Texte intégral
Je suis heureuse dêtre ce matin à vos côtés, et de participer à la journée Télésanté 2013. Je voudrais remercier le Catel, et plus particulièrement son directeur général, Monsieur Pierre TRAINEAU, qui uvre, depuis plus de 15 ans, pour le développement des téléservices.
Je ne peux que souscrire au thème que vous avez choisi pour cette journée, « la télésanté du patient sur son territoire ».
Les nouvelles technologies sont en train de révolutionner la santé. Demain, nous pourrons opérer à distance au quotidien. Les personnes atteintes de maladies chroniques pourront accéder à une consultation personnalisée sur leur Smartphone. Les jeux vidéo seront utilisés pour léducation thérapeutique.
Cette « révolution culturelle et cognitive », décrite par Michel Serres, bouleverse notre rapport au temps et à lespace. Elle transforme en profondeur la relation entre le soignant et le soigné. Elle modifie les pratiques et lexercice de la médecine. Elle ouvre de nouveaux horizons en matière dorganisation du système de santé.
Nous devons saisir les opportunités quoffrent les nouvelles technologies. Elles sont reconnues comme un facteur damélioration de la qualité et de lefficience des soins, mais aussi comme un élément de réponse aux défis de demain.
Les nouvelles technologies de linformation doivent nous aider à faire face au vieillissement de la population. Elles sont un outil pour mieux prendre en charge les maladies chroniques. Un outil qui nous permettra dorganiser le travail des professionnels en réseau et ainsi de décloisonner entre la ville et lhôpital, le soin et le médico-social, favorisant les logiques de parcours indispensables à la modernisation de notre offre de soins. Il permettra de mieux répondre aux aspirations des patients qui souhaitent être soignés à domicile et qui veulent prendre une part plus active dans leur prise en charge.
Les nouvelles technologies sont aussi un moyen pour lutter contre les inégalités de santé. Cest le premier objectif de la politique que je conduis. La télémédecine est, par exemple, au cur du « Pacte territoire-santé » que jai lancé en décembre dernier : elle constitue un outil efficace au service des professionnels qui sinstallent dans des zones isolées et elle permet de lutter contre des temps dattente devenus trop longs.
Enfin, les nouvelles technologies permettent de réaliser des gains defficience. La non-qualité a un coût. Dans un contexte économique contraint, la modernisation de notre offre de soins est une nécessité.
Ces objectifs sont au cur de la stratégie nationale de santé, dont le Premier ministre ma confié la responsabilité. Les nouvelles technologies, parce quelles peuvent contribuer à la réussite de cette politique, y occupent une place centrale.
Le changement ne se décrète pas den haut. Nous avons besoin des professionnels de santé : leur confiance nous est indispensable. Il nous faut aussi nous assurer de ladhésion des patients, en offrant les garanties nécessaires en matière de confidentialité et de sécurité des données. Nous devons enfin associer les industriels pour permettre lémergence dune stratégie industrielle en soutien de notre politique de santé publique.
Notre système de santé ne restera pas en marge des progrès technologiques, bien au contraire. Cest pourquoi jai demandé aux Agences Régionales de Santé délaborer, dici lété, des projets des Schémas Régionaux dInvestissement en Santé (SRIS), en prenant appui sur les orientations stratégiques de leur projet régional de santé : ils devront intégrer lévolution des nouvelles technologies qui est actuellement en cours.
Je veux aujourdhui vous présenter les grandes lignes de ma stratégie pour « la e-santé », qui se déploiera autour de 3 axes.
I/ Le premier dentre eux, cest daccompagner les professionnels et les établissements de santé.
LEtat et lassurance maladie ont lancé une politique volontariste auprès des professionnels de santé : ils ont été incités à informatiser un certain nombre de fonctions prioritaires comme le dossier patient en ville et à lhôpital, la prescription ou la transmission de résultats dexamens à lhôpital.
Pour les établissements de santé, cette action sinscrit dans le programme hôpital numérique. Je vous annonce aujourdhui que 400 millions deuros seront alloués sur 5 ans à ce programme : ils permettront daccompagner les établissements de santé dans les efforts déployés pour atteindre un socle prioritaire centré sur la production de soins et permettant léchange et le partage dinformations.
Inciter, cest également faciliter lutilisation des nouvelles technologies. Linformatique doit simplifier le quotidien des professionnels et en aucun cas le compliquer.
Loffre industrielle devra donc répondre rapidement aux besoins technologiques, à lhôpital ou en cabinet, en maison de santé ou en maison de retraite. Nous devons favoriser la structuration du marché, afin de parvenir à lémergence dune filière industrielle performante. Dans un avenir proche, des solutions innovantes devront pouvoir être proposées, conformément aux normes et aux standards dinteropérabilité et de sécurité quil revient à lEtat de définir et de rendre opposables.
Cette stratégie de filière est une nécessité pour répondre aux besoins des professionnels et des établissements de santé dans lintérêt du patient.
II/ Le deuxième axe de ma stratégie en e-santé, cest le renforcement de la coordination et de la coopération des professionnels dans le cadre du parcours de santé.
La stratégie nationale de santé vise en priorité à renforcer la logique des parcours de soins. Or, la coordination dans les champs sanitaire et médico-social demande impérativement de mettre en place des systèmes dinformation ouverts et sécurisés. Ils rendent plus faciles la communication et le partage dinformations entre les professionnels de santé, mais aussi avec les patients.
La majorité des outils nécessaires existe déjà. Les autres seront disponibles à court terme. Nous pourrons évaluer leur impact dans les prochains mois dans le cadre des expérimentations PAERPA de parcours coordonné pour personnes âgées.
