opérationnelles au service dune meilleure compréhension et dune plus forte implantation des entreprises de léconomie sociale et solidaire. Si, à ce titre, les CRESS peuvent favoriser les échanges de vues entre les acteurs, je ne pense pas quelles puissent être un instrument de représentation ou de formalisation dorientations stratégiques. Il me semble que les CESER répondent bien mieux à de tels objectifs.
Je partage votre constat sur la disparité territoriale qui caractérise les CRESS et quil faudra traiter. Il ne faut pas être surpris, ni choqué, de ce que chaque territoire cherche à ajuster le positionnement des CRESS au regard des spécificités territoriales. Á ce sujet, jai bien noté votre point de vigilance concernant la situation lOutre-mer, qui ne doit pas rester à lécart de la structuration de lESS. Lessentiel est que toutes les missions soient bien couvertes dans chaque région et quelles sexercent dans un cadre adapté et formalisé.
Cette exigence mamène à un autre point traité par le projet de la commission temporaire : la contractualisation entre les acteurs. Là encore, je partage pleinement vos préconisations. Léconomie sociale et solidaire doit être mieux identifiée dans les contrats de projet État-Région. Les schémas régionaux de développement économiques doivent comporter un volet dédié à léconomie sociale et solidaire et la loi devrait offrir aux acteurs locaux un cadre contractuel permettant de rendre visible leur collaboration. Lexemple que vous citez des pôles territoriaux est pertinent. Avec Cécile Duflot et la Datar, nous allons lancer un nouvel appel doffres pour faire en sorte de favoriser la constitution et le financement du développement de ces clusters de léconomie sociale et solidaire qui démontrent sur le terrain quils sont une alternative très concrète à la délocalisation, quils permettent des collaborations entre des PME ou des ETI de léconomie dite classique et des acteurs de léconomie sociale et solidaire et quils contribuent très largement à limiter ou à freiner ce que sont les destructions demplois sur notre territoire. Cest la raison pour laquelle, avec Cécile Duflot, nous lançons ce nouvel appel doffres pour financer lémergence de nouveau clusters de léconomie sociale et solidaire.
Tous ces sujets feront lobjet de propositions de ma part et jai conscience quil conviendra de coordonner ce chantier législatif avec la préparation de lActe III de la décentralisation.
Jen viens à la modernisation du modèle coopératif et sur le droit de préférence. Le gouvernement souhaite développer le nombre de SCOP car cela créera de lemploi et des activités. Si mon ministère sintéresse autant au développement des SCOP, ce nest pas par idéologie. Je voudrais quon lentende ainsi. En effet, les SCOP qui sont membres de bon nombre de fédérations professionnelles et des organisations patronales, ne sont plus de vieux messieurs en barbe blanche avec une redingote qui vous vantent un modèle datant des siècles précédents. Les SCOP, cest de la haute technologie, comme cela peut être de la charpente. Elles sont dans tous les domaines, le bâtiment, lindustrie, les services et sont présentes sur tout le territoire. Pourquoi voulons-nous favoriser laugmentation du nombre de SCOP ? Parce que nous avons observé, de manière statistique, quune SCOP sur son marché, comparée à une concurrente de droit commun, sest souvent révélée plus résistante face à la crise. Pourquoi ? Parce que la totalité des excédents sont reversés dans lentreprise et quelles ne sont pas tendues par un objectif qui serait parfois la rémunération du propriétaire en capital de lentreprise.
À ce titre, ce modèle dentreprise - qui nest pas généralisable car la SCOP nest pas de la magie, elle ne transforme pas du plomb en or - est aujourdhui à valoriser. La crise laisse un testament et dans ce dernier, il y a nécessité de penser à un modèle économique plus tempérant, plus patient et plus prudent. Nous considérons aujourdhui que les SCOP et leur développement - pas seulement elles - contribuent et participent, de laffirmation dune stratégie de croissance économique audacieuse qui prend des risques, mais qui recherche aussi - pardon de ce mot - la durabilité, la tempérance, la prudence. À ce titre, nous voulons donc favoriser la création de SCOP.
Les SCOP, cest un outil à mobiliser contre la fermeture dentreprises saines. Les SCOP peuvent faire plus et nous aider à sauvegarder des entreprises et des emplois en facilitant la reprise dentreprises en bonne santé par leurs salariés. Chaque année, plusieurs dizaine de milliers demplois sont perdus, faute de reprise dentreprises saines. Ces entreprises sont viables et génèrent de lactivité. Ce sont de petites PME de mécanique, de peinture, dimprimerie, pas des pépites qui justifieraient quon se les arrache parce quelles dégageraient des rendements considérables, mais elles maintiennent lemploi sur les territoires et des familles debout, des salariés debout qui eux-mêmes restent des agents économiques qui contribuent à lessor de notre économie. Raison pour laquelle nous considérons aujourdhui quil nest pas acceptable de laisser autant dentreprises saines fermer et quil faut trouver toutes les solutions possibles, dont les SCOP, pour pouvoir y répondre.
Que se passe-t-il souvent dans ces entreprises ? Le propriétaire de lentreprise tarde à préparer sa succession, en plus il a naturellement tendance à surestimer la valeur de son bien, ce qui est compréhensible vu son investissement durant parfois toute sa vie pour son entreprise. Ainsi parfois il ne trouve pas de repreneur pour son activité. Les salariés peuvent constituer une réponse à ce problème. Vous rappeliez, Monsieur Lenancker, à juste titre que la Commission européenne avait souligné en 2004 lintérêt de faire appel aux coopératives de travailleurs pour pérenniser des entreprises par leurs salariés qui, de par leur connaissance fine de lentreprise et des marchés, offrent une solution à mobiliser. Une de ces conditions, cest lanticipation. Cest un facteur clef de réussite pour une transmission dentreprise aux salariés.
