Déclaration de M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, en réponse à une question sur le défilé du 14 juillet, à l'Assemblée nationale le 16 juillet 2013.

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Circonstance : Question au gouvernement posée par M. Philippe Meunier, député (UMP) du Rhône, à l'Assemblée nationale le 16 juillet 2013

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,
Tous les membres du gouvernement, sauf obligation internationale, étaient présents à la cérémonie du 14 Juillet et au défilé. Je dois dire, Monsieur le député, que vous ne faites pas honneur à la France par vos propos particulièrement minables et polémiques.
Je ne vais pas commenter davantage, mais avec tous ceux qui étaient là, ces millions de Français qui ont suivi à la télévision publique, pendant cinq heures, les manifestations du 14 Juillet, auront vu que ce qui nous rassemblait, au-dessus des polémiques, au-dessus des mesquineries c'était les valeurs de la France, les valeurs de la République : Liberté, Égalité, Fraternité.
J'ajouterai aussi que, lorsque les soldats de l'armée malienne ont défilé devant nous et devant le Président Traoré, par intérim, je dois dire que nous étions fiers de nos armées, de nos soldats, qui ont au nom de la France, au nom de la liberté, contre le terrorisme mené un combat exemplaire, et nous étions fiers que défilent aux côtés des soldats français, les soldats d'Afrique et de l'armée malienne. C'est cela que j'aurais aimé entendre dire, et vous ne l'avez pas dit. Mais moi j'ai la France au cœur et à l'esprit, et rien d'autre Monsieur le député.
Alors oui, je crois que ce jour-là les Français étaient fiers de dire : vive la République et vive la France !
Source http://www.gouvernement.fr, le 18 juillet 2013|N|N|N|N|Texte intégral70450|Bonjour à toutes et à tous.
Je viens de présider le troisième Comité Interministériel pour la Modernisation de l'Action Publique. Beaucoup de ministres, la quasi-totalité des ministres ont participé à cette réunion où nous avons pris beaucoup de décisions.
Quel est l'objectif ? Modernisation de l'action publique, cela peut paraître un terme assez vague. En réalité, il s'agit de commencer par évaluer toutes les actions publiques, toutes les politiques publiques pour voir si elles sont efficaces, pour voir si elles sont justes, si elles sont utiles à la compétitivité du pays, de nos entreprises, au développement de nos territoires, et pour voir si l'argent des contribuables est bien utilisé, utilement. Et si possible – c'est l'objectif – faire des économies, réduire notre déficit.
Ce travail est engagé depuis plus d'un an, et peu à peu, porte ses fruits. L'évaluation – je vais prendre un exemple très concret qui nous a conduits à un certain nombre de décisions aujourd'hui – concerne les aides aux entreprises. Toutes les aides aux entreprises ont été évaluées et nous nous sommes rendu compte qu'il y avait des doublons, qu'il y avait des aides inutiles, peu efficaces et donc nous avons décidé de les concentrer sur ce qui sera utile pour leur développement : l'investissement, l'innovation, l'industrie parce que c'est un secteur qui a besoin d'être aidé particulièrement pour les avancées technologiques, et puis aussi les aides à l'export que nous avons réorganisées. Au total, nous allons faire une économie de 1,5 milliard sans préjudices mais avec beaucoup plus d'efficacité. Donc tout le monde est gagnant, le contribuable, mais aussi les entreprises puisqu'il s'agit des aides aux entreprises.
Le président de la République avait annoncé un choc de simplification. Il est vrai que souvent on croule sous la paperasse, les procédures, la lenteur et cela concerne aussi bien les citoyens, cela concerne les collectivités locales, cela concerne les entreprises et cela décourage l'initiative. Là, nous avons pris 200 mesures de simplification. Je ne vais donc pas toutes les citer. Vous en connaissez déjà une, qui est très concrète pour tous les Français, c'est la carte d'identité. Elle est renouvelable au bout de dix ans. Nous avons décidé qu'elle serait désormais renouvelable au bout de quinze ans. Les chèques Restaurant, il y a plus de 3,3 millions de salariés qui les utilisent. C'est beaucoup de papier… C'est beaucoup de papier pour les salariés, c'est beaucoup de papier aussi pour les entreprises, les fournisseurs, les restaurants par exemple. C'est 160 000 points de vente qui sont concernés. Donc, fini le papier. Tout sera numérisé avec une carte, comme une carte de crédit, ce qui facilitera la vie des salariés mais aussi des entreprises qui seront payées plus vite. Et puis cela coûtera moins cher, là encore. Une économie et plus d'efficacité.
Concernant la simplification, plus générale, sur les entreprises, le député Thierry Mandon a fait beaucoup de propositions très concrètes que nous avons quasiment toutes retenues. J'en citerai une, c'est toutes les déclarations comptables qui sont faites. Il est normal de faire des déclarations comptables, mais parfois pour les très petites entreprises, on demande autant que pour une très grande. Donc nous avons décidé de simplifier la vie de ces très petites entreprises, de ces petites et moyennes entreprises, ce qui concerne un tiers des entreprises françaises qui vont voir leur vie changer. Parce qu'à chaque fois, il faut faire appel à des concours extérieurs, et cela coûte de l'argent et cela fait perdre beaucoup de temps. Un autre exemple, ce sont les délais de paiement pour les petites entreprises. Ils vont être raccourcis. Autre exemple, quand vous créez une entreprise, vous devez déposer un enregistrement, mais qui coûte cher. Surtout quand on crée une entreprise, on a besoin d'argent. On a décidé de diminuer de 50 % le coût de cet enregistrement.
Plus globalement, le travail qui a été fait par tous les membres du gouvernement – et je salue particulièrement le travail de Marylise Lebranchu qui est ministre de la Réforme de l'Etat et de la décentralisation, mais aussi de la Fonction publique – tous les ministres se sont mobilisés, toutes les administrations se sont mobilisées, les préfets se sont mobilisés. Et là, nous avons des résultats ! Cela se sent. Nous allons poursuivre ce travail de modernisation, de simplification. Parce que ce qui est important, c'est que les Français aient confiance dans l'action publique. Ils sont attachés à leurs services publics, mais ils veulent qu'ils soient efficaces, qu'ils soient utiles, qu'ils soient compréhensibles.
Nous avons beaucoup travaillé sur ces points, nous allons poursuivre. Le prochain Comité interministériel aura lieu avant la fin de l'année, mais d'ores et déjà, je peux vous dire que toutes ces initiatives permettent de faire des économies, que nous avons évaluées à 3 milliards de diminution du déficit. Or tout cela contribue à améliorer la vie des Français, améliorer l'efficacité de nos entreprises, et en même temps améliore l'usage de l'argent public. Cela veut dire aussi supprimer toute une série d'organismes. Nous en avons supprimé 100 lors de la dernière réunion. Nous venons de supprimer 68 commissions, j'allais dire inutiles, mais il y en a sans doute d'autres, nous allons poursuivre les investigations.
Et puis il y a nécessité, parfois, non pas de supprimer mais de conserver et d'améliorer, c'est cela la modernisation. Cela ne peut pas se faire sans les agents, sans les fonctionnaires qui sont associés, qui sont consultés, que ce soit dans les départements ou que ce soit à l'échelle de l'Etat. Je vais prendre un exemple concret. Nous avons pour toute la politique contractuelle de l'Etat, les contrats de ville, la lutte contre l'exclusion, mais aussi le développement et l'aménagement du territoire, trois organismes : la Délégation à l'aménagement du territoire, l'Agence pour la cohésion sociale et puis la Délégation interministérielle pour la ville. Nous avons décidé de fusionner ces trois organismes pour qu'ils soient plus efficaces dans un Commissariat à l'égalité et au développement des territoires, et qui va être au travail dans les prochains mois parce qu'il va avoir une mission très précise, c'est négocier, via les préfets de région avec les régions, les départements, les villes, de nouveaux contrats de plan pour mettre en oeuvre tout le programme d'investissement que j'ai annoncé la semaine dernière.
Donc un Etat plus efficace, ce n'est pas un Etat absent. Ce n'est pas un Etat qui démissionne. C'est un Etat qui affirme son rôle et qui est garant du pacte social républicain. Je vous remercie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 18 juillet 2013 |N|N|N|N|Texte intégral 70451|LE PREMIER MINISTRE (traduction) : « Au nom de Dieu clément et miséricordieux, je voudrais remercier le président de la République française pour les propos qu’il vient de tenir lors de cette visite et l’entretien que nous avons eu ici, aujourd’hui, au Palais du Gouvernement avec le groupe de ministres et la délégation qui accompagnent le Président. Nous avons ainsi pu passer en revue les domaines de coopération les plus importants. Comme l’a dit le Président dans son intervention, nous avons réitéré notre engagement à renforcer et affermir ces relations privilégiées entre la Tunisie et la France. Nous avons œuvré à en élargir le domaine. Ces relations sont surtout basées sur la confiance mutuelle, le respect mutuel et un désir commun de renforcer ces relations comme je le disais. Les accords qui ont été signés aujourd’hui au Palais de Carthage, en présence des deux Présidents, ne font que renforcer cette orientation pour le soutien et l’affermissement de cette relation à l’avenir. J’ai également profité de cette occasion pour adresser mes remerciements à la France d’avoir été aux côtés de la Tunisie dans le processus révolutionnaire et dans la période postrévolutionnaire ; et pour le soutien que la Tunisie est en train de recevoir dans de très nombreux domaines ; et pour le soutien accordé à la Tunisie dans ses négociations avec la Communauté européenne pour obtenir le statut de partenaire privilégié ; et pour tout ce qui s’en suit de discussions à l’avenir où nous espérons obtenir une coopération ouverte dans de très nombreux domaines. Cet entretien était également une occasion pour informer le président de la République française sur le point où on en est la Tunisie dans son processus démocratique : quelles sont les difficultés auxquelles nous devons faire face, comment nous y faisons face… Le Président a rappelé – et cela nous a beaucoup touchés – que la Tunisie, ayant été la première révolution du Printemps arabe, a ouvert la voie. Jusqu’à aujourd’hui, nous constatons que la révolution tunisienne est celle qui est la plus proche de réussir dans ce processus démocratique. Nous constatons, au vu des autres processus de transition démocratique, qu’il y a des difficultés, qu’il y a parfois des échecs momentanées, mais que, jusqu’à aujourd’hui, la Tunisie est en train de marcher sur la bonne voie. Nous marchons d’un pas ferme grâce à la prise de conscience de ses responsables politiques et parce que nous comptons sur la légalité, sur le consensus, sur un dialogue ouvert. Nous espérons être quasiment à la fin de ce processus que nous allons pouvoir conclure par des élections, que nous espérons pouvoir tenir avant la fin de cette année. La coopération entre la Tunisie et la France est forte et profonde et nous espérons qu’elle se renforcera à l’avenir. C’est un point de presse aujourd’hui, avec le président de la République française. Je souhaiterais donc que vous adressiez vos questions au Président. Le Président MARZOUKI a participé, aux côtés du Président français, à une conférence de presse au cours de laquelle il a éclairci un certain nombre de points. Je voudrais donc que vous adressiez vos questions au Président exclusivement. Nous ne voulons pas prendre beaucoup de son temps. Je vous remercie de votre attention ».
