Interview de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé à I Télé le 12 juin 2013, sur le conditionnement des médicaments et l'accès aux soins médicaux.

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Média : Itélé

Texte intégral


CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce qu’il y a en France un développement inquiétant des cas de corona virus ?
MARISOL TOURAINE
Non, il n’y a pas depuis les deux cas, les deux patients qui ont été atteints…
CHRISTOPHE BARBIER
Dans le Nord…
MARISOL TOURAINE
Du corona virus dans le Nord, dont un est malheureusement décédé, il n’y a pas de nouveaux cas en France de corona virus. Je veux dire que chaque jour pratiquement, des personnes sont testées. A ce jour, 49 personnes ont été testées pour savoir si elles étaient atteintes ou non par le corona virus. Et dans les 49 cas, les résultats sont revenus négatifs. Ce qui veut dire que la suspicion n’a pas été confirmée. Nous sommes en attente d’un résultat, comme ça a été le cas au cours des dernières semaines pour les autres patients.
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce qu’il ne serait pas nécessaire néanmoins, au nom de la précaution, de suspendre les vols entre la France et l’Arabie Saoudite, ou au moins de contrôler plus drastiquement les passagers qui en reviennent ?
MARISOL TOURAINE
Nous donnons des conseils, et nous recommandons aux voyageurs, lorsqu’ils vont dans les pays du Moyen-Orient, de respecter des règles d’hygiène extrêmement précises, et de ne pas toucher d’animaux – je le répète – de ne pas entrer en contact avec des animaux, puisque nous ne connaissons pas l’origine de ce virus, qui doit transiter par un animal, a priori, mais nous ne savons pas lequel. Au retour de voyage, nous recommandons à ces voyageurs d’être attentifs à leur état de santé, et au cas où ils développent de la fièvre, de la toux par exemple, de consulter rapidement. Donc pas d’interdiction, mais des recommandations précises, il ne s’agit pas d’affoler. Nous avons une politique qui est une politique définie au niveau international, la France est évidemment en relation avec l’Organisation mondiale de la santé, et je le dis, je souhaite qu’une coopération renforcée se mette en place au niveau international, pour que nous puissions arriver à déterminer l’origine de ce virus.
CHRISTOPHE BARBIER
Pas de dysfonctionnements décelés à l’usine TEVA de Sens, où est conditionné le Furosémide, allez-vous diligenter d’autres enquêtes dans l’entreprise ?
MARISOL TOURAINE
Il y a deux enquêtes qui sont menées parallèlement dans cette entreprise TEVA, d’une part, une inspection a eu lieu, qui n’a montré aucun dysfonctionnement permettant d’expliquer l’erreur de conditionnement que l’on a observée la semaine dernière. Concrètement, on a retrouvé des somnifères dans des boîtes qui devaient contenir des diurétiques, et l’enquête qui a eu lieu ne permet pas de dire : il y a eu tel dysfonctionnement. Mais il y a une deuxième enquête qui est en cours, qui consiste à examiner le contenu des boîtes qui reviennent à l’entreprise, sous contrôle évidemment des autorités sanitaires, pour le moment, aucune des boîtes qui est revenue n’a fait apparaître de mauvais conditionnements.
CHRISTOPHE BARBIER
LE FIGARO publie une lettre d’un ancien pharmacien employé par TEVA qui dénonce le contrôle qualité défaillant dans l’entreprise, est-ce que vous allez l’auditionner ? Est-ce qu’il va être entendu ?
MARISOL TOURAINE
Ecoutez, il va y avoir une saisine du Parquet pour voir comment nous devons poursuivre l’enquête. Moi, je ne crois pas que les rumeurs, les commentaires des uns et des autres soient forcément utiles dans cette période. Mais je voudrais surtout indiquer que cette erreur – qui est rarissime – de conditionnement n’a rien à voir avec le fait que le médicament en question soit un médicament générique, soit un médicament générique…
CHRISTOPHE BARBIER
On a l’impression qu’ils sont quand même traités un peu par-dessus la jambe…
MARISOL TOURAINE
Non, c’est une entreprise qui est une entreprise reconnue, le premier "génériqueur" au niveau mondial, il ne s’agit pas de dire : les génériques sont de mauvais médicaments, c’est un problème…
CHRISTOPHE BARBIER
Ça rapporte moins, donc on apporte moins de soins, forcément…
MARISOL TOURAINE
Non, absolument pas, c’est un marché évidemment considérable, j’insiste là-dessus, il y a eu… et c’est un problème de conditionnement que nous cherchons à expliquer et à comprendre, mais le fait que ce soit un médicament générique n’a rien à voir, le générique est un médicament qui permet de soigner et qui soigne très bien. J’insiste là-dessus parce que la France est le seul pays développé dans lequel il y ait une telle inquiétude à l’égard des médicaments génériques, et je veux redire que cette inquiétude n’a pas de fondements.
CHRISTOPHE BARBIER
Alors, le diurétique vient de Hongrie, le somnifère vient d’Espagne, tout ça est conditionné à Sens, c’est peut-être ça le problème, on devrait peut-être obliger les conditionnements sur le lieu de production ?
MARISOL TOURAINE
