Déclaration de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des Français de l'étranger, sur l'aide apportée aux victimes du terrorisme, à Paris le 18 septembre 2013.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Colloque sur le thème de "L’Europe contre le terrorisme : le regard de la victime", à Paris le 18 septembre 2013

Texte intégral


Monsieur le Ministre des Affaires Étrangères,
Mesdames et Messieurs les Élus,
Mesdames et Messieurs les Représentants d'associations,
Mesdames, Messieurs,
Chers Collègues et Amis,

Quelques heures après avoir ouvert le colloque consacré aux victimes civiles du terrorisme, j'ai à nouveau le plaisir de me trouver à vos côtés.
Beaucoup d'entre vous ont participé aux tables rondes de l'après-midi, dont les discussions furent riches et utiles. Elles ont permis de tirer les enseignements d'une décennie de lutte et de mobilisation.
Elles sont revenues sur les progrès réalisés pour mieux accompagner les victimes. Je pense notamment à la phase souvent longue et pénible des procédures judiciaires contre les auteurs de ces actes.
Elles ont permis également d'échanger sur les répercussions médicales, sociales et psychologiques. Autant d'impacts qui appellent des réponses appropriées de la part des pouvoirs publics.
La réussite du colloque tient surtout à son parti pris : faire du point de vue de la victime l'axe pivot des mesures destinées à soulager, autant qu'il est possible, les effets dévastateurs du terrorisme. Cela peut paraître évident aujourd'hui : cela ne l'a pas toujours été.
En France, Il a fallu la ténacité d'une Françoise Rudetzki, fondatrice de SOS attentats, le volontarisme de l'Association française des victimes du terrorisme, et, plus récemment, l'expertise de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs, pour que ce changement de perspective soit rendu possible.
La Fondation Miguel Angel Blanco, en Espagne, et l'Association italienne des victimes du terrorisme, ont oeuvré en un sens identique. Avec le soutien des autorités étatiques et des autorités européennes, les victimes, leurs familles, les associations qui les représentent, ont réussi à faire entendre leur voix.
On comprendra alors en quoi l'exposition «L'Europe contre le terrorisme, le regard de la victime» enrichit le propos du colloque. Le titre est éloquent. Il dit la nécessité d'élargir les points de vue, et de ne plus jamais omettre celui de la victime. Il signale combien les États et les institutions européennes font bloc et se montrent résolus à combattre les atteintes à la sécurité de nos sociétés démocratiques.
Il est d'usage de dire que le terrorisme n'a pas de visage. L'exposition que nous inaugurons aujourd'hui montre qu'il n'en est rien. Oui, le terrorisme a un visage : c'est celui des victimes.
La valeur et la force des images résident d'abord dans cette démonstration : les victimes ne sont pas des valeurs comptables accolées à des dates. Se souvenir que tel attentat a fait tant de morts, c'est important, c'est utile à la mémoire collective. Mais cela ne suffit pas.
Un acte terroriste peut toucher une, dix, dix mille personnes, son scandale est tout entier contenu dans le désespoir d'un visage, la détresse d'un regard, la meurtrissure d'un corps. Et bien sûr, dans le retrait de la vie, inexcusable. À ceux qui veulent trouver des circonstances atténuantes, il faut rappeler sans relâche l'illégitimité des fins et l'infamie des moyens.
Il faut, comme le fait l'exposition, montrer l'hébétude de cet agent municipal de Madrid, venu secourir les victimes des attentats du 11 mars 2004, qui ont coûté la mort à 192 personnes. Il est essentiel d'exposer le désespoir de cette jeune Norvégienne après les attentats d'Oslo commis en juillet 2011. Il importe de diffuser l'image de ce père tentant de réconforter d'une main protectrice son fils ayant assisté à la mort de trois enfants et d'un adulte, abattus devant l'école juive Ozar Hatorah, à Toulouse, le 19 mars 2012.
Montrer les victimes ne participe en aucune manière d'une forme d'exhibition. C'est au contraire une arme contre le fanatisme, la haine, l'ignorance.
Le vrai visage du terrorisme est celui de ses victimes : rien ne serait pire qu'en faire des abstractions. En les montrant en leur qualité d'êtres de chair et de coeur, les démocraties dressent contre la barbarie le rempart de la reconnaissance, de l'empathie et de la solidarité.
Une passionnante section de l'exposition est d'ailleurs consacrée aux réactions des sociétés européennes dans ces périodes d'extrême vulnérabilité. Que démontrent les exemples espagnols, italiens, irlandais et français ? Que les sociétés ont beau être meurtries, elles restent soudées et se renforcent quand elles sont formées d'individus libres réunis autour d'un idéal de fraternité.
Cet idéal est le nôtre, mais aussi celui de toutes les nations éclairées. À cet égard, il n'est pas anodin que l'exposition soit une initiative conjointe de trois pays - L'Espagne, l'Italie et la France -, avec le soutien de l'Union européenne.
Ce rappel m'offre l'occasion de saluer une nouvelle fois nos partenaires - la Fondation espagnole Miguel Angel Blanco, l'Association française des Victimes du Terrorisme, l'Association Italienne des Victimes du Terrorisme et la Commission européenne.
Permettez-moi de réitérer mes remerciements aux victimes et à leurs familles présentes parmi nous. Vous avez eu le courage de venir témoigner aujourd'hui. À travers vous se fait entendre la voix des victimes à travers le monde. Il est essentiel qu'elle soit entendue, par-delà la diversité des trajectoires et des expériences de vie.
Je forme le voeu que cette exposition permette à ces femmes, à ces enfants, à ces hommes désarmés de se sentir moins seuls, et de se savoir soutenus par la nation toute entière.
Je vous remercie de votre bienveillante écoute, et vous souhaite une agréable soirée.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 septembre 2013