Point de presse de M. Thierry Repentin, ministre des affaires européennes, sur les avancées en matière de construction européenne, les relations euro-américaines et sur l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne, à Strasbourg le 1er juillet 2013.

Prononcé le 1er juillet 2013

Intervenant(s) : 

Circonstance : Déplacement à Strasbourg (Bas-Rhin) pour la plénière au Parlement européen, le 1er juillet 2013

Texte intégral

Q - Peut-on commencer par vous demander un bilan de ce qui s'est passé la semaine dernière, notamment du sommet et des accords trouvés juste avant, sur ces dossiers clés qui ont aboutis au dernier moment et de façon assez positive et aussi sur le chômage des jeunes qui vous tient à coeur ?
R - La semaine passée a été chargée, y compris juste avant le sommet. Au CAG, deux jours avant, nous avons dialogué avec la présidence irlandaise pour savoir si nous lui donnions un mandat supplémentaire pour négocier avec le Parlement sur le CFP 2014-2020, car la présidence irlandaise pensait qu'elle était arrivée au terme du mandat que lui avait confié le Conseil. La France a plaidé pour que le Parlement soit entendu dans ses demandes, que ce soit celles visant à plus de souplesse, celles sur le FEAD ou encore celles portant sur une clause de révision obligatoire en 2016. Ces demandes semblaient légitimes au regard des enjeux. Et s'il n'y avait pas eu d'accord, accord qui n'est d'ailleurs pas encore définitif aujourd'hui, nous nous serions privé d'outils importants pour les politiques publiques, tel que les dispositifs de lutte contre le chômage des jeunes : ces 6 milliards d'euros que nous souhaitons concentrer dans les années 2014-2015. Cet accord, c'est aussi le FEAD - dont je rappelle que le gouvernement précédent avait acté la disparition au 31 décembre prochain et que nous avons finalement sauvé - et c'est aussi l'élargissement du dispositif Erasmus : nous passons de 8 à 13 milliards et nous l'élargissons à des jeunes qui n'étaient pas éligibles jusqu'à aujourd'hui - je pense aux apprentis, aux jeunes en formation dans les entreprises. C'est aussi la certitude de pouvoir accompagner les pays qui ont fait de l'emploi des jeunes leur priorité, notamment la France, qui pourra, du coup, mieux répondre à la demande de la Commission de mettre en place la garantie jeunesse c'est-à-dire une offre d'emploi, une offre de stage , une offre de formation professionnelle, une offre d'apprentissage dès cette année 2013 et qui se traduira en France par l'expérimentation sur dix départements dès le mois de septembre, et qui sera élargie aux autres départements en 2014. Cela a été un travail de fond, dans l'urgence et dans la responsabilité entre le Parlement, le Conseil et la Commission, juste avant et pendant le Conseil européen.
Le Conseil européen acte des points positifs pour la France, points que François Hollande demandait d'ailleurs inlassablement, avec une fermeté tranquille, depuis un an. Il s'agit de mobiliser toutes les disponibilités budgétaires sur les priorités emploi et relance économique. L'emploi, j'en ai parlé, ce sont les dispositions sur les jeunes. L'activité économique, c'est aussi ne pas sacrifier les ressources pour les travaux sur le mécanisme d'interconnexion européen, c'est-à-dire les grandes infrastructures de transport ferroviaire, routière, de l'énergie. C'est aussi l'augmentation des crédits sur la recherche et développement, c'est très important car il y a une forte croissance : 38 % de ce budget. Et puis, c'est cette demande de François Hollande qui a enfin été entendue, de s'assurer que le pacte de relance pour l'emploi de juin 2012 se traduise dans des faits, dans les territoires, en accompagnement des efforts des collectivités et des entreprises. Nous avons pu acter le fait qu'il y a 7 milliards d'euros cette année pour la France, 7 milliards l'an prochain et 7 milliards l'année d'après. Et pour être sûrs que cet argent sera utilisé, nous aurons une réunion à l'Élysée avec l'ensemble des préfets de région, cette semaine même, pour qu'ils se mobilisent pour aller chercher ces financements qui sont aujourd'hui disponibles.
Q - Tout cela dans un contexte de tension entre la France et la Commission européenne, au-delà des problèmes de personnes, est-ce que les choses se sont calmées et ce que cela a permis de rapprocher les points de vues ?