Pour cela, les salariés doivent être informés suffisamment en avance pour avoir le temps détudier le dossier, de constituer une société de reprise avec les moyens financiers et ainsi proposer une offre crédible au propriétaire cédant. La solution proposée vise à renforcer le droit à linformation pour les salariés en amont de la cession, afin de leur permettre de formuler, sils le souhaitent, une offre de reprise. Il est encore trop tôt pour entrer dans le détail de la mesure, mais le statut juridique de SCOP est loutil parfaitement adapté pour cela et il a toute ma préférence. Mais il est tout à fait envisageable que les salariés puissent choisir une autre forme dentreprise, si les conditions ne sont pas réunies pour entreprendre en SCOP, cest un principe de liberté auquel nous tenons.
La mesure ne concernera pas les transmissions familiales puisque dans ce cas le problème de transmission ne se pose pas. Notre mesure a pour objectif de faciliter les transmissions dentreprises et non pas de les freiner. La question de la taille de lentreprise est essentielle et je proposerais quun critère de taille dentreprise soit fixé en fonction du nombre demplois et du chiffre daffaires qui reste à déterminer, car la reprise par les salariés est difficilement envisageable au-delà dune certaine taille et dun certain capital. Est-ce 500 salariés, plus ou moins ? Le débat parlementaire nous lindiquera. En revanche, ce nouveau droit sappliquera aux petites entreprises par la voie des institutions représentatives du personnel quand elles existent et directement aux salariés dans les entreprises de moins de 10 salariés. Cest un enjeu fort dactivité et demplois, a fortiori parce que ces entreprises qui ferment sont souvent des TPE ou des PME.
Jinsiste sur un point important, jai demandé à mes services de travailler à une mesure la plus simple possible, compréhensible par tous, salariés comme chefs dentreprises. Encore une fois, lobjectif est de susciter lenvie de transmettre son entreprise à ses salariés et de laisser le choix et les moyens aux salariés de la reprendre.
Je vais poursuivre le débat sur le droit préférentiel de reprise. Renforcer le droit à linformation en amont du projet de cession est un préalable essentiel. Il pourrait être utilement complété par la mise en place dun droit préférentiel en faveur de loffre des salariés. Cette mesure trouverait sa justification en cas doffre formulée par des fonds spéculatifs dont nous devinons que lobjet nest pas le maintien de lactivité, mais le gain ou le profit quils peuvent réaliser et dont on connaît tous et dont on mesure les dégâts quils ont réalisés sur plusieurs de nos territoires.
Cette mesure, à travers lexplosion de la précarité et de la grande pauvreté, cest aussi une conséquence dune absence peut-être de régulation en amont de la cession de ces entreprises qui nous aurait permis déviter de telles situations. Cela signifierait donc quà offre égale en termes demploi, de maintien de lactivité mais aussi de prix, la proposition des salariés pourrait lemporter sur celle dautres repreneurs, mais le débat politique devra définir ce que lon peut entendre par offre égale. À mon sens, lobjectif de préservation des emplois est essentiel.
Jajoute un autre objectif qui est un rappel dordre constitutionnel. Notre créativité rencontrera deux bornes fondamentales que sont le droit de propriété dune part, et la liberté de commerce et dindustrie dautre part. Ces deux bornes contiennent une dose de flexibilité mais rien ne serait pire que lidée que nous portons soit anéantie par une décision des juges constitutionnels estimant que nous avons franchi ces bornes. Cest dans ce cadre étroit que nous devrons calibrer soigneusement la mesure.
Dautres mesures doivent être envisagées, telles que la SCOP damorçage pour faciliter la constitution de tours de table financier solides pour proposer la création dun statut transitoire de SCOP pendant la phase de création permettant aux salariés de ne pas être majoritaires au capital pendant 5 à 10 ans et arbitrer tout en possédant plus de 65 % du droit de vote. Pendant cette période transitoire, grâce aux excédents accumulés, les salariés pourront constituer progressivement les fonds propres nécessaires à la pleine possession de lentreprise et devenir ainsi pleinement majoritaires au capital.
Cest une proposition que je fais mienne car elle facilitera la levée de fonds nécessaire et limitera de fait la prise de risque par les salariés repreneurs.
Jy vois un autre avantage en faisant entrer au capital des investisseurs extérieurs patients ; cela peut aussi aider et accompagner les salariés repreneurs à consolider leur modèle économique : ils ne seront pas seuls à veiller aux destinées de leur entreprise.
Enfin, je vous rejoins dans la possibilité de créer des groupes de SCOP. Là aussi, je rejoins votre projet davis. Si lon veut que les SCOP puissent être compétitifs sur des marchés hautement concurrentiels, il faut leur permettre de se regrouper sans pour autant remettre en cause la gouvernance démocratique basée sur le principe "une personne = une voix" à léchelle du groupe. Cette proposition est, là encore, travaillée par mes services.
Je voudrais enfin vous dire un mot du financement. Oui, la Banque publique dinvestissement financera les SCOP. La difficulté est de pouvoir faciliter la reprise et la transmission dentreprises en SCOP pour des « gros tickets ». Si lon veut pouvoir développer les SCOP, il faut quelles puissent constituer des tours de table de plusieurs millions deuros. Pour cela, la Banque publique dinvestissement sera mobilisée puisque cinq cents millions deuros seront réservés aux entreprises de léconomie sociale et solidaire. La Banque publique dinvestissement interviendra en fonds propres et prêts pour consolider la structure financière des SCOP ; cela décuplera ainsi leur capacité dinvestissement en permettant un meilleur effet de levier des crédits bancaires.
