Déclaration de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des Français de l'étranger, sur les efforts en faveur des Français de l'étranger, à Paris le 7 mars 2013.

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Circonstance : Session plénière de l'Assemblée des Français de l’étranger (AFE), à Paris le 7 mars 2013

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames les Conseillères, Messieurs les Conseillers,
Chers amis,
C’est avec un plaisir sincère que je vous retrouve afin d’évoquer les dossiers qui sont au coeur de notre attention commune.
Aujourd’hui, quels que soient les pays, les questions de sécurité ont pris une importance particulière. L’actualité récente nous rappelle de manière tragique combien les Français de l’étranger peuvent être menacés.
Nous avons aujourd’hui 15 otages dans le monde. Leur sort est une préoccupation constante au plus haut niveau de l’Etat.
Avec le Ministre des Affaires Etrangères, Laurent Fabius, la sécurité de nos compatriotes à l’étranger est notre priorité. Elle est également la vôtre et celle de vos parlementaires que j’associe à mon action quotidienne. Vous me savez disponible et je ne vous reprocherai jamais d’en abuser.
Je me suis récemment rendue au Mali et au Niger afin de rencontrer tous les acteurs de notre dispositif diplomatique, consulaire et scolaire, et évaluer sa mise en oeuvre en fonction des menaces estimées. J'ai rencontré les responsables politiques.
J’ai pu constater l'excellente coopération entre nos ambassades et les autorités locales s'agissant de la sécurité des Français.
C'est dans ce contexte de prévention que le Chef de l’Etat avait procédé à la fermeture temporaire du lycée Liberté de Bamako tandis que le centre de crise - en liaison avec les ambassades concernées - renforçait les consignes de vigilance et adaptait le zonage des cartes « Conseils aux voyageurs » aux évolutions géographiques de la menace.
Les efforts menés conjointement avec les autorités maliennes permettent d’assurer la réouverture de l’établissement aux élèves le lundi 11 mars. Vous appréciez tous ce que cela signifie pour les familles mais aussi pour le pays.
Il est important de rappeler qu'aucune zone de la région sahélienne ne peut être considérée comme sans risque. Nos compatriotes doivent donc rester vigilants et avoir recours à l’ensemble des moyens de prévention et d’information que nous mettons à leur disposition.
La France dispose d’un dispositif reconnu comme étant parmi les plus performants au monde. En ma qualité de Ministre déléguée chargée des Français de l’étranger, je fais en sorte que chaque Français bénéficie de la protection qui lui est due. J’ai tenu dès l’été, lors de la conférence des ambassadeurs, à interroger nos ambassadeurs sur les améliorations à apporter à notre dispositif. Cette réflexion a été prolongée par l’envoi d’un questionnaire à leur attention. Les résultats m’ont permis de dresser une feuille de route, déjà en partie mise en oeuvre par le directeur du Centre de crise. La commission temporaire sur la sécurité de votre assemblée sera d’ailleurs destinataire d’un compte-rendu de cette enquête. Vous associer est essentiel. Je souhaite rassembler tous les acteurs autour de cette problématique, qu’il s’agisse des élus, des entreprises, des opérateurs de voyages ou des ONG. Vos contributions individuelles ou collectives seront les bienvenues.
Je tiens également à rendre ici hommage à nos forces et aux 4 morts qui endeuillent leurs rangs pour leur engagement auprès des troupes maliennes et africaines. Leur combat se confond avec la défense des valeurs qu’ils portent au nom de la République.
J’en ai – en votre nom – assuré le ministre de la Défense.
J’aimerais maintenant aborder ce qui est légitimement au coeur de vos préoccupations. La réforme de la représentation des Français établis hors de France.
J’ai présenté au bureau de décembre la réforme que je porte sur la représentation politique des Français de l’étranger. Le projet déposé au Parlement correspond à cette présentation. Il s’inscrit – ainsi que le relève la porte-parole du gouvernement - dans la volonté du gouvernement de renforcer l’expression de la démocratie de proximité.
Je comprends les sentiments mitigés qu’une telle refonte peut susciter. Les réformes institutionnelles qui touchent à notre communauté sont rares. Elles sont d’autant plus importantes.
Depuis ma nomination j’ai rencontré plusieurs milliers de nos compatriotes.
