Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la commission des lois,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et messieurs les Sénateurs.
Le projet de loi que jai lhonneur de vous présenter au nom du Gouvernement a pour ambition de réformer la représentation politique des Français de létranger. Il sinscrit ainsi dans un double mouvement.
Dune part, celui exprimé par Victor Hugo en 1868 selon lequel la France nest pas un empire, la France nest pas une armée, la France nest pas une circonscription géographique [...] ; la France est une âme. Où est-elle ? partout. [...] Il arrive parfois à une patrie dêtre exilée. Une Nation comme la France est un principe. Cest cette universalité que nos compatriotes expriment par leur émigration et qui crée, en retour, des devoirs pour la France.
Dautre part, celui déjà porté par la gauche voici trente ans qui eut alors le souci « détablir de façon parfaite et démocratique des règles qui permettent aux Français se trouvant à létranger de faire entendre leur voix sur les affaires les concernant ». Claude Cheysson dont je salue ici la mémoire - ajoutait devant vous à loccasion de lexamen de ce qui allait devenir la loi du 7 juin 1982 relative au conseil supérieur des Français de létranger :
« Il importe de permettre à nos compatriotes qui vivent à létranger davoir une représentation à la hauteur de la richesse et de la force quils nous apportent. Nous ne saurions nous en passer car leur présence à létranger constitue une richesse pour la France. Mais cela crée une obligation au Gouvernement ».
Cest cette obligation que ce projet de loi, après celui de 1982, achève de satisfaire.
Je suis heureuse, Monsieur le Président, Mesdames Messieurs les Sénateurs que le Gouvernement ait souhaité que ce projet vienne en 1ère lecture au Sénat. Outre quil est de tradition que les textes concernant directement ou indirectement la composition du corps électoral dune assemblée ce qui est lun des objets du projet que je porte lui soient soumis en 1ère lecture, je sais aussi le rôle particulier de la Haute assemblée vis-à-vis dune communauté dont elle a longtemps assumé seule le privilège de la représenter.
Je voudrais, dans un premier temps, vous exposer les raisons qui ont conduit le gouvernement à vous proposer ce texte et vous en donner la genèse. Ce texte, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Sénateurs, est le résultat dun constat et dune méthode.
Le constat est celui de la nécessité reconnue par tous de moderniser une représentation politique des Français de létranger rendue nécessaire par lévolution de cette communauté et son désir permanent de continuer à exercer sa citoyenneté malgré son éloignement. Jy reviendrai.
La méthode, cest celle de la concertation. On peut être ambitieux et modeste dans la manière de faire. Le Gouvernement na jamais sous-estimé limportance de cette réforme souhaitée depuis longtemps. Je constate que plus dune dizaine de propositions de lois ont ainsi été déposées par certains membres de cette Haute assemblée ces dernières années sans que la majorité à laquelle ils appartenaient ait jugé utile den débattre. Elles étaient à tout le moins lexpression dune insatisfaction que ce projet vient satisfaire. Jimagine quils nous en remercieront en le votant !
Cest donc dans un esprit de consensus, de dialogue et déchange, que le gouvernement sest attaché à la rédaction de ce projet.
Reprenant, sans parti pris et quels quen soient les bords politiques, les projets ou propositions émis notamment au sein de lassemblée des Français de lEtranger, le gouvernement sest attaché à les évaluer après en avoir discuté avec leurs auteurs. Un soin particulier a ainsi été apporté à lexamen de deux propositions : lune originale qui tendait à créer suivant le voeu réitéré de lAFE - « une collectivité doutre-frontières ». Elle ne pouvait cependant aboutir sans une lourde réforme de la Constitution. Lautre avait pour objet la création dun établissement public sur le modèle de ce quétaient les régions avant 1972. Cétait cependant sengager dans une voie qui aboutissait à une solution inverse de celle recherchée par ses promoteurs : une plus grande autonomie de la représentation des Français de létranger.
Sur ces deux points, les différents avis sollicités tant par les parlementaires des Français de létranger auprès des services juridiques des deux chambres que par le Gouvernement se sont rejoints. Ces deux propositions ont donc été écartées. La commission des lois et règlements de lAFE avait quant à elle émit à lunanimité en septembre 2012 un avis qui définissait trois principes qui ont été retenus comme base de départ dans lélaboration de ce projet de loi. La représentation des Français de létranger doit satisfaire à un double principe de proximité et de représentativité. Il doit également permettre un élargissement du corps électoral.
Sur cette base, le texte du gouvernement a été longuement débattu et examiné par votre commission des lois. Jen profite pour saluer ici limportance du travail réalisé par son rapporteur, le sénateur Jean-Yves Leconte. Jai été sensible à son engagement et à sa disponibilité qui na eu dégale que celle de ses interlocuteurs. Sous lautorité de son président, Jean-Pierre Sueur et avec lattention constructive et permanente de la sénatrice Catherine Tasca, votre commission a ainsi procédé à un certain nombre dajustements sur lesquels jaurai loccasion de mexprimer durant le débat. Le Gouvernement en connait les qualités.
Ceci ayant été rappelé, il me semble, Mesdames, Messieurs les sénateurs, que le Gouvernement est dautant plus fier de porter cette réforme que celle-ci peut sembler tardive. Il nest pas de système représentatif qui résiste durablement à lexistence dun décalage entre le corps social représenté et ses élus. Cest pourtant là le constat effectué par le plus grand nombre.
Au-delà des clichés, les Français de létranger ne sont ni des exilés fiscaux, ni de vieux expatriés aux retraites confortables.
