Texte intégral
Je suis heureux de vous voir si nombreux présents à cette journée, nous n'avons pas souvent l'occasion de réunir les acteurs de l'insertion par l'activité économique et ceux qui travaillent avec eux. J'espère que cette journée aura permis de répondre à une partie des questions que vous vous posez et que vous aurez pu profiter des temps d'échanges. Il reste encore des choses en suspens. C'est normal, nous sommes dans un processus de réforme qui est encore en cours de construction et qui va se déployer progressivement.
* Une grande réforme de simplification : ce n'est pas si simple
La réforme que nous allons conduire ensemble est une grande réforme. En prenant comme les financements comme clé d'entrée, nous allons reconstruire une politique pour l'insertion par l'activité économique.
Nous portons ensemble une conviction : nul n'est inemployable et c'est par le travail que l'on s'insère dans la société, que l'on prend ou reprend un rythme de vie, que l'on tisse des liens, entre autres choses.
Le contexte économique actuel fait que beaucoup de personnes se retrouvent exclues du marché du travail du fait d'une sélectivité accrue. Certaines ont besoin d'une période de transition plus ou moins longue pour reprendre pied. L'insertion par l'activité économique est une réponse précieuse qu'il nous faut développer et mobiliser à bon escient afin que les salariés en insertion puissent vraiment utiliser ces périodes de transition pour rebondir.
Dans un contexte budgétaire dont vous connaissez les contraintes, nous sommes parvenus à dégager des moyens importants pour mettre en place une part d'aide modulée pour les structures les plus performantes ou qui accueillent les personnes les plus en difficulté. Autre avancée majeure : l'indexation de l'aide au poste sur le SMIC est désormais un acquis. La situation que vous avez connue de décrochage des financements dans les entreprises d'insertion en particulier ne pourra donc plus se reproduire.
Aujourd'hui, la répartition des moyens n'est pas optimale et les structures passent beaucoup trop de temps à s'acquitter des formalités requises par les différents financeurs. Les structures qui innovent, qui développent des partenariats fructueux avec des entreprises ou qui accueillent des personnes en très grandes difficultés ne sont pas toujours encouragées à le faire.
Avec cette réforme, nous souhaitons redonner des marges de manuvre à l'Etat territorial pour construire une politique cohérente et efficace avec les acteurs du territoire.
Je salue l'énorme travail accompli par le conseil national de l'insertion par l'activité économique et par sa présidente Christiane Demontès. Je crois que cette instance a vraiment retrouvé tout son sens : elle a prouvé qu'il était possible de construire une réforme ambitieuse de manière partenariale, rapide et efficace. L'enjeu va être de réussir à ce que cette dynamique se décline sur chaque territoire.
Notre objectif premier, c'est la simplification : harmoniser les modes de financement, clarifier et coordonner les financements publics et simplifier ainsi la vie des structures pour qu'elles puissent se consacrer à plein à leur mission. Grâce aux conventionnements pluriannuels et aux versements mensuels, toutes les structures bénéficieront de plus de visibilité sur leurs ressources et pourront ainsi monter plus facilement des projets.
Pour autant, passer d'un système compliqué à un système plus simple, ce n'est pas si simple !
- Le premier mot d'ordre, c'est l'anticipation. C'est un défi car chaque situation est différente. Le simulateur que nous allons vous diffuser permettra toutefois à chacun d'anticiper aussi précisément que possible ce que sera sa situation en 2014 ;
- Le deuxième mot d'ordre doit donc être l'adaptation. Nous devrons être vigilants collectivement sur les cas de difficultés, de manière à les régler au mieux. Nous aurons de petites marges financières pour cela, que les DIRECCTE pourront utiliser en tant que de besoin.
* Une phase de transition que nous allons accompagner
L'année 2014 va être une année de transition. Nous allons l'accompagner. Dès 2015, nous aurons mis en place un nouveau paysage.
Nous avons opté pour un calendrier en deux temps afin de nous donner la possibilité de préparer au mieux la transition pour les AI et les ACI ; afin, aussi, que les structures puissent anticiper les effets du nouveau mode de financement et de gestion, et que les DIRECCTE aient le temps de renouveler les conventionnements pour l'ensemble des structures.
Nous allons travailler à lisser dans le temps les effets de la réforme, pour les perdants comme pour les gagnants. Vous le savez, la réforme représentera des augmentations de financement très significatives pour certaines structures. Il n'est pas question de revenir là-dessus mais cela va devoir se faire progressivement,
- d'abord pour ne pas créer de déséquilibres trop importants,
- et aussi pour laisser le temps aux structures d'ajuster leur projet et leur activité pour que ces financements puissent être utilisés au mieux.
Le passage au droit commun concernant la comptabilisation des salariés va également s'étaler dans la durée. Je crois qu'il s'agit d'un vrai progrès pour le secteur et pour les salariés. Nous appuierons les structures dans ce changement, notamment celles qui seront concernées par la mise en place d'institutions représentatives du personnel.
A l'issue de cette réunion, six séminaires interrégionaux seront organisés au cours du premier semestre pour vous permettre de vous préparer au mieux.
