Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Aujourd'hui s'ouvre la VIIIe rencontre sur la Sécurité des entreprises françaises à l'étranger qui est devenue, au fil du temps, quelque chose de beaucoup plus large.
Vous savez que nous avons fait du soutien aux entreprises une priorité, sinon la priorité, de la politique étrangère de notre pays. Et c'est pourquoi j'ai souhaité, avec Hélène Conway-Mouret, ouvrir personnellement votre rencontre annuelle et c'est elle ensuite qui conclura vos travaux.
La sécurité fait évidemment partie des sujets sur lesquels notre réseau diplomatique peut et doit vous apporter son aide. C'est vous les responsables des entreprises qui êtes, bien sûr, au premier chef, responsables de la sécurité de vos collaborateurs, de vos emprises, de vos investissements. Mais il est absolument indispensable que nous travaillions ensemble, en multipliant les passerelles et les outils : les échanges d'informations, les partages d'analyse du risque, les points de situation réguliers, relations étroites entre nos postes et les entreprises implantées localement, la préparation en amont des scénarios de gestion de crise, voire dans certains cas, des exercices pratiques de simulation.
En limitant votre exposition au risque, en vous préparant, et c'est bien le sens de ces rencontres, vous vous mettez en situation de pouvoir saisir les opportunités de croissance dans les meilleures conditions.
Les chiffres sont très éloquents : un investissement sur deux se porte aujourd'hui sur des zones pudiquement décrites comme «troublées». Le montant cumulé des investissements dans ces zones dites à risque s'élèvent en effet à 600 milliards de dollars. Les professionnels de la sécurité privée ont pris la mesure des besoins car on estime que leur chiffre d'affaires a augmenté de 50 % par an ces dernières années, pour un marché qui, en 2013, aurait dépassé les 250 milliards de dollars.
À l'occasion de cette réunion, j'ai demandé au Centre de crise, - son directeur M. Didier Le Bret est ici -, et à la direction des entreprises - son directeur M. Jacques Maire est également ici - de se concentrer sur trois axes particulièrement importants pour nos entreprises :
En premier lieu, l'analyse des risques et des enjeux associés aux pays émergents. Nos marges de croissance de demain, qui sont ô combien utiles, dépendent largement de notre capacité à aborder aujourd'hui ces nouveaux marchés. C'est la raison pour laquelle, le président de la République, moi-même et d'autres membres du gouvernement avons multiplié ces déplacements dans ces régions à forte croissance, qu'il s'agisse de l'Asie, de l'Asie centrale, de l'Amérique latine et de certains pays d'Afrique. Tout à l'heure, vous parlerez de l'Indonésie, grand pays émergent, en présence de notre ambassadrice, afin de faire le point sur les opportunités et sur les risques associés pour vous y préparer. Donc le thème est : risques, enjeux et possibilités associés à chaque pays émergent. Sans jouer les cuistres, je me rappelle qu'en grec ancien c'est le même mot qui signifie risque et chance.
En second lieu, le développement des PME et des ETI à l'international, est pour le moment insuffisant. Il suffit de regarder notre balance commerciale qui est le juge de paix. Pour des raisons compréhensibles, elles hésitent à assumer seules les risques liés à une implantation à l'étranger. Avec notre ambassadeur en Côte d'Ivoire, vous allez discuter de savoir comment des alliances peuvent être nouées sur le terrain et comment parvenir à accompagner au mieux PME et ETI sur des marchés difficiles.
Et puis il y a un troisième cas de figure, même si il y en beaucoup d'autres, ce sont les pays en situation sécuritaire dégradée ou en sortie de crise, notamment dans des régions où la France dispose historiquement d'implantations anciennes. C'est le cas dans une grande partie de la zone Afrique du Nord Moyen-Orient, mais cela vaut aussi pour nombre de pays du Sahel. Notre ambassadeur en Égypte partagera avec vous son expérience de terrain dans un pays ami de la France, où la plupart de nos grands groupes sont également présents et continuent de l'être mais qui est un pays qui présente quelques problèmes.
Sur toutes ces questions, j'ai une seule chose à vous dire c'est que la Maison que je dirige est à votre service. On ne peut pas le dire plus simplement. J'ai donné cette indication aux ambassadeurs, qui d'ailleurs ne m'ont pas attendu pour être à votre disposition, mais qui le sont de manière plus expresse aujourd'hui et qui doivent d'autant plus l'être car pour moi c'est un critère de leur réussite dans leur poste. Donc l'ensemble des diplomates, et plus particulièrement le Centre de crise, sont vraiment à votre disposition. Ils doivent vous aider à identifier et à évaluer les grandes évolutions sécuritaires pour mieux les anticiper.
Nous allons poursuivre cette politique, renforcer les capacités du Centre de crise en direction des entreprises. Le pôle entreprises du Centre de crise va s'étoffer. Une Task Force interministérielle, à la fois civile et militaire, de gestion des crises extérieures est, depuis le 1er janvier, intégrée au Centre de crise et devient une mission pour la stabilisation. L'idée c'est d'intégrer l'ensemble des missions liées aux phases initiales de la stabilisation et de la reconstruction afin de disposer d'une compétence sur la continuité de la gestion de crise. Cette cellule est composée d'agents venant de différents ministères (défense, intérieur, finances, affaires étrangères). Ses missions ont été précisées avec le recensement et l'analyse des moyens financiers et humains mobilisés sur les pays en phase de stabilisation, la mobilisation de l'expertise française et l'aide à la constitution de plate-formes d'entreprises pour être au plus près des marchés dits de reconstruction.
