Texte intégral
Monsieur lambassadeur,
Madame la consule générale,
Mesdames et Messieurs les consuls honoraires,
Mesdames les élues,
Monsieur le directeur de lOffice national des anciens combattants, ici en Tunisie,
Mesdames Messieurs les anciens combattants,
Mesdames, Messieurs,
Depuis ma prise de fonction au mois de mai dernier, jai eu la chance de me rendre dans ce Maghreb qui mest cher : de me rendre en Algérie il y a peu, au côté du président de la République François Hollande, au Maroc dans le cadre de ce quon appelle le 5+5 qui concerne la politique de défense. Je navais pas encore eu loccasion de me rendre en Tunisie, un pays que je connais, comme beaucoup de Français, à loccasion de déplacements privés ; dans lequel jai eu loccasion aussi de venir comme parlementaire européen - ce qui était mon mandat au moment dentrer au gouvernement - et plus récemment au côté de François Hollande, candidat à la présidence de la République. Il me semblait quen ayant visité lAlgérie et le Maroc, il manquait dans ce Maghreb qui mest cher une petite touche à ce tableau et donc une visite en Tunisie. Doù le bonheur dêtre ici avec vous ce soir, même si les mots peuvent paraître forts.
Je suis aussi en Tunisie dans un contexte que vous connaissez, à la demande du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, mais aussi à la demande des autorités tunisiennes. Nous avons eu des contacts avant mon déplacement et je crois que la demande des autorités tunisiennes est de voir le plus régulièrement possible les autorités gouvernementales ou en tout cas des personnalités représentants la France.
Le contexte est particulier, avec lintervention française au Mali. Il est en effet de ma responsabilité, au côté de Jean Yves Le Drian, de consulter, de maintenir un dialogue étroit avec lensemble des partenaires concernés et cest le cas avec les Tunisiens, de par limportance de lenjeu : il sagit de la stabilité non seulement du Mali, non seulement de lAfrique de louest, non seulement du continent africain, mais plus largement de toute une région.
Lintervention française, moi jallais dire quelle mhonore, ou quelle nous honore. Elle nous honore pour plusieurs raisons. La première est que la France est intervenue à la demande des autorités maliennes, à la demande du président malien. Elle la fait dans un contexte qui est celui du respect du droit international et de larticle 51 de la charte des Nations unies puisque son intervention est liée à un accord bilatéral entre la France et le Mali.
Elle la fait pour des valeurs qui me sont chères et qui vous sont chères et qui sont des valeurs de liberté, des valeurs de tolérance, des valeurs de démocratie.
Elle la fait, et jen tire fierté avec une pointe de patriotisme que jassume entièrement, parce que cétait lun des seuls pays à pouvoir le faire. Il faut se rendre compte de ce que nous représentons à léchelle de la planète : les troupes françaises au Mali représentent ce quest la France, sa force, sa capacité à intervenir. Entre la décision politique prise par le président de la République et les premières frappes, cinq heures se sont passées. Il y a très peu de pays au monde qui sont en capacité de le faire, surtout pour de bonnes raisons et non pas, même sil ny a pas eu débat sur cette question, pour des intérêts liés à ce quon appelait la Françafrique.
Cette décision française, soyez-en convaincus, était la bonne décision parce que, si la France nétait pas intervenue, le Mali aurait perdu son intégrité, aurait perdu ses institutions, aurait perdu en fait tout espoir de voir advenir un avenir meilleur, même sil y a encore nécessité aujourdhui darriver à une stabilisation politique de ce pays. Nos armées ont mené un travail exceptionnel, reconnu dailleurs dans la déclaration qui a été faite aujourdhui par Joe Biden, le vice-président américain, qui déjeunait avec le président de la République française et qui a salué lintervention française au Mali. Il a salué lexceptionnel travail, lexceptionnelle qualité de nos soldats, leur exceptionnel professionnalisme. On ne peut que se féliciter de ce soutien international.
Intervention décisive, mais en même temps nécessité aujourdhui de trouver une solution : la France nest pas engagée pour senliser au Mali, même si elle restera le temps quil faudra. Elle restera pour que le Mali retrouve son intégrité. Elle restera en aidant les forces maliennes et africaines à reconquérir lensemble du territoire. Elle fait tout pour éviter des choses qui, pour nous, sont inacceptables : toute exaction, tout non-respect des droits de lhomme. Elle fera tout aussi pour que la question entre le Nord et le Sud fasse partie du débat malien, pour que cette question soit réglée. Elle fera tout pour que cette stabilisation politique sopère autour délections libres. Je me félicite de la feuille de route qui a été établie au Mali.
