Texte intégral
,
Je me suis engagée personnellement auprès des familles de Chloé, Théo et Milie à ce que toute la lumière soit faite sur les causes des décès de leurs enfants, intervenus en quelques heures seulement, au Centre hospitalier de Chambéry, au mois de décembre dernier. Ma responsabilité à leur égard, envers l'ensemble des usagers de notre système hospitalier, mais aussi envers le système hospitalier lui-même, c'est de fournir, en toute transparence, l'ensemble des informations dont nous disposons sur les conditions dans lesquelles sont morts ces enfants. Je veux redire qu'il s'agit d'un accident d'une exceptionnelle gravité.
Ces accidents survenus en milieu hospitalier sont liés à une contamination bactérienne de poches de nutrition délivrée par voie veineuse. Comme vous le savez, j'ai immédiatement demandé aux autorités sanitaires de tout mettre en uvre pour éclairer les circonstances de ce drame. Trois enquêtes ont été lancées parallèlement. Ce sont leurs résultats que je veux vous présenter.
1/ Je veux d'abord revenir sur la chronologie des événements de manière très factuelle.
En octobre dernier, le service de réanimation néonatale de l'hôpital de Chambéry a été confronté à un cas grave d'infection nosocomiale à staphylocoque. Ce cas a été signalé dans le cadre de l'infectiovigilance à l'Institut de Veille Sanitaire.
Les décès de Chloé et Théo, les 6 et 7 décembre, ainsi que celui de Milie dans la nuit du 11 au 12 décembre ont été initialement reliés à cet épisode nosocomial du mois d'octobre. Une cellule de crise a été constituée au sein de l'hôpital. L'agence régionale de santé de Rhône Alpes a été alertée par l'établissement le 12 décembre.
Le même jour, l'ARS a pris la décision, rare, de fermer le service de réanimation néo natale, afin que soit menée une désinfection complète et qu'il soit procédé à des contrôles microbiologiques de l'environnement.
Le 15 décembre au soir, la survenue, en néonatalogie, d'un choc septique chez un enfant alimenté par une poche de nutrition parentérale a orienté les soupçons des médecins sur les poches qu'avaient aussi reçues Chloé, Théo et Milie.
L'ARS, alertée le lendemain matin, le 16 décembre, a signalé sans attendre à l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) cet évènement grave, évoquant un défaut de qualité des poches de nutrition parentérale.
Dès le 16 décembre, l'hôpital a cessé d'utiliser des poches fabriquées à façon.
Le 17 décembre, l'ANSM a procédé au retrait immédiat de toutes les poches fabriquées le 28 novembre, lot commun aux trois enfants décédés et à celui victime d'un choc septique observé le 16 décembre. Cela concernait 137 poches de nutrition, distribuées à 7 établissements hospitaliers par le même fournisseur, le laboratoire Marette de Courseulles-sur-Mer. Pour Chambéry, cela représentait 35 poches livrées le 2 décembre. La plupart de ces poches avait déjà été utilisée sans que d'autres accidents se soient produits. 17 poches de Chambéry ont été analysées.
Parallèlement, l'ANSM a engagé une inspection détaillée du site du laboratoire Marette du 17 au 19 décembre.
A la fin du mois de décembre, les premiers résultats microbiologiques des prélèvements effectués sur les poches étant discordants, nous avons sollicité l'expertise de l'Institut Pasteur.
Le 7 janvier, les résultats de l'institut Pasteur ont indiqué que toutes les poches contaminées l'avaient été par un seul et même germe d'origine environnementale. A ma demande, une décision de police sanitaire de suspension de la production du laboratoire Marette a été immédiatement prise. Il a été par ailleurs demandé au laboratoire de mettre en quarantaine les poches stockées dans ses locaux. Dans le même temps, les établissements hospitaliers ont également reçu l'ordre de cesser d'utiliser ces poches et de les placer en quarantaine.
Voilà pour la chronologie précise des faits.
2/ Je souhaite maintenant vous détailler les trois volets de l'enquête administrative.
(i) Le premier volet de cette enquête a été conduit par l'ANSM. Il a concerné l'ensemble de la chaîne de production et de distribution des poches.
