Déclaration de Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme, sur la politique du tourisme, Paris le 26 novembre 2013.

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Circonstance : Installation du comité de pilotage des Assises du tourisme, à Paris le 26 novembre 2013

Texte intégral

Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les présidents,
Mesdames et messieurs,
Je suis heureuse de vous accueillir ce matin à Bercy pour l'installation du comité de pilotage des assises du tourisme et je veux toutes et tous vous remercier très chaleureusement pour l'enthousiasme dont vous avez fait preuve lorsque nous vous avons proposé de participer à cette grande mobilisation sur le tourisme.
Vous tous ici avez accepté de consacrer du temps, dans des agendas souvent déjà très chargés, pour piloter des groupes, pour participer au comité de pilotage, pour apporter votre regard et votre expertise de professionnel ou d'élu, mais aussi simplement d'usager.
Nous le savons bien et en sommes depuis longtemps convaincus, le tourisme est un atout essentiel pour la France. Mais justement, l'objectif de ces assises est aussi de le faire savoir et de permettre une prise de conscience collective sur tout ce qu'il peut apporter à notre pays.
Les chiffres, vous les connaissez. Notre pays est la première destination touristique au monde, avec 83 millions de visiteurs accueillis l'année dernière.
Economiquement, le tourisme représente 7% de la richesse produite, soit plus que notre agriculture, ou que le secteur automobile, et pèse pour près de 12 milliards d'euros de solde positif dans la balance des paiements.
Notre pays possède une offre touristique sans égale dans le monde : 37 sites classés à l'Unesco, plus de 43.000 monuments historiques classés ou inscrits, 4.000 sites et événements touristiques accueillant au total près de 300 millions de visiteurs. Sans compter les parcs naturels, nos massifs montagneux parmi les plus hauts d'Europe, les trois façades maritimes de l'Hexagone et les rivages d'outre-mer….
Nous avons une offre hôtelière et de restauration riche et diversifiée, nous avons un maillage de transports exceptionnel, des savoir-faire artisanaux et industriels de qualité qui exportent un Style France dans le monde entier.
Le tourisme est par ailleurs un élément fédérateur pour nos régions, nos départements, nos communes. C'est une réelle opportunité pour tous les Français sur tous les territoires. Les touristes dépensent localement. Leur présence augmente la consommation dans les commerces et la fréquentation des établissements culturels ou sportifs notamment. Et les investissements réalisés pour développer les transports et les équipements collectifs bénéficient en premier lieu à nos concitoyens.
C'est enfin un secteur créateur d'emplois avec plus de 2 millions de personnes qui y travaillent directement et indirectement. Des emplois qui ont la particularité de ne pouvoir être délocalisés et qui s'adressent, pour partie, à une population faiblement qualifiée.
Le tourisme est donc l'affaire de tous.
Pourtant, rien n'est jamais acquis. De nouvelles destinations émergent, et la concurrence est aujourd'hui de plus en plus importante entre les pays. C'est pourquoi nous devons réagir …
De nouvelles attentes sont créées par le numérique et l'arrivée de nouveaux pays sur le marché du tourisme, par les enjeux d'un développement culturel et durable des territoires, de la préservation et la valorisation de notre patrimoine, du rayonnement de notre gastronomie et de nos savoir-faire, de la sécurité de nos visiteurs, de l'efficacité de nos transports, de la modernisation de nos infrastructures, de l'apprentissage des langues étrangères, mais aussi et surtout de la nécessité d'être aux yeux de tous une grande nation accueillante et chaleureuse.
Le tourisme nécessite donc aujourd'hui une nouvelle mobilisation, et c'est là tous les défis que nous devons relever lors de ces assises.
C'est un enjeu déterminant alors que l'on prévoit une forte croissance de ce secteur d'activité dans le monde. Le nombre de touristes est passé de 278 millions en 1980 à plus d'un milliard en 2012. Et ce chiffre pourrait doubler d'ici 20 ans, selon nos estimations.
C'est pourquoi le Président de la République a souhaité en faire une priorité avec un objectif clair : maintenir le rang de la France et dégager le premier solde touristique de tous les pays d'Europe.
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, m'a donc confié l'organisation des Assises du tourisme. Il s'agit de dégager un programme d'actions concrètes pour dynamiser le secteur, mieux utiliser l'ensemble du potentiel national et renforcer l'attractivité de la France.
Pour bénéficier de cette dynamique, un mot d'ordre : l'implication de tous les Français, au-delà même de l'Etat, d'Atout France, des collectivités territoriales, des professionnels pour lesquels il faut définir un cadre et des objectifs communs.
La mise en place de ces Assises du Tourisme constitue une occasion unique d'échange et de réflexion.
Je souhaite qu'à leur issue une politique innovante, volontariste et efficace soit mise en place de façon pérenne.
