Texte intégral
Q - Vous vous occupez beaucoup de la reconstruction du Mali, mais nous avons des interrogations, comme tous les Français, sur la situation de nos nouveaux otages. Cette famille est-elle partagée en deux ? Est-ce qu'on sait ce matin définitivement, avec sûreté - parce qu'il y a eu quelques allers retours hier à l'assemblée - où ils sont et comment sont-ils si je puis dire répartis et aux mains de qui en fait ?
R - Écoutez, je ne peux pas vous donner d'éléments d'information supplémentaires par rapport à ce qui a déjà été évoqué par Laurent Fabius et par le président de la République.
Q - C'est-à-dire ?
R - C'est-à-dire discrétion et détermination. Je pense que si nous voulons être efficaces, et tout le monde le souhaite, il faut être discret. Nous sommes déterminés, nous travaillons avec l'ensemble des autorités locales, avec nos propres services, nos propres sources d'information.
Q - Le président a quand même dit qu'ils étaient probablement séparés. Enfin, il l'a confirmé.
R - Je n'ai pas de commentaires sur ce sujet sincèrement, Guillaume Durand. Je ne veux pas faire de commentaires aujourd'hui.
(...)
Q - Sur l'intervention française au Mali, on rentre quand même là, j'ai l'impression, dans une seconde phase avec une résistance qui s'installe notamment autour de Gao. Il y a une sorte de guérilla urbaine, non ?
R - Ce qui est sûr, c'est que cette intervention n'est pas terminée. Personne n'a pensé qu'elle allait se faire en quelques jours. Si nous avons dit justement qu'il était nécessaire d'intervenir parce que ces groupes étaient en capacité de déstabiliser tout un pays, c'est parce ces groupes sont conséquents. Cette intervention est donc en cours, et la France est présente sur tous les fronts : sur le front militaire mais aussi justement - vous l'évoquiez dans votre introduction - sur le front de la reprise de l'aide publique au développement. Je suis allé à Bamako lundi et mardi : nous reprenons notre aide parce que nous sommes à la fois dans le fait de gagner l'intervention militaire qui n'est pas achevée, et aussi de gagner la paix.
Q - Ce qui a l'air de se compliquer, non, sur le terrain ?
R - Parce que l'intervention militaire était nécessaire évidemment, mais ce n'est pas cette intervention militaire en soi qui va permettre au Mali de redémarrer, de reconstruire, de refaire ce qu'on appelle le vivre ensemble entre les différentes communautés. Nous sommes présents sur tous les fronts pour gagner l'intervention militaire et pour gagner la paix.
Q - Justement, la complexité de tout ça : on a l'exemple afghan. On ne peut pas assimiler l'Afghanistan et ce qui se passe au Mali.
R - Non.
Q - Mais la question, c'est qu'il y a quand même des symptômes que l'on retrouve : l'aide, c'est ce qu'on a voulu faire en Afghanistan ; le mélange entre la bataille frontale et la guérilla, c'est ce qu'on a connu en Afghanistan et ce qui est en train de se passer au Mali ; l'internationalisation de tout cela avec le Pakistan dans le cas de l'Afghanistan ; et ce qui se passe pour justement nos otages un peu partout en Afrique, c'est quand même déjà le cas.
R - Mais qu'il y ait des liens entre les différents groupes terroristes du Nigeria et du Sahel, nous le savions et c'est en partie aussi ce qui justifie le fait d'intervenir pour les empêcher de prendre le contrôle d'un pays. Les otages, c'est malheureusement une réalité qui précédait l'intervention et c'est aussi une réalité qui n'est pas du tout purement franco-française. Évidemment les médias français parlent plus particulièrement des otages français mais il faut savoir que dans la même zone, le Nigeria, il y a quelques jours ce sont des otages grecs, britanniques, libanais et aucun de ces pays n'est engagé dans l'intervention militaire.
Q - Il y a une organisation crapuleuse des choses plutôt.
R - Non. On est dans une version où tous ces groupes cherchent évidemment à avoir des revenus en prenant des otages. C'est pour cela qu'ils les prennent et donc c'est pour cela que nous devons être totalement intransigeants et, comme le disait Laurent Fabius, ne rien céder à ces groupes.