QUESTION : « Monsieur le Président, bonjour, Monsieur le Premier ministre, une question concernant la possibilité qui avait été évoquée de convertir une partie de la dette publique tunisienne à l’égard de la France en mécanisme d’aide, pouvez-vous nous en dire davantage, où en est ce dossier, quel montant serait concerné, est-ce que des domaines ont déjà été envisagés pour les investissements possibles dans le cadre de cette reconversion, à quelle échéance vous pensez que ces dossiers peuvent aboutir et en particulier les contrats de coopération envisagés aujourd’hui rentreraient dans le cadre de ces mécanismes de reconversion ? »
LE PRESIDENT : « D’abord, je l’ai rappelé, la France est un des principaux pays, qui aide et soutient la Tunisie. Nous voulons ce soutien par rapport à ce qui est notre relation historique, sans doute, sûrement, par rapport à l’intensité des échanges entre nos deux pays et du nombre d’entreprises présentes en France, mais aussi, par rapport à la responsabilité historique qui est celle de la Tunisie aujourd’hui. Pour être plus concret encore, sur la période 2013-2014, il y a 500 millions d’euros d’aide directe à des projets, qui passent notamment par l’Agence française de développement. Nous sommes le premier bailleur de fonds étranger de la Tunisie. Nous allons ajouter à cette somme l’opération qui est souhaitée par les Tunisiens et je pense qui peut être une très belle illustration de ce qu’est une politique de développement. Nous allons ajouter jusqu'à 60 millions d’euros de conversion de dette en investissements. Les projets seront définis avec les Tunisiens et la visite d’aujourd’hui et de demain y contribuera. Le plus tôt sera le mieux. Ce qui pourra être engagé dès cette année, le sera. A l’évidence, l’essentiel se fera l’année prochaine. Mais sur le plan financier, chacun comprend l’idée, c’est que plutôt que d’annuler une dette, ou plutôt que d’en faire un moratoire, le report ou la renégociation, nous préférons l’investir directement sur un projet. Et nous voulons lui donner un aspect de partenariat. Ce n’est pas la France qui choisit les projets, c’est la Tunisie avec nous. Par ailleurs, nous voulons mobiliser l’Union européenne sur cette idée de conversion de dette et de l’inscrire dans le partenariat de Deauville, dont la France est à l’origine ».
QUESTION : « Monsieur le Président, bonjour. Vous avez parlé de coopération multilatérale voire multidimensionnelle entre la Tunisie et la France. Vous savez qu’en France il y a une forte communauté tunisienne de l’ordre de 700 000 citoyens dont partie de nationalité tunisienne, d’autres franco-tunisiens. Cette communauté tunisienne irrigue le tissu culturel et économique français. Comment faire pour créer des méthodes de travail pour transformer les liens que les Franco-tunisiens et les Tunisiens de France ont avec la Tunisie pour en faire une passerelle de développement mutuellement bénéficiaire ? »
LE PRESIDENT : « C’est une chance que d’avoir 700 00 Tunisiens en France, parfois avec la double nationalité, qui veulent à la fois être en France pour servir le pays qui les a accueillis, et en même temps sont fidèles à leur pays d’origine. Ces Tunisiens sont souvent bien formés, sont eux-mêmes parfois dans le domaine économique. Nous devons donc en faire des instruments de développement utiles pour la Tunisie. Par rapport à des projets de formation professionnelle que nous voulons développer en Tunisie, il serait possible d’utiliser ce potentiel, ce capital humain dans cette direction. Qui connaît le mieux les Tunisiens si ce n’est les Tunisiens eux-mêmes ? Qui peut être le mieux placé pour les former, que des Tunisiens. A cet égard, il y a un programme qui a été lancé par la France pour former des enseignants en langue française. Là aussi, dans l’ensemble du monde, en particulier francophone.
Nous pouvons appuyer aussi par des Tunisiens venant enseigner ici, les efforts que nous faisons pour le développement de notre langue, appuyer sur des projets qui peuvent être technologiques. Voilà le sens de ce que nous voulons faire avec les Tunisiens de France ».|N|N|N|N|Texte intégral 70452|La France sait toujours se faire attendre. Je ne demande pas plus de lumière, ni plus de son, simplement votre attention – en vous remerciant encore pour votre accueil ! Je salue cette initiative qui a été prise par l’Union tunisienne du travail, de l’industrie, du commerce et de l’artisanat et par le MEDEF, qui nous permet membres du Gouvernement français, membres du Gouvernement tunisien, chefs d’entreprise de définir le cadre de ce que peut être une nouvelle coopération.
Je veux saluer la Présidente de l’UTICA, parce qu’elle est la première femme qui a été élue à la tête d’une organisation patronale dans le monde arabe, prouvant une nouvelle fois que la Tunisie est d’avant-garde. En outre, vous venez d’obtenir un prix prestigieux – le Women Business Award – qui a été décerné par les pays participant au partenariat de Deauville et qui est quasiment, on peut le dire, le prix Nobel du patronat. Je veux saluer, une nouvelle fois, le président de la République tunisienne, mon ami Moncef MARZOUKI. Parce que l’accueil qui m’est fait pour cette visite d’Etat situe la responsabilité de nos deux pays dans cette période que nous traversons, mais surtout le niveau de notre amitié. C’est dû à l’Histoire, à la réalité humaine mais aussi à la qualité des relations personnelles que nous pouvons tisser entre chefs d’Etat et ministres de nos deux gouvernements.
Je l’évoquais, la Tunisie vit un moment historique et les entreprises ont aussi un rôle à jouer pour que votre pays réussisse pleinement sa transition démocratique. Moncef MARZOUKI l’évoquait : une révolution produit, à la fois, de l’espoir, parfois de l’inquiétude, mais elle ne peut réussir que si parallèlement le développement économique connait une nouvelle accélération. Il ne peut y avoir de transition démocratique que s’il y a une mobilisation de l’ensemble des forces qui font la production d’un pays. En servant l’économie tunisienne, vous servez la transition démocratique. De la même manière, les entreprises françaises qui viennent depuis longtemps ici en Tunisie, investir, créer de l’activité, vont chercher, non seulement – et c’est bien légitime – un retour de leur investissement, ce qu’on appelle un profit, mais également vont rendre service à la Tunisie toute entière. Non pas qu’il y ait une volonté morale – parfois l’économie et la morale ne font pas bon ménage – mais au moins ce que nous pouvons retrouver là, c’est une conception de l’entreprise citoyenne au service du développement d’un pays ami.
La Tunisie peut compter sur le soutien de la France. Mon pays est le premier bailleur d’aide publique pour le développement pour la Tunisie qui, à travers tous ses instruments, arrive à mobiliser des centaines de millions d’euros : 500 millions d’€ pour la période 2013/2014. Au-delà des chiffres, ses projets sont considérables pour la Tunisie. C’est la mise en place du réseau ferroviaire du Grand Tunis, dont les protocoles financiers sont signés aujourd’hui même. Ce sont également des projets agricoles, des projets urbains. La France est prête à poursuivre non seulement son aide mais à la transformer, j’en ai fait l’annonce devant l’Assemblée constituante ce matin. Je l’avais dit, dès hier, au Président MARZOUKI ainsi qu’au Premier ministre. La France va réaliser une conversion de dette pour des projets d’investissements, c’est-à-dire permettre qu’une créance se transforme en activité économique. La France est le premier fournisseur de la Tunisie – pour près de 4 milliards d’euros. Mais ce qui est aussi très important, c’est que la France est le premier client de la Tunisie – pour un montant comparable. Le marché français absorbe un tiers des exportations de la Tunisie. Quand votre économie est dynamique, la nôtre se trouve confortée et réciproquement. C’est vrai, qu’en ce moment, il y a une récession en Europe et que cela peut altérer vos capacités de développement. Néanmoins, malgré ce qui s’est produit dans l’année 2012 avec les incertitudes qu’engendre nécessairement une révolution, je note que la croissance tunisienne a été supérieure à 3 % l’année dernière. Il y a ici une dynamique qui ne demande qu’à être encouragée. La France veut être le premier investisseur en Tunisie. Il y a déjà plus de 1350 entreprises qui sont présentes, employant 125 000 personnes. Nous pouvions avoir la crainte, cela peut arriver quand il y a des doutes sur un système politique, que les entreprises françaises se rétractent dans leur choix d’investissement. Cela a été tout l’inverse, elles se sont non seulement maintenues, ici sur leur marché, mais elles ont encore augmenté leur participation. Je veux en citer quelques exemples : des grands groupes comme BIC et AUCHAN sont venus renforcer leur présence en Tunisie ; une entreprise bancaire, CIC, est venue mettre sa participation dans la Banque de Tunisie ; SOFIPROTEOL vient d’ouvrir, dans le domaine agricole, une nouvelle usine dans la région de Testour avec un lien qui a été voulu par ses dirigeants avec des éleveurs tunisiens. C’est vrai pour les grands groupes, c’est vrai aussi pour les PME. Je veux saluer justement cette particularité qui est que beaucoup de PME françaises sont présentes sur le marché tunisien. Cela veut dire que vous leur avez fait le meilleur accueil. 80 % des entreprises installées en Tunisie sont des PME. Il y a eu ce lien entre PME françaises et PME tunisiennes. Notre coopération est dynamique dans de nombreux secteurs souvent traditionnels : les équipements électroniques, l’aéronautique. Nous avons encore signé un marché, hier, avec l’achat de plusieurs avions Airbus. Ce que je veux, à travers la nouvelle période qui s’ouvre, c’est que nous puissions offrir de nouveaux domaines de coopération, de partenariats, d’investissements.