* Un message particulier aux conseils généraux
Je voudrais dire un mot spécifiquement aux représentants des conseils généraux. Je sais que vous êtes dans une situation financière parfois tendue et contrainte par des dépenses obligatoires et que certains auront la tentation de réduire leur effort en direction de l'IAE. Je vous le dis : évitez au maximum ce type de raisonnements, au risque que tout ce chantier se traduise finalement par un jeu à somme nulle pour le secteur dans certains territoires.
La réforme met en place de nouvelles modalités de coopération. Demain, vous pourrez, dans le cadre de la convention d'objectifs et de moyens, articuler beaucoup plus étroitement vos financements et construire une vraie politique de développement de l'IAE assise sur vos complémentarités. Saisissez-vous de cette possibilité, je sais que c'est un peu compliqué pour l'année prochaine qui est divisée en deux mais vous pouvez d'ores et déjà commencer.
Nous avons devant nous une grande marge d'amélioration de l'efficacité de nos financements et de notre pilotage et des simplifications en vue pour les structures. A minima, il nous faut avancer partout sur la mise en place d'un dossier unique de demande de financements.
Nous sommes à la confluence de l'insertion sociale et de l'insertion dans l'emploi et donc à la jonction des politiques de l'Etat et du département. Plutôt que de nous regarder en chiens de faïence en triant les publics, sachons travailler ensemble pour adapter au maximum notre offre d'accompagnement aux besoins des personnes. Derrière les financements, les programmes des uns et des autres, il y a des hommes et des femmes qui ont besoin de l'intervention publique et à qui nous ne pouvons pas demander de se soumettre à nos petites subtilités institutionnelles.
Nous ne vous demandons pas forcément de faire plus, mais au moins de maintenir l'effort en valeur pour garantir un progrès pour le secteur.
* Les chantiers à venir
Toutes les questions de mise en uvre ne sont pas tranchées et d'autres se poseront au fur et à mesure du déploiement de la réforme. La priorité pour les semaines et les mois à venir sera donc le suivi du déploiement des nouvelles modalités de financement. Un comité de suivi sera créé au sein du CNIAE et nous nous assurerons que les choses se mettent en uvre de manière fluide.
Mais nous n'allons pas nous arrêter là. Un grand chantier bat son plein en ce moment, c'est celui de la réforme de la formation professionnelle.
Le maître mot de cette réforme est de faire en sorte que la formation professionnelle bénéficie davantage à ceux qui en ont le plus besoin. Les salariés en insertion font bien sûr partie de ceux-là. Or précisément, je sais qu'il est souvent bien compliqué aujourd'hui de bâtir des parcours de formation adaptés. Les salariés de l'IAE sont dans cette situation complexe, d'être à la fois salariés en insertion et demandeurs d'emploi. Et, alors que leurs besoins en formation sont importants et gages d'une insertion durable et réussie après l'IAE, les salariés en insertion ne bénéficient plus tout à fait des dispositifs des demandeurs d'emploi et pas tout à fait des dispositifs salariés. Ou de façon très conditionnée, notamment parce que les fonds dont vous disposez via les OPCA sont insuffisants. Ces difficultés, la réforme de la formation professionnelle devra les lever. Je salue les réseaux qui ont travaillé et fait des propositions là-dessus.
Trois autres axes de travail me semblent importants pour l'année 2014 :
- Réfléchir à la place de l'IAE dans le développement des territoires. L'IAE, ce n'est pas que de l'insertion, ce sont aussi des activités, souvent des activités innovantes, répondant à de nouveaux besoins. Je vous engage à travailler, avec les conseils régionaux notamment, aux stratégies de développement territoriales ;
- Mieux associer les personnes accueillies aux réflexions et aux décisions. Dans le courant de l'année 2014, nous créerons un collège des publics au sein du CNIAE. Cela me semble très important mais c'est une démarche qui se prépare. Je vous engage à y travailler, sur les territoires comme au sein des structures.
- Enfin, les travaux que nous avons conduits pour préparer la réforme ont mis en évidence nos lacunes en matière de connaissance du secteur et des personnes accueillies. Je souhaite donc que nous travaillions sur ce besoin de connaissances et les réponses à y apporter en matière d'observation et d'études à conduire.
Tous, ici, vous êtes engagés pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes auxquelles le marché du travail ne fait pas spontanément de place. Je vous le dis : pour être efficace, faites front commun. Je sais que chaque type de structures a son modèle et son histoire, que chaque institution a sa logique et son positionnement. Mais les divisions et les incohérences desservent profondément le secteur.
Notre modèle est sans comparaison en Europe et dans le monde. Il nous faut rayonner, il nous faut communiquer. Mettez en valeur ce que vous faites dans les média de vos territoires. Je suis frappé par le nombre de personnes qui ignorent totalement l'existence de l'IAE ou méconnaissent ses principes de fonctionnement, y compris malheureusement du côté des partenaires sociaux. Nous travaillons avec eux au niveau national mais les contacts que vous pouvez nouer au niveau local sont essentiels. Il s'agit de portes d'entrée dans les entreprises, via les représentants des chefs d'entreprise. Mais les représentants des salariés ont aussi un rôle essentiel à jouer dans la bonne intégration de personnes ayant eu des parcours difficiles au sein du collectif de travail.
Je suis heureux et fier de la dynamique que nous avons pu lancer jusqu'ici. Je souhaite qu'elle se poursuive et s'amplifie et compte sur vous pour cela.
Je vous remercie.
Source http://travail-emploi.gouv.fr, le 13 décembre 2013