Texte intégral
WILLIAM LEYMERGIE
Pour « Les 4 vérités », ce matin, c'est Guillaume DARET qui reçoit Najat VALLAUD-BELKACEM, porte-parole du gouvernement mais aussi ministre des Droits des femmes.
GUILLAUME DARET
Bonjour à tous, bonjour Najat VALLAUD-BELKACEM.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bonjour.
GUILLAUME DARET
Le gouvernement a donc annoncé hier que le projet de loi famille serait reporté, son examen, au plus tôt en 2015. Alors, les écologistes dénoncent un renoncement consternant. Est-ce que vous n'avez pas, comme le dit Jean-Luc MELENCHON, trompé la gauche ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Vous savez, ce projet de loi famille, tout le monde en parle, tout le monde le fantasme, même, parfois, sans en avoir jamais lu une seule ligne, et pour cause, les travaux autour de ce projet de loi sont très loin d'être finalisés, et c'est le sort normal d'un texte lorsqu'il n'est pas suffisamment prêt, que de se voir repousser de quelques mois. C'est même le travail, j'allais dire, quotidien du ministre des Relations avec le Parlement, que de veiller à ce que le calendrier parlementaire tienne compte à la fois de l'état d'avancement des textes et puis des priorités que se fixe le gouvernement. C'est vrai que la priorité que nous nous fixons pendant cette année 2014, c'est la lutte contre le chômage, c'est le pacte de responsabilité, c'est l'emploi. Donc, ce texte de loi famille, sera bien examiné
GUILLAUME DARET
Vous vous y engagez, il sera examiné
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Evidemment.
GUILLAUME DARET
Ce n'est pas un enterrement de première classe.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Aucunement, il sera examiné sur les sujets dont nous avons toujours dit qu'ils en seraient la composante essentielle, c'est-à-dire la question par exemple de l'adoption, qu'il faut encadrer d'une façon qui laisse davantage de souplesse et de possibilités aux enfants à adopter et aux familles qui souhaitent adopter. La question des tiers, des beaux-parents, en particulier, la question de la protection de l'enfance.
GUILLAUME DARET
Pas de PMA, même en 2015 ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais, il a toujours été dit, je ne sais plus en quelle langue le dire, que la PMA ne faisait pas partie de ce projet de loi famille.
GUILLAUME DARET
Vous, vous y êtes favorable, à titre personnel.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais, vous savez, ce que l'on pense, à titre personnel, c'est ce que l'on pense à titre personnel. A un moment donné, je pense que le président de la République ayant pris la décision de se remettre au Conseil national d'éthique sur ce sujet, attendons que le Conseil d'éthique réponde sur ce sujet et attendons de façon sereine, sans fantasmer là encore.
GUILLAUME DARET
Vous êtes favorable, ou pas, vous à titre personnel, à la PMA ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
J'ai déjà eu l'occasion de le dire.
GUILLAUME DARET
Oui ou non ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, j'ai déjà eu l'occasion de le dire, mais vous savez, un gouvernement c'est un collectif. Aujourd'hui, encore une fois, les textes du gouvernement, le Premier ministre, le président de la République, ont souhaité, sur un sujet qui pose beaucoup de questions, attendre l'avis du Conseil d'éthique. Mais
GUILLAUME DARET
Pourquoi avoir pris cette décision de repousser ce projet de loi, alors que dimanche, vous-même, quand il y avait des manifestations dans les rues, vous disiez que ces manifestants étaient, je cite, dans des combats imaginaires. Si c'était des combats imaginaires, pourquoi reculer ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je maintiens que c'était des revendications imaginaires, je maintiens que les
GUILLAUME DARET
Mais alors, pourquoi repousser le projet de loi, si vous êtes dans votre bon droit ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais que les choses soient claires, nous ne repoussons aucunement le projet de loi, à l'aune de la manifestation, nous le repoussons
GUILLAUME DARET
Il n'y a pas du tout de lien entre les manifestations de dimanche et le fait que le lendemain le projet de loi soit repoussé ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Nous repoussons l'examen de ce projet de loi, parce que, de fait, il n'est pas prêt. Voilà, on ne peut pas le dire plus clairement que cela. Maintenant, c'est vrai que, je vous rejoins, l'hystérisation autour de ce projet de loi, notamment du fait de la Manifestation pour tous, qui s'est appuyée pour hystériser le débat sur des fantasmes et des peurs imaginaires, en effet, est préoccupante et problématique, et nous ne voulons pas que ce projet de loi prospère dans ce type de conditions, nous voulons au contraire qu'il soit discuté dans la sérénité, dans la concertation, parce que les sujets que je vous ai rappelés tout à l'heure, adoption, beaux-parents, protection de l'enfance, ils méritent quand même autre chose que la série de fantasmes à laquelle on a eu droit ce dimanche, et je redis qu'il n'a jamais été question pour le gouvernement d'adopter la Gestation pour autrui par exemple.