Chez celles et ceux des conseillers et des parlementaires qui ont été à mes côtés lors de ces déplacements, j’ai retrouvé cette joie de l’engagement et du service des autres que j’ai aussi fait vivre pendant les 14 années où j’ai représenté les Français du Royaume Uni puis d’Irlande sur ces bancs.
Ne vous y trompez pas cependant. C’est justement parce que cette représentation politique de nos compatriotes expatriés a fait ses preuves qu’il convient de la renforcer au plus prés de ceux que nous aidons. Personne ne pourra contester ici le bien fondé de cet objectif.
Il est aussi la traduction nécessaire, vous le sentez bien, de l’évolution d’une communauté aujourd’hui majoritairement jeune, mobile et binationale, d’une communauté qui évolue tant sur le plan géographique, qu’économique ou sociologique.
L’examen du projet de loi en séance publique au Sénat aura lieu à partir du 18 mars. Jean-Yves Leconte a été nommé rapporteur pour la Commission des lois du Sénat. Je me réjouis qu’il se soit engagé à défendre ce projet dans l’esprit de la réforme souhaitée par le Gouvernement. L’Assemblée nationale devrait s’en saisir à partir de la mi-avril.
Etre expatrié, mes amis, ce n’est pas abandonner une partie de sa citoyenneté. Nos compatriotes, quelques soient les continents, ont les mêmes attentes, les mêmes besoins. La création de ce ministère y apporte une réponse.
A chacune de mes rencontres avec mes collègues ministres, je m’attache à souligner l’importance, pour notre pays, pour son rayonnement, pour notre économie de la communauté des Français à l’étranger. Pour se faire, mon action politique est transversale.
Education, affaires sociales, intérieur, recherche et enseignement supérieur, économie et finances, emploi et formation professionnelle, tourisme. Sur tous ces sujets je suis saisie. Sur tous ces sujets, j’interpelle les autres ministères. Il me semble ainsi donner à la notion de solidarité gouvernementale, sa vraie dimension : celle d’un travail collégial, celle d’un travail d’équipe.
Je l’illustrerai rapidement en vous présentant ce que sont ces échanges sur les dossiers qui nous intéressent.
1°) Avec le Ministre de l’Intérieur, nous progressons sur plusieurs sujets :
- Je suis heureuse de pouvoir vous annoncer que la délivrance du passeport « grand voyageur », sera enfin effective au 1er avril.
- Par ailleurs, après un lancement très prometteur à Pékin, le déploiement du dispositif Itinera, véritable consulat mobile, a été testé dans onze postes pilotes depuis l’automne. Cette phase de test s’est avérée positive. Itinera sera donc déployé dans une centaine de postes dès le mois d’avril.
- Je m’efforce également, avec le Ministre de l’Intérieur, d’assouplir les critères d’exemption des tests de français dans les procédures d’acquisition de la nationalité française ;
- Je travaille enfin, avec lui, à l’évolution du statut et des attributions des consuls honoraires ;
- Vous savez que des élections législatives partielles se tiendront avant l’été dans la 1ère et la 8ème circonscription.
Mes services et ceux du Ministère de l’Intérieur sont mobilisés afin qu’elles se déroulent dans les meilleures conditions.
2°) Lundi dernier, le Président de la République a annoncé un grand projet de réforme de la formation professionnelle. J’ai insisté pour que les Français de l’étranger ne soient pas oubliés. Avec le Ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage, nous allons adapter le dispositif de formation pour les Français de l’étranger. En effet, nous ne pouvons nous contenter d’une situation qui mobilise 900.000 euros et ne bénéficie qu’à une soixantaine de personnes par an.
3°) Avec le Ministère délégué aux anciens combattants, les Français de l’étranger auront leur place dans les commémorations du centenaire de la première guerre mondiale et du 70ème anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale.
Nos compatriotes de l’étranger qui ont répondu à l’appel de la patrie doivent être honorés à la hauteur des sacrifices consentis. Ils sont une fraction de notre mémoire nationale. Nous devons le rappeler à la Nation.
4°) Avec la Ministre de l’artisanat et du tourisme, nous nous rejoignons sur la nécessité d’augmenter la délivrance de visas d’affaires pour les acteurs économiques étrangers. J’ai par ailleurs eu l’occasion de m’entretenir longuement avec elle des aspects relatifs à l’expatriation.