En même temps, et parce que ce nest pas son rôle que de rester, la France va assister les forces maliennes mais aussi les forces africaines de la Communauté économique des États dAfrique de lOuest (CEDEAO) et, au travers la résolution 2085 des Nations unies, elle va participer à la mise en place de la Mission internationale de soutien au Mali (MISMA). La France fait tout pour que ces soldats soient formés. On peut se féliciter que lUnion européenne ait accepté notre proposition dans ce domaine et quà partir de la mi-février cette formation des soldats maliens et des unités africaines se fasse en collaboration avec larmée française.
Jai eu loccasion pendant toute cette journée de rencontrer le ministre tunisien de la Défense, le Premier ministre et le président de la République tunisienne, au côté de Monsieur lambassadeur et avec la délégation qui maccompagnait, pour leur exprimer ce quétait la position française. Il me fallait transmettre ce message et le transmettre en disant que nous étions aussi pour une solution politique. Que la France serait aussi au rendez-vous avec une politique de coopération et de développement. Parce que partout où lon crée de la misère, partout où il y a des difficultés sociales, il y a des risques. Au-delà de lopération militaire, il faudra aider, en mobilisant en particulier lEurope qui na pas toujours été à la hauteur, pardonnez-moi cette expression. LEurope, en particulier, doit pouvoir répondre. Je me félicite dailleurs de la décision européenne qui a été prise daccepter de débloquer 250 millions deuros destinés à la future politique de coopération au Mali.
Le défi est donc militaire, politique et économique. Il est important pour le Mali, pour toute la région et aussi pour lEurope.
Vous qui vivez ici aujourdhui vous savez dailleurs que le rétablissement de la démocratie est un processus complexe et qui sinscrit parfois dans un temps long. Mais même si nous sommes dans un monde où les choses vont vite, parfois trop vite, parfois au détriment de la réflexion, il ne faut jamais oublier quentre la Révolution française et la première République cent ans se sont écoulés. Parfois on demande à aller un peu plus vite que le temps nécessaire et donc il faut savoir faire preuve de sagesse, ou en tout cas de recul pour étudier la situation telle quelle est réellement.
Vous avez été les témoins directs de cet élan que fut le printemps arabe et de ce leadership occupé par la Tunisie dans ce domaine. Les premières pierres de la nouvelle démocratie tunisienne ont été posées mais la bâtisse reste à faire et cette construction doit sappuyer sur les valeurs dans lesquelles nous croyons : le respect, la confiance, la solidarité.
Pendant cette période, vous navez pas été que de simples spectateurs. Vous avez été au quotidien les ambassadeurs de la France sur la rive sud de la Méditerranée et sachez, cest lun des messages que jai envie de transmettre, que le gouvernement demeure et demeurera à votre écoute, sensible aux retours que vous pourrez lui apporter en tant que citoyens français ou franco-tunisiens vivant en Tunisie.
Jentends bien les inquiétudes qui sont les vôtres. Inquiétudes sur le sentiment dinsécurité, sur linsécurité qui peut exister. Je pense à ce qui ma été dit ce matin avec les inscriptions sur le mur de lécole Robert-Desnos. Je comprends ce que cela peut générer, je lentends. Sachez quavec Monsieur lambassadeur ce sont des messages que nous avons fait passer et au ministre de la Défense, parce que cela relève en partie de sa responsabilité, et au Premier ministre tunisien et au président de la République. Le message a été entendu pour faire que la sécurité soit assurée à votre égard et pour que des mesures soient prises de façon à ce que ce sentiment dinsécurité disparaisse. Vous sentirez la présence nécessaire des forces de sécurité tunisiennes auprès de vous.
Moi qui, comme vous, ai vécu des deux côtés de la Méditerranée cela ne se sait pas mais cela se voit et je porte un nom sur lequel je nai pas triché , moi qui suis né à Alger, jai la certitude que cette mer Méditerranée nest pas une frontière qui divise mais bien une étendue qui rassemble. En tout cas, cest ma philosophie, un sentiment que jai depuis longtemps et que vous portez.
Cest un pont qui fait que cette amitié est une amitié solide qui construit les relations entre nos deux peuples, qui construit la relation entre nos deux sociétés. Malgré les déchirements, malgré les incompréhensions, malgré les interrogations, malgré parfois le passé encore douloureux, nous restons, vous restez, je reste avec vous, profondément méditerranéens.