Q - Sauf à payer.
R - C'est pour cela qu'il a dit ne rien céder à ces groupes.
Q - Non mais sauf à payer.
R - Je crois que je viens de vous répondre !
Q - Il y a quand même d'autres représailles, d'autres enlèvements à craindre puisque cette internationale radicale va maintenant de la Somalie jusqu'au Nigeria. Elle traverse une bonne partie de l'Afrique.
R - Oui, évidemment. Nous sommes face une réalité qui est complexe mais, encore une fois, c'est cette réalité qui a justifié...
Q - Mais alors vous dites quoi aujourd'hui aux Français qui sont installés en Afrique ?
R - Nous leur disons : «Soyez extrêmement prudents.» C'est pour cela par exemple qu'à Bamako le lycée français est fermé, parce que nous savons qu'il peut constituer une cible pour des groupes terroristes. Donc, nous prenons toutes les dispositions en termes de sécurité nécessaires, mais en même temps nous ne pouvons pas laisser faire et c'est pour cela que nous sommes intervenus au Mali. Mais encore une fois, la solution - et c'est pour cela que nous ne sommes pas du tout dans une logique de guerre contre le terrorisme à la George Bush - n'est pas que militaire. Elle passe par le développement, par le dialogue politique et c'est pour cela que nous sommes présents dans toutes les dimensions de cette solution.
Q - Justement, l'un des problèmes qui est posé dans cette affaire et dans cette région, c'est qu'on voit qu'au fond des conflits qui sont des conflits ethniques se cachent ou se dissimulent derrière des conflits soi-disant islamiques. Parce que là, il y a une ethnie qui est au pouvoir au Mali, qui est le sud, puis des gens au nord qui contestent le pouvoir qui a été pris justement par les ethnies du sud. Comment reconstruire un État et donc avoir une politique de développement face à des façades qui sont d'une grande hypocrisie ?
R - Vous avez bien résumé la situation. C'est pour cela que l'on n'est pas dans une logique non plus de guerre contre une religion, parce que c'est largement une façade cette idéologie affichée. Derrière, il y a des narcotrafics, des conflits d'intérêt et, effectivement, il y a un problème de communautés au Mali, c'est-à-dire ce qu'ils appellent le vivre ensemble entre certaines communautés - touaregs par exemple - et puis le sud.
Nous, Français, nous n'avons pas à interférer dans le dialogue politique qui appartient aux Maliens. Nous ne sommes pas dans une logique néo coloniale : c'est à eux de trouver les compromis entre eux. On peut accompagner, on peut faciliter mais c'est d'abord la responsabilité des Maliens que de trouver ce compromis dans d'autres États. Je pense au Niger voisin où ce compromis a été trouvé donc c'est possible. C'est possible au Mali ; maintenant c'est de leur responsabilité.
Q - Ce qui est important pour nous, en tout cas pour nos troupes et pour nous qui observons nos troupes et nos ressortissants, c'est qu'on est en train de se dire ce matin, Pascal Canfin, assez lucidement : «On était là pour quinze jours, trois semaines, trois mois»...
R - Qui l'a dit ?
Q - Non, non ! En fait la logique en écoutant vos explications, c'est qu'on est là peut-être pour un an, voire deux. Parce que la reconstruction d'un État, cela ne va pas prendre dix minutes.
R - Non. La reconstruction ne passe pas par le militaire. La stratégie est simple. Nous étions les seuls à pouvoir intervenir dans l'urgence pour éviter la prise de Bamako, nous l'avons fait. Maintenant nous sommes dans une logique où nous faisons monter en puissance ce qu'on appelle la MISMA, les forces africaines, qui ont vocation à devenir une opération de maintien de la paix des Nations unies dès que les procédures nécessaires sur le plan juridique et le droit international sont accomplies. Dans ce temps-là, plusieurs mois sans doute, nous resterons mais nous avons vocation à ne pas rester éternellement et à nous retirer progressivement pour laisser monter les forces africaines et la MISMA.
Q - Un point : les proches de cette famille ont-ils été reçus ?