Lexpatriation nest plus cette trahison affirmée par Vergniaud en 1791 qui y voyait une rupture du pacte social auquel celui qui part serait infidèle. Lexpatriation, lémigration sont une chance pour la France. Le chef de lEtat le revendiquait durant la campagne présidentielle. Sexprimant à Londres devant nos compatriotes réunis, il déclarait alors que « les Français de létranger expriment la capacité et la générosité de notre pays. La France leur est redevable de son rayonnement dans le monde ». Et il ajoutait : « Ils donnent de la France limage dun pays curieux, dynamique et ouvert ».
Ces expatriés, que vous rencontrez lors de vos déplacements à létranger sont désormais jeunes, actifs et souvent binationaux. 1,611 million dentre eux étaient inscrits dans les consulats fin 2012. On estime cependant à plus de 2,5 millions le nombre de Français réellement installés à létranger, linscription étant facultative.
Ces Français, vous le devinez intuitivement, ne ressemblent ainsi plus aux émigrants du début du siècle. Sexprimant le 13 mars dernier devant la communauté française dOttawa, le Premier Ministre avait certes peut-être devant lui certains des descendants de ces Français du bas Canada rencontrés par Tocqueville en 1830. Leur nombre, leur profil, les motifs de leur émigration même ne sont cependant pas comparables.
Permettez-moi de dresser rapidement le portrait de cette communauté.
LEurope en regroupe la moitié. Certains pays connaissent une croissance du nombre de Français inscrits supérieure à la moyenne mondiale. Si la Suisse, le Royaume-Uni et la Belgique concentrent à eux trois, le quart des Français établis à létranger, la Turquie, la Suède, lAutriche ou la Pologne ont une communauté française qui augmente de manière très importante. Hors dEurope les plus fortes croissances sont constatées aux Etats-Unis, et surtout en Asie-Océanie cest-à-dire en Chine, en Indonésie ou en Australie.
Cette population française expatriée a presque doublé en 15 ans. Elle ne cesse de croître avec une augmentation moyenne de + 4% sur les 5 dernières années. Elle est jeune et active : 60% a ainsi entre 18 et 60 ans dont 10% entre 18 et 25 ans. Prenant gout à lexpatriation dans le cadre de leurs études, ils sexpatrient pour trois à cinq ans mais sans objectif dinstallation définitive.
La diversité de ces profils, des aventures individuelles que chaque expatriation exprime interdisent cependant de penser quil y ait un « groupe » Français de létranger homogène recouvrant les mêmes réalités à travers le monde. La démographie, la géographie, léconomie, la curiosité humaine linterdisent. 40% de nos expatriés sont dailleurs des binationaux, établis de longue date à létranger ou ils ont fondé une famille. Rien de commun ici avec le chercheur rencontré en Californie, lavocat croisé à Hong Kong ou le chef dentreprise implanté en Chine.
Par sa vitalité même, cette communauté est plurale. Cest ce qui en fait la richesse pour la Nation. Le Chef de lEtat le constatait devant nos compatriotes à Malte en octobre dernier : « Chacun à sa place, lorsquil est dans un pays qui nest pas le sien, doit participer à ce mouvement des échanges, à cette influence que la langue peut espérer au travers de votre propre participation ». La diplomatie économique portée par le Président de la République trouve ainsi naturellement avec nos compatriotes qui vivent à létranger ses premiers ambassadeurs.
Le mode de représentation de cette communauté nest cependant plus adapté.
Notre pays, depuis les grandes réformes de la Libération a accompli un effort considérable pour faire représenter son émigration au Parlement. Et, grâce à cette représentation, nos compatriotes ne sont pas demeurés des expatries tournant le dos à la France.
Cest en effet une constante, Mesdames, Messieurs les sénateurs. Nos compatriotes qui vivent à létranger veulent pouvoir exercer leur citoyenneté. Je faisais allusion tout à lheure aux propos tenus par le Premier Ministre lors de son déplacement au Canada. Il ajoutait alors : « Avec la distance, vous avez une conscience aigüe que la France représente des valeurs, un modèle qui est le modèle républicain. Loin de France on prend conscience de lessentiel et on en ressent une légitime fierté » qui sexprime dans votre volonté de participer au débat national. Il faisait ainsi écho à lauteur de « La Démocratie en Amérique » qui sémerveillait de constater que malgré le désintérêt de la France, nos expatriés au Canada conservaient une identité commune et le même désir de rester lier à la France.
Cet exercice de la citoyenneté, la République y a toujours été sensible.
Je ne referais pas ici lhistorique dune représentation qui vous est familière et que les sénateurs Léon Jozeau-Marigné, Paul Pillet ou Jean-Jacques Hyest vous ont si richement dressée à loccasion des rapports quils eurent à rédiger sur lun ou lautre des aspects de cette représentation politique si particulière.
Des « députés de la Nation » instaurés par Colbert auprès des consuls de France, à lAssemblée des Français de létranger crée en 2004 en passant par le conseil supérieur des Français de létranger institué en 1948 par Vincent Auriol et Robert Schuman, votre souci a toujours été le même : permettre à ceux que la géographie éloigne de continuer à participer au débat national en instituant une représentation locale qui est graduellement devenue politique.
Cest le même souci, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les sénateurs, qui vous a légitimement conduit à rechercher les modes délections les plus conformes à la Constitution et aux principes républicains de notre pays. La réforme profonde par François Mitterrand, en 1982, du conseil supérieur des Français de létranger na ainsi guère été contestée - même par nostalgie tant ce système électoral était en réalité fondé sur la désignation et la cooptation.
