Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Monsieur le Sénateur,
À l'Assemblée générale des Nations unies, le président de la République française, dans ses propos devant l'ensemble des chefs d'État et de gouvernement, a centré l'essentiel de son discours sur la République centrafricaine. Dimanche dernier, je me suis moi-même rendu en République centrafricaine, à Bangui. J'étais accompagné de la commissaire européenne chargée des questions humanitaires.
La République centrafricaine : ses trois initiales sont RCA, et le problème est que le A, aujourd'hui, cela veut dire «Abandon». L'abandon se traduit par le fait que 10 % de la population est aujourd'hui déplacée, qu'il existe une mortalité infantile de plus de 10 % et qu'à l'exception de Bangui, sa capitale où la sécurité est plus ou moins assurée grâce aux troupes françaises, le reste du pays est ravagé par des bandes armées.
Personne ne s'intéressait à ce sujet, et il se trouve que la France, parce que c'est sa mission, a décidé de lancer l'alarme sur ce pays qui, comme son nom l'indique, est au centre de l'Afrique. Une réflexion de bon sens est nécessaire : on ne peut pas prétendre porter attention à l'Afrique, continent d'avenir, si on ne porte pas attention et appui à son centre. C'est précisément là où se trouve la République centrafricaine.
Le sujet, si on veut le schématiser, c'est au moins trois séries de préoccupations.
D'abord, sur le plan de la sécurité. Dans les provinces, la situation est effrayante - vous l'avez décrite en quelques mots - et, pour la première fois dans l'Histoire de la Centrafrique, il existe des conflits d'ordre religieux entre les chrétiens qui sont majoritaires et les musulmans. J'ai rencontré, dimanche dernier, les chefs des trois principales religions (catholique, protestante et musulmane) présentes en RCA. Ils sont totalement opposés à ces guerres internes. Ils les constatent, ils les condamnent et ils les déplorent. À cette situation-là se greffe la question de la Seleka qui a été dissoute par le chef d'État de la transition, M. Djotodia, qui n'est pas reconnu par la communauté internationale. Les soldats de la Seleka, qui ne sont pas payés, ainsi que les fonctionnaires, et ceci depuis quatre mois, vont revenir à la vie civile ou intégrer l'armée. Vous voyez les problèmes que cela pose.
Les quatre pays limitrophes de la RCA ont envoyé des troupes, qui composent une force que l'on appelle la MISCA. Aujourd'hui, elles sont au nombre de 2.100, et ce chiffre va monter jusqu'à 3.500 hommes. La France a sur place 410 hommes et elle envisage d'augmenter son contingent si cela s'avère nécessaire. Nous avons obtenu, par ailleurs, une résolution du conseil de sécurité des Nations unies, votée à l'unanimité, qui fait obligation au secrétaire général, et ceci dans un délai de trente jours, de présenter un rapport sur la situation. Il y aura une deuxième résolution qui donnera mandat à cette force ainsi qu'à la France d'intervenir davantage. Puis il y aura une troisième résolution au printemps pour envisager, peut-être, ce que l'on appelle une opération de maintien de la paix.
Donc, la question de la sécurité est traitée par les quatre pays agissant au nom de la communauté des États de l'Afrique centrale en liaison avec l'Union africaine et la France.
Le deuxième problème concerne la situation humanitaire. La situation est celle que je vous ai décrite. Elle est abominable. L'Europe, la France et la communauté internationale, réunis au sein de la conférence des donateurs, doivent permettre d'avancer sur ce sujet.
Et puis, il y a un problème politique. Les élections doivent avoir lieu au plus tard en février 2015 mais il n'y a plus d'état-civil. Avant 2015, il faudra également qu'il y ait un référendum pour accepter la Constitution. Il faut donc une montée en régime démocratique alors que les deux principaux responsables, M. Djotodia et son Premier ministre, n'auront pas le droit de se présenter à ces élections. Ils m'ont confirmé, devant les représentants des Nations unies, qu'ils ne le feraient pas.
Tout est à faire. Nous en avons discuté avec le président de l'Afrique du sud, avec Mme Zuma au nom de l'Union africaine, avec les quatre pays limitrophes avec lesquels je suis en contact étroit. La France fera son devoir.
Voilà notre position sans nous substituer aux Africains : il faut appeler l'attention internationale sur ce conflit qui peut devenir gravissime, et agir en mobilisant à la fois l'Europe, la communauté internationale, l'ensemble de l'Afrique et apporter à nos amis africains le soutien qu'ils méritent.
Ce que j'ai dit aux Centrafricains, comme je vous le dis, Monsieur le Sénateur, la France ne laissera pas tomber la République centrafricaine.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 octobre 2013