Texte intégral
Q - Le monde entier est au chevet de Nelson Mandela, quelles sont les dernières informations que vous avez ? Pas plus que nous, j'imagine.
R - Non, les informations, c'est qu'il est malheureusement au seuil de la mort. C'est un formidable bonhomme que j'ai eu la chance de connaître. Quand j'étais Premier ministre, nous avons pris la tête du combat contre l'apartheid. À l'époque, nous avons demandé et obtenu un embargo sur le charbon qui venait d'Afrique du Sud, et c'est ce qui a contribué, Mandela me l'a dit, à détacher la bourgeoisie blanche, qui dirigeait les choses, de l'apartheid. À ce moment-là, les blancs ont compris que s'ils continuaient à soutenir l'apartheid, il n'y avait plus de perspective économique. Mais c'est surtout un homme absolument magnifique parce qu'il a lutté, pendant toute la première partie de sa vie, d'une façon extrêmement dure, mais pendant la lutte il pensait déjà à la réconciliation, et c'est cela qui est extraordinaire.
Q - Il pensait à la réconciliation déjà.
R - Ah oui ! Je me rappelle plusieurs conversations que l'on a eues, alors que l'apartheid existait encore. Il disait : «je dois mener une lutte très dure parce qu'il faut mener une lutte pour casser ce système». On a oublié maintenant, mais l'apartheid, cela voulait dire que les noirs ne pouvaient pas monter dans les autobus où montaient les blancs, ils ne pouvaient pas aller dans les toilettes où étaient les blancs ; c'était vraiment un système monstrueux. Il a lutté toute sa vie, mais il savait que devrait venir un moment de réconciliation. Et en plus c'est un seigneur, je veux dire même physiquement, un homme admirable.
Q - Vous avez une anecdote, vous vous souvenez d'une anecdote, d'un moment précis qui vous a marqué ?
R - Aujourd'hui tout le monde l'encense, mais la première fois qu'il est venu à Paris, c'était à l'époque de François Mitterrand, qui l'a reçu à l'Élysée. Il nous a raconté sa lutte en prison... Enfin, ce que j'ai retenu de cette conversation, c'est que c'était un dur, vraiment un dur, mais cette dureté c'était pour renverser le système, mais il savait - c'est cela qui était extraordinaire - qu'un jour il serait le Père de la nation.
Q - François Hollande a prévu d'aller à ses obsèques ?
R - Écoutez, on n'en n'est pas là, on ne va pas anticiper...
Q - Non, non, on n'en n'est pas là, mais enfin bon !
R - Je pense que tous les présidents du monde évidemment vont rendre hommage à Nelson Mandela.
Q - Demain, Conseil européen à Bruxelles, Laurent Fabius, les 27 chefs d'État et de gouvernement seront donc réunis, à Bruxelles, est-il vrai que la France va demander à la Commission européenne une modification de sa recommandation sur la prochaine réforme des retraites ?
R - C'est assez compliqué. Il y a maintenant un système où le Conseil européen doit donner des recommandations, et le Conseil européen se prononce sur la base de propositions de la Commission. Le texte de la Commission entre beaucoup dans les détails et je pense que ce qui sera adopté, c'est une recommandation plus générale. Je ne pense donc pas qu'il y aura de bagarre.
Q - Vous demandez quand même à la Commission de revenir sur sa recommandation.
R - Non, l'idée c'est l'orientation générale, elle est tout à fait légitime, c'est-à-dire sérieux budgétaire et croissance. Il faut que la France s'applique le sérieux budgétaire, mais ce n'est pas à la Commission d'entrer dans tous les détails, sinon le Parlement français ne servirait à rien. Je ne prévois pas de grande difficulté là-dessus.
Q - Vous pensez qu'il y aura accord là-dessus ?
R - Oui.
Q - Il y avait une phrase qui choquait, une phrase qui proposait l'augmentation de l'âge légal de départ à la retraite, dans les recommandations de la Commission.
R - C'est un exemple de ce que la Commission peut faire ou ne peut pas faire. Que la Commission dise à la France «il faut que vous équilibriez votre régime de retraite», c'est tout à fait légitime, c'est d'ailleurs ce que l'on est en train de faire, puisqu'il va y avoir une réforme des retraites. Mais c'est à chaque pays de décider souverainement quelle est la meilleure façon d'y parvenir.
Q - Oui, ce n'est pas à Bruxelles de définir les modalités de la réforme des retraites en France.
R - D'entrer dans tous les détails, non, bien sûr.
Q - Non, ce n'est pas à Bruxelles de nous dicter sa loi. Je vous le dis parce qu'on entend beaucoup cela.
R - Sous quelle forme ?
Q - Beaucoup de formes. Lorsque les critiques s'adressent à M. Barroso, venant... eh bien oui, venant de votre gouvernement, enfin de membres de votre gouvernement.