Les lois du 18 mai 1983 qui réservaient lélection des sénateurs aux seuls membres élus du CSFE et celle du 9 août 2004 qui remplaça le Conseil supérieur par une Assemblée des Français de létranger, composée de 180 membres, dont 155 élus au suffrage universel direct, ont contribué à cette meilleure représentation de nos compatriotes qui résident à létranger. Il en va naturellement de même de lélection de 11 députés représentant spécifiquement les Français de létranger en juin 2012 dont on peut cependant penser quelle naurait pas nécessairement vu le jour, si les résultats auxquels celle-ci a conduit avait pu en être escomptés. Cétait effectivement une excellente réforme !
Malgré cela, et malgré un accès à linformation et un lien « virtuel » très actif, nous ne pouvons cependant que constater et regretter que le taux de participation à lensemble de ces scrutins nest pas satisfaisant :
- en 2009, ce taux pour lélection des conseillers à lAFE était à peine supérieur à 20% ;
- en 2012 pour les élections présidentielles il était de 38% au 1er tour et 42% au 2ème tour contre 81% en métropole ;
- quant aux élections législatives, il était de 20,6% au 2ème tour contre 57% en moyenne en métropole.
Plusieurs explications sont régulièrement avancées quil sagisse :
- dun désintérêt apparent qui est parfois plus le signe dune implication dans le pays dans lequel vivent nos compatriotes quun désintérêt de la chose publique et de leur rôle de citoyen ;
- ou dun décalage entre la réalité de nos communautés et le dispositif actuel.
Lon pourrait aussi incriminer le découpage des circonscriptions actuelles qui servent à lélection des conseillers de lassemblée des Français de létranger et qui semblent à beaucoup artificielles tant les écarts démographiques et géographiques sont considérables. Un seul exemple suffira : le seuil de représentation pour avoir un conseiller est de 3.000 résidents inscrits en Andorre contre 19.000 à Bruxelles.
Par ailleurs, 87 pays nont pas de conseiller AFE résidant. Cela représente près de la moitié des Etats du monde.
Jajoute que, tout en répondant enfin au principe dégalité devant le suffrage et dindivisibilité de la Nation, lélection de députés pour représenter nos compatriotes qui vivent à létranger a précipité la nécessité de redéfinir le rôle des élus AFE. Elle nous impose en effet de trouver une complémentarité et une articulation entre ces conseillers et les parlementaires similaire à celle que vous avez, Mesdames Messieurs les sénateurs, si utilement tissés avec les élus locaux des départements que vous représentez.
Enfin, et peut-être est-ce lélément qui vous sera le plus familier, le collège électoral des sénateurs des Français de létranger demeure limité à 155 grands électeurs fixant ainsi le quotient électoral à 25 ce qui est incontestablement faible. Ceci aussi, il convenait de le modifier ce qui aura pour effet de faire entrer les membres de la Haute assemblée qui représentent les Français établis hors de France dans une normalité plus acceptable.
Exercice dune citoyenneté revendiquée,
Mobilisation des compétences et des énergies de nos compatriotes expatriés,
Modernisation et cohérence dune représentation politique dont tous reconnaissent la nécessité ;
Ce sont là les objectifs poursuivis par le projet que je vous présente aujourdhui au nom du gouvernement. Sans revenir sur la structure et le contenu dun texte que le Rapporteur vous présentera tout à lheure et, sans anticiper sur un débat auquel le gouvernement participera avec implication, je désire néanmoins vous présenter brièvement les éléments essentiels de ce projet ; élément que partagent dailleurs les élus de lAFE et les parlementaires, votre commission des lois et le gouvernement.
En premier lieu, nous avons considéré à linstar de ce que sont les conseils municipaux pour nos concitoyens métropolitains que lexercice de la citoyenneté lorsque lon est Français et que lon réside à létranger passe par la démocratie de proximité. Or, pour que celle-ci ait un sens, il faut que lélection sorganise au plus près, géographiquement, des résidents.
Cest pourquoi ce texte crée des conseillers consulaires au nombre de 444 élus au suffrage universel direct dans le cadre de circonscriptions consulaires. Sinspirant de la structure de notre réseau diplomatique, les circonscriptions seront créées là où la France possède une activité consulaire parce que nous y avons une communauté importante.
Ces conseillers formeront des conseils consulaires au nombre de 132. Ils remplaceront ainsi les comités qui en matière sociale, dattribution des bourses, de formation professionnelle ou demploi assistent aujourdhui nos chefs de poste.
Lieux dinformation et de participation des citoyens à la prise de décision, les conseils consulaires - par une extension des compétences matérielles des comités existants - participeront par exemple à la mise en place de politiques publiques en matière denseignement, daides sociales, mais aussi de toutes politiques relatives au travail, à lemploi et la formation professionnelle, à la sécurité et à tout autre sujet dordre économique, éducatif ou culturel qui intéressent les Français de létranger. Ils assureront en outre un lien entre nos concitoyens tant avec les autorités administratives françaises que locales.
Tirant leur force de leur légitimité électorale, ces conseils seront obligatoirement consultés dans leur domaine de compétence. Ils pourront aussi donner leur avis sur toute question concernant les Français de létranger. Ajoutons que, présidés par le chef de poste, ces conseils associeront des personnalités qualifiées et des experts. Il reviendra den préciser la composition exacte par décret. Mais lidée la nécessité est de permettre à tous ceux qui font vivre à létranger ce nouveau modèle français que nous portons, à tous ceux qui en incarnent les idéaux et les valeurs de pouvoir être sollicités afin denrichir la réflexion des services de lEtat.
Représentants dentreprises y compris de PME
Présidents de CCI,
Parents délèves,
Représentants dassociation,
Tous seront sollicités, tous seront invités à participer.