Le conditionnement a lieu en France, c’est ce qui se passe pour beaucoup de nos médicaments, y compris les médicaments de marque…
CHRISTOPHE BARBIER
Il faut peut-être changer…
MARISOL TOURAINE
C’est-à-dire les médicaments qui ne sont pas des génériques, j’ai indiqué que je souhaitais que nous puissions travailler avec l’industrie pharmaceutique à la relocalisation d’une partie de l’activité de production de médicaments sur le sol européen, nous sommes en discussion, cela suppose d’identifier notamment des filières stratégiques ou des médicaments qui, pour nous, sont particulièrement importants, parce qu’il y a la sécurité, mais il y a aussi la volonté de lutter contre les ruptures éventuelles d’approvisionnement, parfois, il arrive que, un médicament ne soit plus disponible, et c’est une préoccupation pour moi.
CHRISTOPHE BARBIER
Les deux cachets incriminés se ressemblent physiquement, à l’oeil, est-ce qu’il ne faut pas imposer aux laboratoires de mieux distinguer par des couleurs, par des formes, leurs médicaments ?
MARISOL TOURAINE
On peut le faire, mais vous savez, il y a beaucoup de médicaments, il y a beaucoup de médicaments, et on le voit, qu’il s’agisse de médicaments de marque ou de médicaments génériques, prenez ceux que peut-être vous utilisez à l’occasion, ou de façon plus régulière, et ils se ressemblent, et donc l’enjeu, il est de faire en sorte d’apporter une garantie, que le patient n’ait pas à se demander lui-même si le médicament qu’il prend est le bon, mais qu’il ait confiance, cela dit, j’observe que dans le cas du Furosémide, c’est une patiente qui a donné l’alerte, et donc ça a fonctionné.
CHRISTOPHE BARBIER
Confirmez-vous que le paquet de cigarettes va augmenter de 40 centimes en deux fois 20 centimes ?
MARISOL TOURAINE
Une hausse du prix des paquets de cigarettes a été décidée dans la loi de financement de Sécurité sociale à la fin de l’année dernière, cette hausse va intervenir début juillet, elle représentera 30 à 40 centimes selon le prix de base du paquet de cigarettes…
CHRISTOPHE BARBIER
En deux temps ?
MARISOL TOURAINE
A priori, en un temps, et les discussions ont lieu aujourd’hui, pour savoir à quel moment exactement cela va intervenir, mais ça se fera début juillet.
CHRISTOPHE BARBIER
C’est pour ça que vous freinez sur la cigarette électronique, c’est pour qu’on continue à fumer de vraies cigarettes qui rapportent à l’Etat ?
MARISOL TOURAINE
Non, je ne veux pas que la cigarette rapporte à l’Etat, et d’ailleurs, nous augmentons le prix du paquet de cigarettes comme un élément d’une stratégie d’ensemble pour amener les gens à arrêter de fumer. Moi, je voudrais rappeler que le tabac tue, il tue…
CHRISTOPHE BARBIER
73.000 personnes…
MARISOL TOURAINE
Oui, 200 personnes par jour, c’est donc la première cause de mortalité que l’on pourrait éviter dans notre pays, c’est un enjeu de santé publique, il ne s’agit pas simplement de jouer sur la fiscalité, parce que ça ne suffit pas, c’est pour cela que j’ai annoncé un plan d’ensemble, destiné aux femmes enceintes : apposer un logo pour rappeler aux femmes enceintes, un logo sur les paquets de cigarettes, pour leur rappeler que fumer est dangereux, aider au sevrage, c’est-à-dire, concrètement, apporter une aide financière pour que les gens arrêtent de fumer, et encadrer l’utilisation de la cigarette électronique, qui aujourd’hui se développe de façon un peu préoccupante…
CHRISTOPHE BARBIER
Anarchique…
MARISOL TOURAINE
Parce que ça apparaît comme un produit mode, un produit chic, et moi, je ne veux pas que, on se mette à fumer la cigarette électronique comme autrefois, on s’est mis à fumer du tabac.
CHRISTOPHE BARBIER
Vous allez prendre en main la réforme sur les retraites, est-ce que, aligner le public sur le privé est votre objectif ?
MARISOL TOURAINE
L’objectif du gouvernement, c’est une réforme qui soit une réforme juste, vous savez, on parle beaucoup des retraites, et trop souvent, et il faut donc arrêter avec ces petites réformes à répétition qui ont pour seul objectif de financer à quelques années, et qui n’y arrivent pas. Et donc…
CHRISTOPHE BARBIER
Une grande réforme, c’est public, privé alignés.
MARISOL TOURAINE
Non, une grande réforme, c’est une réforme qui inscrit nos régimes dans la durée, la question du public et du privé sera posée, évidemment, la Fonction publique ne restera pas à l’écart d’une réforme, mais montrer du doigt les fonctionnaires, ça n’est certainement pas une bonne façon pour aborder une réforme des retraites.
CHRISTOPHE BARBIER
Et les retraites seront moins indexées sur les prix, donc le pouvoir d’achat sera grignoté.
MARISOL TOURAINE
A ce jour, aucune décision n’est prise, c’est une proposition qui est faite par certains, ça n’est pas une proposition qui a nécessairement vocation à être retenue.
CHRISTOPHE BARBIER
Claude GUEANT doit-il rendre les 260.000 euros de prime qu’il a touchés de manière apparemment indue ?
MARISOL TOURAINE
En tout cas, il faut qu’il explique comment il a pu percevoir autant d’argent sous une forme qui n’était a priori pas légale, la justice est saisie, c’est à la justice de statuer.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 juin 2013