Le but de la BPI nest pas de se substituer aux banques ni aux acteurs qui ont financé les SCOP -je pense à lIDES ou à la CG-SCOP-, mais bien de les compléter et de les accompagner. Lépargne dans notre pays est abondante ; cest un atout considérable ; lenjeu est de la flécher vers de linvestissement productif, et donc, parmi toutes les entreprises qui produisent, aussi les SCOP. Là aussi, cest un formidable levier.
Autre point important : la BPI facilitera le financement dOSEO et aidera ainsi les SCOP à développer leur savoir-faire. Encore trop souvent, celles-ci ne peuvent avoir accès au financement de linnovation au motif que leur structure juridique nest pas adéquate. Elle ne correspond pas au cadre que sétait fixé OSEO. La BPI viendra y remédier et je veux saluer le travail qui a été fait à la demande du ministère de léconomie et des finances et de moi-même par OSEO pour commencer par anticipation à travailler et à penser des instruments adaptés, notamment au développement des capacités de production des SCOP.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers, je voudrais vous dire quil y a beaucoup de fierté à être ici devant vous à loccasion de ce projet davis du Conseil économique, social et environnemental sur le projet de loi que je défendrai. Il fera lobjet dune intense consultation puisquil passera devant le Haut Conseil de la vie associative, le Conseil supérieur de la coopération, le Conseil supérieur de la mutualité, le Conseil supérieur de léconomie sociale et solidaire, et il continuera donc à être discuté par sans doute beaucoup dentre vous, mais dans dautres enceintes et dautres cénacles.
En tout cas, je suis très heureux que le gouvernement ait pu, à travers ce projet de loi sur léconomie sociale et solidaire, bénéficier de la contribution de lensemble des groupes que je me réjouis par anticipation dentendre.
Jai un passé comme tout le monde, militant, politique et syndical, dentrepreneur aussi, ce qui se sait un tout petit peu moins, de salarié essentiellement du secteur privé, et je me réjouis aujourdhui, à travers toutes ces expériences dhomme, mais aussi de responsable politique, de la façon dont, sur ce sujet, léconomie sociale et solidaire, le développement de nos territoires, le développement du modèle coopératif, le Conseil économique, social et environnemental a voulu apporter une contribution pour favoriser cette biodiversité économique dont je parlais, dont nous avons tout à gagner, en faisant en sorte que nous puissions collectivement franchir une étape décisive et permettre à léconomie sociale et solidaire -ce sera ma conclusion- de changer déchelle.
Ce dont nous avons besoin, cest de permettre à léconomie sociale et solidaire de changer déchelle. Sommes-nous arrivés à un plafond au-delà duquel le développement de léconomie sociale et solidaire serait désormais interdit ? Donnerons-nous les moyens demain à Emmaüs de continuer à pouvoir être concurrentiel par rapport à son premier concurrent quest Veolia ?
Ou permettrons-nous quun certain nombre de secteurs de léconomie circulaire du recyclage soient totalement délestés de leur utilité sociale, de ce que lon appelle les externalités positives maintenant ?
Limpact social comme limpact environnemental, cest bien de cela dont on parle : permettre à certaines entreprises de changer déchelle et, à travers cela, écrire, dune certaine manière, une partie de lhistoire postérieure à cette crise qui laisse un testament ; testament auquel nous voulons répondre à travers le développement de léconomie sociale et solidaire, et dont je me réjouis que la contribution du Conseil économique, social et environnemental rejoigne en bien des points la volonté de ce gouvernement.
Je vous remercie.
(Applaudissements)
M. le Président. Merci, Monsieur le ministre.
Source http://www.lecese.fr, le 11 février 2013
Je voudrais saluer votre implication personnelle dans cette tâche.
Je salue et remercie, Madame Christine Dupuis, la Présidente de cette commission temporaire sur léconomie sociale et solidaire même si je pense que cette commission laissera une trace pas temporaire du tout mais durable dans la façon dont nous nous inspirerons par la loi des travaux et du projet davis de votre conseil.
Je voudrais remercier les membres de cette commission qui se sont beaucoup impliqués dans ce travail, jai eu loccasion de les rencontrer, lors dune audition qui était extrêmement intéressante qui nous a permis de balayer des sujets bien au-delà des termes de la saisine comme dailleurs les rapporteurs sen sont saisis eux-mêmes et ont relaté un certain nombre de réflexions et de préconisations qui sont celles du conseil.
Cest un grand honneur pour moi, au nom du gouvernement, non pas dassister à la remise de votre premier avis puisque ce nest pas le premier avis, mais à vos conclusions à partir de la première saisine du gouvernement à légard du conseil qui portait sur deux chapitres de la loi sur léconomie sociale et solidaire.
Je voudrais pour commencer saluer la façon dont les uns et les autres se sont engagés dans ce travail sans a priori idéologique, jespère dailleurs que nous pourrons retrouver cette même unanimité derrière, mais sans a priori idéologique à légard du secteur de léconomie sociale et solidaire dont on véhicule aujourdhui beaucoup de caricatures et qui méritent bien mieux que ces caricatures au regard du poids qui est le sien dans le produit intérieur brut, dans lemploi en France, du poids qui est le sien dans les services dintérêt général ou dutilité sociale. Il mérite mieux que les caricatures ou les a priori que lon a parfois pu entendre ou colporter sur elle.
Merci à vous de cette implication et de cette contribution qui pèsera de façon capitale dans la préparation du projet de loi que je soumettrai au conseil des ministres pour la fin du premier semestre 2013 ; lengagement du gouvernement que ce texte soit déposé au premier semestre 2013 sera tenu.