Le tourisme doit être un outil prépondérant au service, tout à la fois, de la croissance, de l'emploi, de l'aménagement du territoire et de l'amélioration de la qualité de vie.
Avec tous les ministres associés, nous avons identifié neuf thèmes qui constituent autant de groupes de travail dans lesquels bon nombre d'entre vous sont répartis. Je vous les présente rapidement mais vous trouverez plus de détails dans le dossier de presse.
Le premier thème est l'émergence de nouvelles destinations. Le tourisme se concentre aujourd'hui sur une petite partie du pays : 20 % du territoire accueille 80 % des flux de touristes. La région francilienne regroupe par exemple 20 des 30 premiers sites culturels les plus visités de France. Paris et les autres destinations phares (la côte d'Azur par exemple) bénéficient certes d'une visibilité internationale mais elles ne doivent pas occulter la diversité du territoire français ni l'émergence d'offres innovantes correspondant aux nouveaux comportements de consommation touristique, comme les circuits à vélo, l'éco-tourisme, l'oenotourisme…). Il nous faut donc mettre en valeur des lieux et des thématiques bien identifiés dans nos territoires, en métropole comme en Outre-mer, à l'image des contrats de destination que j'ai déjà initiés avec l'expertise d'Atout France et le concours de mes services, mais nous devons faire mieux.
Autre question : comment diversifier l'offre ? La France possède des richesses remarquables, mais le potentiel touristique de certaines de ses destinations, comme par exemple les grands sites naturels ou certains événements culturels, n'est pas pleinement exploité en termes d'accessibilité, d'offres de services, de qualité d'accueil… Il est nécessaire de professionnaliser les pratiques de valorisation touristique de ces territoires. Cela peut passer par l'implantation d'une activité économique sur les sites (restauration, hôtellerie, musée…) ou par le développement d'une politique événementielle susceptible de développer la notoriété du site. Il est également indispensable de développer des offres diversifiées et innovantes pour répondre aux exigences des nouvelles clientèles et de l'évolution des comportements des touristes. Par exemple, mettre en place une offre alternative au ski en montagne, ou développer d'autres activités sur le littoral, dans nos campagnes ou dans les villes.
La diversification de l'offre touristique est alors une réponse aux enjeux liés à la saisonnalité. Il faut imaginer de nouvelles filières touristiques qui permettent notamment d'allonger la durée du séjour et donc d'augmenter les recettes.
Autre sujet, le tourisme d'affaires et de grands évènements. Le segment du voyage d'affaires a représenté 40 milliards d'euros de recettes l'an dernier en France, soit un cinquième des dépenses du secteur en Europe. Les prévisions montrent que les dépenses de voyages d'affaires devraient progresser de 50 % dans le monde à l'horizon 2023. La France doit prendre une part plus importante d'un marché du voyage d'affaires en pleine croissance, et qui sont une porte d'entrée dans le pays. Les évènements sportifs sont de leur côté un formidable levier de promotion des territoires comme nous le voyons chaque année avec le Tour de France par exemple.
Ce groupe sera chargé d'évaluer les forces et les faiblesses de notre pays dans ce domaine, entre autres, la rénovation et l'adaptation de l'offre hôtelière et fera des propositions pour déployer une véritable et identifiable « offre française ».
Egalement, la qualité de l'accueil est un des points essentiels de l'attractivité touristique. Les points d'entrée sur le territoire, comme les aéroports, ou les gares sont les premiers lieux de contact avec notre pays et ils comptent beaucoup dans l'image que les touristes retiennent d'une destination.
La simplicité d'accès et d'orientation des transports sur place est également un critère important dans l'expérience touristique.
Les centres d'information visiteurs ou les services numériques contribuent aussi à la qualité du service rendu aux touristes.
Enfin, l'accueil est celui qui est réservé aux touristes à chaque étape de leur parcours depuis les gares et les aéroports, mais également dans les hôtels, les restaurants, les commerces, les activités.
Il s'agit de changer notre image, mettre en place une signalétique adaptée, développer les informations en langues étrangères, et identifier toutes les pistes pour améliorer la qualité de l'accueil des touristes dans notre pays. La question de la sécurité des touristes, un point sensible notamment pour la clientèle asiatique, sera également étudiée par le groupe de travail.
Quant aux métiers du tourisme, créer une filière d'excellence est primordial alors que la lutte contre le chômage est la priorité absolue du gouvernement. Le rapport de François Nogué, président de Pôle Emploi, intitulé « Le tourisme, filière d'avenir – Développer l'emploi dans le tourisme » qui est riche et de grande qualité. Il constitue une base solide pour les réflexions de ce groupe.
Trois autres pistes de travail également proposées.
Comment favoriser l'investissement ?