Dans la fonction qui est la mienne, je veille à rappeler chaque fois que je le peux que cest en comprenant le passé que nous pourrons construire le présent et, au-delà, notre avenir, ou lavenir de nos enfants et de nos petits enfants. Le travail mémoriel est passionnant. Cest une chose à laquelle je nétais pas forcement préparé. Je nétais pas spécialiste de ces questions dans ce qui était mon parcours dhomme public. Mais cest vraiment quelque chose de passionnant parce que ce travail mémoriel cest une manière de comprendre lautre, et que comprendre lautre cest souvent éviter la confrontation. Pour moi cest quelque chose très lourd de sens, qui favorise le rapprochement entre les peuples, par le dialogue nécessaire, la réflexion sur les questions didentité, dappartenance à la nation.
En ce sens la séquence mémorielle qui souvre et dans laquelle nous sommes déjà engagés permettra de rassembler nos concitoyens, les Français, autour de leur histoire et dengager un véritable travail de mémoire en France mais aussi avec de nombreux autres pays. Jai déjà engagé le dialogue avec un grand nombre de mes homologues sur ce Bassin méditerranéen et plus largement sur lensemble des continents.
Le travail que jai engagé avec mes homologues de la rive sud de la Méditerranée est pour moi important et parmi les instructions que jai pu commencer à donner, il y a notamment celle de mettre davantage en valeur la contribution de larmée dAfrique à la libération du territoire national.
Je noublie pas que dès la Première Guerre mondiale, près de 58.000 Tunisiens avaient combattu aux côtés des Français. Lors de la Seconde Guerre mondiale cet effort fut renouvelé, notamment par la participation des troupes tunisiennes à la campagne dItalie, au débarquement de Provence et dans les durs combats de lhiver 1944-1945 en Alsace.
Je dis cela parce que, sans vouloir conceptualiser à tout prix, quand on appartient à la mémoire collective dun pays, quelles que soient les raisons de cette appartenance à cette mémoire collective, on appartient un peu à la nation. Même si les pays sont différents on appartient à une nation commune.
Dans le travail mémoriel qui est le mien, au moment où je minterroge sur ce que devient notre République, sur ce que devient lappartenance à la nation dun certain nombre de nos jeunes, en France, qui se posent la question de savoir sils sont français parce quils sont nés de père, de mère ou de parents nés ailleurs, le message que jai envie de leur transmettre est le suivant : « Vos grands-parents se sont battus. Ils se sont battus pour les valeurs de la République, pour les valeurs de liberté, ont donné leur vie, ont donné leur sang. Ils appartiennent à cette mémoire collective. Parce que eux appartiennent à cette mémoire collective il ny a aucun doute, vous appartenez à la nation française ».
Je crois que cest ce message républicain que jai envie de transmettre, pour le temps quil me reste à faire au sein de ce ministère et jespère quil sera le plus long possible. Cest une chose à laquelle jattache beaucoup dimportance.
La mission interministérielle que je préside sous lautorité du ministre de la Défense, structurera le calendrier commémoratif à venir. Ce que je souhaite avant tout, cest le rassemblement, léchange, le partage, la transmission dune mémoire apaisée, qui devient malheureusement plus une mémoire de pierre aujourdhui et que nous perdons petit à petit, le cycle de la vie faisant son oeuvre. Je me dis quil faut, en tout cas pour la Deuxième Guerre mondiale, essayer de profiter encore de cette mémoire de chaire. Parce que la mémoire de pierre ne remplace jamais la mémoire de chaire et que lune des leçons que je retiens en rencontrant ces femmes et ces hommes résistants, déportés, engagés, combattants, cest dabord la modestie, lhumilité et, cest là le message le plus fort, quelle que soit leur histoire il ny a jamais de haine. Dans un monde où lon fabrique de la haine trop rapidement je me dis que transmettre un message sans haine est toujours quelque chose qui enrichit notre parcours et le parcours des enfants qui sont derrière nous.
Je sais que vous tous, en faisant vivre cette mémoire, faites également vivre lamitié franco-tunisienne. Je suis donc particulièrement honoré de pouvoir être parmi vous ce soir. Je me réjouis de ce temps passé avec vous ce soir. Merci de votre disponibilité, de cette écoute pratiquement religieuse, envers moi qui suis un laïc. Sachez que le gouvernement français est à vos côtés, et au côté du peuple tunisien.
Vive la France,
Vive la Tunisie,
Vive lamitié franco-tunisienne.