Premier domaine, la filière agricole et agroalimentaire. Une convention de partenariat, entre les ministres français et tunisiens de l’Agriculture, a été signée hier permettant de structurer des filières d’avenir comme le lait, l’huile d’olive et les céréales. Il s’agit, aussi bien pour la France que pour la Tunisie, de monter en gamme comme l’on dit. Cela vaut aussi pour l’agriculture et l’industrie agroalimentaire. Deuxième domaine, l’alliance numérique, c’est-à-dire les nouvelles technologies. Il y a eu, là-aussi, un partenariat exceptionnel entre entreprises françaises et entreprises tunisiennes avec des prolongements commerciaux permettant la colocalisation, car nous savons bien, parlons franchement, qu’il y a toujours un risque en ces domaines du numérique, des centres d’appels ; que ce qui est installé en Tunisie pourrait être défavorable à l’emploi en France. Justement, ce type de convention permet de rassurer, les uns et les autres, pour que ce qui se fait en Tunisie soit favorable à l’activité en France et que nous ne nous mettions pas à nous concurrencer inutilement. Créer de l’emploi et en France et en Tunisie dans le secteur des nouvelles technologies, c’est possible justement à travers un réseau de PME et de start-up que nous avons réussi à fédérer. Troisième domaine, les énergies renouvelables. Le président de la République tunisienne me disait : c’est l’avenir de la Tunisie. Depuis deux ans, le Gouvernement français a dégagé plusieurs millions d’euros pour monter des projets dans le solaire et dans l’éolien en Tunisie avec des villages qui vont être dotés des dernières technologies, dans le domaine notamment photovoltaïque ou des énergies marines. Là-aussi, ce que nous ferons pour la Tunisie sera utile pour la France, notamment dans la perspective de la transition énergétique, avec la montée des énergies renouvelables, avec des technologies nouvelles qui feront que le prix de ces énergies baissera. Car nous savons bien que le prix des énergies fossiles va augmenter et que nous pourrons ainsi permettre cette substitution, utile pour l’environnement, utile pour l’emploi. De nombreux chefs d’entreprise m’accompagnent et je veux les en remercier. Ils m’accompagnent pas simplement pour me faire plaisir, cela peut arriver, mais ils m’accompagnent parce qu’ils ont compris qu’ils avaient de nombreux projets à bâtir avec la Tunisie, des contacts utiles grâce à votre forum avec des industriels et des entrepreneurs tunisiens. Il y a des alliances à nouer. Je pense à la réalisation de grands travaux, à ce qui va se faire pour le port de Rades, pour les stations d’épuration d’eaux de traitement de déchets de nombreuses villes, pour des centrales électriques… Il y a également un consortium qui a été créé par la société Corail Rail, qui vient de remporter l’appel d’offres pour le réseau rapide de Tunis. Tout cela prouve que nous pouvons agir ensemble. J’ai également souhaité, cela a été exaucé, que les entreprises françaises et tunisiennes, qui sont fortes de leur complémentarité, puissent s’unir pour aller conquérir un certain nombre de marchés dans l’ensemble de la région. Par exemple, Schneider Electric apporte son soutien au premier groupe privé tunisien Poulina pour mettre en place un certain nombre de données. Plusieurs entreprises tunisiennes développeront leurs liens industriels avec de grandes sociétés françaises. C’est le cas de Telnet et de Sifax, qui se sont rapprochés d’Airbus et de Safran et d’Altran. Tout cela va dans le sens de cette complémentarité, de ce partenariat, de ce co-développement que je souhaitais. Les touristes français représentent un contingent, comme l’on dit, égal à l’ensemble des touristes britanniques, allemands et italiens réunis. La France a donc, depuis longtemps, en matière touristique, fait le choix de la Tunisie. Elle donne conseil aux voyageurs. Le ministre des Affaires étrangères les prodigue sur un site qui, paraît-il, est l’un des plus visités de France, peut-être même davantage que celui de l’Elysée ! Mais j’en comprends la raison, non pas parce qu’il annonce la météo mais parce que le site du ministère des Affaires étrangères renseigne tous les Français - et d’ailleurs, bon nombre d’Européens - qui s’interrogent sur leur lieu de vacances en terme de sécurité. Le site du ministère des Affaires étrangères signale que ce sont les régions touristiques de la Tunisie qui sont les plus sûrs du monde. J’encourage donc tous ceux qui, en France ou ailleurs, s’interrogent sur leur lieu de vacances à venir ici en Tunisie, comme je l’ai fait, même si ce n’était pas simplement pour des vacances. Mesdames et Messieurs, tout le sens de mon propos est à la fois économique et politique. Il est économique parce que la France a confiance dans la dynamique de croissance, ici, en Tunisie. Mon propos est économique, parce que nous avons à bâtir une coopération nouvelle, un partenariat exceptionnel. Il est économique parce que nous avons même à inventer des mécanismes et des dispositifs de co-développement. Il est économique, parce que je crois que c’est l’intérêt et de nos entreprises françaises et des entreprises tunisiennes d’avoir des alliances. Mais il est aussi politique, car si nous voulons que la révolution réussisse en Tunisie, si nous voulons que la transition démocratique puisse être accomplie, si nous voulons qu’il y ait un cadre stable, une sécurité pour les investissements mais aussi pour que les Tunisiens puissent vivre en liberté, alors nous devons tout faire pour que l’économie tunisienne puisse être encouragée, soutenue, stimulée. Vous avez souhaité mettre votre forum sous le slogan des opportunités. Mesdames et Messieurs, quand l’amitié rencontre l’opportunité ou les opportunités, cela s’appelle la confiance. Merci.|N|N|N|N|Texte intégral 70453|Monsieur le Président de l’Assemblée nationale constituante,
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les députés,
C’est un honneur de m’adresser à vous, au nom de la France. Un honneur, parce que vous êtes la première Assemblée élue au suffrage universel en Tunisie dans des conditions de liberté et de pluralisme. Un honneur, parce que vous êtes une Assemblée issue d’un processus révolutionnaire. Un honneur, parce que vous préparez une Constitution qui est le texte fondamental dans une grande démocratie pour séparer et organiser les pouvoirs, pour permettre à l’Etat de droit d’être respecté, pour garantir les libertés, pour permettre la participation de tous à la vie publique. Un honneur, parce que, au-delà de cette Constitution, vous préparez les élections qui auront lieu et qui seront également le signe de la vitalité de la démocratie tunisienne. Je suis sûr que, malgré toutes les épreuves – il en existe toujours – toutes les difficultés, la Tunisie saura montrer une nouvelle fois l’exemple. La Tunisie a toujours été pionnière. Au XIXe siècle, c’est elle qui inaugura la grande tradition constitutionaliste du monde arabe avec la « loi de l’État tunisien ». C’était en 1861. C’est en Tunisie que le mouvement réformiste arabe s’est affirmé avec Kheireddine PACHA et Mohamed SNOUSSI. La Tunisie, au cours du XXème siècle, a été en avant-garde en gagnant plus tôt que d’autres son indépendance, en fondant sa République et en accordant aux femmes un statut unique dans le monde arabe. Même sous le temps de l’oppression et de la dictature, la Tunisie a su montrer le chemin. Des hommes et des femmes ont eu le courage de réclamer justice et de porter les droits de l’Homme. Pour beaucoup, ce fut un combat douloureux. La France aujourd’hui exprime à ceux qui ont éprouvé dans leurs chairs les affres de la dictature, à ceux qui ont été arrêtés, torturés pour leurs convictions, la France exprime aujourd’hui, ici, par ma voix, son immense respect. La Tunisie a également montré l’exemple avec le Printemps arabe en janvier 2011. Le geste, à Sidi Bouzid, de Mohamed BOUAZIZI a changé le cours de l’Histoire – de l’histoire de la Tunisie, mais aussi de l’histoire du monde. Et je veux ici solennellement saluer sa mémoire.
