Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Commissaire,
Chers collègues,
Je veux dabord remercier la Commission pour les efforts quelle a accomplis pour améliorer le texte du mandat. Dans bien des domaines, les progrès sont réels ; dans dautres nous aurions souhaité des formulations plus fortes et plus précises. Sur le dossier de linvestissement et notamment du mécanisme de règlement des différends investisseur contre Etat ; le compte ny est pas et la France reste insatisfaite. Mais dans un esprit constructif et de compromis, je suis prête à vous donner le bénéfice du doute et à men contenter, même si je resterai vigilante.
Mais il y a un domaine où cela ne passe pas. Ce domaine vous le connaissez. Cest celui de la culture et du principe fondamental de lexception culturelle. Ce nest pas une surprise pour vous. Vous connaissez les convictions françaises. Nous vous lavons dit. Nous lavons écrit. Vous connaissez lextrême sensibilité des créateurs européens, même si vous avez certainement sous-estimé sa force. Vous connaissez leur capacité à entraîner, à convaincre, à mobiliser. Quatorze ministres de la culture les ont suivis, comme très majoritairement le Parlement Européen. Son Président a rappelé hier que pour le Parlement européen la culture et les services audiovisuels devaient être clairement exclus du mandat.
Vous nêtes pas surpris. En revanche je conserve de mon côté quelques interrogations majeures qui nont pas trouvé réponse. Je comprends que vous vous êtes mis daccord avec les négociateurs américains sur le principe dune négociation « sans exclusion », mais après quelles consultations ? qui vous en a donné mandat ? Jai une autre incompréhension essentielle. Vous souhaitez remettre en cause un principe fondamental, constitutif du projet européen - lexception culturelle - et vous avez choisi pour ce faire le partenaire qui domine le monde en matière de production audiovisuelle avec les dérives et les tentations qui vont avec la puissance, lactualité malheureusement nous le rappelle. Et en plus ce partenaire ne partage pas, en matière de diversité culturelle, nos valeurs et la affirmé en refusant de signer la convention de lUnesco de 2006. Surprenant non ?
La France, elle, ne vous surprendra pas. Elle refuse le projet de mandat, elle refusera tout mandat qui ne comportera pas une protection des services culturels et lexclusion claire et explicite du secteur audiovisuel. Nous avons échangé beaucoup darguments sur le fond, sur la tactique. Je ne vais pas allonger nos débats, je veux juste rappeler deux points :
Cest un principe de liberté qui est en jeu. Les révolutions technologiques vont obliger nos créateurs, nos industries culturelles à repenser totalement leurs modèles de création et de diffusion Pas à sadapter comme vous le concédez du bout de vos explications techniques, mais à se réinventer. Il y a dix ans, il ny avait ni tablette numérique, ni livre numérique, ni téléphone « intelligents », ni you-tube, ni facebook, ni twitter. Qui sait ce que seront demain les modes de consommation, de transmission, de diffusion ? La seule garantie pour permettre à nos auteurs, nos créateurs, nos producteurs de continuer à inventer le futur, cest maintenir vivant ce principe de liberté daction quest lexception culturelle, « le meilleur moyen de préserver la diversité du cinéma » comme la rappelé Steven Spielberg il y a moins dun mois.
Le deuxième point est celui de la soi-disant menace protectionniste. En moyenne 60 % des écrans européens y compris français sont occupés par des films américains. Selon les années, les films européens occupent 3 à 6 % du marché américain. Où est louverture ? Où est la fermeture ?
Monsieur le Président, lEurope, sa légitimité, sont contestées, remises en cause dans nos pays. Il ne faut pas donner raison aux sceptiques de lEurope en braquant contre elle les meilleurs de ses enfants : les créateurs, les artistes. Il faut dire aussi les choses clairement, pas de manière ambigües, partielles, contournées, qui contredisent les belles déclarations et leur donnent un côté orwellien. Nous avons aussi sur ce mandat un enjeu de transparence et de crédibilité démocratique. Nous devons le relever.