R - Oui, bien sûr.
Q - Et je lis même, ce matin, M. Bartolone dit dans Le Parisien, je crois, «M. Barroso est un homme dépassé». C'est un homme dépassé ?
R - Oui, j'ai entendu aussi cela dans la bouche de M. Juppé, etc.
Q - Oui, «archaïque», M. Juppé.
R - Mon point de vue - et je traite tout cela, c'est normal, comme ministre des affaires étrangères - c'est ce qui permet le débat avec la Commission, oui, mais tout ce qui est pugilat, non. C'est-à-dire qu'il faut éviter de personnaliser, parce que M. Barroso a certainement ses défauts, comme chacun, mais il est président de la Commission et il ne s'agit pas de M. Barroso en tant que tel.
Que l'on ait un débat, oui. Moi-même je m'interroge ; qu'est ce que cela veut dire concrètement ? L'Europe, on en a besoin, mais il faut que ce soit une Europe réorientée, parce que si c'est une Europe qui conduit à plus de chômage, cela ne va pas.
En revanche, pas d'attaques personnelles, dans un sens ou dans un autre, parce que M. Barroso, il y a une dizaine de jours avait eu des phrases, à l'égard de la France, qui n'étaient pas acceptables, même s'il avait dit que ce n'était pas la France qui était visée. Donc, je pense qu'il faut - je ne dis pas seulement cela parce que je suis diplomate - avoir un débat, tout à fait normal, mais tout ce qui est considéré comme des attaques personnelles, non.
Q - Alors, est-ce qu'Arnaud Montebourg a eu tort ?
R - Disons que la formulation peut être discutée, voilà, c'est une jolie formule.
Q - ... ça c'est diplomatique. Il a eu tort ?
R - Non, je crois qu'il se situait par rapport au Front national.
Q - Oui. «José-Manuel Barroso est le carburant du Front national» a-t-il dit, vous l'avez entendu et lu.
R - Je pense que les raisons pour lesquelles certaines personnes peuvent voter Front national, sont au-delà simplement de ce que décide la Commission européenne, c'est plus vaste.
Q - Donc, a-t-il eu tort de dire cela ?
R - Disons que je n'aurais pas formulé ainsi, probablement, mais on ne va pas faire une polémique là-dessus.
Q - Non, mais que les choses soient claires, il n'aurait pas dû ?
R - Je pense que ce n'est pas une bonne chose...
Q - Quand on est membre d'un gouvernement qui a contribué au choix de M. Barroso...
R - Oui, mais enfin c'est autre chose.
Q - Même si les députés socialistes européens ont toujours voté contre M. Barroso, mais enfin bon !
R - Non, mais allons au fond du débat...
Q - Aujourd'hui c'est quand même curieux. Aller au fond du débat...
R - On ne va pas pinailler sur une expression.
Q - Oui, mais c'est curieux, mettez-vous à la place de l'opinion, c'est ce que l'opinion ne comprend pas, Laurent Fabius. Qu'un ministre critique Bruxelles, ce même ministre nous dit «c'est Bruxelles qui est le carburant du Front national», moi je ne comprends plus.
R - Il y a plusieurs choses. D'abord, l'orientation de la Commission - pas simplement M. Barroso - peut être critiquée. Effectivement, quand on voit aujourd'hui où en est l'Europe, avec plus de vingt millions de chômeurs, cela veut dire qu'il faudrait à la fois relancer l'Europe, mais aussi la réorienter ; c'est ce que nous proposons. Donc, là-dessus, il y a une contestation légitime, vis-à-vis de l'orientation de la Commission, c'est le premier point.
Deuxième point, dire que c'est à cause de ce que décide M. Barroso que les gens votent Front national, c'est quand même faire un raccourci assez frappant. Donc moi je pense que les raisons sont beaucoup plus profondes, et je ne l'aurais pas formulé ainsi.
Q - Oui, M. Barroso est un libéral, tout le monde le sait.
R - Ultra libéral. Il devait être trotskiste, quand il était jeune. Tout le monde peut évoluer et c'est un homme intelligent par ailleurs, qui parle très bien, beaucoup de langues, mais l'orientation générale on peut la contester.
Q - Mais au nom de qui parle-t-il ? Il n'a aucune légitimité démocratique.
R - Si...
Q - Il n'a jamais été élu.
R - Il n'a pas été élu, mais il y a eu une désignation de la Commission. Le système va d'ailleurs changer...
Q - Oui, je sais, en 2014.
R - La prochaine fois, il faudra que la Commission et son président soient, en quelque sorte, avalisés par le Parlement européen, et le Parlement européen sera élu par nous tous. Donc, d'une certaine manière - et je crois que c'est une bonne chose - la Commission aura une orientation qui sera déterminée par le vote des électeurs.
(...)