R - C'est le président de la République qui reçoit directement les familles, donc c'est à lui qu'il faut poser la question.
Q - Et vous savez si un rendez-vous...
R - Pour l'instant, je n'ai pas d'informations.
(...).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2013
R - Écoutez, je ne peux pas vous donner d'éléments d'information supplémentaires par rapport à ce qui a déjà été évoqué par Laurent Fabius et par le président de la République.
Q - C'est-à-dire ?
R - C'est-à-dire discrétion et détermination. Je pense que si nous voulons être efficaces, et tout le monde le souhaite, il faut être discret. Nous sommes déterminés, nous travaillons avec l'ensemble des autorités locales, avec nos propres services, nos propres sources d'information.
Q - Le président a quand même dit qu'ils étaient probablement séparés. Enfin, il l'a confirmé.
R - Je n'ai pas de commentaires sur ce sujet sincèrement, Guillaume Durand. Je ne veux pas faire de commentaires aujourd'hui.
(...)
Q - Sur l'intervention française au Mali, on rentre quand même là, j'ai l'impression, dans une seconde phase avec une résistance qui s'installe notamment autour de Gao. Il y a une sorte de guérilla urbaine, non ?
R - Ce qui est sûr, c'est que cette intervention n'est pas terminée. Personne n'a pensé qu'elle allait se faire en quelques jours. Si nous avons dit justement qu'il était nécessaire d'intervenir parce que ces groupes étaient en capacité de déstabiliser tout un pays, c'est parce ces groupes sont conséquents. Cette intervention est donc en cours, et la France est présente sur tous les fronts : sur le front militaire mais aussi justement - vous l'évoquiez dans votre introduction - sur le front de la reprise de l'aide publique au développement. Je suis allé à Bamako lundi et mardi : nous reprenons notre aide parce que nous sommes à la fois dans le fait de gagner l'intervention militaire qui n'est pas achevée, et aussi de gagner la paix.
Q - Ce qui a l'air de se compliquer, non, sur le terrain ?
R - Parce que l'intervention militaire était nécessaire évidemment, mais ce n'est pas cette intervention militaire en soi qui va permettre au Mali de redémarrer, de reconstruire, de refaire ce qu'on appelle le vivre ensemble entre les différentes communautés. Nous sommes présents sur tous les fronts pour gagner l'intervention militaire et pour gagner la paix.
Q - Justement, la complexité de tout ça : on a l'exemple afghan. On ne peut pas assimiler l'Afghanistan et ce qui se passe au Mali.
R - Non.
Q - Mais la question, c'est qu'il y a quand même des symptômes que l'on retrouve : l'aide, c'est ce qu'on a voulu faire en Afghanistan ; le mélange entre la bataille frontale et la guérilla, c'est ce qu'on a connu en Afghanistan et ce qui est en train de se passer au Mali ; l'internationalisation de tout cela avec le Pakistan dans le cas de l'Afghanistan ; et ce qui se passe pour justement nos otages un peu partout en Afrique, c'est quand même déjà le cas.
R - Mais qu'il y ait des liens entre les différents groupes terroristes du Nigeria et du Sahel, nous le savions et c'est en partie aussi ce qui justifie le fait d'intervenir pour les empêcher de prendre le contrôle d'un pays. Les otages, c'est malheureusement une réalité qui précédait l'intervention et c'est aussi une réalité qui n'est pas du tout purement franco-française. Évidemment les médias français parlent plus particulièrement des otages français mais il faut savoir que dans la même zone, le Nigeria, il y a quelques jours ce sont des otages grecs, britanniques, libanais et aucun de ces pays n'est engagé dans l'intervention militaire.
Q - Il y a une organisation crapuleuse des choses plutôt.
R - Non. On est dans une version où tous ces groupes cherchent évidemment à avoir des revenus en prenant des otages. C'est pour cela qu'ils les prennent et donc c'est pour cela que nous devons être totalement intransigeants et, comme le disait Laurent Fabius, ne rien céder à ces groupes.
Q - Sauf à payer.
R - C'est pour cela qu'il a dit ne rien céder à ces groupes.
Q - Non mais sauf à payer.