Permettez-moi de prendre quelques exemples qui illustrent la stratégie que je souhaite mettre en place.
1/ Celui de la télémédecine est édifiant.
Nous avons aujourdhui la possibilité de pouvoir nous affranchir des distances. En rapprochant les professionnels entre eux et ces derniers avec leurs patients, la télémédecine permettra de meilleures prises en charge, partout sur le territoire. Je veux que nous passions rapidement dune phase dexpérimentation à une phase de généralisation.
Un plan national de déploiement de la télémédecine doit nous permettre davancer.
Il sagit de concentrer nos efforts sur des thèmes prioritaires. Ils concernent dans un premier temps le secteur hospitalier et visent, à titre dexemple, à assurer une permanence des soins en imagerie ou une meilleure prise en charge de laccident vasculaire cérébral. Les projets pilotes que nous accompagnons sont mis en uvre dans 8 régions. Ils doivent pouvoir rapidement sétendre sur le reste du territoire, dans le cadre des programmes régionaux de télémédecine pilotés par les Agences Régionales de Santé. Je compte sur la mobilisation des ARS pour que la télémédecine se déploie au service des besoins de santé de chaque territoire.
Nous développerons par ailleurs la télémédecine dans le secteur ambulatoire. Cest dailleurs lun des engagements que jai pris dans le cadre du « Pacte territoire-santé » pour lutter contre les déserts médicaux. Une expérimentation en ce sens sera lancée au cours du second semestre. Dans ce cadre, nous devons lever les barrières liées au financement et à la tarification de lactivité de télémédecine, en particulier pour les professionnels de santé libéraux. Notre objectif, cest doffrir de la visibilité aux acteurs concernés.
Je veux aussi aller plus loin et développer le recours aux fonctions de téléconsultation, de téléassistance et de télésurveillance, afin de faciliter laccès au système de soins sur lensemble du territoire. De nombreuses initiatives ont fleuri ces dernières années. Repérons-les, analysons-les et tirons-en les enseignements nécessaires. La stratégie nationale de santé, cest aussi cela.
2/ Un deuxième exemple, celui du Dossier Médical Personnel (DMP).
Il doit être réorienté au service du parcours de santé.
Les professionnels doivent disposer doutils de partage de linformation sur les patients, aisément accessibles et sécurisés. Le Dossier Médical Personnel peut répondre à cette nécessité : il doit cependant prendre en compte les besoins des professionnels de santé.
Je souhaite que le Dossier Médical de Personnel deuxième génération que jappelle de mes vux soit placé au centre du parcours de soins : il intégrerait de nouveaux services comme le partage dune synthèse médicale ou lutilisation en mobilité. Il serait linstrument privilégié de la prise en charge des pathologies chroniques, avec une indispensable ouverture sur le domaine médico-social.
Son déploiement saccompagnera de la mise en place dune messagerie sécurisée santé qui permettra aux professionnels de santé de communiquer entre eux.
3/ Dernier exemple sur lequel je me suis engagée, celui de la création des « territoires de soins numériques ».
Ce projet, que nous lançons avec lappui du Commissariat général à linvestissement, nous permettra de tester les outils technologiques de demain et daller plus loin dans lexploitation de leurs potentialités au service de la santé. Nous y consacrerons 80 millions deuros dans le cadre des investissements davenir. Nous testerons sur quelques territoires, avec limplication forte des Agences Régionales de Santé, des systèmes dinformation modernes, ouverts et sécurisés, utilisables par lensemble des acteurs du parcours de soins. Le succès de ces projets ouvrira la voie à une généralisation à lensemble des territoires.
Mesdames et messieurs,
III/ Le troisième axe de ma stratégie en e-santé, cest enfin lamélioration des services dinformation fournis aux usagers et aux citoyens
Les nouvelles technologies doivent bénéficier aux professionnels. Mais elles sont également un instrument de la « démocratie sanitaire ».
La mobilisation des technologies de linformation et de la communication, et des réseaux internet constituent un potentiel considérable pour linformation, laccompagnement et léducation des patients.
Il nous faut répondre à la demande de nos concitoyens daccéder à des sites publics dinformation de qualité. Nous devrons dans cette perspective mieux coordonner laction des acteurs publics.
Jai demandé à ce que des propositions me soient faites rapidement pour construire un véritable service public dinformation en santé, à destination de nos concitoyens.
Par ailleurs, je suis favorable à une ouverture maîtrisée des données de santé. Nous devrons absolument veiller à préserver le secret médical : nul ne souhaite que son voisin ou son employeur puisse avoir accès aux données qui touchent à sa santé. Dans le même temps, il est nécessaire pour des raisons de santé publique de mieux exploiter ces données. Cest à la puissance publique de sorganiser mieux. Au-delà, dautres acteurs de la vie économique et sociale réclament un accès à ces données. Jai décidé, pour organiser les évolutions nécessaires dans le strict respect des obligations déontologiques, de charger un membre du Conseil dEtat de me faire des propositions dans ce domaine.
Mesdames et messieurs,
Voilà les 3 axes prioritaires de ma stratégie en e-santé.
Le cap ainsi fixé requiert une forte implication de tous les acteurs, professionnels de santé, entreprises et pouvoirs publics. Jai demandé au secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales dassurer la conduite du volet e-santé de la stratégie nationale de santé pour ce qui concerne lEtat.
Il ny a plus désormais dobstacle technologique. Nous devons dans les prochaines années tenter détendre le plus largement possible lusage des nouvelles technologies à lensemble de notre système de santé. Il y a là un gisement que nous sommes résolus à exploiter avec vous.
Je vous remercie.
Source http://www.social-sante.gouv.fr, le 3 avril 2013