Q - Manque d'Europe fiscale, manque d'Europe sociale, manque d'Europe politique...
R - Environnementale.
Q - Environnementale, etc., etc.
R - Manque de croissance, manque de croissance surtout.
Q - Oui, manque de croissance, d'ailleurs on se demande où est la promesse de François Hollande en matière de croissance, au niveau européen.
R - Il y a eu 120 milliards d'euros, vous savez, qui ont été décidés au mois de juin 2012, mais l'une des raisons de la réunion de demain, c'est de préciser où sont passés les 120 milliards. Ils ont été décidés et la France va dire qu'il faut que ces sommes soient vraiment débloquées.
Q - Vous allez demander le déblocage de ces 120 milliards demain ?
R - Bien sûr, et pas seulement, il y a aussi un plan de 6 milliards d'euros pour les jeunes. C'est une proposition franco-allemande ; je pense qu'elle est bonne mais il faut l'appliquer. Il ne faut pas simplement le décider, il faut le faire appliquer.
Q - Donc vous demandez le déblocage des 120 milliards ?
R - Exact.
Q - La Turquie, l'Union européenne rouvrira en octobre, et seulement en octobre, les négociations sur l'adhésion future, éventuelle, de la Turquie à l'Union. Pourquoi en octobre ? Parce qu'il y a eu les événements que l'on sait, l'Allemagne a demandé un délai, de 4 mois. Est-ce que vous êtes favorable à une adhésion de la Turquie à l'Union européenne ?
R - La description que vous faites est tout à fait juste, il y avait la proposition de l'ouverture d'un chapitre, qui est le chapitre 22 pour être précis. Et puis, l'Allemagne a indiqué qu'elle ne souhaitait pas le faire maintenant. Donc ce sera fait en octobre ou un petit peu plus tard. Cela ne préjuge pas de l'adhésion ou non-adhésion ultérieurement. Mais le fait que l'on ouvre un chapitre sur les trente qui sont à discuter, je pense que c'est légitime.
Q - Vous êtes favorable à l'adhésion ?
R - Je pense qu'elle n'est pas pour tout de suite, parce que cela poserait de gros problèmes...
Q - Aujourd'hui, impossible ?
R - Ah non, aujourd'hui, ni du côté turc, ni du côté européen.
Q - Oui, et compte tenu du pouvoir exercé par M. Erdogan, impossible ?
R - Ça, c'est autre chose, de toutes les manières, c'est un horizon très vaste.
Q - Oui, c'est-à-dire, pas avant dix, douze ans ?
R - Oui, c'est de cet ordre de grandeur. Sur ce qui s'est passé en Turquie, ce qui me frappe, si vous voulez, c'est que cela a commencé avec un petit incident, une histoire d'urbanisme, et puis cela a pris des proportions considérables, un peu de la même manière qu'au Brésil d'ailleurs, dans d'autres conditions.
Q - Exactement, ou qu'en Tunisie...
R - C'est autre chose, parce que la Tunisie était en difficulté économique, tandis que la Turquie est un pays, au contraire, qui progresse. Ce qui veut dire qu'il n'y a pas simplement la réalité économique, il y a aussi la distribution des richesses et la manière d'exercer le pouvoir.
Beaucoup de gens ont reproché un certain autoritarisme à M. Erdogan. Ce que nous avons fait, c'est de dire que nous n'allons pas nous ingérer dans ce qui se passe en Turquie, mais nous demandons qu'on revienne au dialogue. Car, que ce soit en Turquie ou ailleurs, les problèmes ne peuvent pas se régler autrement que par le dialogue et la démocratie.
Q - La Syrie, l'Europe, là encore, divisée, mais pas que l'Europe, le monde divisé autour de la Syrie, le G8 n'a même pas réclamé le départ d'Assad, même pas !
R - Je ne suis pas aussi négatif que vous. Le G8 a dit : il faut que la conférence de Genève 2 ait lieu.
Q - Oui, elle aura lieu quand cette conférence ?
R - On espérait en juillet. Je ne suis pas sûr que ce soit possible. Il y a eu hier une réunion à la fois des Russes, des Américains à laquelle a participé l'envoyé spécial conjoint des Nations unies et de la Ligue arabe, M. Lakhdar Brahimi, pour essayer d'avancer...
Q - Qui ont dit non...
R - C'est difficile...
Q - Ça ne sera pas en juillet, Laurent Fabius...
