Déclaration de M. Pascal Canfin, ministre du développement, sur l'aide française au développement, à Paris le 1er juillet 2013.

Prononcé le 1er juillet 2013

Intervenant(s) : 

Circonstance : Session plénière de la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), à Paris le 1er juillet 2013

Texte intégral

Messieurs les présidents,
Monsieur le secrétaire général, Cher André Laignel,
Mesdames et Messieurs les membres de la CNCD,
Mesdames et messieurs les élus,
Chers Amis,
Pour la deuxième fois depuis le début de l’année, j’ai l’honneur de présider vos travaux. La première fois, le 29 janvier dernier, c’était pour faire suite à la remise, quelques jours plutôt, du rapport d’André Laignel, à Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères.
C’était aussi pour vous présenter les priorités du ministère, en écho aux attentes des collectivités territoriales et de leurs groupements, en particulier sur le terrain du développement, dont j’ai la charge, et des enjeux globaux.
Nous étions alors en plein exercice des Assises du développement et de la solidarité internationale, sous l’impulsion du Premier ministre et du Président de la République, auxquelles vous avez été parties prenantes. Ces assises ont été clôturées par le Président de la République le 1er mars, après 4 mois de concertation avec tous les acteurs du développement.
Le président de la République a lors de son discours du 1er mars déterminé plusieurs marqueurs et orientations pour notre politique de développement, que je souhaiterais brièvement rappeler.
Face aux défis du développement et à l'objectif d'éradication de l'extrême pauvreté, notre politique de développement doit contribuer au développement économique du Sud et à la satisfaction des besoins essentiels. Le président nous a appelé à réfléchir à des critères et des principes pour mettre en place ces objectifs, qui seront définis dans la future loi sur le développement et dans le rapport qui lui sera annexé. Critères politiques, et notamment l'exigence démocratique, critères sur la transparence, la lutte contre la corruption, mais aussi sur la redevabilité de notre aide, voilà des chantiers sur lesquels je souhaite recueillir vos commentaires et analyses. Progresser vers plus de transparence, d'efficacité de notre aide, voilà un des enjeux clé que nous avons à mettre en oeuvre.
Le président avait aussi rappelé l'objectif de sécurité, sans lequel le développement n'est pas possible, au Mali comme ailleurs. Ces sujets sont essentiels, et vous savez qu'au Mali, avec l'effort de la France, de l'Union Européenne, l'aide reprend progressivement son cours. Les collectivités n’en ont pas été absentes de cet effort. Lors de la Conférence des donateurs à Bruxelles le 15 mai, la voix des collectivités, maliennes et françaises, a été portée. Elles ont montré qu’elles pouvaient appuyer de façon complémentaire l’aide bilatérale, et que leur aide, via les collectivités maliennes, et les associations d’élus, permettaient de toucher tout le territoire.
Nous en discuterons tout à l’heure, plus précisément, mais je souhaitais vous réaffirmer l’engagement de l’Etat français pour travailler avec les collectivités territoriales et bénéficier des liens que vous avez créés avec vos collectivités partenaires. Je confirme que le fonds d’urgence de Cités Unies France sera bien abondé par l’Etat, comme promis, pour des projets menés via et pour les collectivités locales maliennes.
Pour rester sur le sujet du Mali, nous y expérimentons, pour l'Aide Française, un dispositif innovant de suivi citoyen, pour assurer la transparence de l'aide. En effet, la France va pour la première fois publier sur un site internet une liste précise des projets qu’elle va financer dans le cadre de l’aide au développement. Ce dispositif permettra à la fois aux Françaises et aux Français de voir concrètement à quoi sert notre aide, mais aussi aux Maliennes et aux Maliens et à leurs ONG de suivre, grâce au calendrier, l’exécution des projets, et ainsi de constater avancées et éventuels retards. Une hotline par SMS viendra compléter ce dispositif en permettant une interpellation directe des responsables français. Inédite, cette méthode instaure une forme de contrôle citoyen à côté des contrôles habituels. Je souhaiterais, si vous en êtes d’accord que les collectivités puissent contribuer à cet exercice de transparence et qu’elles fassent l’effort de rendre également publiques leurs actions de coopération décentralisée au Mali. En lien avec l’Ambassade de France au Mali, nous pourrions ainsi avoir une vision claire et exhaustive des projets menés par la France et par les collectivités, de façon à rendre l’aide publique au développement plus efficace, plus transparente.
Le troisième objectif fixé par le président de la République, c'est le développement durable. Vous le savez, la France accueillera très probablement en 2015 la conférence de l'ONU sur le climat. Nous sommes pleinement mobilisés, avec vous, et je compte sur les collectivités territoriales pour être des acteurs dans ce domaine. J’ai d’ailleurs donné comme mission à Michel Delebarre et Ronan Dantec, de réfléchir à la façon d’associer et de mobiliser les réseaux des collectivités pour aboutir à un accord en 2015.
Notre réunion de la CNCD aujourd’hui vise à faire ensemble un nouveau pas en avant, pour la coopération décentralisée, pour la diplomatie des territoires, comme aime à l’appeler Laurent Fabius, grâce au renforcement de votre Commission, pleinement reconnue dans son rôle central d’animation de la coopération décentralisée et de l’action extérieure des collectivités territoriales.
Conformément à vos souhaits, mais également aux recommandations du rapport Laignel, la CNCD a vocation à être une véritable instance de discussion, de concertation.
