Interview de Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du gouvernement à France 2 le 18 juillet 2013, sur le projet de loi sur l'égalité entre les hommes et les femmes.

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Média : France 2

Texte intégral


ROLAND SICARD
Avant de parle du projet de loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes, je voudrais qu’on revienne sur les hausses d’impôts annoncées dans la presse de ce matin, notamment la hausse de la TVA qui passerait à 21% et pas 20, vous confirmez ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non je ne confirme rien du tout, le président de la République a eu l’occasion de s’exprimer sur ce sujet dimanche dernier et il l’a dit. L’essentiel des efforts que nous souhaitons réaliser sur l’année 2014 le sera par des économies sur les dépenses de l’Etat et des pouvoirs publics. Pour ce qui est des recettes, il y a ce que nous avons déjà annoncé, donc l’augmentation de la TVA tel que nous l’avons annoncé, c’est-à-dire une augmentation toute mesurée, s’agissant du taux normal avec une augmentation du taux intermédiaire qui est moindre et puis une baisse en revanche du taux des produits de premières nécessité. Et à quoi sert cette augmentation de la TVA ? A financer le crédit d’impôt compétitivité emploi des entreprises que nous avons installées pour qu’elles puissent embaucher et pour le reste, il n’y a pas d’autres mesures qui ont été annoncées pour une raison très précise, c’est que les décisions ne sont pas prises et il y a une volonté de passer davantage par les économies sur les dépenses que par la TVA.
ROLAND SICARD
Cela dit dimanche, François HOLLANDE n’a pas exclu une augmentation des impôts pour 2014.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Il ne l’a pas exclu…
ROLAND SICARD
Il a dit qu’il essaierait de l’éviter.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
…en précisant qu’il ferait tout pour l’éviter parce que notre… vous savez, on n’augmente jamais les impôts par plaisir. Encore une fois si nous essayons de réduire le déficit de la France, car c’est cela que nous aspirons à faire, c’est parce que nous voulons avoir des comptes plus sains qui nous permettent précisément à la fois de ne pas laisser une ardoise aux générations à venir et en même temps, de pouvoir financer nos priorités aujourd'hui sans avoir à recourir à l’emprunt et à nous mettre en permanence dans la main des marchés. Donc nous le faisons pour cette année 2014 davantage par les économies sur les dépenses et c’est beaucoup les mesures qui ont été annoncées hier par le Premier ministre en termes de simplification, qui ont un impact évidemment sur le coût de la dépense publique, et pour ce qui est…
ROLAND SICARD
Ce sont de grosses économies ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ce sont des économies importantes, des mesures qui ont déjà été annoncées par exemple dans le cadre de la réforme de la politique familiale, d’autres mesures qui ont été annoncées hier de modernisation du service public rendu aux usagers…
ROLAND SICARD
Politique familiale, il y a la baisse du quotient familial, c'est une hausse d’impôts ça.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Pour quelques-uns, pour ceux qui d’une certaine façon en ont le moins besoin, mais au profit d’autres, puisqu’à côté en effet, la baisse du quotient familial pour les ménages les plus aisés, vous avez une augmentation de l’allocation de soutien familial pour les familles monoparentales, vous avez une augmentation de 50% du complément familial pour les familles nombreuses qui sont dans la difficulté. Vous avez surtout la création de 275.000 places d’accueil, que ce soit des places de crèches, des assistantes maternelles ou de la préscolarisation. Donc vous avez des services en plus et tout cela répond évidemment aux besoins des familles. Vous savez, notre politique, il faut la prendre comme un ensemble, ce que nous cherchons à faire, c’est à financer les meilleurs services possibles pour l’ensemble des ménages français.
ROLAND SICARD
L’opposition elle parle de politique d’austérité. C’est un terme que vous récusez ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C’est un terme que je récuse absolument pour une raison simple, c’est qu’on ne fait pas de l’austérité lorsqu’on adopte un plan anti pauvreté à 2 milliards d’euros. On ne fait pas d’austérité quand on prévoit de mettre 60.000 nouveaux postes dans l’Education nationale. On ne fait pas d’austérité lorsque, comme ça a été annoncé cette semaine, on met 120 millions d’euros sur les bourses des étudiants, permettant à une petite centaine de millier d’étudiants, d’avoir des droits renforcés dès la rentrée prochaine. Non, je crois qu’au contraire, nous sommes dans une politique juste évidemment qui passe par le redressement de nos comptes, mais précisément pour financer ce que nous estimons être nos priorités, la formation, l’emploi, nous avons besoin de redresser nos comptes sinon nous n’avons pas de marge de manoeuvre.
ROLAND SICARD
Sur l’affaire CAHUZAC, Charles de COURSON disait hier ici que François HOLLANDE savait tout depuis le mois de janvier. Si c’est le cas, pourquoi est-ce qu’il n’a pas fait démissionner Jérôme CAHUZAC plus tôt ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Vous savez, moi je suis assez surprise de la façon dont se comporte monsieur de COURSON dans cette affaire. Vous avez une commission d’enquête, rappelez-vous par le passé lorsque l’opposition que nous étions demandait une commission d’enquête au gouvernement, généralement ça lui était tout bonnement refusé. Or cette fois-ci, donc le gouvernement a accepté que la commission d’enquête se tienne, les ministres sont venus répondre devant cette commission d’enquête, sous serment, de façon totalement publique, chacun peut regarder ces auditions et la commission d’enquête doit ensuite remettre un rapport dans lequel elle délivre ses conclusions. C’est un travail collégial qui est fait au sein de cette commission. Donc voir monsieur de COURSON courir ensuite les plateaux de télévision pour commenter ce travail, ne me parait pas de bon aloi parce que je pense qu’il faut respecter les règles de cette commission et que par ailleurs, dans la mesure où les travaux de cette dernière sont publics…