5°) Avec le ministère des affaires sociales et de la santé :
- le travail engagé de longue date se poursuit, notamment concernant les certificats de vie ;
- Concernant la dépendance, je suis heureuse de vous annoncer la mise en place au Maroc d’un groupe de travail pilote sur la tutelle et la dépendance. Sur cette question essentielle et symbolique de la prise en charge de nos ainés, j’ai, le 7 février dernier – accompagnée de la sénatrice Christiane Kammermann, inauguré l’Ehpad (établissement hébergement personnes âgées dépendantes) de Gaillac, qui complète utilement le dispositif social du Ministère en faveur de nos ressortissants les plus défavorisés. Il offre un accueil à nos compatriotes en situation de grande dépendance, de précarité économique et de rupture socio-familiale. Cet établissement est géré par le Comité d’Entraide des Français Rapatriés (CEFR). Je saisis cette occasion pour remercier très sincèrement et très chaleureusement devant vous aujourd’hui M. Ramon Casamitjana, Président du CEFR, qui n’a pas ménagé ses efforts pour que la résidence de Gaillac puisse voir le jour.
6°) Avec la Ministre déléguée à la Famille, nous nous sommes
rencontrées début janvier pour traiter de la question, douloureuse, de
la situation des enfants issus de couple mixte en cas de séparations.
- L’idée est de permettre à nos postes diplomatiques et consulaires de se doter d’outils complémentaires à ceux de la cellule d’aide à la médiation familiale internationale du ministère de la justice. Il s’agit de favoriser à l’étranger la restauration du dialogue entre les deux parents pour leur permettre d’identifier des solutions dans l’intérêt des enfants.
- Je sais que nombre d’élus sont mobilisés par ce sujet, je pense notamment à Pierre-Yves Le Borgn, dont la circonscription comprend l’Allemagne où la problématique a pris une résonnance particulière récemment, à Richard Yung, Louis Duvernois, Joëlle Garriaud Maylam ou Claudine Lepage.
7°) Vous serez associés très prochainement à une réflexion sur l’avenir de notre réseau d’enseignement français à l’étranger.
- Notre communauté expatriée évolue, dans sa répartition géographique et sa composition sociologique. Il nous faut réfléchir aux évolutions nécessaires de ce service public qui n’a pour seule fonction que de projeter nos enfants dans l’aventure d’une vie à découvrir.
- Je souhaite que soit posée la question d’une réactualisation de la charte de l’enseignement français à l’étranger sur les conditions liées à l’accueil et à l’accompagnement d’élèves en situation de handicap.
- C’est pour envisager l’avenir avec sérénité que je tiens à organiser dans les prochains mois une concertation avec l’ensemble des partenaires du système éducatif. Le Ministre de l’Education Nationale y sera naturellement associé.
- Je tiens à revenir sur la campagne de bourses scolaires actuelle, issue de la réforme. Vous savez que plus de 25 000 élèves français à l’étranger en bénéficient. Il s’agit d’un dispositif unique au monde dont il fallait, là aussi, assurer la pérennité. Le budget voté à l’automne nous assure pour les trois prochaines années un budget en augmentation régulière.
Avec cette réforme, la solidarité nationale va vers les familles qui en ont le plus besoin. Les critères sont désormais plus lisibles. Le système est donc plus transparent.
Deux annonces pour terminer :
- le 17 juin prochain, j’organiserai une conférence ministérielle avec mes homologues sur les communautés nationales établies à l’étranger. Une façon de réfléchir ensemble sur ce qui fonde l’unité d’une Nation par-delà le temps et l’espace ;
- En marge de celle-ci une exposition de dessins de presse réalisés par des dessinateurs de l’association « cartooning for peace » se tiendra sur les grilles du ministère, rue de la Convention. Elle permettra de constater que les Français – mêmes vus de l’étranger – savent rire d’eux-mêmes.
Mes amis, Léon Blum écrivit à la fin de la guerre que faire de la politique c’est agir pour maintenir la cohésion de la société, c’est s’adapter au cours des événements, c’est employer la force fraiche des générations montantes. Notre rôle, face à cette communauté si particulière des Français de l’étranger n’est pas différent :
- Maintenir sa cohésion avec la communauté nationale ;
- Nous adapter à son évolution ;
- Permettre aux générations montantes de la faire vivre et de nous enrichir de son expérience.
Faisons cela et nous aurons, ensemble, rempli notre rôle.
Je vous remercie.
Source http://www.helene-conway.com, le 8 mars 2013