Afin de ne pas perdre la valeur ajoutée que représentent lexpertise et le conseil que peuvent apporter ces conseillers auprès du Parlement et du Gouvernement français, 80 dentre eux assureront par ailleurs le lien avec la France en venant siéger à Paris dans ce que sera la nouvelle Assemblée des Français de létranger. Une assemblée certes moins nombreuse mais aux compétences élargies et à lautonomie renforcée, par lélection de son président notamment.
En deuxième lieu, et ce nest pas à vous que je lapprendrai Mesdames Messieurs les sénateurs, il nest pas délection sans loi électorale, sans le choix dune loi électorale. Chaque loi doit alors sadapter à son objet. Dans un souci de justice électorale et de simplicité du mode de scrutin, le gouvernement a donc souhaité recourir à la proportionnelle à la plus forte moyenne dans le respect du principe de parité.
Ces conseils consulaires seront ainsi formés de 1 à 9 conseillers en fonction du nombre de nos compatriotes inscrits. 22 circonscriptions malgré les efforts tant du gouvernement que de votre rapporteur pour en diminuer le nombre - ne comprendront cependant quun seul conseiller.
Pour le reste, 55% des circonscriptions compteront entre 3 et 5 élus et 3 en compteront 9, là où nos communautés sont les plus importantes (Bruxelles, Genève et Londres). Nous passerons ainsi de 52 à 132 circonscriptions électorales et de 155 à 444 conseillers.
Je crois utile dajouter que les communautés françaises pouvant évoluer rapidement, il est apparu utile de reconnaître au Ministre des Affaires étrangères le pouvoir dadapter cette carte électorale par voie réglementaire dun scrutin à lautre.
Nul souci ici de découpage partisan ou ingénieux.
On peut en effet raisonnablement concevoir que pour des raisons politiques ou économiques, une communauté puisse subir une évolution démographique importante avant le renouvellement suivant. Il faut alors quavec la facilité du pouvoir réglementaire, les circonscriptions puissent être modifiées afin de ne pas aboutir à des résultats incohérents avec des circonscriptions comportant un nombre important de conseillers mais ne comportant pratiquement plus de Français, dautres au contraire où des communautés importantes néliraient que quelques élus.
Pour reprendre les propos dAlain Richard défenseur à lAssemblée nationale en avril 1982 du projet qui allait permettre à nos compatriotes délire des représentants antérieurement cooptés par une majorité qui sen satisfaisait trop naturellement - « le système que nous vous proposons a la vertu dêtre juste. Le lieu de débat et dexpression des préoccupations quotidiennes des Français de létranger sera remplie désormais par des conseillers élus au plus près deux ». Ce gouvernement, aujourdhui comme hier, na pas dautres ambitions. Je puis vous en assurer.
Dernier point enfin.
La création de ces conseils consulaires permettra mécaniquement - oserais-je dire - délargir le collège électoral sénatorial. Il sera désormais constitué de lensemble des conseillers consulaires auxquels sajouteront les 11 députés ainsi que 65 grands électeurs complémentaires. Leur nombre sélèvera ainsi à 520.
Sur ce point aussi la représentation politique des Français de létranger tendra à la normalité. La commission des lois de la Haute assemblée na pu que sen féliciter.
Un mot enfin sur le projet de loi qui vous est soumis portant prorogation du mandat des membres de lAssemblée des Français de létranger, renouvelable au mois de juin prochain.
Afin de permettre lélection de lensemble des conseillers consulaires avant lété 2014, il est proposé que le mandat des conseillers de la série B (Asie et Europe) soit prolongé dune année. Cette prorogation répond à un motif dintérêt général dans la mesure où ces élections nauraient pas eu de sens car nous examinons aujourdhui un projet portant réforme globale de la représentation des Français de létranger.
Monsieur le Président,
Vous me permettrez, en conclusion, dexprimer un espoir au nom du gouvernement ; celui que tous les groupes de la Haute assemblée puissent sunir pour adopter ce texte.
Deux éléments me semblent le permettre.
En premier lieu, les consultations conduites à loccasion de la préparation de ce projet de loi ont permis au gouvernement de constater que tous bien quavec discrétion pour certains ! - étaient favorables à cette réforme.
Mesdames, Messieurs les sénateurs, pour avoir siégé au conseil supérieur des Français de létranger puis à lAFE avant davoir lhonneur de rejoindre les bancs de votre assemblée, je sais que vous avez toujours été les témoins bienveillants de la disponibilité et du dévouement des représentants des Français de létranger. Vous les avez aidés et sans vous rien naurait été possible. Vous leur permettrez, par le soutien que vous leur apporterez en votant ce texte, dassurer différemment demain cette fonction à laquelle ils sont tant attachés.
En second lieu, et ainsi que les orateurs inscrits le rappelleront sans doute à loccasion de la discussion générale, nous devons cette unité de la représentation nationale à nos compatriotes. Nous la leur devons à ce quils représentent, aux valeurs quils incarnent, à leur désir malgré léloignement de demeurer inclus dans la communauté nationale. Certains se plaisent à affirmer, à provoquer, la division de la société française. Pour ceux qui vivent à létranger, cette division apparait comme artificielle. Ils sont persuadés et les voyages que je peux réaliser en attestent que la France dispose - génie français aidant peut-être ? - de tous les atouts pour réussir dans le monde. Ils nous apportent souvent ce sens du monde un peu plus vaste ; le vent du large. Cest également la conviction profonde du gouvernement. Cette confiance quils ont en nous nous honore. Nous leur devons dy être sensibles. Vous pourrez, par votre vote unanime et au souvenir de celui qui vous avait réuni lors de ladoption de la loi du 26 avril 1983, le leur manifester.
Je vous remercie.