L'investissement, qui est en recul de 4% sur un an, constitue pourtant un facteur de compétitivité primordial pour renforcer l'attractivité de la destination France alors que la concurrence augmente entre les pays, notamment européens. Les besoins en matière de rénovation et de remise à niveau de l'offre d'hébergements sont pourtant importants. Sans la poursuite d'un effort continu dans les investissements publics et privés, un déclin de l'attractivité de la France est prévisible. Nous devons trouver des solutions pour parvenir à un investissement satisfaisant en terme d'équipements qui bénéficieront directement aussi à nos concitoyens au delà de l'aspect touristique.
Autre question : comment fédérer l'action des pouvoirs publics et renforcer l'attractivité de la France ?
Ils ont un rôle d'accompagnement essentiel pour l'organisation et la structuration d'une offre touristique cohérente et attractive. Mais une meilleure coordination des acteurs et des outils est nécessaire, tant sur le territoire que dans nos réseaux à l'étranger qui sont une opportunité pour mieux appréhender les attentes de nos visiteurs et constituer des relais pour la promotion de la destination France.
C'est le sens des contrats de destination que j'ai mis en place, mais il faut aussi s'appuyer sur nos réseaux : je pense bien sûr aux bureaux d'Atout France, mais également aux ambassades.
Et aussi : comment adapter l'organisation de la filière aux mutations numériques ?
L'émergence de nouveaux acteurs numériques dans le tourisme est à l'origine d'une évolution en profondeur du partage de la valeur dans l'ensemble de la filière touristique, qu'il convient de réguler, d'anticiper et d'accompagner.
Internet, notamment, a généré de nouvelles formes de consommation des voyages. Désormais, les deux tiers des voyages réservés le sont via les sites spécialisés et 18,6 millions de français ont préparé leur séjour en ligne en 2012. Des pratiques auxquelles il faut ajouter l'utilisation des Smartphones et la consultation des réseaux sociaux au cours des séjours.
L'appropriation par les acteurs traditionnels du tourisme des nouvelles technologies et nouveaux usages du numérique est une priorité afin de faire de cette évolution une opportunité de développement. Le numérique permet notamment de nouveaux modes d'influence mais aussi de nouveaux services aux visiteurs pour améliorer l'expérience touristique.
Enfin, neuvième et dernier thème, et non des moindres : la relance du tourisme des Français. Les Français partent moins en vacances. En 2012, 46 % d'entre eux ne sont pas partis. Est en cause, la baisse du budget consacré aux vacances, conséquence de la crise économique, mais aussi des freins sociaux ou culturels. Les Français privilégient toujours l'Hexagone mais les séjours sont plus courts, les voyages se font par la route, et les maisons de campagne ou de famille sont plébiscitées. La relance du départ en vacances des Français constitue l'une des priorités du gouvernement, alors même que le tourisme des Français en France demeure la première source de recettes.
Le groupe de travail s'attachera à déterminer comment promouvoir l'offre française et comment convaincre de son caractère attractif en termes de qualité de séjours et de services, par rapport aux offres tout compris à l'étranger, sur la base des travaux menés par Claudie Buisson.
L'ensemble des propositions fera l'objet d'un plan d'ensemble en faveur de la relance du tourisme des français.
Ces groupes de travail ont à chaque fois deux ministères référents et sont pilotés chacun par deux personnalités, présentes parmi nous aujourd'hui. Je tiens une nouvelle fois à vous remercier pour votre participation.
Ces groupes se réuniront tout au long de la durée des assises et autant que de besoin.
Et puisqu'il est important de tenir compte des enjeux locaux pour proposer des solutions réalistes, et parce que le tourisme est une économie de proximité, profondément ancrée dans nos territoires, des rencontres d'une journée seront également organisées dans chaque région.
La restitution des travaux sera présentée au printemps à l'occasion de la tenue clôture des assises du Tourisme.
En conclusion, je souhaite que cette réflexion collective permette une prise de conscience collective sur tout ce que le tourisme peut apporter à notre pays en termes d'aménagement du territoire, de retombée économiques de modernisation des infrastructures, d'amélioration des services et donc de qualité de vie.
Ces assises, c'est une belle ambition pour notre pays, en faveur d'un secteur plein d'avenir, un secteur moderne et dynamique qui peut encore davantage se fédérer pour faire émerger plus d'innovation dans les offres proposées, pour qu'elles sortent de l'ordinaire, tout comme nos destinations, nos produits, ou notre accueil.
Innovation et modernisation sont véritablement les deux piliers de ces assises.
A vous, à nous, maintenant de donner corps à ce défi. Je sais que vous serez audacieux, imaginatifs, créatifs, que nous ne laisserez pas passer cette opportunité que nous avons de construire ensemble la France de demain.
Le tourisme est une chance pour la France. Je compte sur vous pour faire de ces assises une réussite au service d'un beau projet pour notre pays !
Source http://www.artisanat-commerce-tourisme.gouv.fr, le 27 novembre 2013