Pourquoi avoir saisi le CESE ?
Pour deux raisons, à la fois parce que nous voulions donner une illustration de la volonté du gouvernement de revitaliser, de revigorer la démocratie sociale de tous les acteurs économiques, sociaux et environnementaux qui ont une contribution qui est utile au travail et à la réflexion du gouvernement sur sa stratégie de croissance en faveur de léconomie sociale et solidaire. Et parce que, deuxième raison, nous voulons mettre en oeuvre une politique publique, une stratégie de croissance en faveur de lESS ; stratégie de croissance qui se fixe cet objectif de faire de lESS à la fois un moyen de sortir de la crise mais aussi un objectif. Non pas pour opposer les économies dites classiques à léconomie sociale et solidaire, mais pour avoir une stratégie complète de croissance qui se préoccupe des capacités, des potentiels de croissance et de développement de tous les secteurs en particulier celui de léconomie sociale et solidaire.
Je voudrais rappeler le contexte de cette saisine. Il est incontestablement celui dune économie en difficulté ou déprimée pour la zone euro et celle de lUnion européenne. Ce matin, je siégeais à lEcofin au nom de la France ; nous avons examiné les préconisations de la commission en matière de croissance et ladoption dune coopération renforcée en faveur de la taxe sur les transactions financières, mais ce qui est intéressant aujourdhui et qui se passe dans lUnion européenne, cest quà partir dune situation particulièrement déprimée se posent les termes dun débat nouveau notamment sur la nécessité de prendre en compte les déficits structurels, de regarder dans les dépenses publiques et dans la consolidation budgétaire ce qui relève dune dépense qui stimule la croissance, dune dépense qui est neutre pour la croissance, ce qui montre quà laulne dun contexte récessif, tout le monde évolue, y compris la Commission européenne, y compris le FMI.
De ce point de vue, il est important de mettre en place des politiques publiques qui tiennent compte de ce contexte particulièrement difficile pour léconomie européenne et à lintérieur de celle-ci léconomie française.
LESS crée de lemploi et dans un pays qui a autant de chômeurs, nous avons la responsabilité de tout faire pour consolider et développer léconomie sociale et solidaire.
Dans les dix dernières années, ce secteur a créé 23 % des emplois supplémentaires quand léconomie classique nen créait que 7 %. Cela justifie à nos yeux de mettre en place une véritable stratégie de croissance pour ce secteur de façon quun modèle qui sest révélé robuste, tempérant et patient durant la crise puisse disposer demain des moyens de se développer.
Cest tout lenjeu des politiques que nous avons voulu mettre en place depuis la constitution du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Elles ne se limiteront pas à un texte de loi sur léconomie sociale et solidaire et elles iront bien plus loin : la mise en place du programme emploi davenir concerne pour moitié dores et déjà les acteurs de léconomie sociale et solidaire, le pré-positionnement de la banque publique dinvestissements en faveur de léconomie sociale et solidaire et de produits financiers adaptés à la structure capitalistique ou aux spécificités des acteurs de léconomie sociale et solidaire ; bien sûr une loi dont vous avez examiné plusieurs des objectifs, qui sera votée par le parlement et, bien au-delà, toute une série de mesures qui aujourdhui concourent au développement de ce secteur.
Je me réjouis que dans le cadre des annonces faites par le Premier ministre sur le programme investissements davenir, il ait été annoncé le lancement dun nouvel appel à projet en direction des acteurs de léconomie sociale et solidaire doté à minima de 20 millions deuros destinés à financer des moyens et gros « tickets » comme l on dit, à partir de 500 000 euros pour favoriser la structuration de ces acteurs dès lors quils ont des projets qui sont des projets lourds de développement en réponse aux difficultés quils rencontrent avec la crise.
Que lon ne sy trompe donc pas : lambition du gouvernement nest pas de faire un ministère en plus, doù le fait que nous layons logé à Bercy en quelque sorte, ni de faire un texte de loi déclamatoire sur léconomie sociale et solidaire mais bien de poser les termes, les normes dune politique publique en faveur dun secteur qui justifie en raison de ces statuts, de ces spécificités, de ces fonctions, de ces missions quil y ait aujourdhui une politique du gouvernement en sa faveur.
Venons-en au contenu de votre projet davis et sur ma proposition. Le Premier ministre avait sollicité votre institution sur deux aspects que jentends traiter dans le cadre de mon projet de loi : la territorialisation de léconomie sociale et solidaire dune part, et les conditions de reprise dune entreprise en forme de coopérative par ses salariés, dautre part.
Vos rapporteurs ont certes étendu leurs travaux en élargissant quelque peu le spectre afin dillustrer sans doute la richesse de vos débats en commission mais à cette étape de nos discussions, je vais me contenter dévoquer le sujet de la saisine originelle avant de laisser à chaque groupe le soin dexprimer sa position qui dépassera sans doute lobjet de la saisine.
Le projet davis répond donc à la demande du gouvernement qui souhaitait pour commencer une synthèse de vos travaux passés en lien avec les enjeux de léconomie sociale et solidaire. Japprécie le rappel de vos contributions et celle des CESER qui ont valorisé la participation des salariés dans lentreprise, ainsi que les singularités de la gouvernance des entreprises de lESS et leur implication décisive dans les politiques sanitaires et sociales. Il ny a pas de miracle dans le fait quune entreprise de lESS soit plus robuste quune autre. Cest bien en raison de sa gouvernance ou de sa structure capitalistique que lon a aujourdhui un modèle plus tempérant.
Jindique cela, mais il ny a pas pour nous da priori idéologique vis-à-vis de léconomie sociale et solidaire.