Nous avons souhaité, avec Jean-Michel Despax, délégué à l’action extérieur des collectivités territoriales, profiter de vous avoir tous réunis, et pouvoir vous entendre sur différents sujets.
Nous reviendrons plus en détail sur les aspects juridiques liés à la loi sur le développement dans un deuxième temps de notre réunion. Comment faire en sorte de valoriser l’action de coopération à l’international des collectivités ? comment sécuriser la coopération décentralisée ? Vos associations membres et vos réseaux d’élus ont largement été sollicités sur l’article de loi qui concernera les collectivités et leur action extérieure. Je compte sur vous pour nous aider. Mon cabinet a bien reçu les différentes propositions, et nous ne manquerons pas d’en tenir compte.
Pour faire suite aux recommandations du rapport Laignel, il faut un minimum de renforcement institutionnel et beaucoup d’engagement personnel.
Pour cela, nous avons préparé un projet de décret, modifiant le texte actuel d’une manière plus approfondie et plus consensuelle que lors de la réforme technique, sans doute nécessaire, mais incomplète, de 2006. Avent d’engager la procédure interministérielle assez longue, car il s’agit d’un décret en Conseil d’Etat, je tenais à communiquer ce projet à votre Commission et, sur la base de votre appréciation, à saisir les ministres de l’intérieur et de la décentralisation, ces dispositions étant destinées à figurer dans la partie règlementaire du Code général des collectivités territoriales.
Je ne ferai pas ici le commentaire détaillé de ce texte, mais vous en rappelle les grandes lignes. Outre une mise en harmonie avec l’organisation gouvernementale, ce projet comporte des éléments de nature à vous permettre de travailler dans de meilleures conditions et avec une visibilité accrue. En même temps que l’augmentation – déjà réalisée de fait cette année – du nombre des plénières et le doublement du nombre des « personnalités qualifiées », la mise en place d’une Commission permanente et d’un Vice-président sont le gage d’une concertation plus active entre les sessions.
Ce renforcement de la C.N.C.D., qui sera donc un organe plus souple, plus dynamique, dans un esprit de renforcement de votre action et de valorisation de votre rôle, montre bien qu’il n’y a pas lieu de se faire de souci sur la mise en place, parallèlement, du nouveau Conseil national du développement et de la solidarité internationale (C.N.D.S.I.), comme aboutissement des Assises.
Nous en parlerons tout à l’heure plus en détail, puisqu’un document sur ce sujet figure également sur la table. Pour répondre à certaines interrogations des élus, la C.N.C.D. reste plus que jamais votre maison et c’est là que se débattront les orientations stratégiques communes à l’Etat et à vos collectivités. Et le CNDSI apportera, j’en suis persuadé, de la valeur ajoutée, pour un dialogue multiacteurs rénové. Je compte sur vous pour apporter votre expertise à cette enceinte, qui sera paritaire, et où vous pourrez disposer de 8 représentants.
Votre Commission sera également désormais dotée d’un Comité économique, conformément aux recommandations d’André Laignel. Ce pas essentiel représente beaucoup de travail en perspective, mais la réunion que le délégué, Jean-Michel Despax, a organisée à ce propos le 13 juin dernier a été un succès de mobilisation. Il vous en rendra compte dans quelques instants et vous pourrez donc vous exprimer sur la manière dont cette instance est appelée à travailler. Je tiens à ce stade à remercier la délégation et en premier lieu le secrétaire général de la C.N.C.D. et la secrétaire adjointe [Anne-Marie Mevel-Reingold] pour leur inlassable activité, en plus de leurs tâches traditionnelles, sur lesquelles vous avez exprimé votre satisfaction. L’idée de vous adjoindre un rapporteur général et, quand il le faudra, des rapporteurs spéciaux pour la conduite de vos « chantiers », en synergie avec la D.A.E.C.T., procède d’une stratégie consciente et déterminée de renforcement de vos moyens. Nous pouvons en débattre.
Vous connaissez mon attachement à la concertation et au retour des expériences de terrain. Le rôle irremplaçable que vous jouez dans la démocratie territoriale, mais aussi dans plus de 140 pays avec vos actions de coopération m’est très important. Vous contribuez à l’émergence d’une gouvernance participative, plus responsable et plus transparente. En outre – comme je l’ai souligné, vos collectivités sont un réservoir d’expertise de proximité, au service des citoyens et dans la durée.
A un moment où le Gouvernement cherche à rendre plus cohérente et plus efficace l’action de la France à l’étranger, les pouvoirs locaux, les collectivités sont pour lui un acteur clé. Ils le sont par leur action de plaidoyer sur la scène internationale, ils le sont aussi par les acquis de la coopération décentralisée et par leur capacité à valoriser les dynamiques des territoires, tant dans le domaine de l’attractivité que de la présence à l’extérieur.
Avec le concours et l’expérience des ambassadeurs pour les régions mis en place par Laurent Fabius, avec la cellule d’appui européen auprès de la D.G.M. qui sera chargée de mieux coordonner les financements européens, c’est un véritable plan d’action qui se fait jour, dont vous êtes les protagonistes.
Enfin, je tiens en ce jour à vous remercier, à saluer l’action des associations que vous représentez et des réseaux que vous animez. Une C.N.C.D. renforcée sera pour les années qui viennent le meilleur outil d’un dialogue rénové entre l’Etat et les collectivités, et de la refondation de l’action internationale des collectivités territoriales.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 octobre 2013