Texte intégral
Q - Les Chypriotes se réveillent avec la gueule de bois et ils sont en colère, ils ne croient pas que l'Europe a sauvé Chypre. Et vous ?
R - Je pense que si, l'Europe et le Fonds monétaire international. L'accord qui est intervenu cette nuit est dur, mais il ne pouvait pas en être autrement. Le système chypriote, ce que Pierre Moscovici a appelé «l'économie-casino», était absolument invivable. À partir du moment où il y avait une dette énorme par rapport à la production, il fallait trouver une solution. L'aspect positif de cette solution, par rapport à celle qui était envisagée, c'est que les petits épargnants chypriotes ne vont pas avoir à payer. Mais il faut bien que quelqu'un règle l'addition, et cela va être payé, en grande partie, par les déposants les plus fortunés.
Q - C'est-à-dire les Russes et les Grecs milliardaires qui déposaient leur argent, pas toujours propre, et eux vont être taxés à 40 % ?
R - Pas seulement mais notamment eux. Cela renforce encore plus la nécessité de ce que nous, nous avons proposé, et qui s'appelle «un superviseur bancaire unique». Vous vous rappelez ce débat ? Nous, nous disions, nous continuons à dire qu'il faut qu'il y ait une autorité qui puisse regarder même les petites banques, et d'autres disaient «non, non, les petites banques il ne faut pas les regarder». Or, là, il s'agit de petites banques, mais avec de gros déficits.
Q - C'est positif pour l'Europe, mais pas pour les Chypriotes.
R - C'est positif pour l'Europe ; on a évité une catastrophe supplémentaire mais, cela dit, cela va être difficile parce que c'est une économie tout à fait artificielle.
Q - Et on ne risque pas de se fâcher avec Vladimir Poutine ?
R - Je ne sais pas quelle sera la réaction des Russes. Elle peut être effectivement dure.
Q - Parce qu'il y a des intérêts des amis de Vladimir Poutine installés dans l'île de Chypre.
R - Il y a des déposants russes de grande importance dans les banques chypriotes. Le système était incroyable. Les intérêts étaient de l'ordre de 5 %, alors même que l'économie productive ne produit pas du tout cela. Ce qui veut donc dire que pour produire ces 5 % il fallait que les banques chypriotes elles-mêmes réinvestissent dans d'autres économies-casino, notamment la Grèce, où les taux d'intérêts étaient à 8 %.
Q - Ça c'est fini ?
R - La spéculation, c'est fini.
Q - Ce devrait être fini. Le statut de paradis fiscal, etc., avec toutes ces combinaisons, c'est fini ?
R - Oui, même si on peut avoir un regret : jusqu'à présent, le taux d'impôt sur les sociétés était de 10 % environ, là cela va être 12,5 %, mais ce n'est quand même pas énorme.
Q - Oui, cela pourrait monter. Mais l'Italie, l'Espagne et la France, ne sont pas comparables, évidemment, avec Chypre...
R - Non, pas du tout.
Q - Mais comment éviter qu'un jour le FMI, la BCE, l'Union européenne, nous imposent leur programme ?
R - À la fois en étant sérieux budgétairement et en soutenant, autant qu'on le peut, la croissance. C'est l'attitude que nous avons, il faut à la fois budgétairement être très strict, parce qu'on ne peut pas dépenser durablement plus qu'on ne gagne, et puis il faut aussi soutenir la croissance parce que si on ne soutient pas la croissance, il n'y a pas d'emploi et, en plus, il n'y a pas d'équilibre budgétaire.
Q - Laurent Fabius, à quel moment le gouvernement va-t-il demander aux ressortissants français de quitte la Centrafrique ?
R - Pour le moment, ce n'est pas nécessaire. Nous suivons les événements en Centrafrique heure par heure. Il y a eu, comme vous le savez, une attaque par le mouvement qu'on appelle «Séléka». Le président Bozizé, qui s'était engagé à faire un certain nombre de choses qu'il n'a pas faites, a quitté son pays et nous suivons tout cela très attentivement. Nous avons envoyé un certain nombre de troupes supplémentaires pour protéger nos ressortissants. Les choses sont, de notre point de vue en ce qui concerne les Français, sous contrôle. Mais nous restons extrêmement vigilants.
Q - Les renforts militaires à Bangui n'interviennent pas pour sauver un président et un régime déchu, ça c'est clair ?
