Déclaration de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des Français de l'étranger, sur la communauté française en Autriche et sur les efforts en faveur des Français de l'étranger, à Vienne le 5 avril 2013.

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Circonstance : Déplacement à Vienne-intervention devant la communauté française, le 5 avril 2013

Texte intégral

Monsieur l'ambassadeur,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
M. les conseillers l’Assemblée des Français de l’Étranger,
Chers amis,
Nous avons tous, au gré de notre éducation, de notre sensibilité, de notre esthétique, un Panthéon que peuplent des noms d’auteurs, des livrets d’Opéra ou des lumières de soleils couchants. Un séjour de trente ans en Irlande a peuplé le mien de l’ombre du général de Gaulle sur les plages d’Heron Cove, des poèmes de Yeats, de la liberté d’Oscar Wilde et des invocations celtes de Swift.
Souvenir de mes études secondaires autant que de voyages étudiants – Erasmus avant l’heure – le mien comprend aussi la musique de Mozart, les romans de Schnitzler et la littérature tragique de Stefan Zweig. Il comprend enfin :
- cette ville dont l’atmosphère renvoie à une ère éteinte, celle d’un empire disparu qui nous interpelle sur la volonté des hommes de demeurer unis,
- cette ville dont un diplomate français, un certain Stendhal, relevait que les rues étaient pavées de culture et dont l’auteur du Printemps au Prater ressentait qu’elle se confondait avec le bonheur.
C’est pour cela que je suis heureuse, juste heureuse, d’être avec vous ce soir dans ce Palais de l’Art nouveau qui nous ramène à ce que Vienne peut susciter d’évocations intimes.
J'ai eu l’occasion depuis mon arrivée, dans une visite que j’ai souhaitée orientée sur l’ensemble des questions qui vous concerne :
- de rencontrer un grand nombre d'entre vous,
- de visiter certaines entreprises,
- d’entendre les représentants de vos associations.
J'ai mesuré tout le dynamisme de notre communauté dans de nombreux secteurs de la vie sociale, économique et culturelle viennoise.
Comme Ministre des Français de l'étranger, j'ai à coeur de vous rencontrer, de vous écouter. Je retrouve alors dans vos propos l’écho d’une expatriation que j’ai vécue. Et même si vos élus, par delà leur diversité se font les témoins de vos préoccupations, m'interrogent et sollicitent mon ministère, je sais que rien ne remplace le contact direct et l'échange.
Votre communauté est forte de plus de 8.000 personnes inscrites, en progression constante et régulière ; elle est majoritairement jeune, active, dynamique et bien intégrée. Votre service consulaire à Vienne ainsi que les six consuls honoraires installés dans les différents länder que je salue pour leur dévouement et leur efficacité, assurent une représentation de qualité.
J’ajoute que notre pays est le seul au monde à offrir à ses ressortissants une telle variété de services ainsi que des prestations, notamment sociales, de ce niveau. Elles sont l’expression financière de la solidarité que la Nation apporte à ceux que la distance sépare ou éloigne.
Pour autant, ce réseau n'échappe pas à l'impératif de réduction des dépenses publiques (les effectifs consulaires du ministère ont diminué de plus de 6% ces dernières années alors que la communauté installée à l'étranger progresse de 4% en moyenne annuelle). Afin de maintenir un service rendu de qualité et de proximité, il nous faut donc repenser l'organisation de l'activité consulaire pour se concentrer sur les missions essentielles quitte à adapter notre dispositif en fonction de la réalité locale.
Cette adaptation de notre réseau consulaire a été entreprise sous l'autorité de Laurent Fabius et dans le cadre du projet gouvernemental de Modernisation de l'Action Publique. J’en ai présenté l’essence lors d’un récent conseil des ministres : elle repose sur :
- la modernisation de nos outils (cela peut être notamment une informatisation accrue des processus et une dématérialisation des documents),
- la simplification de nos procédures (état civil en Europe, notariat hors d'Europe par exemple),
- et la rationalisation de nos missions.
J’ai aussi le souci que cette modernisation se fasse au bénéfice de nos opérateurs économiques qu’il s’agisse :
- de la mise en place d’un passeport grand voyageur au nombre de pages adapté à ceux qui se rendent souvent à l’étranger ;
- ou du développement du nombre de Volontaires Internationaux en Entreprises (les VIE) de 25 % en 3 ans et de la démocratisation de leur accès tant pour les PME et ETI que pour des profils plus diversifiés de jeunes diplômés.
Je tiens à remercier, en cette occasion, tous les acteurs économiques de notre communauté : UBIFRANCE, la Chambre de commerce et les Conseillers du Commerce extérieur. Votre engagement est essentiel plus encore lorsqu’une synergie existe entre tous.
Une crise d'ampleur sans précédent frappe notre pays, à l'instar de nos voisins européens. Le Gouvernement auquel j'appartiens a une mission, celle de son redressement économique. C'est à cette tache impérieuse que nous nous sommes attelés, sans relâche.
L’effort engagé est considérable et sans précédent. Il s'inscrit dans une méthode claire : le retour de la croissance et la réduction du chômage. Cela passe par le désendettement de notre pays, un dialogue social apaisé et fructueux, le redressement de notre compétitivité.