Ce fut le début d’un processus. D’autres peuples se sont mis en mouvement après la Tunisie. Il appartient à chacun d’entre eux de montrer la voie, de chercher le bon chemin. Cette voie peut être heurtée, parfois violente, c’est le cas en Libye. Cette voie peut être interrompue, c’est le cas aujourd’hui en Egypte. Cette voie peut déboucher sur une guerre, c’est le cas, hélas, en Syrie. Mais la leçon que le peuple tunisien a donnée au monde, c’est qu’il ne peut pas y avoir de stabilité, il ne peut pas y avoir de développement, il ne peut pas y avoir de progrès sans la liberté. Et c’est cette liberté-là qui est en marche partout. Je sais que vous avez d’immenses défis à relever. La France sait ce qu’est une révolution, sa puissance irréversible, l’écho qu’elle suscite dans le peuple, mais également la difficulté d’inscrire dans le temps toutes les conquêtes, d’être à la hauteur de l’espérance créée – et en même temps de ne pas donner une illusion impossible. Oui ! La France comprend les impatiences qui peuvent exister ici, en Tunisie, le désir de résultat – pas simplement, d’ailleurs, en Tunisie – et l’exigence de garantie. Je sais donc ce que vous affrontez. D’abord, l’héritage de l’ancien régime mais aussi la crise économique en Europe qui vous frappe, l’insécurité dans la région qui vous touche, sans parler de la violence – et elle existe, y compris à l’intérieur – de la part de ceux qui n’acceptent pas les principes de votre révolution. En cet instant, j’ai une pensée pour Chokri BELAID, homme de conviction tué pour ses idées. Et je forme le vœu, qui est le vôtre, que toute la lumière soit faite sur son assassinat et que ses assassins soient justement jugés et punis. Mais la Tunisie a montré encore ces derniers jours qu’elle est capable de dépasser ce qui peut la diviser, de surmonter toutes les épreuves, tous les défis. Je veux, à l’occasion de ma visite, dans le moment précis que vous traversez, dans les doutes et les espérances qui sont les vôtres, montrer que la relation entre la France et la Tunisie peut être refondée dans ce contexte. Je suis le premier président de la République française à venir en Tunisie depuis votre révolution. C’est un symbole mais c’est aussi une volonté de refonder la relation entre la France et la Tunisie. Refonder notre relation, c’est d’abord assumer la vérité. C’est pourquoi, je me rendrai, aujourd’hui même, au mausolée de Farhat HACHED. Je dirai à sa veuve, à son fils ainsi qu’aux représentants de l’UGTT que je m’engage, au nom de la France, à rechercher et à faire toute la clarté sur son assassinat en 1952. J’ai d’ores et déjà donné instruction pour que toutes les archives soient rendues publiques sans aucune exception. A l’initiative du maire de Paris, Bertrand DELANOE, enfant de Bizerte, une place de la capitale française porte désormais le nom de Farhat HACHED. C’est l’une des expressions de l’estime des Français pour ce héros du mouvement national tunisien. Refonder notre relation, c’est respecter pleinement l’histoire de la Tunisie, la lutte pour son indépendance, les mouvements qui l’ont portée, sa capacité à forger sa propre identité, à définir une relation sereine avec la France. Je reconnais l’apport d’Habib BOURGUIBA à cette construction-là et, là aussi, je salue sa mémoire. Refonder notre relation, c’est tirer toutes les leçons du passé, même le plus brûlant, car il y a des blessures, je les connais. Il y a eu des incompréhensions, je les ai mesurées au moment de la révolution tunisienne. A ce moment-là, à Paris et partout en France, des Tunisiens venaient me voir – espérant le soutien de la France dans ce moment décisif – disaient leur déception mais aussi leur attente. Ils voyaient également que nombre de mes concitoyens dans les mondes associatif, politique, syndical étaient solidaires de la révolution tunisienne. C’est bien là l’essentiel. Et je remercie le président MARZOUKI – quand il est venu à Paris – d’avoir dit que la France des citoyens n’avait pas fait défaut à la Tunisie. Refonder notre relation, c’est exprimer la confiance de la France dans la Tunisie nouvelle. La France est prête à travailler avec les représentants du peuple tunisien – tous les représentants du peuple tunisien – élus démocratiquement dans le pluralisme. Parce que le message de la France s’adresse à tous les Tunisiens et à celles et ceux qui sont désignés dans cette Assemblée, puis dans la future pour les représenter. La France sait que l’islam et la démocratie sont compatibles. De grandes voix tunisiennes, comme celle de Mohamed CHARFI, l’ont dit avec grande force. La France sait aussi que l’identité tunisienne se nourrit d’apports multiples et que le progrès politique, économique, social demande la participation de tous dans la démocratie, dans le respect des libertés, dans l’égalité des droits. La France vous encourage, sans vous donner de leçon. La France aussi participe des inquiétudes lorsqu’elles existent, et les exprime à chaque fois qu’elle pense que c’est utile et que c’est nécessaire. La France et la Tunisie sont liées, l’une à l’autre, par la culture, les femmes et les hommes qui ont fait ce que nous sommes ; par notre histoire mais aussi par ce présent qui permet à de nombreuses familles issues de la Tunisie de vivre en France et à d’autres – françaises – de s’établir en Tunisie. C’est ce qui fait notre force, cette communauté parfois de destin que nous partageons. La France et la Tunisie ont besoin l’une de l’autre, la France est prête à travailler avec vous dans tous les secteurs où vous pouvez solliciter son concours. Au cours de ma visite, les ministres ici présents ont signé, avec les vôtres, de nombreuses conventions et accords. Ils formeront le cadre de notre coopération. La France, Monsieur le Président, est déjà le premier bailleur de fonds publics au développement pour la Tunisie. Elle continuera de mobiliser les pays du partenariat de Deauville et l’ensemble de l’Union européenne, pour vous permettre de connaître le meilleur développement pour votre pays. Je mobiliserai tous les instruments, à notre disposition. Les engagements de la France pour la Tunisie s’élèvent déjà à plus d’1,5 milliard. Pour 2013 et 2014, nos perspectives sont de délivrer 500 millions d’euros de plus. L’Agence Française de Développement investira notamment dans la réhabilitation des quartiers de vos villes, l’alimentation en eau, la formation professionnelle, les liaisons ferroviaires, le développement agricole. En plus de cet appui, la France réalisera, pour la Tunisie, une opération que vous avez vous-mêmes – autorités tunisiennes, représentants du peuple tunisien – exprimée : la conversion de dette, c'est-à-dire la transformation de ce qu’est une créance de la France en investissements pour la Tunisie. Notre coopération, c’est aussi les entreprises. Elles sont plus de 1 350 françaises à être installées en Tunisie, à y faire travailler plus de 125 000 personnes. Ces chiffres n’ont pas diminué depuis la Révolution, et toute mon action, avec celle du gouvernement, c’est de faire en sorte qu’il y ait plus d’entreprises qui viennent ici, en Tunisie, pour votre développement, mais aussi pour l’activité économique en France. Monsieur le Président, vous avez insisté sur le tourisme. Je ne veux pas réduire la Tunisie au tourisme, car la Tunisie a plein d’atouts, plein de capacités. Mais elle a aussi, par la qualité de ses paysages, par son climat, et par l’hospitalité de sa population, toutes les possibilités d’avoir une économie touristique dynamique. Là encore, j’irai dans ce haut lieu du tourisme qu’est Sidi Bousaïd, et j’invite, à travers cette visite que j’effectue à votre invitation, tous les Français à venir nombreux passer leurs vacances en Tunisie. Notre coopération est aussi dans l’Administration, dans l’Ecole Nationale d’Administration. On pourrait en dire tellement de choses en France, mais tellement de bien en Tunisie ! Nous ferons en sorte que l’expertise puisse être partagée, dans ces domaines comme dans celui du droit. J’ai bien conscience, cela m’a été rappelé par le gouvernement hier, de ce que vous attendez de la France, sur cette question du droit, du respect des règles, de la lutte contre la corruption, de ce qui vous a été volé par le régime déchu. Je vous l’affirme ici : tout ce qui a été mal acquis vous sera rendu. J’ai donc demandé que tout soit mis en œuvre pour accélérer les procédures, faciliter l’identification des biens. Un magistrat français sera bientôt installé à Tunis pour y veiller, et nous en ferons l’évaluation à chaque étape. Enfin, notre coopération est tournée vers la jeunesse, la jeunesse de France, la jeunesse de Tunisie. Près de 20 000 Tunisiens étudient en France, 4 000 étudiants s’y inscrivent chaque année, 1 000 bénéficient d’une bourse accordée par le gouvernement français. Je sais les problèmes qui ont été posés et j’ai donc veillé à ce que les règles de circulation des étudiants étrangers soient assouplies. J’ai demandé d’abroger – et ce fut fait dès les premiers jours de mon mandat – une instruction administrative qui empêchait les étudiants déjà présents en France de pouvoir travailler. Mais je veux faire en sorte que nous puissions améliorer la mobilité entre nos deux pays, tout en luttant contre l’immigration clandestine. Je ne veux pas capter la jeunesse tunisienne, je veux simplement que celle qui veut étudier en France dans de bonnes conditions puisse le faire, pour retourner ensuite dans votre pays, exprimer le talent, la compétence et l’expérience, qui auront été développés dans notre pays. La France contribuera à réaliser aussi des projets importants de formation ici en Tunisie, comme dans le Centre de formation professionnelle de Gafsa, ou encore l’Ecole nationale d’Ingénieurs de Bizerte. Ce partenariat entre la France et la Tunisie, pour l’éducation, pour la formation, doit être placé au meilleur niveau d’excellence. Je veux que nous puissions avoir aussi une coopération en matière de culture, de recherche, pour que nous puissions donner le meilleur de nous-mêmes. Donner le meilleur de nous-mêmes aussi pour la Méditerranée, que nous avons en partage, cette « blanche mer citoyenne », une Méditerranée de projets, là aussi, autour de la sécurité alimentaire, de l’accès à l’eau, des universités. Travaillons ensemble ! Ici, il y a des représentants des régions françaises, et notamment de la Méditerranée, de Provence-Alpes-Côte-D’azur, et d’autres. Vous avez souhaité une coopération décentralisée. Elle sera non seulement engagée – elle l’est déjà – mais poursuivie, amplifiée, pour que nous portions des projets communs. Enfin, nous avons, la Tunisie et la France, à travailler pour la paix. Je veux vous assurer de mon engagement à lutter contre toutes les menaces auxquelles l’Afrique du Nord, l’Europe, et la