Cest seulement le souci pragmatique de regarder ce qui marche, tout ce qui marche : de la PME classique comme de la PME de léconomie sociale et solidaire ; de la petite entreprise qui se crée dans le secteur des hautes technologies comme de la petite SCOP qui va faire de la charpente. Tout nous intéresse. Il ny a pas de petits et de grands emplois. Il ny a pas de bons et de mauvais emplois. Il ny a pas de bonnes et de mauvaises entreprises. Tout nous intéresse, surtout dans un pays qui, aujourdhui, est confronté au fléau du chômage et à la nécessité de relancer son économie. Cest pourquoi nous nous sommes concentrés sur léconomie sociale et solidaire et la raison pour laquelle ce gouvernement se mobilise sur ce secteur.
Bon nombre de vos analyses et préconisations sont étudiées de près. Ainsi, par exemple, je travaille actuellement à ce quun enseignement soit dispensé sur les modèles dentrepreneuriat de léconomie sociale et solidaire. Il y a 75 Masters 2 en lien avec léconomie sociale et solidaire ; je me réjouis de ce développement. Également, dans bon nombre de chaires de lentreprenariat social, léconomie sociale se développe dans nos grandes écoles de commerce. Je me réjouis donc du travail que vous aviez fait, je pense à la recommandation de M. Jean-Baptiste Prévost, qui figure dans son rapport récent sur lemploi des jeunes.
Par ailleurs, le projet davis mentionne très opportunément vos réflexions sur les incertitudes introduites en raison de lemprise croissante du droit de lUnion européenne dans les relations entre les collectivités publiques et les entreprises de léconomie sociale et solidaire, notamment celles impliquées dans des missions de service public. Au demeurant, dans cette affaire, il nest pas toujours juste de mettre en cause Bruxelles. Il est arrivé aussi quà Paris, on nait pas su ou pas voulu exploiter toutes les marges de manoeuvre quoffre le droit communautaire. Jai bien lintention dinviter le législateur à traiter une partie de ces questions en proposant, par exemple, de clarifier par la loi la frontière entre les marchés publics et les subventions. Jai bien noté que cette démarche correspondait à une des recommandations du projet davis qui constituera donc, pour moi, un point dappui précieux.
Je proposerai également au gouvernement que la loi facilite le recours aux marchés publics, pour lesquels les entreprises de léconomie sociale et solidaire sont des partenaires performants des pouvoirs publics. Je pense notamment aux marchés comportant des clauses dinsertion.
Votre projet davis revient également sur vos positions répétées en faveur dun statut européen, tant pour les associations que pour les mutuelles. Ma collègue, Mme Fourneyron, sera attentive à ce rappel concernant le champ associatif. Je suis quant à moi mobilisé pour que les travaux sur le statut de la mutualité européenne avancent vraiment, mais ce nest pas un sujet facile. Nous savons où se trouvent les verrous ; nos amis et partenaires allemands ne sont pas forcément naturellement favorables à un statut de la mutualité européenne, mais nous travaillons à les convaincre afin que, dans le sillage du Parlement européen qui avance sur ce sujet, demain, le Conseil également puisse avancer. Dailleurs, ce sera le thème dun entretien que jaurai au cours du mois prochain avec le commissaire européen chargé de lindustrie et de lentreprenariat, M. Tajani et je me réjouis dores et déjà du soutien que nous a apporté le commissaire Barnier, qui a la volonté de faire avancer le statut de la mutuelle européenne.
Jen viens à vos recommandations relatives au développement local de léconomie sociale et solidaire. Jobserve une grande convergence de points de vue entre le projet de votre commission temporaire et les orientations du gouvernement. De manière générale, nous sommes probablement dans un moment, que jhésite à qualifier dhistorique, car on met ce mot à toutes les sauces, mais en tout cas, il y a un bon alignement des planètes. Cest, dabord, la disponibilité des acteurs de léconomie sociale et solidaire. Cest, aussi, la disponibilité de lÉtat, celle des collectivités locales et même, récemment, à travers un séminaire organisé par la Garde des sceaux avec les procureurs, celle de lautorité judiciaire qui se préoccupe des conditions de reprises dentreprises. Lorsque lon voit un certain nombre de décisions prises par les tribunaux de commerce - et je respecte ces derniers, ils sont souverains - qui ont parfois pu être motivées par lignorance de la spécificité du modèle des SCOPS, il mapparait nécessaire, de faire un travail, jose le dire, dacculturation à léconomie sociale et solidaire. Je considère quil faut collectivement, décideurs économiques comme décideurs politiques, être plus acculturé à la diversité de ce modèle. Je pense très honnêtement que la biodiversité est bonne pour léconomie, pour les entreprises et pour la nature, et que lon a tout à gagner à ce que, dans notre pays, on valorise la biodiversité économique.
Jen viens à vos recommandations relatives au développement local de léconomie sociale et solidaire. Jai parlé du bon alignement des planètes. Je me réjouis que le Conseil économique, social et environnemental rejoigne cet alignement des planètes, mais je le trouve là naturellement à sa place.
Je veux insister sur un point que vous avez identifié, le fait que les entreprises de léconomie sociale et solidaire soient à ce point solidement ancrées dans nos territoires. Ça nest pas le fait du hasard. Vous lavez bien remarqué. Ce sont bien les traits identitaires de léconomie sociale et solidaire qui sont à lorigine de sa robustesse et de son ancrage territorial. Je pense, notamment, au fait que beaucoup dacteurs de léconomie sociale et solidaire répondent par linnovation sociale à des besoins sociaux liés à des territoires. Cest ce qui explique, aussi, leur place actuelle dans nos territoires et lattachement des acteurs de ces territoires au développement de léconomie sociale et solidaire.