R - Non, pas du tout. François Hollande l'a dit fort bien, nous n'avons pas à nous mêler aux affaires intérieures de la Centrafrique. En revanche, nous devons protéger nos ressortissants. C'est ce que nous faisons.
Q - Mais est-ce que ce matin, Laurent Fabius, vous dites que la France reconnait la junte militaire, Séléka, qui a pris le pouvoir, ou qu'elle la condamne, comme l'Union africaine ?
R - François Hollande s'est entretenu avec Ban Ki-moon, et avec le président tchadien Idriss Deby, qui est le président en exercice de la Communauté Économique des États d'Afrique Centrale, pour proposer de trouver une solution conforme aux accords de Libreville d'il y a quelques mois. Pour l'instant, il n'y a pas de pouvoir légitime en République centrafricaine puisque le président est parti.
Q - Donc le pouvoir n'est pas légitime ?
R - Il n'y en a pas pour le moment.
Q - Le chef militaire a dit «je suis président de la République», il s'est autoproclamé.
R - Pour l'instant, il n'y en n'a pas.
Q - Est-ce qu'il y a un risque que la Centrafrique devienne à son tour un repère de djihadistes terroristes, puisque le Soudan est à côté et qu'il y a des pays... ?
R - Non, on n'en n'est pas là, heureusement. Mais il faut faire très attention parce que ce qu'on voit au Mali, au Nigeria ou ailleurs montre qu'il y a en fait des groupes terroristes un peu partout.
Q - Mobiles.
R - Oui, ils sont mobiles et il faut éviter la ramification entre tout cela.
Q - La France a confirmé la mort d'Abou Zeid, mais Al Qaïda lui a déjà donné un successeur, Djamel Okacha, qui est déjà recherché. Est-ce que cela veut dire que la guerre antiterroriste va continuer au Mali ?
R - Vous savez que nous sommes intervenus pour stopper les avancées terroristes au Sud. L'opération a été extrêmement bien réussie. Maintenant, il faut gagner la paix. Il est vrai qu'il reste des groupes terroristes dans la région et nous n'avons pas l'intention, nous les Français, pas plus que les autres, d'abandonner la lutte contre les groupes terroristes qui continuent d'être menaçants.
Q - Laurent Fabius, les djihadistes ont-ils, comme ils l'ont annoncé, tué un otage français ?
R - Cela a été annoncé, nous avons beaucoup d'inquiétude bien sûr, pour M. Verdon, mais nous n'avons pas de confirmation.
Q - Est-ce que vous avez des traces récentes de la présence d'otages quelque part ?
R - Je suis très discret, vous le savez, sur ce point parce que toute indication que l'on donne peut être utilisée par les terroristes. Je reste donc à la fois très déterminé et très discret.
Q - Il y a une étrange rumeur qui a circulé hier à travers le monde, la mort de Bachar Al-Assad, qui aurait été assassiné par un garde du corps iranien, c'est peut-être l'objectif des grandes puissances, mais est-ce qu'il y a une part de vérité ?
R - Un site a en effet publié cette information, mais elle n'est pas confirmée.
Q - Qu'est-ce que vous dites sur la Syrie ? Vous disiez «la France est une nation souveraine, elle prendra ses responsabilités à propos des armes».
R - La situation actuelle en Syrie est absolument catastrophique. Si on veut éviter que ce pays éclate et que ce soit finalement les extrémistes qui l'emportent, il faut une solution politique. Pour cela, il est nécessaire qu'un rééquilibrage s'opère sur le terrain des forces militaires. Mais, les choses se compliquent, vous avez vu que le président de la coalition nationale, qui est un homme très bien, très raisonnable, très responsable, M. Al-Khatib, a proposé sa démission ; elle a été refusée par le reste de la coalition. Demain, il y a une réunion, un Premier ministre a été nommé, mais ce Premier ministre lui-même est récusé par l'Armée de libération syrienne.
Q - Donc, vous n'avez plus d'interlocuteur ?
R - Nous souhaitons à la fois que l'opposition se réunisse à nouveau, parce que toute division est négative et, d'autre part, que l'opposition reste dans ses limites, j'allais dire réformistes. Nous ne sommes absolument pas d'accord avec une dérive qui serait une dérive extrémiste.
(...)
Q - Vous allez participer à l'Élysée à un Conseil de Défense sur le Mali et vous répéterez donc ce que vous nous avez dit ce matin. Mais il y a aussi les problèmes du budget de la Défense, ça ce sera pour un autre jour.
