Déclaration de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des Français de l'étranger, sur les relations entre la France et le Salvador, à San Salvador le 20 mai 2013.

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Circonstance : Déplacement en Amérique centrale du 16 au 22 mai-intervention devant la communauté française, à San Salvador le 20 mai 2013

Texte intégral


Monsieur l’Ambassadeur,
Madame la Conseillère à l’AFE,
Mesdames, Messieurs,
Mes chers amis,
Je suis heureuse d’être parmi vous ce soir, à la résidence de France au Salvador, dans cette lointaine terre « cuscatleca » qui vous accueille si chaleureusement dans ses somptueux paysages de volcans. Il y a longtemps, trop longtemps, qu’un Ministre du Gouvernement n’était pas venu vous saluer.
Comme Ministre des Français de l'étranger, j'ai à coeur de vous rencontrer, de vous écouter. Je retrouve alors dans vos propos l’écho d’une expatriation que j’ai vécue. Et même si vos élus, par delà leur diversité se font les témoins de vos préoccupations, m'interrogent et sollicitent mon ministère, je sais que rien ne remplace la chaleur du contact direct.
La présence de la France est ancienne au Salvador ; ce pays qui résonne intimement dans l’esprit des enfants comme étant celui de Consuelo, l’épouse salvadorienne de Saint-Exupéry, « l’épouse » du Petit Prince.
La France a souhaité être aux côtés du Salvador pendant la période la plus noire de son histoire, durant les terribles années de la guerre civile. Elle a ainsi oeuvré pour le rétablissement de la paix, depuis la déclaration franco-mexicaine de 1981 jusqu’aux accords de paix de Chapultepec en 1992. Ces accords, qui ont permis le retour de la paix et l’avènement de la démocratie, sans doute uniques en Amérique latine, Nous en avons célébré l’année dernière à Paris le vingtième anniversaire.
C’est ce qui explique peut-être l’excellence des relations politiques que nous entretenons avec le Salvador. Elles sont fondées sur le partage de mêmes valeurs : la démocratie, la liberté, la tolérance, la justice sociale. J’ai pu le constater cet après-midi lors de mes entretiens avec nos amis salvadoriens ainsi qu’avec le Secrétaire Général du SICA, ce système d’intégration régionale dont nous sommes membres observateurs depuis l’année dernière. Nous sommes proches. Proches également au travers de l’Union Européenne, qui a signé avec la région Amérique centrale un ambitieux accord d’Association, en passe d’être ratifié. Il nous ouvre de nouvelles perspectives. Sachons en profiter.
La France est présente encore par son action culturelle et linguistique. Je souhaite saisir cette occasion pour saluer l’action de l’Alliance Française qui fait tant avec des moyens contraints, mais avec beaucoup de dynamisme et d’imagination. Je veux aussi saluer le remarquable travail du Lycée Antoine et Consuelo de Saint-Exupéry, que j’ai eu la chance de visiter, et d’admirer ce matin. Quel outil formidable au service de la présence de la langue et de la culture françaises ; mais plus généralement au service de notre influence. La culture, la langue doivent aussi nous permettre de nous ouvrir à l’économie.
La France est également active en matière de coopération technique, notamment dans le secteur essentiel de l’eau. Nous souhaitons la développer encore, en particulier en apportant notre soutien à la coopération décentralisée, déjà active. Elle souhaite l’être davantage enfin, en explorant des pistes nouvelles de coopération universitaire et scientifique.
Mais la France n’est pas assez présente sur le plan économique. La compagnie aérienne TACA est depuis longtemps un fidèle client d’Airbus. C’est une remarquable réussite, mais le reste de nos échanges n’est pas à la hauteur du potentiel de nos deux pays.
Dans un contexte économique difficile, le Président de la République, depuis son élection a fait le choix d’une politique courageuse et ambitieuse, à la hauteur de la gravité de la situation de la France ambitieux : sérieux budgétaire, maîtrise de la finance, réforme du marché du travail, pacte de compétitivité. Nous nous y consacrons sans relâche. Dans cet effort considérable que nous devons mener, le développement de notre présence économique à l’étranger est fondamental.
Son développement doit être l’expression de cette diplomatie économique avancée par Laurent Fabius. Elle signifie que, chacun à sa place, lorsqu’il est dans un pays qui n’est pas le sien doit participer à ces échanges, à cette influence que la France peut espérer à travers la propre participation de ses expatriés. La France était en 2012 le 4ème pays pour les investissements à l’étranger. Je gage que nous vous le devons parce que vous êtes nos premiers ambassadeurs.
Dans cette diplomatie économique, le développement de nos liens avec l’Amérique latine est essentiel. Il s’agit même d’une priorité ainsi que le rappelait encore récemment le Ministre des Affaires étrangères. Je remercie la Chambre de Commerce et les Conseillers du Commerce Extérieur que j’ai rencontrés ce matin, pour leur action. Elle permet de mieux faire comprendre à nos entreprises les opportunités multiples qu’offre un marché centraméricain trop mal connu. Soyez assurés que je me ferai votre relai à Paris, pour solliciter du MEDEF international l’envoi ici d’une mission exploratoire, ainsi que vous le demandez depuis plusieurs années.