Source http://www.helene-conway.com, le 19 mars 2013
Monsieur le Président de la commission des lois,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et messieurs les Sénateurs.
Le projet de loi que jai lhonneur de vous présenter au nom du Gouvernement a pour ambition de réformer la représentation politique des Français de létranger. Il sinscrit ainsi dans un double mouvement.
Dune part, celui exprimé par Victor Hugo en 1868 selon lequel la France nest pas un empire, la France nest pas une armée, la France nest pas une circonscription géographique [...] ; la France est une âme. Où est-elle ? partout. [...] Il arrive parfois à une patrie dêtre exilée. Une Nation comme la France est un principe. Cest cette universalité que nos compatriotes expriment par leur émigration et qui crée, en retour, des devoirs pour la France.
Dautre part, celui déjà porté par la gauche voici trente ans qui eut alors le souci « détablir de façon parfaite et démocratique des règles qui permettent aux Français se trouvant à létranger de faire entendre leur voix sur les affaires les concernant ». Claude Cheysson dont je salue ici la mémoire - ajoutait devant vous à loccasion de lexamen de ce qui allait devenir la loi du 7 juin 1982 relative au conseil supérieur des Français de létranger :
« Il importe de permettre à nos compatriotes qui vivent à létranger davoir une représentation à la hauteur de la richesse et de la force quils nous apportent. Nous ne saurions nous en passer car leur présence à létranger constitue une richesse pour la France. Mais cela crée une obligation au Gouvernement ».
Cest cette obligation que ce projet de loi, après celui de 1982, achève de satisfaire.
Je suis heureuse, Monsieur le Président, Mesdames Messieurs les Sénateurs que le Gouvernement ait souhaité que ce projet vienne en 1ère lecture au Sénat. Outre quil est de tradition que les textes concernant directement ou indirectement la composition du corps électoral dune assemblée ce qui est lun des objets du projet que je porte lui soient soumis en 1ère lecture, je sais aussi le rôle particulier de la Haute assemblée vis-à-vis dune communauté dont elle a longtemps assumé seule le privilège de la représenter.
Je voudrais, dans un premier temps, vous exposer les raisons qui ont conduit le gouvernement à vous proposer ce texte et vous en donner la genèse. Ce texte, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Sénateurs, est le résultat dun constat et dune méthode.
Le constat est celui de la nécessité reconnue par tous de moderniser une représentation politique des Français de létranger rendue nécessaire par lévolution de cette communauté et son désir permanent de continuer à exercer sa citoyenneté malgré son éloignement. Jy reviendrai.
La méthode, cest celle de la concertation. On peut être ambitieux et modeste dans la manière de faire. Le Gouvernement na jamais sous-estimé limportance de cette réforme souhaitée depuis longtemps. Je constate que plus dune dizaine de propositions de lois ont ainsi été déposées par certains membres de cette Haute assemblée ces dernières années sans que la majorité à laquelle ils appartenaient ait jugé utile den débattre. Elles étaient à tout le moins lexpression dune insatisfaction que ce projet vient satisfaire. Jimagine quils nous en remercieront en le votant !
Cest donc dans un esprit de consensus, de dialogue et déchange, que le gouvernement sest attaché à la rédaction de ce projet.
Reprenant, sans parti pris et quels quen soient les bords politiques, les projets ou propositions émis notamment au sein de lassemblée des Français de lEtranger, le gouvernement sest attaché à les évaluer après en avoir discuté avec leurs auteurs. Un soin particulier a ainsi été apporté à lexamen de deux propositions : lune originale qui tendait à créer suivant le voeu réitéré de lAFE - « une collectivité doutre-frontières ». Elle ne pouvait cependant aboutir sans une lourde réforme de la Constitution. Lautre avait pour objet la création dun établissement public sur le modèle de ce quétaient les régions avant 1972. Cétait cependant sengager dans une voie qui aboutissait à une solution inverse de celle recherchée par ses promoteurs : une plus grande autonomie de la représentation des Français de létranger.
Sur ces deux points, les différents avis sollicités tant par les parlementaires des Français de létranger auprès des services juridiques des deux chambres que par le Gouvernement se sont rejoints. Ces deux propositions ont donc été écartées. La commission des lois et règlements de lAFE avait quant à elle émit à lunanimité en septembre 2012 un avis qui définissait trois principes qui ont été retenus comme base de départ dans lélaboration de ce projet de loi. La représentation des Français de létranger doit satisfaire à un double principe de proximité et de représentativité. Il doit également permettre un élargissement du corps électoral.
Sur cette base, le texte du gouvernement a été longuement débattu et examiné par votre commission des lois. Jen profite pour saluer ici limportance du travail réalisé par son rapporteur, le sénateur Jean-Yves Leconte. Jai été sensible à son engagement et à sa disponibilité qui na eu dégale que celle de ses interlocuteurs. Sous lautorité de son président, Jean-Pierre Sueur et avec lattention constructive et permanente de la sénatrice Catherine Tasca, votre commission a ainsi procédé à un certain nombre dajustements sur lesquels jaurai loccasion de mexprimer durant le débat. Le Gouvernement en connait les qualités.
Ceci ayant été rappelé, il me semble, Mesdames, Messieurs les sénateurs, que le Gouvernement est dautant plus fier de porter cette réforme que celle-ci peut sembler tardive. Il nest pas de système représentatif qui résiste durablement à lexistence dun décalage entre le corps social représenté et ses élus. Cest pourtant là le constat effectué par le plus grand nombre.
Au-delà des clichés, les Français de létranger ne sont ni des exilés fiscaux, ni de vieux expatriés aux retraites confortables.