R - Oui, c'est très difficile. Mais je reviens au G8. Le G8 a dit une chose importante : «nous voulons que cette conférence de Genève ait lieu». Or, quel est l'objet de la conférence de Genève ? Il faut être très précis, l'objet de la conférence de Genève est de dire : «il faut que de part et d'autre, c'est-à-dire du côté du régime et du côté des résistants, l'on se mette d'accord pour qu'il y ait un gouvernement de transition qui ait tous les pouvoirs exécutifs». Ce qui veut dire nécessairement que tout le monde est d'accord pour qu'à Genève, on décide d'un gouvernement qui se voit transférer tous les pouvoirs de M. Bachar Al-Assad. Donc M. Bachar Al-Assad serait sans pouvoirs et, à terme, il s'en irait. Je pense qu'il s'agit là d'une avancée. Une autre avancée, on s'est mis d'accord au G8 pour dire: «il faut que la Syrie accepte les missions de l'ONU pour contrôler s'il y a des armes chimiques ou pas». En revanche, le côté négatif, c'est qu'à peine le G8 terminé, M. Poutine a dit : «si on me demande des armes, je les livre».
Q - Et nous, on va livrer ?
R - On peut livrer des armes dites non létales. On en a fait d'ailleurs à certains. Les armes létales, c'est-à-dire les armes susceptibles de créer la mort, nous ne l'avons pas décidé. Et nous ne pourrons le faire que si, premièrement, l'opposition s'unit et, deuxièmement, s'il y a une traçabilité de ces armes. Il ne s'agit pas de livrer des armes pour que cela se retourne ensuite contre nous.
Q - Est-ce que l'embargo sera levé le 1er août ?
R - Il est déjà levé. Il est dit qu'à partir du 1er août...
Q - On ira plus loin...
R - On peut aller plus loin. Nous n'avons pas encore pris de décision. Nous en discutons, à la fois avec nos partenaires, et en interne, avec le président de la République.
Q - Et une aide militaire pour former les rebelles en Jordanie ?
R - Elle est déjà possible...
Q - Vous allez le faire ?
R - C'est ce qu'on appelle une assistance technique, elle est déjà possible...
Q - Les Américains le font...
R - Oui, mais ils le font comme ils disent dans leur langage «en cover», c'est-à-dire de manière discrète, bon...
Q - Oui, discrète, et nous, est-ce qu'on le fait ?
R - Pour le moment, nous ne le faisons pas, mais il n'est pas impossible que nous le fassions. Nous ne l'avons pas encore décidé.
Q - Oui, vous y êtes favorable, vous ?
R - Je suis favorable à ce qu'on rétablisse un équilibre entre les deux. Je vous rappelle que M. Bachar Al-Assad a des avions - il en a 550 - il est soutenu par l'Iran et le Hezbollah, il bombarde les résistants, qui sont dans une situation épouvantable. J'ai reçu hier le maire d'Alep, qui me décrivait ce qui se passe. Les résistants ne peuvent pas faire face. Et donc l'embargo, finalement, se retourne contre les résistants, puisque les autres reçoivent des armes, et eux n'en ont pas. Il faut donc, si on veut aller à la solution politique qu'un certain équilibre entre les deux parties soit rétabli.
Q - Donc vous allez rééquilibrer les choses, si je comprends bien.
R - Nous sommes onze pays qui aidons les résistants. Un certain nombre de pays arabes le font, et nous, nous y réfléchissons.
Q - Oui, vous réfléchissez dans la direction de l'aide. Bon, on va terminer avec le Mali : élection présidentielle le 28 juillet...
R - C'est une bonne nouvelle...
Q - La France va verser 280 millions d'euros, c'est cela, au Mali ?
R - Nous versons, à travers les fonds européens, un certain nombre d'aides civiles. En tout cas, il y a une très bonne nouvelle, les élections. Il y a six mois, en janvier, le Mali était sur le point d'être absorbé par les groupes terroristes. Je me rappelle le coup de téléphone du président malien disant au président Hollande : «si vous n'intervenez pas, demain, je suis mort». Aujourd'hui, premièrement, le drapeau malien flotte partout ; deuxièmement, la sécurité est dans l'ensemble assurée ; troisièmement, dans un mois, il y a des élections ; quatrièmement, les Nations unies ont pris le relais des forces africaines et françaises...
Q - C'est-à-dire que les forces françaises vont quitter le Mali...
R - Oui, progressivement, elles vont le faire...
Q - Progressivement, dans le calendrier prévu ?
R - Oui, bien sûr...
Q - Accéléré ou pas, non ?
R - Non, pas accéléré... Elles diminuent leur présence, mais elles sont là pour éviter des coups durs. Si on nous avait dit, il y a six mois, que l'on arriverait à faire cela, j'aurais signé tout de suite. C'est un grand succès et il faut en féliciter les militaires qui ont fait un travail magnifique, ainsi que les diplomates qui ont fait aussi un beau travail.
Q - Dernière question, vous avez des nouvelles encourageantes de nos otages enlevés au Niger ?