En matière de développement local, je trouve dans votre projet davis des préconisations très pertinentes et partage la plupart des constats qui y figurent. Je souhaite en évoquer quelques-uns.
Oui, les chambres régionales de léconomie sociale et solidaire, les CRESS, doivent voir leur existence reconnue et leurs missions stabilisées par la loi. Je rejoins totalement les auteurs du projet davis sur lidentification des missions des CRESS, lobservation de léconomie sociale et solidaire, la promotion, donc faire connaître léconomie sociale et solidaire, et le développement de léconomie sociale et solidaire. Je les rejoins également sur la nécessité dune collaboration formalisée, non seulement avec les régions et lÉtat, cest évident, mais également avec les organismes consulaires investis dans le développement économique et laide aux entrepreneurs.
Mais je rejoins aussi votre projet davis sur linopportunité dune consularisation des CRESS. Outre quelle serait très lourde au plan institutionnel et budgétaire, et quelle nest donc pas à notre portée, une telle mutation nest pas souhaitable, car je pense que léconomie sociale et solidaire est confrontée à un défi paradoxal : le besoin de faire reconnaître ses différences mais, aussi, celui dêtre banalisée. Introduire une forme de césure un peu étanche entre léconomie sociale et solidaire et le reste de léconomie à travers la consularisation des CRESS ne contribuerait pas à un développement forcément aussi efficace que nous le souhaitons de lESS dans les territoires.
Je suis plus réservé, cependant, sur la place quil faudrait accorder au dialogue social dans les CRESS. Dans mon esprit, les CRESS demeureront constitués sous un régime associatif et si le législateur peut stabiliser les missions des chambres avec lesquelles lÉtat et les régions seront invitées à contractualiser, je doute que la loi puisse également fixer des exigences quant à la composition de ces associations.
Quoi quil en soit, les CRESS doivent être conçues - et le sont le plus souvent ainsi déjà - comme des opérateurs investis de missions techniques et opérationnelles au service dune meilleure compréhension et dune plus forte implantation des entreprises de léconomie sociale et solidaire. Si, à ce titre, les CRESS peuvent favoriser les échanges de vues entre les acteurs, je ne pense pas quelles puissent être un instrument de représentation ou de formalisation dorientations stratégiques. Il me semble que les CESER répondent bien mieux à de tels objectifs.
Je partage votre constat sur la disparité territoriale qui caractérise les CRESS et quil faudra traiter. Il ne faut pas être surpris, ni choqué, de ce que chaque territoire cherche à ajuster le positionnement des CRESS au regard des spécificités territoriales. Á ce sujet, jai bien noté votre point de vigilance concernant la situation lOutre-mer, qui ne doit pas rester à lécart de la structuration de lESS. Lessentiel est que toutes les missions soient bien couvertes dans chaque région et quelles sexercent dans un cadre adapté et formalisé.
Cette exigence mamène à un autre point traité par le projet de la commission temporaire : la contractualisation entre les acteurs. Là encore, je partage pleinement vos préconisations. Léconomie sociale et solidaire doit être mieux identifiée dans les contrats de projet État-Région. Les schémas régionaux de développement économiques doivent comporter un volet dédié à léconomie sociale et solidaire et la loi devrait offrir aux acteurs locaux un cadre contractuel permettant de rendre visible leur collaboration. Lexemple que vous citez des pôles territoriaux est pertinent. Avec Cécile Duflot et la Datar, nous allons lancer un nouvel appel doffres pour faire en sorte de favoriser la constitution et le financement du développement de ces clusters de léconomie sociale et solidaire qui démontrent sur le terrain quils sont une alternative très concrète à la délocalisation, quils permettent des collaborations entre des PME ou des ETI de léconomie dite classique et des acteurs de léconomie sociale et solidaire et quils contribuent très largement à limiter ou à freiner ce que sont les destructions demplois sur notre territoire. Cest la raison pour laquelle, avec Cécile Duflot, nous lançons ce nouvel appel doffres pour financer lémergence de nouveau clusters de léconomie sociale et solidaire.
Tous ces sujets feront lobjet de propositions de ma part et jai conscience quil conviendra de coordonner ce chantier législatif avec la préparation de lActe III de la décentralisation.
Jen viens à la modernisation du modèle coopératif et sur le droit de préférence. Le gouvernement souhaite développer le nombre de SCOP car cela créera de lemploi et des activités. Si mon ministère sintéresse autant au développement des SCOP, ce nest pas par idéologie. Je voudrais quon lentende ainsi. En effet, les SCOP qui sont membres de bon nombre de fédérations professionnelles et des organisations patronales, ne sont plus de vieux messieurs en barbe blanche avec une redingote qui vous vantent un modèle datant des siècles précédents. Les SCOP, cest de la haute technologie, comme cela peut être de la charpente. Elles sont dans tous les domaines, le bâtiment, lindustrie, les services et sont présentes sur tout le territoire. Pourquoi voulons-nous favoriser laugmentation du nombre de SCOP ? Parce que nous avons observé, de manière statistique, quune SCOP sur son marché, comparée à une concurrente de droit commun, sest souvent révélée plus résistante face à la crise. Pourquoi ? Parce que la totalité des excédents sont reversés dans lentreprise et quelles ne sont pas tendues par un objectif qui serait parfois la rémunération du propriétaire en capital de lentreprise.