Lexpatriation nest plus cette trahison affirmée par Vergniaud en 1791 qui y voyait une rupture du pacte social auquel celui qui part serait infidèle. Lexpatriation, lémigration sont une chance pour la France. Le chef de lEtat le revendiquait durant la campagne présidentielle. Sexprimant à Londres devant nos compatriotes réunis, il déclarait alors que « les Français de létranger expriment la capacité et la générosité de notre pays. La France leur est redevable de son rayonnement dans le monde ». Et il ajoutait : « Ils donnent de la France limage dun pays curieux, dynamique et ouvert ».
Ces expatriés, que vous rencontrez lors de vos déplacements à létranger sont désormais jeunes, actifs et souvent binationaux. 1,611 million dentre eux étaient inscrits dans les consulats fin 2012. On estime cependant à plus de 2,5 millions le nombre de Français réellement installés à létranger, linscription étant facultative.
Ces Français, vous le devinez intuitivement, ne ressemblent ainsi plus aux émigrants du début du siècle. Sexprimant le 13 mars dernier devant la communauté française dOttawa, le Premier Ministre avait certes peut-être devant lui certains des descendants de ces Français du bas Canada rencontrés par Tocqueville en 1830. Leur nombre, leur profil, les motifs de leur émigration même ne sont cependant pas comparables.
Permettez-moi de dresser rapidement le portrait de cette communauté.
LEurope en regroupe la moitié. Certains pays connaissent une croissance du nombre de Français inscrits supérieure à la moyenne mondiale. Si la Suisse, le Royaume-Uni et la Belgique concentrent à eux trois, le quart des Français établis à létranger, la Turquie, la Suède, lAutriche ou la Pologne ont une communauté française qui augmente de manière très importante. Hors dEurope les plus fortes croissances sont constatées aux Etats-Unis, et surtout en Asie-Océanie cest-à-dire en Chine, en Indonésie ou en Australie.
Cette population française expatriée a presque doublé en 15 ans. Elle ne cesse de croître avec une augmentation moyenne de + 4% sur les 5 dernières années. Elle est jeune et active : 60% a ainsi entre 18 et 60 ans dont 10% entre 18 et 25 ans. Prenant gout à lexpatriation dans le cadre de leurs études, ils sexpatrient pour trois à cinq ans mais sans objectif dinstallation définitive.
La diversité de ces profils, des aventures individuelles que chaque expatriation exprime interdisent cependant de penser quil y ait un « groupe » Français de létranger homogène recouvrant les mêmes réalités à travers le monde. La démographie, la géographie, léconomie, la curiosité humaine linterdisent. 40% de nos expatriés sont dailleurs des binationaux, établis de longue date à létranger ou ils ont fondé une famille. Rien de commun ici avec le chercheur rencontré en Californie, lavocat croisé à Hong Kong ou le chef dentreprise implanté en Chine.
Par sa vitalité même, cette communauté est plurale. Cest ce qui en fait la richesse pour la Nation. Le Chef de lEtat le constatait devant nos compatriotes à Malte en octobre dernier : « Chacun à sa place, lorsquil est dans un pays qui nest pas le sien, doit participer à ce mouvement des échanges, à cette influence que la langue peut espérer au travers de votre propre participation ». La diplomatie économique portée par le Président de la République trouve ainsi naturellement avec nos compatriotes qui vivent à létranger ses premiers ambassadeurs.
Le mode de représentation de cette communauté nest cependant plus adapté.
Notre pays, depuis les grandes réformes de la Libération a accompli un effort considérable pour faire représenter son émigration au Parlement. Et, grâce à cette représentation, nos compatriotes ne sont pas demeurés des expatries tournant le dos à la France.
Cest en effet une constante, Mesdames, Messieurs les sénateurs. Nos compatriotes qui vivent à létranger veulent pouvoir exercer leur citoyenneté. Je faisais allusion tout à lheure aux propos tenus par le Premier Ministre lors de son déplacement au Canada. Il ajoutait alors : « Avec la distance, vous avez une conscience aigüe que la France représente des valeurs, un modèle qui est le modèle républicain. Loin de France on prend conscience de lessentiel et on en ressent une légitime fierté » qui sexprime dans votre volonté de participer au débat national. Il faisait ainsi écho à lauteur de « La Démocratie en Amérique » qui sémerveillait de constater que malgré le désintérêt de la France, nos expatriés au Canada conservaient une identité commune et le même désir de rester lier à la France.
Cet exercice de la citoyenneté, la République y a toujours été sensible.
Je ne referais pas ici lhistorique dune représentation qui vous est familière et que les sénateurs Léon Jozeau-Marigné, Paul Pillet ou Jean-Jacques Hyest vous ont si richement dressée à loccasion des rapports quils eurent à rédiger sur lun ou lautre des aspects de cette représentation politique si particulière.
Des « députés de la Nation » instaurés par Colbert auprès des consuls de France, à lAssemblée des Français de létranger crée en 2004 en passant par le conseil supérieur des Français de létranger institué en 1948 par Vincent Auriol et Robert Schuman, votre souci a toujours été le même : permettre à ceux que la géographie éloigne de continuer à participer au débat national en instituant une représentation locale qui est graduellement devenue politique.
Cest le même souci, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les sénateurs, qui vous a légitimement conduit à rechercher les modes délections les plus conformes à la Constitution et aux principes républicains de notre pays. La réforme profonde par François Mitterrand, en 1982, du conseil supérieur des Français de létranger na ainsi guère été contestée - même par nostalgie tant ce système électoral était en réalité fondé sur la désignation et la cooptation.