R - En période de crise économique, quand les gens souffrent, quand les entreprises cherchent des contrats, quand ils cherchent des disponibilités financières et budgétaires, il faut aller à l'essentiel, je l'ai dit à mes collègues, je l'ai également dit aux représentants de la Commission : revenez à l'essentiel, revenez sur le fond des dossiers. C'est aussi la position de François Hollande. Ce que vous évoquez a été géré en quelques minutes au G8. Il faut savoir tourner la page.
Q - En parlant des divergences et des désaccords, je voulais revenir sur l'alliance franco-allemande ; une nouvelle fois l'Allemagne s'est positionnée différemment par rapport à la supervision bancaire. Elle a dit que par rapport aux traités actuels, la Commission ne devrait pas avoir ce rôle de supervision. Vous pensez que nous allons aboutir à cette union bancaire si des désaccords comme ceux-là persistent ?
R - Plus nous sommes intégrés, la France et l'Allemagne, plus les sujets sur lesquels il reste à trouver des solutions apparaissent au grand jour. Et apparaissent les sujets que nous n'avions pas encore complètement traités. Mais qui aurait dit, il y a six mois, que François Hollande et Angela Merkel allaient signer un papier ensemble - c'était le 30 mai - dans lequel la France et l'Allemagne s'accorderaient sur des indicateurs sociaux pour la conduite des politiques économiques et mettraient sur la table la question du salaire minimum dans chacun des États de l'union européenne ? et que la France et l'Allemagne seraient d'accord pour considérer qu'il faudrait un président de l'eurogroupe qui soit plus fort, et pour reconnaître les partenaires sociaux comme partenaires à part entière des politiques économiques dans l'Union européenne ? Là, il y a eu des grandes avancées.
Qu'il reste encore des solutions techniques à trouver pour la recapitalisation directe des banques par le MES, qu'il reste encore à déterminer les pouvoirs précis de la BCE pour la supervision, ce sont des mois de travail qui sont devant nous. Mais ce que je note, c'est que les principes sont actés sur la supervision. D'ici quelques mois, avant la fin de l'année, il a été demandé d'adopter un certain nombre de directives. Bref, le but est fixé. Sur ces sujets importants, la France et l'Allemagne avancent beaucoup, et c'est un couple qui produit beaucoup d'idées. J'en veux pour preuve ce texte du 30 mai qui a beaucoup interpellé d'autres ministres européens, qui m'ont dès le lendemain appelé pour avoir des explications.
Q - Donc on ne se dirige pas vers un changement de traités. François Hollande a parlé de changement de traité avec modification juridique mais non politique ?
R - Je ne dis pas que dans l'avenir, il n'y aura pas de changement de traité. Qui peut le dire aujourd'hui ? Nous estimons qu'aujourd'hui il y a encore beaucoup de marge inexploitées dans le TFUE qui nous permettent d'aller au-delà de ce que nous avons fait jusqu'à maintenant, sur la supervision bancaire, y compris sur la recapitalisation des banques ou sur la sécurisation des dépôts bancaires de épargnants en cas de crise bancaire.
Q - La France a demandé davantage d'intégration dans la zone euro. Quel est le rôle de la France ? Comment la France influence-t-elle la zone euro ?
R - La France, contrairement à ce qui a pu se dire lors de l'examen des recommandations pays, exprime ses vues dans le cadre général des règles agréées et mises en place par l'Union. Elle est même favorable à l'approfondissement de la coordination ex ante des politiques économiques. D'une manière générale, elle se considère à l'avant-garde pour la poursuite de l'approfondissement de l'Union économique et monétaire.
Être à l'avant-garde, cela signifie accepter plus d'intégration sur l'Union économique et monétaire dès lors qu'on avance aussi sur le pilier social et que dans la zone euro, il puisse y avoir débat sur les indicateurs qui doivent conduire les politiques économiques. Ces indicateurs doivent être construits avec tous les pays qui le souhaitent. Nous n'avons pas de solution «clé en main», mais nous invitons tous les pays à en discuter. Nous avons d'ailleurs donné un rendez-vous sur ce sujet en octobre prochain. Ce n'est pas une parole en l'air. C'est un calendrier. S'agissant des solutions, nous sommes par exemple favorables à ce que, dans la zone euro, il y ait des réunions des ministres chargés du travail, des affaires sociales, de la recherche, et plus généralement de ceux qui ont une légitimité à se prononcer sur le contenu des politiques de l'Union.
Q - Sur l'affaire Snowden, la France est très en colère. On aimerait avoir votre point de vue sur ce dossier. Est-ce qu'il faut aller jusqu'à ne pas négocier l'accord de libre échange ou est ce que cela permet d'imposer aux Américains des normes plus strictes y compris en matière de protection des données ?