Il y a quelques jours un journaliste du Financial Times expliquait que « lexception culturelle française faisait plus du sens que jamais ». Son article comportait beaucoup danalyses pertinentes mais je suis en désaccord avec lui sur un point. Ce nest pas lexception française qui est en jeu, cest lexception européenne, notre modèle européen. La présidente de lInstitut du Cinéma suédois écrivait sur son blog « merci la France ». Je souhaite que ce soir, elle puisse dire « merci lEurope ».
source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 19 juin 2013
Monsieur le Commissaire,
Chers collègues,
Je veux dabord remercier la Commission pour les efforts quelle a accomplis pour améliorer le texte du mandat. Dans bien des domaines, les progrès sont réels ; dans dautres nous aurions souhaité des formulations plus fortes et plus précises. Sur le dossier de linvestissement et notamment du mécanisme de règlement des différends investisseur contre Etat ; le compte ny est pas et la France reste insatisfaite. Mais dans un esprit constructif et de compromis, je suis prête à vous donner le bénéfice du doute et à men contenter, même si je resterai vigilante.
Mais il y a un domaine où cela ne passe pas. Ce domaine vous le connaissez. Cest celui de la culture et du principe fondamental de lexception culturelle. Ce nest pas une surprise pour vous. Vous connaissez les convictions françaises. Nous vous lavons dit. Nous lavons écrit. Vous connaissez lextrême sensibilité des créateurs européens, même si vous avez certainement sous-estimé sa force. Vous connaissez leur capacité à entraîner, à convaincre, à mobiliser. Quatorze ministres de la culture les ont suivis, comme très majoritairement le Parlement Européen. Son Président a rappelé hier que pour le Parlement européen la culture et les services audiovisuels devaient être clairement exclus du mandat.
Vous nêtes pas surpris. En revanche je conserve de mon côté quelques interrogations majeures qui nont pas trouvé réponse. Je comprends que vous vous êtes mis daccord avec les négociateurs américains sur le principe dune négociation « sans exclusion », mais après quelles consultations ? qui vous en a donné mandat ? Jai une autre incompréhension essentielle. Vous souhaitez remettre en cause un principe fondamental, constitutif du projet européen - lexception culturelle - et vous avez choisi pour ce faire le partenaire qui domine le monde en matière de production audiovisuelle avec les dérives et les tentations qui vont avec la puissance, lactualité malheureusement nous le rappelle. Et en plus ce partenaire ne partage pas, en matière de diversité culturelle, nos valeurs et la affirmé en refusant de signer la convention de lUnesco de 2006. Surprenant non ?
La France, elle, ne vous surprendra pas. Elle refuse le projet de mandat, elle refusera tout mandat qui ne comportera pas une protection des services culturels et lexclusion claire et explicite du secteur audiovisuel. Nous avons échangé beaucoup darguments sur le fond, sur la tactique. Je ne vais pas allonger nos débats, je veux juste rappeler deux points :
Cest un principe de liberté qui est en jeu. Les révolutions technologiques vont obliger nos créateurs, nos industries culturelles à repenser totalement leurs modèles de création et de diffusion Pas à sadapter comme vous le concédez du bout de vos explications techniques, mais à se réinventer. Il y a dix ans, il ny avait ni tablette numérique, ni livre numérique, ni téléphone « intelligents », ni you-tube, ni facebook, ni twitter. Qui sait ce que seront demain les modes de consommation, de transmission, de diffusion ? La seule garantie pour permettre à nos auteurs, nos créateurs, nos producteurs de continuer à inventer le futur, cest maintenir vivant ce principe de liberté daction quest lexception culturelle, « le meilleur moyen de préserver la diversité du cinéma » comme la rappelé Steven Spielberg il y a moins dun mois.
Le deuxième point est celui de la soi-disant menace protectionniste. En moyenne 60 % des écrans européens y compris français sont occupés par des films américains. Selon les années, les films européens occupent 3 à 6 % du marché américain. Où est louverture ? Où est la fermeture ?
Monsieur le Président, lEurope, sa légitimité, sont contestées, remises en cause dans nos pays. Il ne faut pas donner raison aux sceptiques de lEurope en braquant contre elle les meilleurs de ses enfants : les créateurs, les artistes. Il faut dire aussi les choses clairement, pas de manière ambigües, partielles, contournées, qui contredisent les belles déclarations et leur donnent un côté orwellien. Nous avons aussi sur ce mandat un enjeu de transparence et de crédibilité démocratique. Nous devons le relever.
Il y a quelques jours un journaliste du Financial Times expliquait que « lexception culturelle française faisait plus du sens que jamais ». Son article comportait beaucoup danalyses pertinentes mais je suis en désaccord avec lui sur un point. Ce nest pas lexception française qui est en jeu, cest lexception européenne, notre modèle européen. La présidente de lInstitut du Cinéma suédois écrivait sur son blog « merci la France ». Je souhaite que ce soir, elle puisse dire « merci lEurope ».
source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 19 juin 2013