Les lois du 18 mai 1983 qui réservaient lélection des sénateurs aux seuls membres élus du CSFE et celle du 9 août 2004 qui remplaça le Conseil supérieur par une Assemblée des Français de létranger, composée de 180 membres, dont 155 élus au suffrage universel direct, ont contribué à cette meilleure représentation de nos compatriotes qui résident à létranger. Il en va naturellement de même de lélection de 11 députés représentant spécifiquement les Français de létranger en juin 2012 dont on peut cependant penser quelle naurait pas nécessairement vu le jour, si les résultats auxquels celle-ci a conduit avait pu en être escomptés. Cétait effectivement une excellente réforme !
Malgré cela, et malgré un accès à linformation et un lien « virtuel » très actif, nous ne pouvons cependant que constater et regretter que le taux de participation à lensemble de ces scrutins nest pas satisfaisant :
- en 2009, ce taux pour lélection des conseillers à lAFE était à peine supérieur à 20% ;
- en 2012 pour les élections présidentielles il était de 38% au 1er tour et 42% au 2ème tour contre 81% en métropole ;
- quant aux élections législatives, il était de 20,6% au 2ème tour contre 57% en moyenne en métropole.
Plusieurs explications sont régulièrement avancées quil sagisse :
- dun désintérêt apparent qui est parfois plus le signe dune implication dans le pays dans lequel vivent nos compatriotes quun désintérêt de la chose publique et de leur rôle de citoyen ;
- ou dun décalage entre la réalité de nos communautés et le dispositif actuel.
Lon pourrait aussi incriminer le découpage des circonscriptions actuelles qui servent à lélection des conseillers de lassemblée des Français de létranger et qui semblent à beaucoup artificielles tant les écarts démographiques et géographiques sont considérables. Un seul exemple suffira : le seuil de représentation pour avoir un conseiller est de 3.000 résidents inscrits en Andorre contre 19.000 à Bruxelles.
Par ailleurs, 87 pays nont pas de conseiller AFE résidant. Cela représente près de la moitié des Etats du monde.
Jajoute que, tout en répondant enfin au principe dégalité devant le suffrage et dindivisibilité de la Nation, lélection de députés pour représenter nos compatriotes qui vivent à létranger a précipité la nécessité de redéfinir le rôle des élus AFE. Elle nous impose en effet de trouver une complémentarité et une articulation entre ces conseillers et les parlementaires similaire à celle que vous avez, Mesdames Messieurs les sénateurs, si utilement tissés avec les élus locaux des départements que vous représentez.
Enfin, et peut-être est-ce lélément qui vous sera le plus familier, le collège électoral des sénateurs des Français de létranger demeure limité à 155 grands électeurs fixant ainsi le quotient électoral à 25 ce qui est incontestablement faible. Ceci aussi, il convenait de le modifier ce qui aura pour effet de faire entrer les membres de la Haute assemblée qui représentent les Français établis hors de France dans une normalité plus acceptable.
Exercice dune citoyenneté revendiquée,
Mobilisation des compétences et des énergies de nos compatriotes expatriés,
Modernisation et cohérence dune représentation politique dont tous reconnaissent la nécessité ;
Ce sont là les objectifs poursuivis par le projet que je vous présente aujourdhui au nom du gouvernement. Sans revenir sur la structure et le contenu dun texte que le Rapporteur vous présentera tout à lheure et, sans anticiper sur un débat auquel le gouvernement participera avec implication, je désire néanmoins vous présenter brièvement les éléments essentiels de ce projet ; élément que partagent dailleurs les élus de lAFE et les parlementaires, votre commission des lois et le gouvernement.
En premier lieu, nous avons considéré à linstar de ce que sont les conseils municipaux pour nos concitoyens métropolitains que lexercice de la citoyenneté lorsque lon est Français et que lon réside à létranger passe par la démocratie de proximité. Or, pour que celle-ci ait un sens, il faut que lélection sorganise au plus près, géographiquement, des résidents.
Cest pourquoi ce texte crée des conseillers consulaires au nombre de 444 élus au suffrage universel direct dans le cadre de circonscriptions consulaires. Sinspirant de la structure de notre réseau diplomatique, les circonscriptions seront créées là où la France possède une activité consulaire parce que nous y avons une communauté importante.
Ces conseillers formeront des conseils consulaires au nombre de 132. Ils remplaceront ainsi les comités qui en matière sociale, dattribution des bourses, de formation professionnelle ou demploi assistent aujourdhui nos chefs de poste.
Lieux dinformation et de participation des citoyens à la prise de décision, les conseils consulaires - par une extension des compétences matérielles des comités existants - participeront par exemple à la mise en place de politiques publiques en matière denseignement, daides sociales, mais aussi de toutes politiques relatives au travail, à lemploi et la formation professionnelle, à la sécurité et à tout autre sujet dordre économique, éducatif ou culturel qui intéressent les Français de létranger. Ils assureront en outre un lien entre nos concitoyens tant avec les autorités administratives françaises que locales.
Tirant leur force de leur légitimité électorale, ces conseils seront obligatoirement consultés dans leur domaine de compétence. Ils pourront aussi donner leur avis sur toute question concernant les Français de létranger. Ajoutons que, présidés par le chef de poste, ces conseils associeront des personnalités qualifiées et des experts. Il reviendra den préciser la composition exacte par décret. Mais lidée la nécessité est de permettre à tous ceux qui font vivre à létranger ce nouveau modèle français que nous portons, à tous ceux qui en incarnent les idéaux et les valeurs de pouvoir être sollicités afin denrichir la réflexion des services de lEtat.
Représentants dentreprises y compris de PME
Présidents de CCI,
Parents délèves,
Représentants dassociation,
Tous seront sollicités, tous seront invités à participer.