France, sont exposées. Cette menace a un nom, c’est le terrorisme. Au Mali, la France est intervenue, à la demande du président TRAORE, pour empêcher que des groupes terroristes ne mettent la main sur l’ensemble du pays. L’action conduite avec les armées africaines a permis, non seulement de réussir à les chasser, mais de préparer une transition politique, puisque des élections auront lieu, sans doute, sûrement, à la fin du mois de juillet, puisque c’est la date qui a été fixée. Nous devons donc tout faire pour que cet exemple soit donné à d’autres pays et que nous puissions garantir la sécurité du Sahel. Je sais bien que vous êtes concernés aussi car quand des groupes terroristes sont chassés d’un pays, ils se réfugient dans d’autres et tentent de le menacer et de déstabiliser. Je sais ce que vous les affrontez, ici même. Avec quel courage vous avez fait face à ceux qui voulaient utiliser les armes contre votre révolution ! En Egypte, les événements récents nous montrent combien les processus de transition démocratique sont fragiles et peuvent être mis en échec. Car c’est un échec quand un Président, élu démocratiquement, est déposé par l’armée. C’est un échec quand des millions d’Egyptiens veulent aussi, après un an, exprimer leur aspiration à la liberté. Alors, que devons-nous dire ? Cette chose simple, c’est que tout doit être fait maintenant, dans ce pays, pour retrouver pleinement la démocratie, la liberté, le pluralisme et, le plus vite possible, des élections. La France est également du côté du peuple syrien, qui fait face à la barbarie d’un régime, et qui endure une guerre qui massacre la population civile. 100 000 morts en Syrie. La France a alors décidé de prendre toutes ses responsabilités et d’aider l’opposition autant qu’il le faudra, à condition, bien sûr, que les groupes d’influence terroriste soient mis de côté, et pour que tout soit fait pour que la Syrie puisse être, elle aussi, un grand pays démocratique. J’ai entendu ce que vous avez dit aussi, Monsieur le Président, sur le conflit israélo-palestinien et sur cette volonté qui doit être la nôtre – celle de l’Europe, celle de la France – de faire revenir les parties prenantes à la négociation pour que soit enfin décidée, négociée, et obtenue la création d’un Etat palestinien. Monsieur le Président, Mesdames, et Messieurs les députés, je mesure, je l’ai dit, ce qu’est votre responsabilité : terminer l’élaboration de votre Constitution, préparer les élections de manière incontestable, comme vous l’avez fait en 2011, être capable de donner espoir à la Tunisie. Ce sont de grands défis mais vous n’êtes pas seuls, vous avez vos amis et la France compte parmi ceux que vous pouvez considérer comme tels. Nous avons trois principes qui nous rassemblent. Le premier, c’est la démocratie, le droit pour tous les citoyens de choisir librement, souverainement, leurs représentants, dans le cadre de l’égalité, du respect des minorités, de la liberté de la presse, de la circulation sans entrave des opinions et des idées, l’égalité des droits entre les femmes et les hommes. Vous avez décidé, vous, cette Assemblée, de préserver cet acquis fondamental de la Tunisie, et surtout de votre histoire et des luttes de votre mouvement féministe, qui fait, à juste raison, votre fierté. Le second principe, c’est celui de la confiance. La France a confiance dans la Tunisie, la France a confiance dans sa capacité à construire un avenir, un développement, une démocratie. La France a confiance dans l’économie tunisienne, dans les horizons qui peuvent finalement être définis, dessinés par nous, ensemble, pour donner de l’espoir à nos peuples respectifs. Enfin, le dernier principe, c’est celui de la responsabilité : responsabilité de la Tunisie pour réussir sa révolution, responsabilité de la France, pour vous appuyer, autant qu’il sera nécessaire. Votre tâche est considérable, et dans l’Histoire il arrive des moments où un peuple décide, non seulement pour lui-même, mais pour les autres. Nous avons, nous la France, cet orgueil – qui nous est parfois reproché – en tout cas cette ambition que nous portons, cette fierté d’avoir, il y a déjà longtemps, fait notre révolution, d’en être toujours les héritiers et de dire partout que nous sommes les défenseurs de droits qui appartiennent à l’humanité toute entière. Nous avons toujours cette idée que nous ne sommes pas n’importe quel pays, nous la France, parce que nous avons été la patrie des Lumières, de l’espérance, de la liberté. Quand un autre peuple nous reconnaît comme tel, nous voyons cette flamme dans nos yeux, les uns les autres, pour partager cette même démarche, cette même ambition. Maintenant, c’est vous, vous la Tunisie, qui avez finalement, à la fois cette fierté, mais aussi cette responsabilité. Vous portez un espoir qui va bien au-delà du peuple tunisien, bien au-delà des peuples arabes, et c’est ce qui nous rend solidaires France et Tunisie. Vive l’amitié entre la France et la Tunisie !|N|N|N|N|Texte intégral 70454|LE PRESIDENT - Bien, Mesdames, Messieurs, ce voyage, cette visite d’État s’achève bientôt. Je vais rencontrer tout à l’heure des personnalités de la société civile, les responsables des partis d’opposition puis enfin la communauté française. J’aurai également un entretien avec le consul honoraire de Benghazi qui a été victime d’une agression – pour ne pas dire d’un attentat – et qui nous donnera son témoignage et nous lui prodiguerons toute notre solidarité et notre admiration d’être sorti comme il est sorti indemne de ce piège.
Mesdames, Messieurs, ce voyage, cette visite avait pour moi un seul objet, c’était d’appuyer, au nom de la France, la transition démocratique en Tunisie dans le contexte que l’on sait et de dire notre amitié au peuple tunisien dans son ensemble et lui affirmer que la France serait toujours à ses côtés quelles que soient les circonstances pour réussir la révolution tunisienne. Il ne s’agit pas de nous ingérer ni de donner la leçon mais de faire en sorte que ce qui s’est produit en Tunisie puisse être un succès pour la Tunisie, pour la relation entre la France et la Tunisie, mais plus largement, pour offrir un exemple à la Méditerranée dans son ensemble et à tous les peuples qui luttent pour leur liberté.
Les rencontres que j’ai eues avec le président de la République, Moncef MARZOUKI, avec le gouvernement et le Premier ministre, avec aussi l’Assemblée nationale constituante, n’avaient que ce seul objectif, non pas choisir entre les uns et les autres, non pas participer au débat public – telle n’est pas la place de la France –, mais tout simplement dire que, soucieux des libertés, des droits, de l’égalité des femmes par rapport aux hommes, nous voulons, nous souhaitons que la Tunisie puisse accomplir sa révolution jusqu’au bout avec une Constitution qui garantira l’État de droit, qui fixera les pouvoirs et les contrepouvoirs, permettra de donner aussi des garanties en matière de liberté et d’égalité, puis ensuite, avec des élections libres. Je rappelle que la Tunisie n’a connu qu’un scrutin libre depuis l’indépendance, celui de 2011, et que c’est donc avec grande méticulosité, grande exigence que les Tunisiens préparent le prochain scrutin, les prochains scrutins.
La France sera aussi aux côtés des Tunisiens en favorisant le développement économique. C’est pourquoi la délégation qui m’accompagnait, au-delà des ministres, au-delà des élus – et je les en remercie – qui sont ici, était constituée de chefs d’entreprise nombreux qui, présents déjà en Tunisie depuis des années, entendaient nouer des nouveaux partenariats dans le cadre d’une coopération refondée telle que je l’ai présentée aussi bien aux acteurs politiques qu’économiques, avec un modèle, le codéveloppement, une innovation majeure, la conversation de la dette, et avec aussi le souci de créer des alliances qui permettront aux Tunisiens et aux Français de pouvoir d’abord tirer le meilleur parti de ce potentiel formidable qui est d’avoir des Tunisiens qui vient en France, souvent avec une double nationalité, et des Français qui sont en Tunisie et qui peuvent se rassembler pour porter des initiatives et des projets.
Mais nous pouvons aussi faire davantage, nouer ces alliances pour aller conquérir des marchés ensemble en Afrique et au-delà. Nous avons aussi affirmé le principe d’une communauté méditerranéenne, c’est-à-dire de ce dialogue, de cette initiative qui a été tentée tellement de fois, pas toujours réussie, pour qu’il y ait un vrai partenariat entre l’Europe et la Méditerranée. Nous avons signé bon nombre d’accords dans bien des domaines économiques. Je ne vais pas ici les citer tous : l’agroalimentaire, les énergies, les nouvelles technologies, le tourisme. Le tourisme qui est une des richesses de la Tunisie. Et si j’ai tenu à faire cette conférence de presse ici, dans ce lieu prestigieux et dans ce cadre fabuleux, c’est aussi pour convaincre que nos compatriotes et beaucoup d’autres peuvent venir en Tunisie passer des vacances, sans oublier la France, parce qu’il y a ici toutes les conditions d’un séjour sûr et agréable. Et quand on est en Tunisie, après, on a le mal du pays, on revient en France et on découvre d’autres paysages.
Voilà ce que j’ai entendu porter et aussi un message en direction de la jeunesse, des créateurs, des hommes et des femmes qui veulent circuler, que nous faciliterons tous ces échanges, toute cette mobilité tant demandée et pas toujours facilitée jusqu’à présent. Nous avons déjà pris beaucoup de mesures. J’en remercie l’ambassade, les services consulaires. Cent mille visas sont délivrés. C’est considérable ! Nous pouvons faire encore plus vite sans doute. Nous avons visité ce matin un musée splendide où le LOUVRE s’est impliqué. Nous avons eu également des échanges avec les jeunes, les volontaires. Je remercie Martin HIRSCH comme je remercie Jack LANG aussi pour l’INSTITUT DU MONDE ARABE. Bref, je ne vais pas ici faire la liste de tous ceux, toutes celles qui contribuent à l’amitié entre la Tunisie et la France.
Ce que je retiens aussi, c’est l’attente qui est portée sur la France, l’espérance, la confiance. Nous avons encore eu un témoignage à Tunis où, en plus, nous venions de faire un acte fort, symbolique qui consiste à remettre des archives par rapport à un acte qui s’est produit en 1952, par rapport à un héros du peuple tunisien. Je pense que ce geste devait être fait. Il était plus que temps, il n’était pas trop tard. Voilà, Mesdames et Messieurs, les messages que je voulais vous délivrer. Je suis prêt à répondre à vos questions.
QUESTION - (Inaudible). Monsieur le président, la position de la France est confuse par rapport à l’incertitude de l’agenda politique du gouvernement tunisien. Les accords économiques occultent-ils la dimension « droit-hommiste » de la France ?