R - Je crois que je viens de vous répondre !
Q - Il y a quand même d'autres représailles, d'autres enlèvements à craindre puisque cette internationale radicale va maintenant de la Somalie jusqu'au Nigeria. Elle traverse une bonne partie de l'Afrique.
R - Oui, évidemment. Nous sommes face une réalité qui est complexe mais, encore une fois, c'est cette réalité qui a justifié...
Q - Mais alors vous dites quoi aujourd'hui aux Français qui sont installés en Afrique ?
R - Nous leur disons : «Soyez extrêmement prudents.» C'est pour cela par exemple qu'à Bamako le lycée français est fermé, parce que nous savons qu'il peut constituer une cible pour des groupes terroristes. Donc, nous prenons toutes les dispositions en termes de sécurité nécessaires, mais en même temps nous ne pouvons pas laisser faire et c'est pour cela que nous sommes intervenus au Mali. Mais encore une fois, la solution - et c'est pour cela que nous ne sommes pas du tout dans une logique de guerre contre le terrorisme à la George Bush - n'est pas que militaire. Elle passe par le développement, par le dialogue politique et c'est pour cela que nous sommes présents dans toutes les dimensions de cette solution.
Q - Justement, l'un des problèmes qui est posé dans cette affaire et dans cette région, c'est qu'on voit qu'au fond des conflits qui sont des conflits ethniques se cachent ou se dissimulent derrière des conflits soi-disant islamiques. Parce que là, il y a une ethnie qui est au pouvoir au Mali, qui est le sud, puis des gens au nord qui contestent le pouvoir qui a été pris justement par les ethnies du sud. Comment reconstruire un État et donc avoir une politique de développement face à des façades qui sont d'une grande hypocrisie ?
R - Vous avez bien résumé la situation. C'est pour cela que l'on n'est pas dans une logique non plus de guerre contre une religion, parce que c'est largement une façade cette idéologie affichée. Derrière, il y a des narcotrafics, des conflits d'intérêt et, effectivement, il y a un problème de communautés au Mali, c'est-à-dire ce qu'ils appellent le vivre ensemble entre certaines communautés - touaregs par exemple - et puis le sud.
Nous, Français, nous n'avons pas à interférer dans le dialogue politique qui appartient aux Maliens. Nous ne sommes pas dans une logique néo coloniale : c'est à eux de trouver les compromis entre eux. On peut accompagner, on peut faciliter mais c'est d'abord la responsabilité des Maliens que de trouver ce compromis dans d'autres États. Je pense au Niger voisin où ce compromis a été trouvé donc c'est possible. C'est possible au Mali ; maintenant c'est de leur responsabilité.
Q - Ce qui est important pour nous, en tout cas pour nos troupes et pour nous qui observons nos troupes et nos ressortissants, c'est qu'on est en train de se dire ce matin, Pascal Canfin, assez lucidement : «On était là pour quinze jours, trois semaines, trois mois»...
R - Qui l'a dit ?
Q - Non, non ! En fait la logique en écoutant vos explications, c'est qu'on est là peut-être pour un an, voire deux. Parce que la reconstruction d'un État, cela ne va pas prendre dix minutes.
R - Non. La reconstruction ne passe pas par le militaire. La stratégie est simple. Nous étions les seuls à pouvoir intervenir dans l'urgence pour éviter la prise de Bamako, nous l'avons fait. Maintenant nous sommes dans une logique où nous faisons monter en puissance ce qu'on appelle la MISMA, les forces africaines, qui ont vocation à devenir une opération de maintien de la paix des Nations unies dès que les procédures nécessaires sur le plan juridique et le droit international sont accomplies. Dans ce temps-là, plusieurs mois sans doute, nous resterons mais nous avons vocation à ne pas rester éternellement et à nous retirer progressivement pour laisser monter les forces africaines et la MISMA.
Q - Un point : les proches de cette famille ont-ils été reçus ?
R - C'est le président de la République qui reçoit directement les familles, donc c'est à lui qu'il faut poser la question.
Q - Et vous savez si un rendez-vous...
R - Pour l'instant, je n'ai pas d'informations.
(...).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2013