Afin de ne pas perdre la valeur ajoutée que représentent lexpertise et le conseil que peuvent apporter ces conseillers auprès du Parlement et du Gouvernement français, 80 dentre eux assureront par ailleurs le lien avec la France en venant siéger à Paris dans ce que sera la nouvelle Assemblée des Français de létranger. Une assemblée certes moins nombreuse mais aux compétences élargies et à lautonomie renforcée, par lélection de son président notamment.
En deuxième lieu, et ce nest pas à vous que je lapprendrai Mesdames Messieurs les sénateurs, il nest pas délection sans loi électorale, sans le choix dune loi électorale. Chaque loi doit alors sadapter à son objet. Dans un souci de justice électorale et de simplicité du mode de scrutin, le gouvernement a donc souhaité recourir à la proportionnelle à la plus forte moyenne dans le respect du principe de parité.
Ces conseils consulaires seront ainsi formés de 1 à 9 conseillers en fonction du nombre de nos compatriotes inscrits. 22 circonscriptions malgré les efforts tant du gouvernement que de votre rapporteur pour en diminuer le nombre - ne comprendront cependant quun seul conseiller.
Pour le reste, 55% des circonscriptions compteront entre 3 et 5 élus et 3 en compteront 9, là où nos communautés sont les plus importantes (Bruxelles, Genève et Londres). Nous passerons ainsi de 52 à 132 circonscriptions électorales et de 155 à 444 conseillers.
Je crois utile dajouter que les communautés françaises pouvant évoluer rapidement, il est apparu utile de reconnaître au Ministre des Affaires étrangères le pouvoir dadapter cette carte électorale par voie réglementaire dun scrutin à lautre.
Nul souci ici de découpage partisan ou ingénieux.
On peut en effet raisonnablement concevoir que pour des raisons politiques ou économiques, une communauté puisse subir une évolution démographique importante avant le renouvellement suivant. Il faut alors quavec la facilité du pouvoir réglementaire, les circonscriptions puissent être modifiées afin de ne pas aboutir à des résultats incohérents avec des circonscriptions comportant un nombre important de conseillers mais ne comportant pratiquement plus de Français, dautres au contraire où des communautés importantes néliraient que quelques élus.
Pour reprendre les propos dAlain Richard défenseur à lAssemblée nationale en avril 1982 du projet qui allait permettre à nos compatriotes délire des représentants antérieurement cooptés par une majorité qui sen satisfaisait trop naturellement - « le système que nous vous proposons a la vertu dêtre juste. Le lieu de débat et dexpression des préoccupations quotidiennes des Français de létranger sera remplie désormais par des conseillers élus au plus près deux ». Ce gouvernement, aujourdhui comme hier, na pas dautres ambitions. Je puis vous en assurer.
Dernier point enfin.
La création de ces conseils consulaires permettra mécaniquement - oserais-je dire - délargir le collège électoral sénatorial. Il sera désormais constitué de lensemble des conseillers consulaires auxquels sajouteront les 11 députés ainsi que 65 grands électeurs complémentaires. Leur nombre sélèvera ainsi à 520.
Sur ce point aussi la représentation politique des Français de létranger tendra à la normalité. La commission des lois de la Haute assemblée na pu que sen féliciter.
Un mot enfin sur le projet de loi qui vous est soumis portant prorogation du mandat des membres de lAssemblée des Français de létranger, renouvelable au mois de juin prochain.
Afin de permettre lélection de lensemble des conseillers consulaires avant lété 2014, il est proposé que le mandat des conseillers de la série B (Asie et Europe) soit prolongé dune année. Cette prorogation répond à un motif dintérêt général dans la mesure où ces élections nauraient pas eu de sens car nous examinons aujourdhui un projet portant réforme globale de la représentation des Français de létranger.
Monsieur le Président,
Vous me permettrez, en conclusion, dexprimer un espoir au nom du gouvernement ; celui que tous les groupes de la Haute assemblée puissent sunir pour adopter ce texte.
Deux éléments me semblent le permettre.
En premier lieu, les consultations conduites à loccasion de la préparation de ce projet de loi ont permis au gouvernement de constater que tous bien quavec discrétion pour certains ! - étaient favorables à cette réforme.
Mesdames, Messieurs les sénateurs, pour avoir siégé au conseil supérieur des Français de létranger puis à lAFE avant davoir lhonneur de rejoindre les bancs de votre assemblée, je sais que vous avez toujours été les témoins bienveillants de la disponibilité et du dévouement des représentants des Français de létranger. Vous les avez aidés et sans vous rien naurait été possible. Vous leur permettrez, par le soutien que vous leur apporterez en votant ce texte, dassurer différemment demain cette fonction à laquelle ils sont tant attachés.
En second lieu, et ainsi que les orateurs inscrits le rappelleront sans doute à loccasion de la discussion générale, nous devons cette unité de la représentation nationale à nos compatriotes. Nous la leur devons à ce quils représentent, aux valeurs quils incarnent, à leur désir malgré léloignement de demeurer inclus dans la communauté nationale. Certains se plaisent à affirmer, à provoquer, la division de la société française. Pour ceux qui vivent à létranger, cette division apparait comme artificielle. Ils sont persuadés et les voyages que je peux réaliser en attestent que la France dispose - génie français aidant peut-être ? - de tous les atouts pour réussir dans le monde. Ils nous apportent souvent ce sens du monde un peu plus vaste ; le vent du large. Cest également la conviction profonde du gouvernement. Cette confiance quils ont en nous nous honore. Nous leur devons dy être sensibles. Vous pourrez, par votre vote unanime et au souvenir de celui qui vous avait réuni lors de ladoption de la loi du 26 avril 1983, le leur manifester.
Je vous remercie.
Source http://www.helene-conway.com, le 19 mars 2013