GUILLAUME DARET
Est-ce que vous distinguez, quand même, les manifestants de dimanche et celui de dimanche dernier, le Jour de colère ? Est-ce que, pour vous, ceux qui étaient dans la rue dimanche, la manif pour tous, ce sont des démocrates qui manifestaient ou au contraire ce sont des forces sombres, des antirépublicains, comme a pu le dire Manuel VALLS ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
J'ai plutôt tendance à les distinguer, en effet, parce que Jour de colère, on avait atteint vraiment le sommet de l'insupportable dans notre pays.
GUILLAUME DARET
Pour vous, ceux qui étaient dans la rue dimanche, c'est qui ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ce dimanche-ci, en revanche, c'était des manifestants, il y avait de tout, il y avait des réactionnaires dans les rues ce dimanche, mais il y avait aussi des familles, qui venaient simplement nous dire leur vision de la société. Simplement, le point commun, finalement, entre tous les manifestants de ce dimanche-ci, c'est qu'ils défendent et qu'ils cherchent, me semble-t-il, à imposer leur vision unique de la famille, leur vision nostalgique d'un modèle familial qui est dépassé, qui ne correspond plus à la société d'aujourd'hui, alors que nous, le gouvernement, nous voulons protéger toutes les familles, nous voulons laisser la liberté à toutes les familles, d'être ce qu'elles sont, et c'est la différence entre nous, finalement, je crois vraiment que ceux qui ont défilé ce dimanche, en réalité, vous savez, ils disaient avoir peur de l'indifférenciation, en fait ils ont peur de l'altérité, ils ont peur des autres modèles que du leur, et ils ont peur aussi des l'égalité des droits, puisque, on l'a vu, ils nous l'ont démontré, ils sont défavorables à un certain nombre de progrès qui vont dans ce sens.
GUILLAUME DARET
Najat VALLAUD-BELKACEM, est-ce que Manuel VALLS est devenu ministre Premier ministre, ministre de la Famille ? C'est lui qui a donné le tempo, hier ; est-ce que c'est lui, est-ce qu'il n'est pas sorti, un petit peu, de sa fonction de ministre de l'Intérieur ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Manuel VALLS est ministre de l'Intérieur, donc il est chargé notamment de répondre en termes d'ordre public, lorsqu'une manifestation a lieu, et c'est ce qui s'est passé dimanche.
GUILLAUME DARET
Est-ce que c'est sa responsabilité de dire, hier matin : il n'y aura pas de PMA, pas de GPA ? Enfin, ou en tout cas, le gouvernement s'opposera à des amendements. Il n'est pas sorti, un petit peu, de ses fonctions ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais, si vous nous avez bien écoutés, nous avons tous répété la même chose, et même la première qui a dit cela, peut-être que ça a été médiatiquement moins relevé, c'est la ministre de la Famille, elle-même, la
GUILLAUME DARET
On a eu l'impression que c'est lui qui a donné le tempo hier et que Matignon a suivi. C'est lui, le chef du gouvernement, Manuel VALLS ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, je redis ici, pour l'avoir vue s'exprimer, que Dominique BERTINOTTI, en charge de la Famille, dès les jours qui précédaient, avait levé un certain nombre de malentendus, s'ils étaient sincères, mais beaucoup de ces malentendus sont insincères, malheureusement, je le déplore, en expliquant que la PMA ne faisait pas partie de son projet de loi. La ministre de la Famille est la mieux placée pour savoir ce qui est dans le projet de loi famille et donc je redis encore une fois que les travaux se poursuivent.
GUILLAUME DARET
On a l'impression, vous dites, que donc ces projets de loi sont repoussés pour se concentrer sur l'économie, sur le pacte de compétitivité. Certains disent, à gauche, que le gouvernement, finalement, sacrifie des projets de société sur l'autel de l'économie. Est-ce que c'est le cas ? Est-ce que vous sacrifiez, finalement, un gouvernement de gauche sur l'économie ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, je n'accepte aucunement cette critique, elle ne correspond à rien. Quel est le gouvernement qui a adopté, précisément, le mariage pour tous, par exemple ? C'est bien le gouvernement de Jean-Marc AYRAULT. Nous en sommes fiers, nous l'assumons, et la réalité, vous m'interrogez sur la manifestation de ce dimanche, la réalité c'est que les manifestants qui défilaient, c'était d'abord contre ce mariage pour tous qu'ils défilaient, parce qu'ils sont toujours persuadés qu'un jour ou l'autre ils pourront revenir en arrière sur ce sujet. Notre responsabilité de gouvernement, c'est non seulement de faire les réformes pour faire progresser la société, mais c'est aussi de les faire accepter, et donc de prendre le temps qu'il faut pour convaincre, pour faire preuve de pédagogie, pour concerter, pour mettre tout le monde autour d'une table, et c'est la façon dont nous procédons pour avancer.
GUILLAUME DARET
Merci beaucoup, Najat VALLAUD-BELKACEM.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Merci à vous.
GUILLAUME DARET
C'est à vous, William.
WILLIAM LEYMERGIE
Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 février 2014