Mes chers compatriotes, citoyens français résidents au Salvador, vous participez au premier chef de la présence et du rayonnement de la France dans ce pays. Vous êtes les porte-paroles de notre langue, de notre culture, de notre vision du monde. Avec le Président de la République et le ministre des affaires étrangères, nous faisons de l’accompagnement et de l’aide aux communautés françaises expatriées une priorité de notre action.
Ce pourrait être une conviction intime. C’est devenu une réalité politique. Le gouvernement attache une grande importance au renforcement des liens avec les Français de l’étranger.
Ce lien entre vous et la France passe par notre réseau consulaire. Il est l'un des plus denses au monde. Il doit être préservé tout en s’adaptant aux évolutions du monde. Afin de le préserver, il était légitime d’engager une réflexion sur sa modernisation. Je suis heureuse de constater qu’il y réussit et se modernise.
Je sais toute l’importance que vous accordez, fort justement, à l’éducation en français de vos enfants. Je souhaiterais vous entretenir brièvement de l’avenir de notre réseau scolaire. Avec près de 600 millions d'euros par an, aucun pays dans le monde n’investit autant que la France dans un réseau d'enseignement à l'étranger. Nos établissements scolaires scolarisent les enfants de nos expatriés mais sont aussi un outil de rayonnement fondamental. Ils témoignent de la présence de notre pays sur la scène intellectuelle mondiale, ils participent à la diversité linguistique et culturelle dans un monde globalisé.
Mais ce réseau a besoin d’être adapté rapidement aux besoins de nos communautés. C’est dans cet esprit que nous avons mis fin au dispositif de prise en charge des frais de scolarité des lycéens français. Cette mesure, découplée de tous critères sociaux, était injuste et financièrement ingérable. Elle n’était d’ailleurs plus financée dès cette année ce qui atteste, en soi, de l’extrême légèreté de ceux qui ont pu me précéder dans cette fonction.
Nous ne pouvons en effet différer la mise en place de la réforme qui réintroduit davantage d’équité dans l’attribution des bourses scolaires. Laurent Fabius et moi avons obtenu une augmentation substantielle du budget des aides à la scolarité, malgré un contexte difficile qui nous impose par ailleurs 10 milliards d'euros d’économie. C'est dire combien ce gouvernement confirme son engagement en faveur de nos communautés expatriées.
Et je vous l’assure, le nouveau système des aides à la scolarité qui a été porte a concertation devant la Commission Nationale des Bourses répond aux impératifs de justice et d’équité sociale. Dans quelques semaines, se tiendront les premières commissions locales de bourses.
Je compte sur l’implication de chacun pour faire de cette réforme un succès.
Les Français de l’étranger sont des citoyens à part entière. Ils ont désormais une représentation complète au Parlement avec onze députés et douze sénateurs. Une réforme de la représentation des Français établis hors de France est en cours. Elle contribuera à renforcer la présence des élus au plus près de chacun de vous et de vos préoccupations avec la création de conseils consulaires composés de conseillers consulaires que vous élirez au suffrage universel direct. L’expression de la démocratie est en effet une exigence que la République – la Res Publica, la chose publique - se doit de rendre effective pour chaque citoyen, qu’il demeure en France ou ailleurs dans le monde.
Cette évolution correspond à la réalité d’une mobilité accrue de nos compatriotes dans le monde. Nous avons enregistré un quasi doublement de ce mouvement en 15 ans et une augmentation moyenne de 4% sur les 5 dernières années. Nous avons une population jeune, active mobile mais aussi une population binationale, très intégrée dans le pays dans lequel elle est installée de longue date et où elle a fondé une famille.
C’est pour prendre en compte cette réalité multiple et cette richesse que le gouvernement a souhaité moderniser la représentation des Français de l’étranger. Les Français qui vivent à l’étranger constituent un atout incontestable pour la France. Ils doivent se faire entendre. Nous avons besoin d’eux.
Mesdames, Messieurs, mes chers compatriotes, je sais que nombreux sont ceux qui parmi vous représentent une deuxième, voire troisième génération de Français résidant au Salvador. Loin de la France, vous n’en demeurez pas moins fidèles à vos origines françaises. Avec vous, la « France extérieure » de Braudel s’intègre à cette Nation dont Taine relevait qu’elle est « l’aboutissement d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouement de tous », quel que soit l’endroit où il se trouve.
Je vous remercie de la chaleur de votre accueil.
Vive le Salvador
Vive la République
Vive la Francesource http://www.helene-conway.com, le 28 mai 2013