Cette mission nous devons la conduire au niveau national mais également à l'échelle de l'Europe : alors que les peuples souffrent, se méfient de l'Europe, s'en détournent parfois... nous avons le devoir de ne pas laisser ce grand projet que nous avons proposé au reste du monde se diluer et se défaire dans la récession. En 1969, un président français, Georges Pompidou concluait un propos consacré à la relance de l’Europe par les mots suivants :
« à l’heure où nous le savons bien, les grandes puissances ne considèrent et ne peuvent considérer les problèmes européens qu’en fonction de leurs intérêts propres, nous devons à nos peuples de ranimer l’espérance d’une Europe maitresse de son propre destin ».
Il s’exprimait dans un contexte certes différent, mais cette ambition, mes amis, doit demeurer la nôtre. La France est aux côtés du Portugal, aux côtés de la Grèce, aux côtés de l'Espagne, comme elle était aux côtés de l'Irlande hier. Et pour avoir vécu trente ans dans ce dernier pays, je puis vous dire l’importance affective que cette solidarité représente.
Citoyens français résidents à l'étranger, vous êtes les porte-paroles de notre pays, de notre vision du monde car vous portez en vous votre langue et votre culture. Aux avant-postes de la mondialisation, vous êtes une véritable richesse pour la France. Au quotidien, vous participez de notre influence et de notre rayonnement. Avec le Président de la République et le Ministre des affaires étrangère Laurent Fabius, nous souhaitons mieux connaître vos besoins et donner une attention particulière à votre vie quotidienne afin de mieux vous accompagner.
Nous avons désormais, et je m’en félicite, une représentation parlementaire complète. Douze sénateurs représentant les Français établis hors de France siègent au Sénat. Je salue la présence de 5 d’entre eux ce soir. Onze députés ont été élus, pour la première fois, en juin dernier. Je salue ici Pierre-Yves Le Borgn’ votre député. L’expression de la démocratie est en effet une exigence que la République se doit de rendre effective pour chaque citoyen, qu’il demeure en France ou ailleurs dans le monde.
Avec cette élection de députés, la représentation de notre communauté expatriée a donc été profondément modifiée. Partant de ce constat, j’ai souhaité engager une réflexion globale sur la représentation des Français à l’étranger ; et plus particulièrement sur le fonctionnement de l’Assemblée des Français de l’Etranger dont je salue vos conseillers Jean-Pierre Villaescusa et Louis Sarrazin.
Il me semble important que nous nous concentrions désormais sur l’échelon local. Plusieurs objectifs portent ma réflexion : rapprocher vos élus des communautés dont ils sont issus partout où elles se trouvent et vous permettre, au sein de conseils consulaires, d’être associés à la mise en place des politiques publiques qui vous concernent directement.
J’ai présenté au Sénat ce projet de loi les 18 et 19 mars derniers. Il a été adopté par la Haute Assemblée et j’en remercie les sénateurs – quel qu’ait été leur bord politique, j’y ai été sensible - pour leur travail constructif. L’Assemblée nationale poursuivra la discussion le 16 avril prochain.
Avec cette réforme sera mis en place un dispositif de représentation au plus près de vous et de vos préoccupations. Je m’en félicite.
J’ai également visité hier le Lycée français de Vienne. J’ai pu apprécier les qualités de cet établissement qui scolarise une minorité d’élèves français, rappelant à quel point nos établissements sont des outils précieux au service du rayonnement de notre langue et de notre culture. Le travail étroit avec les autorités éducatives locales, le grand nombre de partenariats conclus avec des partenaires extérieurs témoignent de son ouverture sur l’Autriche et sur le monde. L’organisation demain de la 3ème rencontre de ses anciens élèves des lycées français à l’initiative de l’association qui les réunit et notamment de son président, Monsieur Ferdi Akdag, en atteste également. L’universitaire que je suis en sait la valeur et le symbole.
Ce lycée me semble être à l’image du réseau des établissements français à l’étranger, combinant excellence, mixité culturelle et sociale. Je suis profondément attachée à ces valeurs qui fondent la légitimité de notre enseignement français à l’étranger.
Mais ce réseau a besoin d’être adapté rapidement aux besoins de nos communautés.
Nous ne pouvions en effet différer la mise en place de la réforme qui réintroduit davantage d’équité dans l’attribution des bourses scolaires. Laurent Fabius et moi avons obtenu une augmentation substantielle du budget des aides à la scolarité, malgré un contexte difficile qui nous impose par ailleurs 10 milliards d'euros d’économie. C'est dire combien ce gouvernement confirme son engagement en faveur de nos communautés expatriées.
Ce pourrait être une conviction intime. C’est devenu une réalité politique. Le gouvernement attache une grande importance au renforcement des liens avec les Français de l’étranger.
Vous me permettrez, en conclusion de solliciter un diplomate encore, Lamartine.
« Ma patrie, écrivait-il, est partout où rayonne la France, Ou son génie éclate aux regards éblouis »
Dans cette ville qui a éclairé de sa beauté l’histoire de l’Europe, je suis convaincue que plus qu’ailleurs ce que vous représentez, Monsieur l’ambassadeur, mes amis, peut être la source d’un dialogue intime et fécond. Par votre engagement, votre présence quotidienne, vous le nourrissez, vous le faites vivre.
Mes chers compatriotes, je vous remercie de votre accueil, très chaleureusement.
Vive l'Autriche,
Vive la République
Vive France.
Source http://www.helene-conway.com, le 11 avril 2013