Source http://www.ambassadefrance-tn.org, le 28 février 2013
Madame la consule générale,
Mesdames et Messieurs les consuls honoraires,
Mesdames les élues,
Monsieur le directeur de lOffice national des anciens combattants, ici en Tunisie,
Mesdames Messieurs les anciens combattants,
Mesdames, Messieurs,
Depuis ma prise de fonction au mois de mai dernier, jai eu la chance de me rendre dans ce Maghreb qui mest cher : de me rendre en Algérie il y a peu, au côté du président de la République François Hollande, au Maroc dans le cadre de ce quon appelle le 5+5 qui concerne la politique de défense. Je navais pas encore eu loccasion de me rendre en Tunisie, un pays que je connais, comme beaucoup de Français, à loccasion de déplacements privés ; dans lequel jai eu loccasion aussi de venir comme parlementaire européen - ce qui était mon mandat au moment dentrer au gouvernement - et plus récemment au côté de François Hollande, candidat à la présidence de la République. Il me semblait quen ayant visité lAlgérie et le Maroc, il manquait dans ce Maghreb qui mest cher une petite touche à ce tableau et donc une visite en Tunisie. Doù le bonheur dêtre ici avec vous ce soir, même si les mots peuvent paraître forts.
Je suis aussi en Tunisie dans un contexte que vous connaissez, à la demande du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, mais aussi à la demande des autorités tunisiennes. Nous avons eu des contacts avant mon déplacement et je crois que la demande des autorités tunisiennes est de voir le plus régulièrement possible les autorités gouvernementales ou en tout cas des personnalités représentants la France.
Le contexte est particulier, avec lintervention française au Mali. Il est en effet de ma responsabilité, au côté de Jean Yves Le Drian, de consulter, de maintenir un dialogue étroit avec lensemble des partenaires concernés et cest le cas avec les Tunisiens, de par limportance de lenjeu : il sagit de la stabilité non seulement du Mali, non seulement de lAfrique de louest, non seulement du continent africain, mais plus largement de toute une région.
Lintervention française, moi jallais dire quelle mhonore, ou quelle nous honore. Elle nous honore pour plusieurs raisons. La première est que la France est intervenue à la demande des autorités maliennes, à la demande du président malien. Elle la fait dans un contexte qui est celui du respect du droit international et de larticle 51 de la charte des Nations unies puisque son intervention est liée à un accord bilatéral entre la France et le Mali.
Elle la fait pour des valeurs qui me sont chères et qui vous sont chères et qui sont des valeurs de liberté, des valeurs de tolérance, des valeurs de démocratie.
Elle la fait, et jen tire fierté avec une pointe de patriotisme que jassume entièrement, parce que cétait lun des seuls pays à pouvoir le faire. Il faut se rendre compte de ce que nous représentons à léchelle de la planète : les troupes françaises au Mali représentent ce quest la France, sa force, sa capacité à intervenir. Entre la décision politique prise par le président de la République et les premières frappes, cinq heures se sont passées. Il y a très peu de pays au monde qui sont en capacité de le faire, surtout pour de bonnes raisons et non pas, même sil ny a pas eu débat sur cette question, pour des intérêts liés à ce quon appelait la Françafrique.
Cette décision française, soyez-en convaincus, était la bonne décision parce que, si la France nétait pas intervenue, le Mali aurait perdu son intégrité, aurait perdu ses institutions, aurait perdu en fait tout espoir de voir advenir un avenir meilleur, même sil y a encore nécessité aujourdhui darriver à une stabilisation politique de ce pays. Nos armées ont mené un travail exceptionnel, reconnu dailleurs dans la déclaration qui a été faite aujourdhui par Joe Biden, le vice-président américain, qui déjeunait avec le président de la République française et qui a salué lintervention française au Mali. Il a salué lexceptionnel travail, lexceptionnelle qualité de nos soldats, leur exceptionnel professionnalisme. On ne peut que se féliciter de ce soutien international.
Intervention décisive, mais en même temps nécessité aujourdhui de trouver une solution : la France nest pas engagée pour senliser au Mali, même si elle restera le temps quil faudra. Elle restera pour que le Mali retrouve son intégrité. Elle restera en aidant les forces maliennes et africaines à reconquérir lensemble du territoire. Elle fait tout pour éviter des choses qui, pour nous, sont inacceptables : toute exaction, tout non-respect des droits de lhomme. Elle fera tout aussi pour que la question entre le Nord et le Sud fasse partie du débat malien, pour que cette question soit réglée. Elle fera tout pour que cette stabilisation politique sopère autour délections libres. Je me félicite de la feuille de route qui a été établie au Mali.