LE PRESIDENT - Sûrement pas ! Tout au long de cette visite, je n’ai cessé de rappeler que, pour nous, la révolution tunisienne, c’étaient les droits de l’homme, l’égalité entre les femmes et les hommes, l’indépendance de la justice, l’État de droit, les libertés, le pluralisme de la presse. Plusieurs cas nous ont été évoqués par les associations que j’ai rencontrées, par les jeunes, par les femmes. Sur tous ces cas, je m’en suis ouvert avec les autorités tunisiennes. Pas besoin d’échange. Si je ne venais ici que pour des contrats, je ne serais pas dans la dimension que j’ai voulu donner à cette visite d’État et que les Tunisiens dans leur ensemble ont voulu également porter par rapport à cette visite du premier président de la République française après la révolution tunisienne. Et par rapport à l’agenda, je m’en suis enquis auprès des autorités et du Parlement, enfin de l’Assemblée constituante. J’ai été, de ce point de vue, rassuré. Que m’a-t-il été dit ? Mais je vérifierai car le temps est court par rapport à ce qui m’a été présenté. Qu’au mois de septembre, la Constitution pouvait être adoptée par l’Assemblée constituante, que l’Assemblée travaillerait même tout le mois d’août si c’était nécessaire, qu’ensuite, l’élection présidentielle pourrait avoir lieu ou à la fin de l’année ou au tout début de l’année prochaine, les élections législatives suivraient. Je ne suis pas l’arbitre. On ne m’a pas fait venir pour savoir si c’était ce mois-ci ou ce mois-là. J’ai considéré que, par rapport à ce qu’était la transition, c’était un agenda qui me paraissait conforme au bel esprit de la révolution tunisienne.
QUESTION - Bonjour Monsieur le président. Roselyne FEBVRE de FRANCE 24.
LE PRESIDENT - Oui.
QUESTION - Ce matin, vous avez évoqué les valeurs positives de la Tunisie. Ce qui vous a permis d’ailleurs de glisser quelques subtiles recommandations. Alors, pensez-vous que les événements en Égypte vont servir d’avertissement à la Tunisie ? Vont-ils en tirer les leçons ? J’aimerais avoir votre analyse personnelle sur ce sujet.
LE PRESIDENT - Je vais parler de l’Égypte et puis je reviendrai en Tunisie parce que même si des comparaisons peuvent être faites, il y a des réalités différentes. Qu’est-ce qui se passe en Égypte ? Depuis plusieurs semaines, des mouvements considérables et l’armée qui prend la responsabilité de déposer le président. Je l’ai dit, c’est un échec, un échec pour tous ceux qui soutenaient ce processus. Il y a des risques. On voit bien les tensions qui peuvent encore survenir et se durcir, s’intensifier, des appels à des manifestations, des arrestations, des morts. Que doit dire la France – et pas seule – avec la communauté internationale ? Le retour le plus vite possible au processus politique de la démocratie, du pluralisme donc des élections et demander à tous les protagonistes, quel que soit leur sentiment, leur rancune ou leurs craintes, de chercher le rassemblement et l’apaisement pour revenir au processus politique et donc pour arriver le plus vite possible à des élections incontestables. La comparaison maintenant. La responsabilité de la Tunisie est très grande, c’est ainsi, surtout avec ce qui se passe en Libye – je parlais de la violence qui s’y est installée et de l’insécurité –, ce qui se passe en Égypte avec, pour le moment, une incertitude et la crainte de l’interruption d’un processus même si tout doit être fait pour le reprendre, ce qui se passe en Syrie (une guerre civile). Donc, quelle est la responsabilité du peuple tunisien, des responsables tunisiens ? Tous, qu’ils soient dans la coalition au pouvoir, qu’ils soient dans l’opposition, c’est de réussir, de montrer que le printemps arabe peut connaître son aboutissement au service de la liberté et de la démocratie. Oui, c’est une responsabilité très grande qu’a la Tunisie puisqu’elle a été la première à faire le printemps arabe, à faire la révolution, à renverser une dictature, à engager une transition politique. Et tous mes interlocuteurs – et j’en aurai sûrement confirmation du côté des forces politiques dites de l’opposition – sont conscients de l’enjeu pour la Tunisie et pour l’ensemble du monde arabe. J’ai senti cet esprit de gravité parmi tous mes interlocuteurs au plus haut niveau. Mais aussi par rapport à la jeunesse, au monde associatif qui s’est engagé, la Tunisie doit réussir. Et la responsabilité de la France, elle est aussi élevée. Nous n’avons pas été là au moment de la révolution. Je ne parle pas de moi. La France, elle n’a pas été là où elle devait être au moment de la révolution. Elle sera aux côtés des Tunisiens pour toute la période de la transition et, j’espère, bien au-delà.
QUESTION - (Inaudible).
QUESTION - Je répète ma question ?
QUESTION - Bien…
LE PRESIDENT - Je la répèterai (inaudible) parce que je peux… J’ai le micro, moi.
QUESTION - Sachant qu’AL-QAÏDA, qui est traquée en Afghanistan et au Pakistan, cherche depuis quelque temps à s’implanter dans le Sahel et en Afrique du Nord. Et craignez-vous, Monsieur le président, qu’après l’intervention française au Mali, que la France puisse être la cible d’attentats terroristes en représailles ? Merci.
LE PRESIDENT - Cette question-là, elle m’a été posée dès le premier jour de l’intervention française au Mali avec les armées africaines et nous, nous prenons toutes les mesures nous permettant de conjurer ces menaces. Mais je réponds directement à votre question : a-t-on parlé avec les autorités tunisiennes du terrorisme et de la lutte implacable qu’il convient de mener contre lui ? Oui, nous en avons parlé et nous soutiendrons tous les efforts de la Tunisie pour parvenir là où ce problème se pose, dans une partie du territoire, à ce combat-là contre le terrorisme. C’est une lutte qui nous concerne tous, pas la Tunisie simplement mais tout le Maghreb, l’Afrique de l’Ouest. Qu’observe-t-on en Libye ? Des groupes terroristes y sont installés ! On nous signale – puisque maintenant, tout est public – qu’il y a des groupes terroristes qui sont passés du Mali et sont allés se mettre en Libye pour mener des actions. Et d’ailleurs, elles ont été intentées ces actions au Niger. Il y a donc à coordonner nos efforts, à fournir des matériels qui peuvent correspondre aussi à cette exigence. Nous en avons parlé avec le gouvernement tunisien qui prend, là aussi, cette bataille, cette lutte très au sérieux. Pour le Mali, je peux vous confirmer que suite aux accords qui ont été passés dis de Ouagadougou entre le gouvernement malien et les représentants de ce qu’on appelle les Touaregs et les différentes populations du Nord-Mali, le ministre des Affaires étrangères a particulièrement suivi cette question et nous avons eu cette conclusion d’un accord. Et aujourd’hui, même, les premiers éléments armés maliens sont à Kidal. Ce qui prouve bien que nous avons permis non seulement de chasser des groupes terroristes, mais de retrouver, pour le Mali, l’intégrité totale de son territoire.
QUESTION - Monsieur le président, bonjour. Jérémy BROSSARD, BFM TV. En France, le Conseil constitutionnel a invalidé les comptes de campagne de Nicolas SARKOZY. Votre prédécesseur annonce qu’il se retire du Conseil constitutionnel. Ses proches, certains d’entre eux en tout cas, crient à un complot politique. Vous êtes le garant, le gardien des institutions en France. Quel regard vous portez sur cette situation qui est pour le moins assez inédite ? Merci.
LE PRESIDENT - Je n’ai pas à commenter et encore moins d’ici, en Tunisie, les comportements, les déclarations des acteurs ou des responsables politiques. En revanche, je suis le garant des institutions. C’est la fonction qui m’a été donnée par les Français le 6 mai dernier et qui me conduit à rappeler que le Conseil constitutionnel est une institution de la République qui, par son indépendance, règle des questions qui sont de sa seule autorité, des décisions qui s’imposent à tous. Et donc le Conseil constitutionnel doit être respecté, pleinement respecté, entièrement respecté et personne ne peut suspecter, mettre en cause cette institution sans alors mettre en cause l’ensemble des institutions. Voilà, s’il n’y a pas d’autres questions sur la Constitution française ou la Constitution tunisienne, je vous remercie…
QUESTION - Monsieur le président, pour la RADIO TÉLÉVISION SUISSE s’il vous plaît. Ici, à votre gauche.
LE PRESIDENT - Oui.
QUESTION - Vous avez fait le choix de ne pas vous rendre dans l’intérieur de la Tunisie où est pourtant partie la révolution et où on peut entendre la gronde, la grogne de temps en temps. Pourquoi ce choix que d’être resté sur Tunis et son entourage ?
LE PRESIDENT - Mais vous pensez que je ne vais venir qu’une fois dans mon mandat en Tunisie ? Donc c’était la première visite – je le disais – que je faisais comme président de la République. Première visite qu’un chef d’État français faisait depuis la révolution. Je devais rencontrer les principaux responsables, aller devant l’Assemblée nationale constituante, rencontrer les chefs d’entreprise, voir les associations, avoir aussi à cœur de parler à la communauté française. Si je peux vous donner une impression personnelle, je n’ai pas eu beaucoup de temps pour faire tout cela mais j’ai eu tellement d’envie d’y revenir que j’irai dans la Tunisie de l’intérieur. Merci.|N|N|N|N|Texte intégral 70455|Q - On va se pencher sur ce fameux dossier des mariages forcés, je prononçais tout à l'heure ce chiffre de 70.000 victimes chaque année en France. Vous avez un axe prioritaire, ce sont ces Françaises qui sont parties à l'étranger, parties forcées, c'est ça ?
R - C'est un phénomène dont nous connaissons l'existence, mais on n'en a jamais vraiment mesuré l'étendue. En début d'année, j'ai lancé une enquête auprès de notre réseau diplomatique et consulaire, pour savoir quels sont les pays où nous devons traiter le rapatriement de certaines de ces jeunes filles, et leur accompagnement par les consulats.