Sur le terrain de l'action d'urgence en réponse aux crises, nous allons également poursuivre nos partenariats en direction des fondations d'entreprises.
Je signerai tout à l'heure une convention de partenariat avec la Fondation Airbus Helicopters, qui va mettre à la disposition du Centre de crise les hélicoptères de ses clients pour effectuer des reconnaissances de terrain pour les pays victimes de catastrophes. Un partenariat avec Airbus est également en cours de négociation pour permettre au fret humanitaire de la France de bénéficier de facilités d'emport.
Toutes ces modalités ont été testées à l'occasion de la tempête qui a très durement frappé les Philippines. Je veux remercier les entreprises françaises implantées localement qui ont bien voulu mobiliser leurs équipes et leurs moyens.
Je veux saisir aussi l'occasion de la présence d'élus locaux pour saluer l'engagement des collectivités territoriales, qui contribuent, de façon importante, au Fonds spécialement créé pour faire face aux crises d'ampleur. Nous avons lancé une entité qui s'appelle le FACECO, Fonds d'action pour les collectivités territoriales. Lorsqu'il y a une catastrophe quelque part, les collectivités territoriales se demandent souvent comment elles peuvent aider. Aussi, nous avons créé auprès du Quai d'Orsay le FACECO qui permet à ceux qui veulent aider, sans avoir une idée précise, de verser de l'argent. À ce titre, nous avons recueilli près de 300 000euro qui ont pu être mobilisés en complément des moyens ordinaires de l'État.
Je veux réaffirmer l'engagement de l'État pour vous soutenir dans votre stratégie d'expansion internationale et dans la conquête de nouveaux marchés. Il faut vraiment que l'on aille chercher la croissance là où elle est et nous avons un travail considérable à faire. Vous ne nous avez pas attendu pour le faire mais il faut passer la surmultipliée. Ceci dans les deux sens, avec les investissements français à l'étranger et, les chiffres viennent de tomber et ils ne sont pas bons, les investissements étrangers en France qui, ce n'est pas une surprise, ont beaucoup décliné. Il faut absolument redresser cette situation et ceci très rapidement.
Je voudrais à cet égard remercier les présidents des grands groupes qui ont répondu présents à notre invitation. Et j'aurai le plaisir de m'entretenir avec certains d'entre eux. Nous avons d'autres initiatives comme le Club des ambassadeurs, le Club des entrepreneurs. Il va y avoir cette année, pour la deuxième année consécutive, l'opération Quai d'Orsay-entreprises, nous avons aussi des Clubs pays (Indonésie, Koweït, Mozambique...) et les Rencontres du Quai d'Orsay. Je pense, et c'est l'objectif que je poursuis, que le Quai d'Orsay et tout le réseau diplomatique doivent devenir la maison des entreprises. Parce que les dimensions entreprises, culturelle, recherche, stratégique, font partie du rayonnement de la France.
On dit que la France a une grande politique étrangère. Mais si celle-ci est assise sur une grande faiblesse économique il n'y aura plus de politique étrangère. Tout cela est imbriqué et c'est dans ce sens-là qu'il faut travailler.
J'ai demandé qu'on lance quelques initiatives nouvelles dont deux ou trois vont vous intéresser. À partir du 1er juillet, il y aura un nouveau portail qui va s'appeler « Diplomatie », qui va être interministériel et surtout ouvert aux entreprises. Il vous permettra de bénéficier de tous les télégrammes non classifiés. Et il y aura, par ailleurs, un certain nombre d'opérations classifiées et beaucoup plus sécurisées que par le passé. Pour tout ce qui est information non classifiée, toutes les personnes qui sont dans notre réseau pourront en disposer. Il y a énormément de matière apportée par nos ambassades et qui demeure insuffisamment utilisée.
La deuxième chose, c'est une opération qui sera mise sur pied très prochainement. En commençant par le Quai et en l'étendant ensuite aux autres membres du gouvernement, vous allez être informés trois semaines à l'avance de tous nos déplacements à l'étranger. Vous pourrez ainsi vous connecter sur ces déplacements soit en vous y joignant physiquement soit en nous disant que vous avez telle ou telle affaire en cours dans ce pays. Ce site sera ouvert trois semaines avant chaque déplacement et trois semaines après celui-ci. Nous pourrons ainsi améliorer le maillage.
Certes cela s'éloigne beaucoup de la sécurité mais je pense que l'esprit de ces Rencontres c'est, à la fois, bien sûr, de travailler sur les questions de sécurité tout à fait majeures, mais en même temps d'avoir une vision plus constructive de tout ce qui bouge. Merci d'être là et de tout ce qui vous faites et je terminerai en vous redisant que cette maison est la vôtre. Et n'hésitez pas : nous sommes à votre disposition !
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 février 2014