En même temps, et parce que ce nest pas son rôle que de rester, la France va assister les forces maliennes mais aussi les forces africaines de la Communauté économique des États dAfrique de lOuest (CEDEAO) et, au travers la résolution 2085 des Nations unies, elle va participer à la mise en place de la Mission internationale de soutien au Mali (MISMA). La France fait tout pour que ces soldats soient formés. On peut se féliciter que lUnion européenne ait accepté notre proposition dans ce domaine et quà partir de la mi-février cette formation des soldats maliens et des unités africaines se fasse en collaboration avec larmée française.
Jai eu loccasion pendant toute cette journée de rencontrer le ministre tunisien de la Défense, le Premier ministre et le président de la République tunisienne, au côté de Monsieur lambassadeur et avec la délégation qui maccompagnait, pour leur exprimer ce quétait la position française. Il me fallait transmettre ce message et le transmettre en disant que nous étions aussi pour une solution politique. Que la France serait aussi au rendez-vous avec une politique de coopération et de développement. Parce que partout où lon crée de la misère, partout où il y a des difficultés sociales, il y a des risques. Au-delà de lopération militaire, il faudra aider, en mobilisant en particulier lEurope qui na pas toujours été à la hauteur, pardonnez-moi cette expression. LEurope, en particulier, doit pouvoir répondre. Je me félicite dailleurs de la décision européenne qui a été prise daccepter de débloquer 250 millions deuros destinés à la future politique de coopération au Mali.
Le défi est donc militaire, politique et économique. Il est important pour le Mali, pour toute la région et aussi pour lEurope.
Vous qui vivez ici aujourdhui vous savez dailleurs que le rétablissement de la démocratie est un processus complexe et qui sinscrit parfois dans un temps long. Mais même si nous sommes dans un monde où les choses vont vite, parfois trop vite, parfois au détriment de la réflexion, il ne faut jamais oublier quentre la Révolution française et la première République cent ans se sont écoulés. Parfois on demande à aller un peu plus vite que le temps nécessaire et donc il faut savoir faire preuve de sagesse, ou en tout cas de recul pour étudier la situation telle quelle est réellement.
Vous avez été les témoins directs de cet élan que fut le printemps arabe et de ce leadership occupé par la Tunisie dans ce domaine. Les premières pierres de la nouvelle démocratie tunisienne ont été posées mais la bâtisse reste à faire et cette construction doit sappuyer sur les valeurs dans lesquelles nous croyons : le respect, la confiance, la solidarité.
Pendant cette période, vous navez pas été que de simples spectateurs. Vous avez été au quotidien les ambassadeurs de la France sur la rive sud de la Méditerranée et sachez, cest lun des messages que jai envie de transmettre, que le gouvernement demeure et demeurera à votre écoute, sensible aux retours que vous pourrez lui apporter en tant que citoyens français ou franco-tunisiens vivant en Tunisie.
Jentends bien les inquiétudes qui sont les vôtres. Inquiétudes sur le sentiment dinsécurité, sur linsécurité qui peut exister. Je pense à ce qui ma été dit ce matin avec les inscriptions sur le mur de lécole Robert-Desnos. Je comprends ce que cela peut générer, je lentends. Sachez quavec Monsieur lambassadeur ce sont des messages que nous avons fait passer et au ministre de la Défense, parce que cela relève en partie de sa responsabilité, et au Premier ministre tunisien et au président de la République. Le message a été entendu pour faire que la sécurité soit assurée à votre égard et pour que des mesures soient prises de façon à ce que ce sentiment dinsécurité disparaisse. Vous sentirez la présence nécessaire des forces de sécurité tunisiennes auprès de vous.
Moi qui, comme vous, ai vécu des deux côtés de la Méditerranée cela ne se sait pas mais cela se voit et je porte un nom sur lequel je nai pas triché , moi qui suis né à Alger, jai la certitude que cette mer Méditerranée nest pas une frontière qui divise mais bien une étendue qui rassemble. En tout cas, cest ma philosophie, un sentiment que jai depuis longtemps et que vous portez.
Cest un pont qui fait que cette amitié est une amitié solide qui construit les relations entre nos deux peuples, qui construit la relation entre nos deux sociétés. Malgré les déchirements, malgré les incompréhensions, malgré les interrogations, malgré parfois le passé encore douloureux, nous restons, vous restez, je reste avec vous, profondément méditerranéens.