À ce titre, ce modèle dentreprise - qui nest pas généralisable car la SCOP nest pas de la magie, elle ne transforme pas du plomb en or - est aujourdhui à valoriser. La crise laisse un testament et dans ce dernier, il y a nécessité de penser à un modèle économique plus tempérant, plus patient et plus prudent. Nous considérons aujourdhui que les SCOP et leur développement - pas seulement elles - contribuent et participent, de laffirmation dune stratégie de croissance économique audacieuse qui prend des risques, mais qui recherche aussi - pardon de ce mot - la durabilité, la tempérance, la prudence. À ce titre, nous voulons donc favoriser la création de SCOP.
Les SCOP, cest un outil à mobiliser contre la fermeture dentreprises saines. Les SCOP peuvent faire plus et nous aider à sauvegarder des entreprises et des emplois en facilitant la reprise dentreprises en bonne santé par leurs salariés. Chaque année, plusieurs dizaine de milliers demplois sont perdus, faute de reprise dentreprises saines. Ces entreprises sont viables et génèrent de lactivité. Ce sont de petites PME de mécanique, de peinture, dimprimerie, pas des pépites qui justifieraient quon se les arrache parce quelles dégageraient des rendements considérables, mais elles maintiennent lemploi sur les territoires et des familles debout, des salariés debout qui eux-mêmes restent des agents économiques qui contribuent à lessor de notre économie. Raison pour laquelle nous considérons aujourdhui quil nest pas acceptable de laisser autant dentreprises saines fermer et quil faut trouver toutes les solutions possibles, dont les SCOP, pour pouvoir y répondre.
Que se passe-t-il souvent dans ces entreprises ? Le propriétaire de lentreprise tarde à préparer sa succession, en plus il a naturellement tendance à surestimer la valeur de son bien, ce qui est compréhensible vu son investissement durant parfois toute sa vie pour son entreprise. Ainsi parfois il ne trouve pas de repreneur pour son activité. Les salariés peuvent constituer une réponse à ce problème. Vous rappeliez, Monsieur Lenancker, à juste titre que la Commission européenne avait souligné en 2004 lintérêt de faire appel aux coopératives de travailleurs pour pérenniser des entreprises par leurs salariés qui, de par leur connaissance fine de lentreprise et des marchés, offrent une solution à mobiliser. Une de ces conditions, cest lanticipation. Cest un facteur clef de réussite pour une transmission dentreprise aux salariés.
Pour cela, les salariés doivent être informés suffisamment en avance pour avoir le temps détudier le dossier, de constituer une société de reprise avec les moyens financiers et ainsi proposer une offre crédible au propriétaire cédant. La solution proposée vise à renforcer le droit à linformation pour les salariés en amont de la cession, afin de leur permettre de formuler, sils le souhaitent, une offre de reprise. Il est encore trop tôt pour entrer dans le détail de la mesure, mais le statut juridique de SCOP est loutil parfaitement adapté pour cela et il a toute ma préférence. Mais il est tout à fait envisageable que les salariés puissent choisir une autre forme dentreprise, si les conditions ne sont pas réunies pour entreprendre en SCOP, cest un principe de liberté auquel nous tenons.
La mesure ne concernera pas les transmissions familiales puisque dans ce cas le problème de transmission ne se pose pas. Notre mesure a pour objectif de faciliter les transmissions dentreprises et non pas de les freiner. La question de la taille de lentreprise est essentielle et je proposerais quun critère de taille dentreprise soit fixé en fonction du nombre demplois et du chiffre daffaires qui reste à déterminer, car la reprise par les salariés est difficilement envisageable au-delà dune certaine taille et dun certain capital. Est-ce 500 salariés, plus ou moins ? Le débat parlementaire nous lindiquera. En revanche, ce nouveau droit sappliquera aux petites entreprises par la voie des institutions représentatives du personnel quand elles existent et directement aux salariés dans les entreprises de moins de 10 salariés. Cest un enjeu fort dactivité et demplois, a fortiori parce que ces entreprises qui ferment sont souvent des TPE ou des PME.
Jinsiste sur un point important, jai demandé à mes services de travailler à une mesure la plus simple possible, compréhensible par tous, salariés comme chefs dentreprises. Encore une fois, lobjectif est de susciter lenvie de transmettre son entreprise à ses salariés et de laisser le choix et les moyens aux salariés de la reprendre.
Je vais poursuivre le débat sur le droit préférentiel de reprise. Renforcer le droit à linformation en amont du projet de cession est un préalable essentiel. Il pourrait être utilement complété par la mise en place dun droit préférentiel en faveur de loffre des salariés. Cette mesure trouverait sa justification en cas doffre formulée par des fonds spéculatifs dont nous devinons que lobjet nest pas le maintien de lactivité, mais le gain ou le profit quils peuvent réaliser et dont on connaît tous et dont on mesure les dégâts quils ont réalisés sur plusieurs de nos territoires.
Cette mesure, à travers lexplosion de la précarité et de la grande pauvreté, cest aussi une conséquence dune absence peut-être de régulation en amont de la cession de ces entreprises qui nous aurait permis déviter de telles situations. Cela signifierait donc quà offre égale en termes demploi, de maintien de lactivité mais aussi de prix, la proposition des salariés pourrait lemporter sur celle dautres repreneurs, mais le débat politique devra définir ce que lon peut entendre par offre égale. À mon sens, lobjectif de préservation des emplois est essentiel.
Jajoute un autre objectif qui est un rappel dordre constitutionnel. Notre créativité rencontrera deux bornes fondamentales que sont le droit de propriété dune part, et la liberté de commerce et dindustrie dautre part. Ces deux bornes contiennent une dose de flexibilité mais rien ne serait pire que lidée que nous portons soit anéantie par une décision des juges constitutionnels estimant que nous avons franchi ces bornes. Cest dans ce cadre étroit que nous devrons calibrer soigneusement la mesure.