ROLAND SICARD
Vous pensez qu’il aurait dû attendre la fin de la commission, du rapport de la commission ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
D’une part, je pense en tout cas qu’il aurait pu éviter d’aller distiller des doutes et des soupçons, des présupposés ici ou là…
ROLAND SICARD
Mais est-ce que François HOLLANDE savait ou ne savait pas ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais François HOLLANDE a toujours dit comment les évènements s’étaient passés, c’est ça qui est intéressant, c’est que ça n’est pas comme si il n’avait pas été amené à s’exprimer le président de la République sur ce sujet. Il l’a fait, il n’a jamais varié et encore une fois, tous les témoignages qui sont fait dans le cadre de la commission d’enquête sont publics, donc j’invite tous ceux que ça intéressent à aller les consulter de près comme ça ils auront exactement le même niveau d’information y compris que monsieur de COURSON. Donc maintenant je ne suggère qu’une chose, c’est que cette commission d’enquête puisse travailler sereinement, dans la collégialité, rendre ses conclusions en temps et en heure et qu’on arrête d’instrumentaliser plus que de besoin sur ce sujet qui a déjà fait je crois beaucoup de mal à la vie politique dans son ensemble.
ROLAND SICARD
Le projet de loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes, qu’est-ce que ça va changer concrètement ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ca va changer beaucoup de choses, d’abord ça va permettre aux femmes d’être considérées à égal enfin des hommes dans le milieu du travail. C’est toute la partie égalité professionnelle dont on a l’impression qu’elle est acquise de longue date et on voit bien les écarts de rémunérations entre les hommes et les femmes, ce n’est pas encore tout à fait ça. Donc un exemple…
ROLAND SICARD
C’est 12%.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, pour ce qui est de ce qu’on appelle la discrimination pure, c’est-à-dire à travail égal salaire inégal. Mais il y a ensuite tout le reste, c’est-à-dire pas les mêmes opportunités de promotion, pas le même accès aux responsabilités qui impact évidemment le montant des rémunérations. Donc un exemple de ce que nous faisons sur ce sujet des inégalités professionnelles, nous interdisons désormais aux entreprises qui ne respectent pas leurs obligations légales en matière d’égalité professionnelle de soumissionner à un marché public. Ça c'est une mesure extrêmement forte et dissuasive et donc nous espérons bien que dans quelques mois, quelques années à peine, elle installera pour l’ensemble des entreprises concernées, les plus de 50 salariés, l’évidence de la nécessité de se conformer à ces obligations.
ROLAND SICARD
Ce n’est pas le premier texte sur le sujet, pourquoi celui-là serait plus efficace que les autres ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Sur l’égalité professionnelle ce n’est pas le premier texte, celui-là sera plus efficace car nous instaurons justement des procédures et y compris des sanctions assez fortes et donc je pense que ça aura son effet. En revanche, c’est le premier texte de loi qui porte sur l’ensemble des inégalités entre les hommes et les femmes qu’on retrouve à la fois dans la vie professionnelle, ce que je viens de dire, mais qu’on retrouve dans d’autres domaines. Prenez par exemple notre mesure sur les pensions alimentaires, voilà un domaine précis qui semble relever de la vie privée, quid de l’après séparation entre un couple…
ROLAND SICARD
40% des pensions ne sont pas payées régulièrement.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Exactement. Lorsque le deuxième parent en effet refuse de payer sa pension alimentaire à la mère isolée, généralement c’est comme ça que ça se passe, eh bien nous avons décidé de ne plus laisser la mère isolée faire face seule à cette difficulté à devoir aller récupérer son argent et nous créons une garantie publique contre les impayés de pension alimentaire qui est la CAF, qui fera désormais écran entre la mère isolée…
ROLAND SICARD
Les allocations familiales.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
…et le débiteur défaillant, voilà, la Caisse d’Allocations Familiales. Donc cette Caisse d’Allocations Familiales, lorsque la pension alimentaire ne sera pas payée et ce dès le premier mois, versera en substitution ce qu’on appelle une allocation de soutien familial d’une centaine d’euros, par mois et par enfant, puis ce sera à la CAF de se retourner contre le débiteur défaillant pour récupérer son dû avec des moyens d’actions évidemment bien plus importants que ceux que pouvait avoir la mère isolée. Donc c’est une nouveauté très importante que nous introduisons et qui va permettre, je crois, peut-être d’abord de lutter contre la précarité des familles monoparentales, vous savez qu’aujourd'hui une famille monoparentale sur trois vit sous le seuil de pauvreté et que cette précarité est souvent liée au non versement des pensions alimentaires. Et puis en second lieu, de mieux responsabiliser l’ensemble des parents quant à la vie de leurs enfants.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 août 2013