R - On a des éléments, mais vous savez que là-dessus, je suis très discret. Mais on y travaille beaucoup. On est en train d'identifier un certain nombre de choses, d'authentifier un certain nombre de choses. Tout indique qu'ils sont vivants, mais il y a beaucoup de travail à faire.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 juin 2013
R - Non, les informations, c'est qu'il est malheureusement au seuil de la mort. C'est un formidable bonhomme que j'ai eu la chance de connaître. Quand j'étais Premier ministre, nous avons pris la tête du combat contre l'apartheid. À l'époque, nous avons demandé et obtenu un embargo sur le charbon qui venait d'Afrique du Sud, et c'est ce qui a contribué, Mandela me l'a dit, à détacher la bourgeoisie blanche, qui dirigeait les choses, de l'apartheid. À ce moment-là, les blancs ont compris que s'ils continuaient à soutenir l'apartheid, il n'y avait plus de perspective économique. Mais c'est surtout un homme absolument magnifique parce qu'il a lutté, pendant toute la première partie de sa vie, d'une façon extrêmement dure, mais pendant la lutte il pensait déjà à la réconciliation, et c'est cela qui est extraordinaire.
Q - Il pensait à la réconciliation déjà.
R - Ah oui ! Je me rappelle plusieurs conversations que l'on a eues, alors que l'apartheid existait encore. Il disait : «je dois mener une lutte très dure parce qu'il faut mener une lutte pour casser ce système». On a oublié maintenant, mais l'apartheid, cela voulait dire que les noirs ne pouvaient pas monter dans les autobus où montaient les blancs, ils ne pouvaient pas aller dans les toilettes où étaient les blancs ; c'était vraiment un système monstrueux. Il a lutté toute sa vie, mais il savait que devrait venir un moment de réconciliation. Et en plus c'est un seigneur, je veux dire même physiquement, un homme admirable.
Q - Vous avez une anecdote, vous vous souvenez d'une anecdote, d'un moment précis qui vous a marqué ?
R - Aujourd'hui tout le monde l'encense, mais la première fois qu'il est venu à Paris, c'était à l'époque de François Mitterrand, qui l'a reçu à l'Élysée. Il nous a raconté sa lutte en prison... Enfin, ce que j'ai retenu de cette conversation, c'est que c'était un dur, vraiment un dur, mais cette dureté c'était pour renverser le système, mais il savait - c'est cela qui était extraordinaire - qu'un jour il serait le Père de la nation.
Q - François Hollande a prévu d'aller à ses obsèques ?
R - Écoutez, on n'en n'est pas là, on ne va pas anticiper...
Q - Non, non, on n'en n'est pas là, mais enfin bon !
R - Je pense que tous les présidents du monde évidemment vont rendre hommage à Nelson Mandela.
Q - Demain, Conseil européen à Bruxelles, Laurent Fabius, les 27 chefs d'État et de gouvernement seront donc réunis, à Bruxelles, est-il vrai que la France va demander à la Commission européenne une modification de sa recommandation sur la prochaine réforme des retraites ?
R - C'est assez compliqué. Il y a maintenant un système où le Conseil européen doit donner des recommandations, et le Conseil européen se prononce sur la base de propositions de la Commission. Le texte de la Commission entre beaucoup dans les détails et je pense que ce qui sera adopté, c'est une recommandation plus générale. Je ne pense donc pas qu'il y aura de bagarre.
Q - Vous demandez quand même à la Commission de revenir sur sa recommandation.
R - Non, l'idée c'est l'orientation générale, elle est tout à fait légitime, c'est-à-dire sérieux budgétaire et croissance. Il faut que la France s'applique le sérieux budgétaire, mais ce n'est pas à la Commission d'entrer dans tous les détails, sinon le Parlement français ne servirait à rien. Je ne prévois pas de grande difficulté là-dessus.
Q - Vous pensez qu'il y aura accord là-dessus ?
R - Oui.
Q - Il y avait une phrase qui choquait, une phrase qui proposait l'augmentation de l'âge légal de départ à la retraite, dans les recommandations de la Commission.
R - C'est un exemple de ce que la Commission peut faire ou ne peut pas faire. Que la Commission dise à la France «il faut que vous équilibriez votre régime de retraite», c'est tout à fait légitime, c'est d'ailleurs ce que l'on est en train de faire, puisqu'il va y avoir une réforme des retraites. Mais c'est à chaque pays de décider souverainement quelle est la meilleure façon d'y parvenir.
Q - Oui, ce n'est pas à Bruxelles de définir les modalités de la réforme des retraites en France.
R - D'entrer dans tous les détails, non, bien sûr.
Q - Non, ce n'est pas à Bruxelles de nous dicter sa loi. Je vous le dis parce qu'on entend beaucoup cela.
R - Sous quelle forme ?
Q - Beaucoup de formes. Lorsque les critiques s'adressent à M. Barroso, venant... eh bien oui, venant de votre gouvernement, enfin de membres de votre gouvernement.
R - Oui, bien sûr.