Cela m'a permis de faire deux choses : d'abord, d'établir une typologie des pays à risque ; et puis de voir comment ces jeunes filles sont traitées. Ces jeunes filles sont en grande détresse, elles arrivent souvent sans identité, sans papiers parce que leur passeport leur a été retiré, leur téléphone supprimé. Parfois, elles ont été séquestrées et elles se retrouvent finalement dans un consulat devant des agents consulaires qui doivent d'abord s'assurer de leur identité, de leur état civil. Il faut en effet s'assurer qu'elles sont bien françaises, puis elles seront conseillées et bénéficieront parfois également d'un appui pour rentrer en France. C'est donc une charge très lourde.
Par ailleurs, le retour en France peut être compliqué parce qu'il faut se souvenir que le mariage a été organisé à partir de la France, à partir de la famille qui a envoyé la jeune fille, pendant l'été, dans son pays d'origine. Il peut y avoir des difficultés pour réintégrer la famille, réintégrer la France. Nous avons donc aussi besoin, en France, d'avoir une prise en charge de ces jeunes filles.
Q - Vous parliez de souffrance tout à l'heure, de détresse. C'est très concret pour ces jeunes femmes ?
R - Oui. Ce sont des jeunes filles qui se retrouvent souvent dans des situations très difficiles, qui ont été violées, séquestrées et qui ont pu s'échapper. Ce que nous voulons aujourd'hui, c'est pouvoir les informer, leur faire connaître leurs droits, leur faire savoir qu'elles ont droit à une protection consulaire à l'étranger et que des agents des consulats sont à leur écoute et, surtout, peuvent ensuite les accompagner.
Q - Globalement elles sont jeunes ? Est-ce qu'elles ont régulièrement en dessous de dix-huit ans ?
R - Dans les dix cas que nous sommes en train de traiter, elles ont entre quatorze et vingt-quatre ans.
Q - Est-ce que vous pouvez faire preuve de sévérité à l'égard des maris, de ceux qui les forcent ?
R - Il est important que ces jeunes filles saisissent la justice.
Q - Vous recevez un rapport aujourd'hui sur ce thème-là...
R - Oui. Il s'agit d'une enquête que j'ai lancée en début d'année auprès de nos postes diplomatiques et consulaires, avec une synthèse qui a été faite sur les cas traités. Nous examinons entre douze et quinze cas par an depuis les cinq dernières années. Mais je pense que le phénomène est beaucoup plus étendu que cela puisqu'en six mois déjà, maintenant qu'il y a une prise de conscience de ce phénomène, nous avons une dizaine de cas à traiter.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2013 |N|N|N|N|Texte intégral 70456|Mesdames, Messieurs,
Alain MIMOUN vient de nous quitter. C’était un combattant courageux, un sportif exceptionnel et un patriote fervent.
Alain MIMOUN était né à Telagh, dans le nord de l’Algérie, le 1er janvier 1921.
Alain MIMOUN est mort à Champigny, dans le Val-de-Marne, le 27 juin 2013.
Entre ces deux dates, s’étend une longue et belle vie faite d’endurance, de sacrifices, et de victoires.
La première de ces victoires fut modeste, c’était de décrocher le certificat d’études primaires, le titre de gloire des enfants de la troisième République. Il l’obtint avec la mention « bien », et son ambition alors était de devenir instituteur. Mais la bourse qui aurait pu financer ses études lui fut refusée. Ce fut pour Alain MIMOUN une blessure. Mais loin de se détourner de la France, il décida de la servir pour être pleinement reconnu par elle.
Il s’engagea donc à 19 ans dans l’armée.
Il se bat alors sur le front belge, où il est témoin de « l’étrange défaite » de 1940. Il intègre le régiment de sapeurs-démineurs en Algérie et participe pendant six mois, de novembre 1942 à mai 1943, au combat contre l’Afrika Korps de ROMMEL. Il aurait pu s’arrêter là. C’était déjà une belle et grande victoire. Mais non, il rejoint l’Italie comme caporal dans le corps expéditionnaire du maréchal JUIN. Il prend part à la bataille de Monte Cassino, en janvier 1944 il est grièvement blessé à la jambe, au point que les médecins s’interrogent, l’amputation est envisagée. La vie d’Alain MIMOUN se joue là. Il se relève, se soigne et repart au combat. Il manque le débarquement en Normandie, qu’importe, il sera de celui de Provence jusqu’à la victoire finale.
A la Libération, il court pour un autre destin. Depuis ce jour de 1947 où Alain MIMOUN est devenu champion de France de course de fond, il collectionne les titres nationaux et mondiaux, jusqu’aux Jeux olympiques de Melbourne en 1956 où il remporte la médaille d’or du marathon.
Ces succès, il les doit à des vertus qui ont fait la personnalité d’Alain MIMOUN et qui peuvent encore aujourd’hui, plus que jamais, avoir valeur d’exemple.
La première de ces vertus c’est la persévérance. Alain MIMOUN aimait comparer sa carrière à « un château » : « Ma médaille d’argent, disait-il, à Londres en 1948, ce sont les fondations ; mes deux médailles d’Helsinki, en 1950, ce sont les murs ; ma médaille d’or de Melbourne, c’est le toit ». La maison est finie.
La seconde de ces vertus c’est la volonté. L’athlétisme, il l’avait découvert fortuitement, à l’armée. Mais, par la suite, il n’a plus laissé aucune place au hasard. Chaque matin, pendant des heures, il s’entraînait. Chaque soir, il mesurait le chemin parcouru. Il courait et il courait encore. Il s’obstinait, parce que tout ce qui n’était pas excellence lui paraissait médiocrité. Il ne s’arrêtait jamais. Il y a à peine 10 ans, à l’occasion des championnats du monde d’athlétisme, certains le voyaient à 82 ans, faire le tour du stade de France, chaussé de ses mocassins de ville… Rien ne lui faisait peur. Il courait. Il courait encore.
Alain MIMOUN, c’était le courage. Il a souvent raconté à ses proches la course mythique de Melbourne. Il s’élançait contre le champion ZATOPEK. Peu de commentateurs lui accordaient la moindre chance de victoire. Mais lui, il y croyait. Il y croyait non seulement au premier kilomètre, le plus facile, mais au trentième, déjà loin du départ, toujours loin de l’arrivée. Il courait sous une chaleur de 40 degrés, ses jambes lui faisaient mal et il ne trouvait plus son souffle alors il s’écria dans une voix intérieure « Fainéant, tu ne vas pas lâcher maintenant ! ». Alors il a couru et a gagné.
Quelque chose le portait, quelque chose de plus puissant que tout, c’était l’amour de la France. « Je rêvais, disait-il, de voir le drapeau français au milieu du stade, je rêvais d’entendre la Marseillaise, c’était mon obsession. ».
Alain MIMOUN, né en Algérie, avait choisi la France. Il était imprégné de son histoire.
La France, pour Alain MIMOUN, c’était un choix, une passion, une fierté, un idéal.
La France, pour Alain MIMOUN, c’était de hautes figures. C’était le chevalier BAYARD, dont un portrait ornait sa maison de Champigny. C’était le général de GAULLE, qui fut sa référence, et qui lui avait dit un jour : « Mimoun, vous et moi, nous avons un point commun : nous durons ». Il a duré jusqu’à aujourd’hui. Une haute figure, c’était aussi Jacques CHIRAC, avec lequel il partageait, au-delà des idées, un territoire, une terre, un département, la Corrèze.
Son épouse, Germaine, venait de Tulle, une belle ville. Ensemble, ils s’étaient installés à Bugeat, sur le plateau de Millevaches où Alain MIMOUN courait bien sûr, mais où il avait contribué au développement d’un Centre pour sportifs qui porte aujourd’hui son nom. C’est là, à Bugeat, qu’il reposera aux côtés de Germaine, disparue il y a trois mois.
Alain MIMOUN était un grand champion mais aussi un homme simple, doué de la véritable humilité, celle qui est plus forte que l’orgueil.
La vie d’Alain MIMOUN est une leçon. Il a vaincu les fatalités, il a dépassé ses propres limites. Il savait souffrir pour l’accomplissement de lui-même et la réussite de son pays.
Aujourd’hui, devant sa famille, devant ses proches, devant ses amis sportifs, devant aussi le régiment dans lequel il a servi, c’est toute la France qui rend hommage à Alain MIMOUN, à celui qui a couru tout au long de son existence sur des champs de bataille pour porter nos couleurs, sur les pistes des stades pour faire retentir la Marseillaise.
Pour Alain MIMOUN qui a couru, cherchant la gloire pour son pays, un pays qu’il aimait plus que tout. Un pays qui lui exprime par ma voix aujourd’hui sa plus sincère reconnaissance.Vive la République et vive la France !|N|N|N|N|Texte intégral 70457|
La France exprime son indignation devant la poursuite des bombardements massifs sur la ville martyre de Homs. Nous condamnons avec la plus grande force l'utilisation indiscriminée, par le régime syrien, de l'ensemble des moyens militaires à sa disposition, pour frapper massivement une population civile otage des combats.
La France souhaite que ces crimes ne restent pas impunis.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2013|N|N|N|N|Texte intégral 70458|
Votre attachement à Madagascar n'a d'égal que le mien pour l'enseignement français à l'étranger.
Cette restructuration du réseau, indispensable, s'est faite dans la concertation depuis 2007 ; elle a été accompagnée de mesures d'aide : bourses pour les élèves français, exonération des frais de première inscription pour les élèves malgaches, forfait transport de 500 euros par an pour deux aller et retour par avion. Les élèves qui ne pourront se déplacer bénéficieront de l'enseignement du Cned.
Aucune modification du réseau n'interviendra dans les prochaines années. Notre souci est de bâtir un enseignement français de qualité à Madagascar.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2013|N|N|N|N|Texte intégral 70459|
Mesdames, Messieurs les Membres du Conseil d'administration du GIP,
Mesdames, Messieurs les participants à l'Assemblée générale,
C'est un honneur et un plaisir pour moi de pouvoir ouvrir votre 5ème conseil d'administration et votre 2ème assemblée générale depuis la création du GIP au printemps 2012. Ce GIP a été créé pour assurer la coordination des Commémorations. Le Département y est représenté par le Secrétaire général adjoint, M. Jean-François Blarel. L'Institut français y est également représenté.