R - Ne soyez pas inquiet sur le budget de la Défense. Les choix qui sont en train d'être faits permettront une défense efficace et en même temps de respecter les équilibres budgétaires.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 mars 2013
R - Je pense que si, l'Europe et le Fonds monétaire international. L'accord qui est intervenu cette nuit est dur, mais il ne pouvait pas en être autrement. Le système chypriote, ce que Pierre Moscovici a appelé «l'économie-casino», était absolument invivable. À partir du moment où il y avait une dette énorme par rapport à la production, il fallait trouver une solution. L'aspect positif de cette solution, par rapport à celle qui était envisagée, c'est que les petits épargnants chypriotes ne vont pas avoir à payer. Mais il faut bien que quelqu'un règle l'addition, et cela va être payé, en grande partie, par les déposants les plus fortunés.
Q - C'est-à-dire les Russes et les Grecs milliardaires qui déposaient leur argent, pas toujours propre, et eux vont être taxés à 40 % ?
R - Pas seulement mais notamment eux. Cela renforce encore plus la nécessité de ce que nous, nous avons proposé, et qui s'appelle «un superviseur bancaire unique». Vous vous rappelez ce débat ? Nous, nous disions, nous continuons à dire qu'il faut qu'il y ait une autorité qui puisse regarder même les petites banques, et d'autres disaient «non, non, les petites banques il ne faut pas les regarder». Or, là, il s'agit de petites banques, mais avec de gros déficits.
Q - C'est positif pour l'Europe, mais pas pour les Chypriotes.
R - C'est positif pour l'Europe ; on a évité une catastrophe supplémentaire mais, cela dit, cela va être difficile parce que c'est une économie tout à fait artificielle.
Q - Et on ne risque pas de se fâcher avec Vladimir Poutine ?
R - Je ne sais pas quelle sera la réaction des Russes. Elle peut être effectivement dure.
Q - Parce qu'il y a des intérêts des amis de Vladimir Poutine installés dans l'île de Chypre.
R - Il y a des déposants russes de grande importance dans les banques chypriotes. Le système était incroyable. Les intérêts étaient de l'ordre de 5 %, alors même que l'économie productive ne produit pas du tout cela. Ce qui veut donc dire que pour produire ces 5 % il fallait que les banques chypriotes elles-mêmes réinvestissent dans d'autres économies-casino, notamment la Grèce, où les taux d'intérêts étaient à 8 %.
Q - Ça c'est fini ?
R - La spéculation, c'est fini.
Q - Ce devrait être fini. Le statut de paradis fiscal, etc., avec toutes ces combinaisons, c'est fini ?
R - Oui, même si on peut avoir un regret : jusqu'à présent, le taux d'impôt sur les sociétés était de 10 % environ, là cela va être 12,5 %, mais ce n'est quand même pas énorme.
Q - Oui, cela pourrait monter. Mais l'Italie, l'Espagne et la France, ne sont pas comparables, évidemment, avec Chypre...
R - Non, pas du tout.
Q - Mais comment éviter qu'un jour le FMI, la BCE, l'Union européenne, nous imposent leur programme ?
R - À la fois en étant sérieux budgétairement et en soutenant, autant qu'on le peut, la croissance. C'est l'attitude que nous avons, il faut à la fois budgétairement être très strict, parce qu'on ne peut pas dépenser durablement plus qu'on ne gagne, et puis il faut aussi soutenir la croissance parce que si on ne soutient pas la croissance, il n'y a pas d'emploi et, en plus, il n'y a pas d'équilibre budgétaire.
Q - Laurent Fabius, à quel moment le gouvernement va-t-il demander aux ressortissants français de quitte la Centrafrique ?
R - Pour le moment, ce n'est pas nécessaire. Nous suivons les événements en Centrafrique heure par heure. Il y a eu, comme vous le savez, une attaque par le mouvement qu'on appelle «Séléka». Le président Bozizé, qui s'était engagé à faire un certain nombre de choses qu'il n'a pas faites, a quitté son pays et nous suivons tout cela très attentivement. Nous avons envoyé un certain nombre de troupes supplémentaires pour protéger nos ressortissants. Les choses sont, de notre point de vue en ce qui concerne les Français, sous contrôle. Mais nous restons extrêmement vigilants.
Q - Les renforts militaires à Bangui n'interviennent pas pour sauver un président et un régime déchu, ça c'est clair ?
R - Non, pas du tout. François Hollande l'a dit fort bien, nous n'avons pas à nous mêler aux affaires intérieures de la Centrafrique. En revanche, nous devons protéger nos ressortissants. C'est ce que nous faisons.