Dans la fonction qui est la mienne, je veille à rappeler chaque fois que je le peux que cest en comprenant le passé que nous pourrons construire le présent et, au-delà, notre avenir, ou lavenir de nos enfants et de nos petits enfants. Le travail mémoriel est passionnant. Cest une chose à laquelle je nétais pas forcement préparé. Je nétais pas spécialiste de ces questions dans ce qui était mon parcours dhomme public. Mais cest vraiment quelque chose de passionnant parce que ce travail mémoriel cest une manière de comprendre lautre, et que comprendre lautre cest souvent éviter la confrontation. Pour moi cest quelque chose très lourd de sens, qui favorise le rapprochement entre les peuples, par le dialogue nécessaire, la réflexion sur les questions didentité, dappartenance à la nation.
En ce sens la séquence mémorielle qui souvre et dans laquelle nous sommes déjà engagés permettra de rassembler nos concitoyens, les Français, autour de leur histoire et dengager un véritable travail de mémoire en France mais aussi avec de nombreux autres pays. Jai déjà engagé le dialogue avec un grand nombre de mes homologues sur ce Bassin méditerranéen et plus largement sur lensemble des continents.
Le travail que jai engagé avec mes homologues de la rive sud de la Méditerranée est pour moi important et parmi les instructions que jai pu commencer à donner, il y a notamment celle de mettre davantage en valeur la contribution de larmée dAfrique à la libération du territoire national.
Je noublie pas que dès la Première Guerre mondiale, près de 58.000 Tunisiens avaient combattu aux côtés des Français. Lors de la Seconde Guerre mondiale cet effort fut renouvelé, notamment par la participation des troupes tunisiennes à la campagne dItalie, au débarquement de Provence et dans les durs combats de lhiver 1944-1945 en Alsace.
Je dis cela parce que, sans vouloir conceptualiser à tout prix, quand on appartient à la mémoire collective dun pays, quelles que soient les raisons de cette appartenance à cette mémoire collective, on appartient un peu à la nation. Même si les pays sont différents on appartient à une nation commune.
Dans le travail mémoriel qui est le mien, au moment où je minterroge sur ce que devient notre République, sur ce que devient lappartenance à la nation dun certain nombre de nos jeunes, en France, qui se posent la question de savoir sils sont français parce quils sont nés de père, de mère ou de parents nés ailleurs, le message que jai envie de leur transmettre est le suivant : « Vos grands-parents se sont battus. Ils se sont battus pour les valeurs de la République, pour les valeurs de liberté, ont donné leur vie, ont donné leur sang. Ils appartiennent à cette mémoire collective. Parce que eux appartiennent à cette mémoire collective il ny a aucun doute, vous appartenez à la nation française ».
Je crois que cest ce message républicain que jai envie de transmettre, pour le temps quil me reste à faire au sein de ce ministère et jespère quil sera le plus long possible. Cest une chose à laquelle jattache beaucoup dimportance.
La mission interministérielle que je préside sous lautorité du ministre de la Défense, structurera le calendrier commémoratif à venir. Ce que je souhaite avant tout, cest le rassemblement, léchange, le partage, la transmission dune mémoire apaisée, qui devient malheureusement plus une mémoire de pierre aujourdhui et que nous perdons petit à petit, le cycle de la vie faisant son oeuvre. Je me dis quil faut, en tout cas pour la Deuxième Guerre mondiale, essayer de profiter encore de cette mémoire de chaire. Parce que la mémoire de pierre ne remplace jamais la mémoire de chaire et que lune des leçons que je retiens en rencontrant ces femmes et ces hommes résistants, déportés, engagés, combattants, cest dabord la modestie, lhumilité et, cest là le message le plus fort, quelle que soit leur histoire il ny a jamais de haine. Dans un monde où lon fabrique de la haine trop rapidement je me dis que transmettre un message sans haine est toujours quelque chose qui enrichit notre parcours et le parcours des enfants qui sont derrière nous.
Je sais que vous tous, en faisant vivre cette mémoire, faites également vivre lamitié franco-tunisienne. Je suis donc particulièrement honoré de pouvoir être parmi vous ce soir. Je me réjouis de ce temps passé avec vous ce soir. Merci de votre disponibilité, de cette écoute pratiquement religieuse, envers moi qui suis un laïc. Sachez que le gouvernement français est à vos côtés, et au côté du peuple tunisien.
Vive la France,
Vive la Tunisie,
Vive lamitié franco-tunisienne.
Source http://www.ambassadefrance-tn.org, le 28 février 2013