Déclaration de M. Michel Sapin, mMinistre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, sur la revalorisation du SMIC et la situation économique, Paris le 18 décembre 2013.

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Circonstance : Réunion de la Commission nationale de la négociation collective à Paris le 18 décembre 2013

Texte intégral


J'en viens donc, sans plus attendre, à la revalorisation du SMIC proposée par le Gouvernement.
Je tiens à saluer le travail du groupe d'experts, son Président François Bourguignon, qui pour sa première année dans cette nouvelle composition a présenté un rapport particulièrement riche qui permet, je le crois, d'éclairer le débat. Je sais que certains d'entre vous ne partagent pas toutes les analyses du groupe d'experts.
La démarche que nous avons mise en place d'échanges directs entre le groupe d'experts et les partenaires sociaux ainsi que la possibilité qui vous est donnée désormais d'annexer des contributions au rapport me semble vertueuse.
Le SMIC est un élément structurant de notre ordre public social, il est normal que le débat ait lieu. Nous le poursuivons cet après-midi, ces temps d'échange sont importants.
Je tiens à dire que le modèle français, si souvent décrié, remporte une belle victoire en étant imité par nos amis allemands qui se rallient à l'idée d'un salaire minimum tant la question des bas salaires est devenue insupportable.
Comme ministre d'un gouvernement de gauche, je tiens également à rappeler ce que représente le SMIC. Certains pensent que l'augmenter détruit des emplois. Je me méfie des sciences trop exactes qui chiffrent ce que représente une économie sur les petites gens. Je sais en revanche que pour ceux dont le SMIC sera revalorisé, quelques centimes de plus par heure et quelques euros par mois, cela veut dire quelque chose. Quand on cherche à gagner en compétitivité, on ne peut pas décourager les salariés. L'économie est une science sociale, pas un jeu d'équation et de modèles statistiques. Il est donc à mes yeux juste et nécessaire que le SMIC soit régulièrement revalorisé, au-delà de l'inflation, avec des gains de pouvoir d'achat.
Selon la nature de la conjoncture économique, il peut être souhaitable d'aller au-delà -un « coup de pouce »- ou d'en rester au gain de pouvoir d'achat de la formule légale. Au 1er janvier 2013, il y avait un de ces coups de pouce, le premier depuis 10 ans.
Cette année, le Gouvernement envisage de procéder à une revalorisation fondée sur l'application des mécanismes légaux de revalorisation sans nouveau « coup de pouce ». Ainsi, le taux horaire du SMIC sera porté à 9.53 euros bruts (contre 9.43€ actuellement) soit un montant mensuel de 1445.38 euros bruts sur la base de 35 heures (contre 1430.22 euros bruts actuellement). Cette augmentation préserve le pouvoir d'achat et l'emploi des moins qualifiés dans le contexte de ralentissement de l'inflation que nous connaissons et alors que s'amorce l'inversion de la courbe du chômage.
Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir au moment du tour de table.
Avant cela, je vous propose d'en venir au second point de l'ordre du jour : le bilan de la réforme de la représentativité syndicale.
Monsieur le Directeur général du travail va nous présenter le rapport qu'il a transmis aux partenaires sociaux.
[…]
Je veux tout d'abord saluer le travail collectif que représente l'aboutissement de cette réforme. Je sais ce qu'elle a représenté d'investissement.
Je pense bien sûr aux équipes du Ministère qui ont travaillé sans relâche sur ce projet. Leur travail a été exemplaire par sa transparence et sa rigueur. Toux ceux qui y ont participé – ils sont nombreux ici – ont de quoi être fiers.
Je pense aussi à vos équipes militantes, dans les entreprises, dans les branches, dans vos confédérations. La réforme change la donne. Elle donne une force, celle de la légitimité du suffrage. Mais je sais aussi ce qu'elle implique d'engagement, de confrontation parfois. C'est le prix d'un syndicalisme vivant, ancré au plus près des salariés.
Cette réunion n'est pas le lieu pour entrer dans les débats techniques sur les dispositions de la loi. Je sais que vous aurez ces débats de manière approfondie dans le cadre du Haut conseil du dialogue social qui se réunira prochainement.
Comme je l'ai déjà indiqué, les éléments d'ajustement du dispositif qui feront consensus pourront être intégrés au projet de loi sur la formation professionnelle et la démocratie sociale que je vous présenterai en début d'année. Des chantiers plus profonds devront être menés, je pense notamment à l'élection TPE notamment. Ils nécessiteront quant à eux la poursuite du travail de concertation.
Je veux insister sur le sens global des réformes que nous menons en matière de démocratie sociale. Elles ont un fil rouge : renforcer les acteurs du dialogue social en confortant leur légitimité et en leur donnant les moyens d'assumer pleinement le rôle central qui est aujourd'hui le leur dans les entreprises, dans les territoires, dans la construction de la norme.
C'est le sens de la réforme de la représentativité patronale que nous engageons. Parce qu'il est évident aujourd'hui que le chemin qui été parcouru par les organisations syndicales doit l'être par les organisations patronales pour disposer des deux côtés de la table d'interlocuteurs à la légitimité incontestable. C'est la seule option pour notre démocratie sociale : rebâtir un espace public social dans lequel des acteurs forts, passent des compromis forts, où chacun permet à l'autre de sauver la face, de fonder un équilibre qu'il peut défendre sans honte auprès de sa base. La sécurisation doit donc aussi être celle des négociateurs, des organisations, de leurs moyens, de leur expertise, de leur indépendance, de leur reconnaissance sur des bases solides et transparentes.
Faute de quoi, les acteurs représentatifs céderont la place à des forces désordonnées et dépourvues de vraie légitimité démocratique, des bonnets ceci aux volatiles untels, des lobbies qui ne représentent qu'eux-mêmes. Donner des moyens, garantir la légitimité comme la possibilité de représenter l'intérêt général, sont de belles missions pour l'Etat vis-à-vis de la démocratie sociale de notre pays.
C'est le sens de la réforme du financement du dialogue social qui doit poser – enfin – des bases claires et assumées de financement des organisations en complément, naturellement, des cotisations qui doivent rester le socle de financements des organisations.
Ce sont là des chantiers majeurs qui complètent parfaitement celui de la représentativité syndicale. Nous aurons à nous réunir en début d'année pour examiner les textes qui en seront la traduction.
Je vous cède la parole pour le tour de table, à la fois naturellement sur la revalorisation du SMIC et sur le rapport sur la représentativité syndicale.
Je vous remercie
source http://travail-emploi.gouv.fr, le 19 décembre 2013