Q - Et je lis même, ce matin, M. Bartolone dit dans Le Parisien, je crois, «M. Barroso est un homme dépassé». C'est un homme dépassé ?
R - Oui, j'ai entendu aussi cela dans la bouche de M. Juppé, etc.
Q - Oui, «archaïque», M. Juppé.
R - Mon point de vue - et je traite tout cela, c'est normal, comme ministre des affaires étrangères - c'est ce qui permet le débat avec la Commission, oui, mais tout ce qui est pugilat, non. C'est-à-dire qu'il faut éviter de personnaliser, parce que M. Barroso a certainement ses défauts, comme chacun, mais il est président de la Commission et il ne s'agit pas de M. Barroso en tant que tel.
Que l'on ait un débat, oui. Moi-même je m'interroge ; qu'est ce que cela veut dire concrètement ? L'Europe, on en a besoin, mais il faut que ce soit une Europe réorientée, parce que si c'est une Europe qui conduit à plus de chômage, cela ne va pas.
En revanche, pas d'attaques personnelles, dans un sens ou dans un autre, parce que M. Barroso, il y a une dizaine de jours avait eu des phrases, à l'égard de la France, qui n'étaient pas acceptables, même s'il avait dit que ce n'était pas la France qui était visée. Donc, je pense qu'il faut - je ne dis pas seulement cela parce que je suis diplomate - avoir un débat, tout à fait normal, mais tout ce qui est considéré comme des attaques personnelles, non.
Q - Alors, est-ce qu'Arnaud Montebourg a eu tort ?
R - Disons que la formulation peut être discutée, voilà, c'est une jolie formule.
Q - ... ça c'est diplomatique. Il a eu tort ?
R - Non, je crois qu'il se situait par rapport au Front national.
Q - Oui. «José-Manuel Barroso est le carburant du Front national» a-t-il dit, vous l'avez entendu et lu.
R - Je pense que les raisons pour lesquelles certaines personnes peuvent voter Front national, sont au-delà simplement de ce que décide la Commission européenne, c'est plus vaste.
Q - Donc, a-t-il eu tort de dire cela ?
R - Disons que je n'aurais pas formulé ainsi, probablement, mais on ne va pas faire une polémique là-dessus.
Q - Non, mais que les choses soient claires, il n'aurait pas dû ?
R - Je pense que ce n'est pas une bonne chose...
Q - Quand on est membre d'un gouvernement qui a contribué au choix de M. Barroso...
R - Oui, mais enfin c'est autre chose.
Q - Même si les députés socialistes européens ont toujours voté contre M. Barroso, mais enfin bon !
R - Non, mais allons au fond du débat...
Q - Aujourd'hui c'est quand même curieux. Aller au fond du débat...
R - On ne va pas pinailler sur une expression.
Q - Oui, mais c'est curieux, mettez-vous à la place de l'opinion, c'est ce que l'opinion ne comprend pas, Laurent Fabius. Qu'un ministre critique Bruxelles, ce même ministre nous dit «c'est Bruxelles qui est le carburant du Front national», moi je ne comprends plus.
R - Il y a plusieurs choses. D'abord, l'orientation de la Commission - pas simplement M. Barroso - peut être critiquée. Effectivement, quand on voit aujourd'hui où en est l'Europe, avec plus de vingt millions de chômeurs, cela veut dire qu'il faudrait à la fois relancer l'Europe, mais aussi la réorienter ; c'est ce que nous proposons. Donc, là-dessus, il y a une contestation légitime, vis-à-vis de l'orientation de la Commission, c'est le premier point.
Deuxième point, dire que c'est à cause de ce que décide M. Barroso que les gens votent Front national, c'est quand même faire un raccourci assez frappant. Donc moi je pense que les raisons sont beaucoup plus profondes, et je ne l'aurais pas formulé ainsi.
Q - Oui, M. Barroso est un libéral, tout le monde le sait.
R - Ultra libéral. Il devait être trotskiste, quand il était jeune. Tout le monde peut évoluer et c'est un homme intelligent par ailleurs, qui parle très bien, beaucoup de langues, mais l'orientation générale on peut la contester.
Q - Mais au nom de qui parle-t-il ? Il n'a aucune légitimité démocratique.
R - Si...
Q - Il n'a jamais été élu.
R - Il n'a pas été élu, mais il y a eu une désignation de la Commission. Le système va d'ailleurs changer...
Q - Oui, je sais, en 2014.
R - La prochaine fois, il faudra que la Commission et son président soient, en quelque sorte, avalisés par le Parlement européen, et le Parlement européen sera élu par nous tous. Donc, d'une certaine manière - et je crois que c'est une bonne chose - la Commission aura une orientation qui sera déterminée par le vote des électeurs.
(...)
Q - Manque d'Europe fiscale, manque d'Europe sociale, manque d'Europe politique...