R - Je note que sur le mandat de négociation, la France, avec fermeté, a tenu bon jusqu'au bout. Certains en doutaient. Le mandat de négociation donné à la Commission européenne est clair, et nous nous assurerons que la négociation se déroule en tenant strictement compte du mandat qui a été donné. C'est le premier point. Je voulais le rappeler.
Le deuxième point est que nous ne pouvons pas arrêter les négociations avec les États-Unis dans la mesure où elles n'ont pas encore débuté. Nous n'allons pas arrêter une négociation qui n'a pas commencé. Ceci étant, pour qu'une négociation se passe dans de bonnes conditions, il faut qu'elle se fasse dans la sérénité, dans la tranquillité. Comme le dit Barack Obama «free and fair». Ici, on n'est visiblement pas dans le «fair play» et nous ne pouvons pas négocier sereinement sans avoir la certitude que cela se fera en toute transparence. Il y a un message de fermeté qui a été adressé aux États-Unis. Laurent Fabius va avoir John Kerry au téléphone cet après-midi. Il y a une mise au point qui devra être faite. On ne traite pas des partenaires, des amis, en les espionnant.
Q - On peut quand même repousser l'ouverture des négociations. Les geler ?
R - Cette discussion doit être partagée. La France est dans un esprit de partenariat avec les autres États de l'Union européenne. Il se trouve qu'il y a des rendez-vous entre les États pour voir comment se mettent en place les négociations avec les États-Unis. On verra cela dans les jours qui viennent. Les États en parleront entre eux pour prendre une décision.
Q - Sur la négociation avec les États-Unis, qu'est-ce que l'Union européenne et la France ont à gagner ?
R - D'une façon générale, nous avons à gagner dans les relations commerciales avec les États-Unis, sur beaucoup de sujets dans lesquels les vrais enjeux ne sont pas les barrières douanières, mais dans l'évolution de certaines normes ou l'ouverture de marchés qui ne sont pas ouverts aujourd'hui aux sociétés européennes. Je pense aux services de l'assurance, d'un certain nombre de services aux collectivités locales ou aux marchés à l'intérieur des États fédérés américains, qui ne sont pas ouverts à la concurrence. Il faudra s'assurer que nous négocierions à tous les niveaux : fédéral et subfédéral. Nous avons à y gagner de part et d'autre de l'Atlantique mais nous devons bien faire comprendre à nos concitoyens que nous nous engageons dans une discussion sur le long terme avec nos partenaires américains. Nous avons tenu bon, à la surprise d'un certain nombre d'interlocuteurs, sur l'exception culturelle. C'est également le cas sur les marchés de la défense et sur ce qu'on appelle les choix de société. Ils ne feront pas partie intégrante des négociations : les OGM, les hormones de croissance et les décontaminations chimiques des viandes. Toutes ces choses qui sont autorisées sur le marché américain mais que nous refusons sur le marché européen.
Q - En quoi l'arrivée de la Croatie au sein de l'UE est une bonne chose ?
R - C'est une bonne chose pour plusieurs raisons. Premièrement, on oublie aujourd'hui ce qui a été la motivation essentielle des pères de l'Europe : d'établir la paix sur notre continent. La Croatie, il y a moins de vingt ans, était en guerre. Ce pays a estimé que, pour son développement économique, pour l'émancipation de son peuple, il était nécessaire qu'il se rapproche de l'Union européenne. Lorsqu'on n'est pas dans l'Union européenne, on a un appétit d'Europe, alors que nous nous interrogeons au sein de l'Europe. C'est un symbole très fort. J'étais à Zagreb le 30 juin pour les cérémonies d'adhésion, il y avait beaucoup d'émotion dans les rues, il y avait de la joie, de la fête. C'est une Europe qui fait rêver. Cela donne aussi un signe à d'autres pays car, au Conseil européen auquel vous avez fait référence, nous avons donné un feu vert au lancement des négociations avec la Serbie, à celui d'un accord d'association avec le Kosovo, en demandant très clairement que les négociations avec ces deux pays avancent en même temps. Ils se sont déchirés, lors d'une guerre fratricide, et c'est sous la bannière étoilée européenne que les deux chefs de gouvernement ont accepté de discuter. Ils ne l'ont fait que sous le drapeau européen. C'est aussi la stabilité des Balkans qui est en jeu. Les Balkans sont à la frontière de l'Union européenne et nous y avons un grand intérêt. Et ce sont aussi des marchés économiques qui vont se développer dans les années qui viennent. Bref, nous avons intérêt à raffermir nos relations avec ces pays. Bienvenue à la Croatie ce 1er juillet.