La tenue de votre conseil dans ces murs du ministère des affaires étrangères a tout son sens : en effet il me semble tout à fait souhaitable de valoriser le rôle qu'ont pu jouer nombre de nos compatriotes résidant à l'étranger dans les deux conflits mondiaux.
Trois types de pays sont en définitive concernés par les commémorations des deux derniers conflits mondiaux dont mon collègue Kader Arif a la charge :
- les combattants des anciennes colonies / pays du champ ;
- les anciens combattants Français de l'étranger ayant combattu dans les FFL ;
- les Français de l'étranger (parfois binationaux) ayant combattu sous uniformes étrangers (en Amérique latine par exemple, nombreux cas de Français engagés dans l'armée américaine).
Dès le début des réflexions liées à la commémoration des deux conflits mondiaux, j'ai souhaité m'investir personnellement dans les programmations qui se dérouleront tout au long des années 2014, 2015 et 2016.
J'envisage pour ma part trois types d'actions qui pourraient être menées spécifiquement sur la problématique des Français de l'étranger dans le cadre des commémorations à venir :
- une action pédagogique auprès des lycéens français de l'étranger en liaison avec le GIP, l'AEFE et le Centre national de documentation pédagogique
- une action patrimoniale et mémorielle visant à exploiter les archives disponibles sur la mémoire des Français de l'étranger ayant répondu à l'appel de la mère patrie. La valorisation de ces archives de personnes connues ou inconnues, de femmes ou de minorités s'étant illustrés, pourrait faire l'objet de livre mémoire et le cas échéant d'exposition dématérialisée sur internet et itinérante à l'étranger.
- enfin une action plus politique : à l'occasion de déplacements conjoints à l'étranger que j'envisage de réaliser avec Kader Arif. Un module «mémoire» pourrait être intégré à chaque déplacement. Nous aurons d'ailleurs d'ici la fin du mois l'occasion d'accompagner ensemble le Premier ministre en Corée du Sud.
J'ai souhaité mobiliser la direction des archives du Département sur les documents qui pourraient concerner des Français de l'étranger impliqués dans les deux derniers conflits mondiaux. Je devrais rencontrer prochainement à ce sujet le nouveau directeur des archives, M. Richard Boidin afin que le travail de recherche réalisé tant par le Département que par nos postes puisse être effectué en coordination avec la FACS, la Fédération nationale des anciens combattants résidant hors de France.
J'ai en effet demandé en début d'année que nos postes diplomatiques et consulaires soient interrogés afin qu'ils puissent dresser un état des lieux de leurs anciens combattants localement et des propositions de ce qui pourrait être mis en oeuvre dans le cadre de ces cycles de commémorations en fonction de ce qu'ils perçoivent sur place.
Je compte sur la mobilisation du GIP et des services des archives tant du Département que du ministère de la défense pour faire remonter dès que possible des ressources documentaires susceptibles de donner corps à cette action patrimoniale et mémorielle que nous devons mener compte tenu de l'implication souvent méconnue de nos concitoyens de l'étranger lors des deux conflits mondiaux.
J'aurai le plaisir de vous retrouver en fin de matinée autour d'un verre pour échanger avec vous sur cette problématique et je souhaite une excellente réunion de votre conseil d'administration et une assemblée générale fructueuse.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2013|N|N|N|N|Texte intégral 70460|Monsieur le Député,
Vous avez décrit la situation d'une façon malheureusement juste. Bien évidemment, les dispositions sont prises, dès aujourd'hui, pour renforcer la protection de nos entreprises et pour faire en sorte que tous nos concitoyens inscrits au registre des français de l'étranger soient prévenus. Des dispositions sont prises aussi, en ce qui concerne la France, pour assurer la protection de tous les bâtiments égyptiens.
Mais votre question porte plus généralement sur la situation égyptienne. Comment la résumer en un mot ? La réalité, ce sont les violences et l'urgence est au contraire au rassemblement. C'est autour de ces deux idées que la France a dit sa disponibilité. Ces violences, vous l'avez rappelé, ont fait plus de 50 morts lundi. Elles sont inacceptables, tout comme l'appel au soulèvement. Il faut qu'il y ait une enquête. Nous demandons à chacun d'agir, en particulier au nouveau président, pour que le rassemblement soit également présent dans le gouvernement. Il est nécessaire que ce rassemblement permette d'aller rapidement aux élections afin que l'on retrouve un processus démocratique. Voilà je crois ce qui est conforme à la tradition de la France.
J'ai fait connaître notre disponibilité aux nouvelles autorités égyptiennes, au ministre des affaires étrangères, et j'ai l'intention de prendre contact - le président de la République me l'a demandé - avec le nouveau président. Je pense que ces deux principes : refus de la violence et nécessité du rassemblement, sont conformes à la tradition de la France et aux intérêts supérieurs de l'Égypte qui, comme vous l'avez rappelé, est un grand pays dont il faut assurer autant que possible la stabilisation.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2013 |N|N|N|N|Texte intégral 70461|
- Quelle est tout d’abord votre définition et votre vision de la francophonie, que l’on a tendance, à tort, à limiter à la promotion de la langue française ?
Vous avez raison, la francophonie c’est bien sûr la promotion de la langue française dans le monde, mais c’est plus que cela. Pour moi, le ministère de la Francophonie est un ministère d’influence au service des valeurs et des peuples de langue française. Les sujets sont nombreux. Je milite pour un espace francophone où les barrières à la mobilité s’estompent pour les étudiants, les artistes, les professeurs et les chercheurs.
Je m’attache aussi à défendre la vision d’une francophonie politique, une francophonie des droits de l’Homme. A ce titre, la France et les 77 pays membres de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) travaillent main dans la main. La langue est un vecteur, la langue est un ciment mais elle est aussi un outil de promotion de la démocratie et de l'aide au développement.
Dans presque toutes les rencontres effectuées depuis le début du quinquennat, j’insiste en préambule sur le fait que la francophonie d’aujourd’hui s’incarne pleinement en étant désencombrée" de la charge de l’histoire coloniale. C’est capital. La francophonie devient une chance économique et culturelle.
- Le premier Forum des femmes francophones que vous avez organisé en mars dernier a mis en lumière la régression inadmissible de leurs droits dans certains pays. Comment la francophonie peut-elle prévenir les violences et garantir les droits des femmes ?
Ce forum a permis une avancée fondamentale : libérer la parole. Je reçois chaque jour des lettres de participantes qui me remercient d’avoir initié ce mouvement. Car il s’agit d’un véritable mouvement qui n’aurait pas vu le jour sans l’aide du secrétaire général de l’OIF, le président Abdou Diouf.
Aujourd’hui, nous lançons une deuxième phase, celle de l’action politique et diplomatique. Le prochain Sommet de la francophonie aura lieu au Sénégal à l’automne 2014. J’étais à Dakar lundi dernier pour rencontrer le président Macky Sall et les organisateurs du sommet. J’ai demandé à l’OIF, et les responsables sénégalais sont d’accord, que la question des droits des femmes soit une des priorités de cet événement. Il est temps que les chefs d’Etat et de gouvernement s’engagent. Il faut des actes.
Je me bats pour que le respect des droits des femmes soit inscrit dans les textes fondateurs de l’OIF. Et je ne suis pas seule dans ce combat : des milliers de femmes comptent sur nous.
- Depuis votre prise de fonctions, vous avez effectué plus d’une trentaine de déplacements à travers le monde qui comprennent systématiquement un volet économique. Quels en sont les objectifs ?
La francophonie est un formidable levier de croissance et d’emploi pour les entreprises. Le problème c’est que beaucoup d’entrepreneurs n’en ont pas conscience ! Alors même que l’Afrique, très largement francophone, sera demain l’un des moteurs de l’économie mondiale !
L’appartenance à l’espace francophone favorise l’ouverture commerciale et stimule les échanges internationaux. A chacun de mes déplacements je demande à rencontrer les entrepreneurs et les dirigeants de filiales pour comprendre les difficultés qu’ils peuvent rencontrer sur le terrain. A Paris, je m’efforce de sensibiliser les patrons du CAC 40 mais aussi les patrons de PME.
Je fais un constat : être francophone offre un avantage compétitif face à des pays comme la Chine ou l’Inde. D’ailleurs, c’est en partie pour cela que la Chine se met de plus en plus au français. La francophonie est un investissement d’avenir, il ne faut pas le négliger.
- Sur le territoire français, comment développez-vous la francophonie dans toutes les dimensions évoquées ?
Je mène une réflexion interministérielle, notamment avec mon collègue François Lamy en charge de la politique de la ville. Mon objectif c’est de ramener du français dans les territoires en souffrance. D’abord auprès des jeunes qui ne maîtrisent pas le "français du monde du travail". Apprendre à rédiger une lettre de motivation, mener un entretien d’embauche ; c’est aussi cela le français. Je souhaite que les entreprises soient parties prenantes de ces formations. Car l’esprit de ce dispositif c’est du "gagnant-gagnant" pour les entreprises comme pour les apprenants.
La francophonie en France c’est aussi mon souhait de généraliser ce que j’appelle l’Ecole des mamans pour les mères immigrées qui ont trop longtemps été les oubliées de la République.
- Le Gouvernement fait de la jeunesse une priorité. Quel est votre regard sur la perte de confiance des jeunes générations ? Un message à adresser aux jeunes de l’espace francophone ?
Chez les jeunes, il y a un vrai désir de francophonie. On le voit lors de grandes manifestations comme le Forum mondial de la langue française de Québec où des milliers de jeunes ont fait le déplacement en juillet 2012. Je sais que la période n’est pas facile mais je sais aussi que leur soif d’engagement est intacte. Ce que je veux leur dire c’est que la francophonie a beaucoup à leur apporter que ce soit en matière de formation, de carrière, d’échanges ou même de rencontres. La francophonie ce n’est pas accessoire : c’est le début d’une belle aventure.
Source http://www.gouvernement.fr, le 16 juillet 2013