R - Environnementale.
Q - Environnementale, etc., etc.
R - Manque de croissance, manque de croissance surtout.
Q - Oui, manque de croissance, d'ailleurs on se demande où est la promesse de François Hollande en matière de croissance, au niveau européen.
R - Il y a eu 120 milliards d'euros, vous savez, qui ont été décidés au mois de juin 2012, mais l'une des raisons de la réunion de demain, c'est de préciser où sont passés les 120 milliards. Ils ont été décidés et la France va dire qu'il faut que ces sommes soient vraiment débloquées.
Q - Vous allez demander le déblocage de ces 120 milliards demain ?
R - Bien sûr, et pas seulement, il y a aussi un plan de 6 milliards d'euros pour les jeunes. C'est une proposition franco-allemande ; je pense qu'elle est bonne mais il faut l'appliquer. Il ne faut pas simplement le décider, il faut le faire appliquer.
Q - Donc vous demandez le déblocage des 120 milliards ?
R - Exact.
Q - La Turquie, l'Union européenne rouvrira en octobre, et seulement en octobre, les négociations sur l'adhésion future, éventuelle, de la Turquie à l'Union. Pourquoi en octobre ? Parce qu'il y a eu les événements que l'on sait, l'Allemagne a demandé un délai, de 4 mois. Est-ce que vous êtes favorable à une adhésion de la Turquie à l'Union européenne ?
R - La description que vous faites est tout à fait juste, il y avait la proposition de l'ouverture d'un chapitre, qui est le chapitre 22 pour être précis. Et puis, l'Allemagne a indiqué qu'elle ne souhaitait pas le faire maintenant. Donc ce sera fait en octobre ou un petit peu plus tard. Cela ne préjuge pas de l'adhésion ou non-adhésion ultérieurement. Mais le fait que l'on ouvre un chapitre sur les trente qui sont à discuter, je pense que c'est légitime.
Q - Vous êtes favorable à l'adhésion ?
R - Je pense qu'elle n'est pas pour tout de suite, parce que cela poserait de gros problèmes...
Q - Aujourd'hui, impossible ?
R - Ah non, aujourd'hui, ni du côté turc, ni du côté européen.
Q - Oui, et compte tenu du pouvoir exercé par M. Erdogan, impossible ?
R - Ça, c'est autre chose, de toutes les manières, c'est un horizon très vaste.
Q - Oui, c'est-à-dire, pas avant dix, douze ans ?
R - Oui, c'est de cet ordre de grandeur. Sur ce qui s'est passé en Turquie, ce qui me frappe, si vous voulez, c'est que cela a commencé avec un petit incident, une histoire d'urbanisme, et puis cela a pris des proportions considérables, un peu de la même manière qu'au Brésil d'ailleurs, dans d'autres conditions.
Q - Exactement, ou qu'en Tunisie...
R - C'est autre chose, parce que la Tunisie était en difficulté économique, tandis que la Turquie est un pays, au contraire, qui progresse. Ce qui veut dire qu'il n'y a pas simplement la réalité économique, il y a aussi la distribution des richesses et la manière d'exercer le pouvoir.
Beaucoup de gens ont reproché un certain autoritarisme à M. Erdogan. Ce que nous avons fait, c'est de dire que nous n'allons pas nous ingérer dans ce qui se passe en Turquie, mais nous demandons qu'on revienne au dialogue. Car, que ce soit en Turquie ou ailleurs, les problèmes ne peuvent pas se régler autrement que par le dialogue et la démocratie.
Q - La Syrie, l'Europe, là encore, divisée, mais pas que l'Europe, le monde divisé autour de la Syrie, le G8 n'a même pas réclamé le départ d'Assad, même pas !
R - Je ne suis pas aussi négatif que vous. Le G8 a dit : il faut que la conférence de Genève 2 ait lieu.
Q - Oui, elle aura lieu quand cette conférence ?
R - On espérait en juillet. Je ne suis pas sûr que ce soit possible. Il y a eu hier une réunion à la fois des Russes, des Américains à laquelle a participé l'envoyé spécial conjoint des Nations unies et de la Ligue arabe, M. Lakhdar Brahimi, pour essayer d'avancer...
Q - Qui ont dit non...
R - C'est difficile...
Q - Ça ne sera pas en juillet, Laurent Fabius...