Dautres mesures doivent être envisagées, telles que la SCOP damorçage pour faciliter la constitution de tours de table financier solides pour proposer la création dun statut transitoire de SCOP pendant la phase de création permettant aux salariés de ne pas être majoritaires au capital pendant 5 à 10 ans et arbitrer tout en possédant plus de 65 % du droit de vote. Pendant cette période transitoire, grâce aux excédents accumulés, les salariés pourront constituer progressivement les fonds propres nécessaires à la pleine possession de lentreprise et devenir ainsi pleinement majoritaires au capital.
Cest une proposition que je fais mienne car elle facilitera la levée de fonds nécessaire et limitera de fait la prise de risque par les salariés repreneurs.
Jy vois un autre avantage en faisant entrer au capital des investisseurs extérieurs patients ; cela peut aussi aider et accompagner les salariés repreneurs à consolider leur modèle économique : ils ne seront pas seuls à veiller aux destinées de leur entreprise.
Enfin, je vous rejoins dans la possibilité de créer des groupes de SCOP. Là aussi, je rejoins votre projet davis. Si lon veut que les SCOP puissent être compétitifs sur des marchés hautement concurrentiels, il faut leur permettre de se regrouper sans pour autant remettre en cause la gouvernance démocratique basée sur le principe "une personne = une voix" à léchelle du groupe. Cette proposition est, là encore, travaillée par mes services.
Je voudrais enfin vous dire un mot du financement. Oui, la Banque publique dinvestissement financera les SCOP. La difficulté est de pouvoir faciliter la reprise et la transmission dentreprises en SCOP pour des « gros tickets ». Si lon veut pouvoir développer les SCOP, il faut quelles puissent constituer des tours de table de plusieurs millions deuros. Pour cela, la Banque publique dinvestissement sera mobilisée puisque cinq cents millions deuros seront réservés aux entreprises de léconomie sociale et solidaire. La Banque publique dinvestissement interviendra en fonds propres et prêts pour consolider la structure financière des SCOP ; cela décuplera ainsi leur capacité dinvestissement en permettant un meilleur effet de levier des crédits bancaires.
Le but de la BPI nest pas de se substituer aux banques ni aux acteurs qui ont financé les SCOP -je pense à lIDES ou à la CG-SCOP-, mais bien de les compléter et de les accompagner. Lépargne dans notre pays est abondante ; cest un atout considérable ; lenjeu est de la flécher vers de linvestissement productif, et donc, parmi toutes les entreprises qui produisent, aussi les SCOP. Là aussi, cest un formidable levier.
Autre point important : la BPI facilitera le financement dOSEO et aidera ainsi les SCOP à développer leur savoir-faire. Encore trop souvent, celles-ci ne peuvent avoir accès au financement de linnovation au motif que leur structure juridique nest pas adéquate. Elle ne correspond pas au cadre que sétait fixé OSEO. La BPI viendra y remédier et je veux saluer le travail qui a été fait à la demande du ministère de léconomie et des finances et de moi-même par OSEO pour commencer par anticipation à travailler et à penser des instruments adaptés, notamment au développement des capacités de production des SCOP.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers, je voudrais vous dire quil y a beaucoup de fierté à être ici devant vous à loccasion de ce projet davis du Conseil économique, social et environnemental sur le projet de loi que je défendrai. Il fera lobjet dune intense consultation puisquil passera devant le Haut Conseil de la vie associative, le Conseil supérieur de la coopération, le Conseil supérieur de la mutualité, le Conseil supérieur de léconomie sociale et solidaire, et il continuera donc à être discuté par sans doute beaucoup dentre vous, mais dans dautres enceintes et dautres cénacles.
En tout cas, je suis très heureux que le gouvernement ait pu, à travers ce projet de loi sur léconomie sociale et solidaire, bénéficier de la contribution de lensemble des groupes que je me réjouis par anticipation dentendre.
Jai un passé comme tout le monde, militant, politique et syndical, dentrepreneur aussi, ce qui se sait un tout petit peu moins, de salarié essentiellement du secteur privé, et je me réjouis aujourdhui, à travers toutes ces expériences dhomme, mais aussi de responsable politique, de la façon dont, sur ce sujet, léconomie sociale et solidaire, le développement de nos territoires, le développement du modèle coopératif, le Conseil économique, social et environnemental a voulu apporter une contribution pour favoriser cette biodiversité économique dont je parlais, dont nous avons tout à gagner, en faisant en sorte que nous puissions collectivement franchir une étape décisive et permettre à léconomie sociale et solidaire -ce sera ma conclusion- de changer déchelle.
Ce dont nous avons besoin, cest de permettre à léconomie sociale et solidaire de changer déchelle. Sommes-nous arrivés à un plafond au-delà duquel le développement de léconomie sociale et solidaire serait désormais interdit ? Donnerons-nous les moyens demain à Emmaüs de continuer à pouvoir être concurrentiel par rapport à son premier concurrent quest Veolia ?
Ou permettrons-nous quun certain nombre de secteurs de léconomie circulaire du recyclage soient totalement délestés de leur utilité sociale, de ce que lon appelle les externalités positives maintenant ?
Limpact social comme limpact environnemental, cest bien de cela dont on parle : permettre à certaines entreprises de changer déchelle et, à travers cela, écrire, dune certaine manière, une partie de lhistoire postérieure à cette crise qui laisse un testament ; testament auquel nous voulons répondre à travers le développement de léconomie sociale et solidaire, et dont je me réjouis que la contribution du Conseil économique, social et environnemental rejoigne en bien des points la volonté de ce gouvernement.
Je vous remercie.
(Applaudissements)
M. le Président. Merci, Monsieur le ministre.
Source http://www.lecese.fr, le 11 février 2013