Q - Par rapport au regard des Croates, beaucoup de Croates ne se réjouissent pas de cette entrée. Qu'avez-vous à leur dire ?
R - Je dirais que leur gouvernement a fait beaucoup d'effort pour arriver aux standards européens pour intégrer l'Europe. Hier soir, dans les discours, il ne leur a pas été caché qu'il restait encore beaucoup d'efforts à faire, que la prospérité n'arriverait pas du seul fait que la Croatie entrait dans l'Union européenne. C'est un message largement partagé, chacun se rendant compte qu'il ne vivait plus dans un pays mais qu'ils intégraient un ensemble composé de 27 autres pays. Nous avons eu un aparté entre les représentants des gouvernements, et nous avons pu voir les chefs d'États de la Serbie, du Kosovo, de Bosnie Herzégovine parler ouvertement, avec un sourire sur le visage, alors qu'ils venaient d'une partie du monde qui s'est déchirée. Cela montre que l'Union européenne mérite d'être vécue pour cela. Nos amis croates espèrent un développement du tourisme, des fonds structurels. Ils recevront sans doute 1 milliard d'euros par an de fonds structurels pour les infrastructures. Ils vont émarger à Erasmus, ils vont aussi pour certains s'établir plus librement dans les 27 autres États de l'Union européenne. On doit d'ailleurs leur tendre les bras. Aux sceptiques, retrouvons nous dans un an et nous pourrons faire le point sur tout ce que l'Europe leur aura apporté.
Q - Les obligations d'État de la Croatie sont mal notées par les agences de notations. Est-ce que cela veut dire que la Croatie est un État qui financièrement n'est pas solide ?
R - La Croatie n'a pas fini de faire des efforts d'assainissement budgétaire, de lutte contre le chômage, de formation de sa population pour qu'elle soit un acteur économique de premier plan, prête à rentrer dans la concurrence. Mais je ne veux pas lui jeter la pierre. Si nous l'avons acceptée dans l'Union européenne, c'est après un long processus qui a pris plusieurs années pour qu'elle soit au niveau des standards de l'économie européenne et elle s'en rapproche. J'observe, par ailleurs, que, dans les recommandations-pays faites par la Commission à des États dans l'Union depuis des années, il y a aussi des efforts budgétaires qui sont demandés. Nous devons travailler tous ensemble. La Croatie fera sa part des choses. Je note qu'elle a eu une croissance économique soutenue, même si les deux dernières années n'ont pas été à la hauteur de leur espérance. C'est un pays qui s'est bien développé grâce au tourisme notamment mais pas exclusivement. Beaucoup d'entreprises françaises, depuis quelques mois, ont pénétré le marché croate plus facilement que lorsque la Croatie n'était pas dans la perspective de l'adhésion européenne. Je pense par exemple, au consortium Bouygues-Aéroport de Paris qui gère désormais l'aéroport de Zagreb et qui va investir près 300 millions d'euros. Je note aussi que l'autoroute sur l'Istrie qui est la partie la plus touristique, est une concession d'une société d'autoroute française. Lactalis vient de prendre une partie du marché du lait de la Croatie et de la Slovénie, juste à coté. C'est l'enseignement, sur un même Campus, en français et en allemand, donné à de jeunes Croates ou de jeunes Européens qui sont basés à Zagreb.
Q - Pour revenir au CFP. Est-ce qu'on est a la fin du feuilleton ? Est-ce qu'il ne va pas y avoir de nouveaux problèmes qui vont ressortir de la part des parlementaires ?
R - Vous savez vous-même que nous ne sommes pas à la fin du processus puisque le 2 juillet il y a un vote sur une résolution. Le vote du budget lui-même sera en septembre. J'ai vécu ces négociations du coté du Conseil - et nous avons eu mardi un dialogue nourri entre les États membres, M Van Rompuy et la présidence irlandaise, pour savoir si nous mandaterions de nouveau la présidence irlandaise pour lui permettre de négocier plus loin qu'elle ne l'avait fait car elle avait le sentiment qu'elle était allée au bout du mandat de négociation. J'observe que le Parlement européen a obtenu l'essentiel de ce qu'il souhaitait. Nous avons de nouveau mandaté la présidence irlandaise, en espérant qu'elle puisse trouver un accord dans les dernières heures.