L'ANSM a mené des enquêtes de police sanitaire sur la fabrication des poches plastiques, sur les fournisseurs des matières premières, sur les laboratoires qui réalisent les contrôles pour le compte de Marette et sur la société chargée du transport des poches jusqu'à Chambéry. Au total, ce sont 6 inspections, qui ont été conduites dans des délais courts.
Mais la partie la plus importante de l'enquête de l'ANSM a concerné le processus de fabrication au sein du laboratoire Marette, inspecté du 17 au 19 décembre, puis de nouveau les 6 et 7 janvier.
Ce sont ces enquêtes qui ont conduit à la suspension de l'ensemble de l'activité du laboratoire Marette.
Les autres investigations n'ont pas montré de dysfonctionnement sur le reste de la chaîne.
(ii) Le deuxième volet de l'enquête, conduit par l'ARS Rhône Alpes, a concerné le Centre hospitalier de Chambéry.
Je veux d'abord rappeler que le service de réanimation néo natale, une fois terminées les opérations de désinfection générale mises en en uvre à compter du 12 décembre, a pu de nouveau accueillir des nouveau-nés à compter du 20 décembre.
Le 7 janvier a eu lieu une inspection sur site, dirigée par l'ARS, en présence d'un inspecteur de l'ANSM et de plusieurs spécialistes des infections nosocomiales.
Elle a porté sur de nombreux points :
- la livraison et le stockage des poches en pharmacie ;
- le transport interne entre la pharmacie et le service de réanimation, ainsi que le stockage dans ce même service ;
- le respect de la chaîne du froid, du circuit du médicament, des modalités de délivrance et de contrôle ultime de la date limite d'utilisation et de la limpidité des poches ;
- le circuit de signalement des incidents de matério et de pharmaco vigilance ;
- le dispositif assurant la qualité et la sécurité des soins, ainsi que la lutte contre les infections nosocomiales.
Le rapport d'inspection, adressé le 14 janvier à l'établissement, a fait l'objet d'une procédure contradictoire d'une durée de huit jours. Cela a permis au centre hospitalier d'apporter des réponses détaillées aux observations et aux remarques de l'inspection.
Les principales conclusions de cette enquête sont les suivantes :
Les 35 poches fabriquées pour Chambéry le 28 novembre ont toutes été livrées le 2 décembre. Six enfants ont reçu des poches de ce lot sans aucune conséquence. Par ailleurs, les investigations ont permis de constater que toutes les poches qui se sont avérées contaminées après analyse, ou qui ont été utilisées en dernier lieu chez les nourrissons décédés, avaient été produites dans une période de temps limitée au cours de la journée du 28 novembre.
La mission d'inspection à Chambéry n'a pas établi de lien entre les pratiques de l'établissement et un risque de contamination des poches de nutrition parentérale utilisées. Néanmoins, plusieurs remarques et prescriptions ont été formulées par la mission sur des points de vigilance concernant la qualité et la sécurité des soins, en particulier, les conditions de conservation des poches, le respect des dates limites d'utilisation, le contrôle de limpidité des poches, et l'amélioration des contrôles environnementaux.
(iii) Le troisième volet de l'enquête a été diligenté par la direction générale de la santé avec l'aide de l'Institut de veille sanitaire. Il a concerné la totalité des établissements de santé utilisant des poches issues du laboratoire Marette.
Il s'agissait ici d'identifier tout évènement grave, potentiellement lié à l'utilisation de poches de nutrition parentérale, et survenu pendant l'année 2013.
Tous les clients du laboratoire Marette en 2013 ont été identifiés : ils sont au nombre de 19. Je veux souligner que cette enquête, menée par la DGS, s'est faite dans des conditions permettant le respect de la confidentialité médicale.
Sur les 19 établissements concernés, 9 cas potentiellement suspects ont été recensés.
Sur ces 9 cas, 3 cas ont été signalés dans 3 établissements différents. Ces cas sont en cours d'exploration et les enfants vont bien.
Les 6 autres concernent Chambéry avec :
- Les 4 cas déjà identifiés : les 3 décès et l'enfant ayant été victime d'un choc septique, en décembre 2013.
- Les 2 autres cas sont un décès survenu en décembre 2012 et un autre en mars 2013, ce dernier ayant déjà été signalé au Procureur de la République. Ces décès pourraient, selon les médecins, être liés à l'usage des poches en l'absence d'autre cause évidente, mais il sera très difficile d'établir leur cause en raison de leur ancienneté.