R - Oui, c'est très difficile. Mais je reviens au G8. Le G8 a dit une chose importante : «nous voulons que cette conférence de Genève ait lieu». Or, quel est l'objet de la conférence de Genève ? Il faut être très précis, l'objet de la conférence de Genève est de dire : «il faut que de part et d'autre, c'est-à-dire du côté du régime et du côté des résistants, l'on se mette d'accord pour qu'il y ait un gouvernement de transition qui ait tous les pouvoirs exécutifs». Ce qui veut dire nécessairement que tout le monde est d'accord pour qu'à Genève, on décide d'un gouvernement qui se voit transférer tous les pouvoirs de M. Bachar Al-Assad. Donc M. Bachar Al-Assad serait sans pouvoirs et, à terme, il s'en irait. Je pense qu'il s'agit là d'une avancée. Une autre avancée, on s'est mis d'accord au G8 pour dire: «il faut que la Syrie accepte les missions de l'ONU pour contrôler s'il y a des armes chimiques ou pas». En revanche, le côté négatif, c'est qu'à peine le G8 terminé, M. Poutine a dit : «si on me demande des armes, je les livre».
Q - Et nous, on va livrer ?
R - On peut livrer des armes dites non létales. On en a fait d'ailleurs à certains. Les armes létales, c'est-à-dire les armes susceptibles de créer la mort, nous ne l'avons pas décidé. Et nous ne pourrons le faire que si, premièrement, l'opposition s'unit et, deuxièmement, s'il y a une traçabilité de ces armes. Il ne s'agit pas de livrer des armes pour que cela se retourne ensuite contre nous.
Q - Est-ce que l'embargo sera levé le 1er août ?
R - Il est déjà levé. Il est dit qu'à partir du 1er août...
Q - On ira plus loin...
R - On peut aller plus loin. Nous n'avons pas encore pris de décision. Nous en discutons, à la fois avec nos partenaires, et en interne, avec le président de la République.
Q - Et une aide militaire pour former les rebelles en Jordanie ?
R - Elle est déjà possible...
Q - Vous allez le faire ?
R - C'est ce qu'on appelle une assistance technique, elle est déjà possible...
Q - Les Américains le font...
R - Oui, mais ils le font comme ils disent dans leur langage «en cover», c'est-à-dire de manière discrète, bon...
Q - Oui, discrète, et nous, est-ce qu'on le fait ?
R - Pour le moment, nous ne le faisons pas, mais il n'est pas impossible que nous le fassions. Nous ne l'avons pas encore décidé.
Q - Oui, vous y êtes favorable, vous ?
R - Je suis favorable à ce qu'on rétablisse un équilibre entre les deux. Je vous rappelle que M. Bachar Al-Assad a des avions - il en a 550 - il est soutenu par l'Iran et le Hezbollah, il bombarde les résistants, qui sont dans une situation épouvantable. J'ai reçu hier le maire d'Alep, qui me décrivait ce qui se passe. Les résistants ne peuvent pas faire face. Et donc l'embargo, finalement, se retourne contre les résistants, puisque les autres reçoivent des armes, et eux n'en ont pas. Il faut donc, si on veut aller à la solution politique qu'un certain équilibre entre les deux parties soit rétabli.
Q - Donc vous allez rééquilibrer les choses, si je comprends bien.
R - Nous sommes onze pays qui aidons les résistants. Un certain nombre de pays arabes le font, et nous, nous y réfléchissons.
Q - Oui, vous réfléchissez dans la direction de l'aide. Bon, on va terminer avec le Mali : élection présidentielle le 28 juillet...
R - C'est une bonne nouvelle...
Q - La France va verser 280 millions d'euros, c'est cela, au Mali ?
R - Nous versons, à travers les fonds européens, un certain nombre d'aides civiles. En tout cas, il y a une très bonne nouvelle, les élections. Il y a six mois, en janvier, le Mali était sur le point d'être absorbé par les groupes terroristes. Je me rappelle le coup de téléphone du président malien disant au président Hollande : «si vous n'intervenez pas, demain, je suis mort». Aujourd'hui, premièrement, le drapeau malien flotte partout ; deuxièmement, la sécurité est dans l'ensemble assurée ; troisièmement, dans un mois, il y a des élections ; quatrièmement, les Nations unies ont pris le relais des forces africaines et françaises...
Q - C'est-à-dire que les forces françaises vont quitter le Mali...
R - Oui, progressivement, elles vont le faire...
Q - Progressivement, dans le calendrier prévu ?
R - Oui, bien sûr...
Q - Accéléré ou pas, non ?
R - Non, pas accéléré... Elles diminuent leur présence, mais elles sont là pour éviter des coups durs. Si on nous avait dit, il y a six mois, que l'on arriverait à faire cela, j'aurais signé tout de suite. C'est un grand succès et il faut en féliciter les militaires qui ont fait un travail magnifique, ainsi que les diplomates qui ont fait aussi un beau travail.
Q - Dernière question, vous avez des nouvelles encourageantes de nos otages enlevés au Niger ?
R - On a des éléments, mais vous savez que là-dessus, je suis très discret. Mais on y travaille beaucoup. On est en train d'identifier un certain nombre de choses, d'authentifier un certain nombre de choses. Tout indique qu'ils sont vivants, mais il y a beaucoup de travail à faire.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 juin 2013