Le Parlement a obtenu plus de flexibilité, c'est incontestable, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiements, ce qui va sans doute nous donner la garantie d'investir 50 milliards de plus que sur la période précédente car le budget va être réellement consommé : c'est un aspect très important pour la relance économique. Le Parlement souhaitait la consommation des crédits par anticipation pour la recherche, il l'a obtenu. Il souhaitait passer de 2,5 milliards à 3,5 milliards, et la France soutenait cette disposition, sur le FEAD, ce qui fait que les associations caritatives pourront continuer leur travail admirable à l'égard des plus précaires de nos concitoyens. Le Parlement souhaitait que cela soit à titre obligatoire. Cette obligation porte sur 2,5 milliards dont 1 milliard est volontaire. Le fonds est sauvé. Ces dernières semaines nous avons aussi sauvé le fonds européen d'ajustement à la mondialisation qui est un fonds qui permet d'accompagner les entreprises qui connaissent des difficultés. PSA avait obtenu 19 millions à la suite d'un licenciement pour aider à la reconversion de ses employés. Le Parlement souhaitait une clause de révision qui soit obligatoire et non pas facultative, il l'a obtenu, au plus tard en 2016. Il va y avoir un nouveau Parlement et il faut qu'il ait le sentiment que tout n'est pas bouclé sur toute la période. C'est un compromis. La France aurait souhaité un budget plus conséquent. Mais c'est le compromis du mois de février dernier avec une France qui tirait vers le haut. Sur la question des ressources propres, le débat est rouvert. Tout est sur la table. Les parlementaires savent que dans le CFP il y a des outils, des disponibilités financières qui existent pour des politiques publiques qui accompagnent la lutte contre le chômage, l'engagement de grands travaux. C'est au Parlement de faire son choix. Il a bien tiré son épingle du jeu.
Q - C'est un budget d'austérité, en nette baisse par rapport à la période précédente. C'est la victoire des pays qui souhaitent moins d'Europe. Cela ne vous dérange pas comme signal ?
R - Ce n'est pas leur victoire, je le conteste car avec la flexibilité, nous aurons sans doute 50 milliards investis en plus dans cette période que dans la période précédente. Dans les faits, on aura 50 milliards en plus. Je veux dire aussi que si tous les chefs d'État et de gouvernement partageaient la même vision d'Europe que François Hollande, nous aurions un budget plus important. Je note qu'en février dernier, lorsque nous avons commencé les négociations, des États et pas des moindres étaient plutôt sur un budget à 820 milliards et la Commission estimait qu'il fallait un budget à 1050. C'est la France qui a tiré, qui a été la locomotive, pour avoir le budget le plus conséquent. Le résultat est un compromis. Compte tenu de la situation, je pense que c'est le meilleur compromis possible. Si certains pensent que nous aurions dû faire plus, je leur dis que la session de rattrapage est en mai 2014, car il y a des élections européennes et qu'il faut faire comprendre à nos concitoyens que c'est à condition d'avoir un Parlement volontariste, qui partage leurs ambitions, qu'il est possible de peser sur les choix au sein de l'Union européenne. Si le 25 mai 2014, vous avez une majorité conservatrice, vous aurez moins de dépenses y compris dans le cadre du CFP car on ne consommera pas les crédits. Il faut aussi une majorité dynamique qui accompagne les chefs d'États et de gouvernements qui veulent une Europe de la relance, de la croissance comme c'est le cas du gouvernement français.
Q - Demain Viktor Orban rend visite au Parlement européen pour la quatrième fois depuis qu'il est premier ministre. La cinquième si on compte son audition il y a trois mois. La Hongrie reste un problème inquiétant en Europe et on n'a toujours pas réussi à dire qu'à un moment il va falloir que le Conseil Européen s'exprime. Quelle est votre position sur la Hongrie ?
R - La Commission est dans son rôle, qui est de s'assurer que les traités de l'Union européenne ne soient pas remis en cause par des initiatives nationales qui prendraient le contre-pied des valeurs de l'Union européenne. Elle peut et doit le faire. Le Parlement européen peut aussi prendre des initiatives pour rappeler l'État de droit, pour rappeler les valeurs de l'Union européenne. Je trouve que c'est une démarche naturelle des parlementaires. La France a appelé, à l'occasion de plusieurs prises de paroles, à ce que chacun des États soit complètement dans la ligne et l'esprit des traités de l'Union européenne, y compris à l'occasion des conseils de ministres auxquels j'ai participé. Nous n'en sommes pas à faire référence à l'article 7. Il y a encore des marges. Je note d'ailleurs qu'il y a eu des inflexions au cours des derniers mois, après un travail de pédagogie positif de la Commission à l'égard de ce pays.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2013