Q - Mais est-ce que ce matin, Laurent Fabius, vous dites que la France reconnait la junte militaire, Séléka, qui a pris le pouvoir, ou qu'elle la condamne, comme l'Union africaine ?
R - François Hollande s'est entretenu avec Ban Ki-moon, et avec le président tchadien Idriss Deby, qui est le président en exercice de la Communauté Économique des États d'Afrique Centrale, pour proposer de trouver une solution conforme aux accords de Libreville d'il y a quelques mois. Pour l'instant, il n'y a pas de pouvoir légitime en République centrafricaine puisque le président est parti.
Q - Donc le pouvoir n'est pas légitime ?
R - Il n'y en a pas pour le moment.
Q - Le chef militaire a dit «je suis président de la République», il s'est autoproclamé.
R - Pour l'instant, il n'y en n'a pas.
Q - Est-ce qu'il y a un risque que la Centrafrique devienne à son tour un repère de djihadistes terroristes, puisque le Soudan est à côté et qu'il y a des pays... ?
R - Non, on n'en n'est pas là, heureusement. Mais il faut faire très attention parce que ce qu'on voit au Mali, au Nigeria ou ailleurs montre qu'il y a en fait des groupes terroristes un peu partout.
Q - Mobiles.
R - Oui, ils sont mobiles et il faut éviter la ramification entre tout cela.
Q - La France a confirmé la mort d'Abou Zeid, mais Al Qaïda lui a déjà donné un successeur, Djamel Okacha, qui est déjà recherché. Est-ce que cela veut dire que la guerre antiterroriste va continuer au Mali ?
R - Vous savez que nous sommes intervenus pour stopper les avancées terroristes au Sud. L'opération a été extrêmement bien réussie. Maintenant, il faut gagner la paix. Il est vrai qu'il reste des groupes terroristes dans la région et nous n'avons pas l'intention, nous les Français, pas plus que les autres, d'abandonner la lutte contre les groupes terroristes qui continuent d'être menaçants.
Q - Laurent Fabius, les djihadistes ont-ils, comme ils l'ont annoncé, tué un otage français ?
R - Cela a été annoncé, nous avons beaucoup d'inquiétude bien sûr, pour M. Verdon, mais nous n'avons pas de confirmation.
Q - Est-ce que vous avez des traces récentes de la présence d'otages quelque part ?
R - Je suis très discret, vous le savez, sur ce point parce que toute indication que l'on donne peut être utilisée par les terroristes. Je reste donc à la fois très déterminé et très discret.
Q - Il y a une étrange rumeur qui a circulé hier à travers le monde, la mort de Bachar Al-Assad, qui aurait été assassiné par un garde du corps iranien, c'est peut-être l'objectif des grandes puissances, mais est-ce qu'il y a une part de vérité ?
R - Un site a en effet publié cette information, mais elle n'est pas confirmée.
Q - Qu'est-ce que vous dites sur la Syrie ? Vous disiez «la France est une nation souveraine, elle prendra ses responsabilités à propos des armes».
R - La situation actuelle en Syrie est absolument catastrophique. Si on veut éviter que ce pays éclate et que ce soit finalement les extrémistes qui l'emportent, il faut une solution politique. Pour cela, il est nécessaire qu'un rééquilibrage s'opère sur le terrain des forces militaires. Mais, les choses se compliquent, vous avez vu que le président de la coalition nationale, qui est un homme très bien, très raisonnable, très responsable, M. Al-Khatib, a proposé sa démission ; elle a été refusée par le reste de la coalition. Demain, il y a une réunion, un Premier ministre a été nommé, mais ce Premier ministre lui-même est récusé par l'Armée de libération syrienne.
Q - Donc, vous n'avez plus d'interlocuteur ?
R - Nous souhaitons à la fois que l'opposition se réunisse à nouveau, parce que toute division est négative et, d'autre part, que l'opposition reste dans ses limites, j'allais dire réformistes. Nous ne sommes absolument pas d'accord avec une dérive qui serait une dérive extrémiste.
(...)
Q - Vous allez participer à l'Élysée à un Conseil de Défense sur le Mali et vous répéterez donc ce que vous nous avez dit ce matin. Mais il y a aussi les problèmes du budget de la Défense, ça ce sera pour un autre jour.
R - Ne soyez pas inquiet sur le budget de la Défense. Les choix qui sont en train d'être faits permettront une défense efficace et en même temps de respecter les équilibres budgétaires.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 mars 2013