Au vu des résultats des trois enquêtes dont je viens de vous donner le détail, l'hypothèse la plus probable est aujourd'hui celle d'un accident de production isolé sur le site de Marette, survenu le 28 novembre lors de la préparation des poches destinées au CH de Chambéry.
Les causes exactes de l'accident n'ont pu être déterminées plus précisément.
Je veux aussi rappeler que :
- l'intégralité du lot suspect du 28 novembre a été retirée dès le 17 décembre en l'absence de signal sur un autre lot et de signal venant d'un autre établissement de santé ;
- aucun cas d'évènement indésirable lié à un autre lot produit par le laboratoire Marette n'a été signalé entre l'alerte de Chambéry le 16 décembre et la décision de police sanitaire intervenue le 7 janvier ;
- la production Marette étant totalement suspendue depuis le 7 janvier, il n'y a plus de risque lié à cette production à façon pour les personnes, enfants comme adultes, sous alimentation parentérale.
3/ Je veux tirer toutes les leçons de ces drames et lance dès aujourd'hui une importante mission confiée à l'inspection générale des affaires sociales.
La première partie de la mission sera consacrée spécifiquement à la gestion de la qualité et de la sécurité des soins au Centre Hospitalier de Chambéry. Elle a pour objectif compte tenu des observations établies par la mission d'inspection d'analyser les responsabilités des différents acteurs de l'hôpital avec l'appui d'experts extérieurs, spécialistes en pharmacie et en réanimation. J'attends les conclusions de cette mission dans un mois et prendrai si nécessaire toutes les mesures qui s'imposent.
La seconde partie de la mission portera plus généralement sur les poches de nutrition parentérale utilisées en pédiatrie et préparées à façon au sein d'établissements pharmaceutiques ou en pharmacie hospitalière.
La mission devra dresser le bilan et formuler des préconisations sur les indications médicales, les modalités de prescription, de fabrication, de supplémentation, de transport et de stockage. Des recommandations sont également attendues en matière de conservation au sein des pharmacies hospitalières ou dans le service prescripteur, de gestion des stocks, de délivrance et de traçabilité des poches. Plus largement, la mission s'attachera à comparer les bénéfices et les risques des préparations magistrales en nutrition parentérale, des préparations industrielles et des supplémentations. J'attends un premier point d'étape à la fin du mois de mars et un rapport définitif fin mai.
Mesdames et messieurs,
Vous le constatez, j'ai souhaité, après avoir informé préalablement les familles de Chloé, Théo et Milie, vous présenter en toute transparence l'ensemble des éléments dont nous disposons. Le rapport d'inspection de l'ARS est rendu public aujourd'hui, à l'exception du détail des dossiers médicaux des enfants. Les rapports d'inspection de l'ANSM seront rendus publics pour leur part mi-février, dès que la procédure contradictoire qui les concerne sera close. En attendant, une synthèse qui détaille les investigations réalisées par l'ANSM est publiée aujourd'hui même. L'ensemble de ces documents sera accessible sur les sites du ministère et de l'ANSM.
Par ailleurs, l'enquête judiciaire qui déploie en ce moment ses propres moyens d'investigation se poursuit.
Pour davantage de détails, je passe désormais la parole :
- au directeur général de l'ANSM, le Pr Dominique MARANINCHI, qui détaillera toutes les inspections menées par ses agents ;
- au Directeur général de la santé, le Pr Benoit VALLET, qui va vous présenter la recherche rétrospective et active de cas suspects, ainsi que les mesures qui ont été prises ;
- au Directeur général de l'offre de soins, qui reviendra sur les résultats de l'enquête concernant le site de l'hôpital de Chambéry.
Je vous remercie.
Source http://www.social-sante.gouv.fr, le 28 janvier 2014
Je me suis engagée personnellement auprès des familles de Chloé, Théo et Milie à ce que toute la lumière soit faite sur les causes des décès de leurs enfants, intervenus en quelques heures seulement, au Centre hospitalier de Chambéry, au mois de décembre dernier. Ma responsabilité à leur égard, envers l'ensemble des usagers de notre système hospitalier, mais aussi envers le système hospitalier lui-même, c'est de fournir, en toute transparence, l'ensemble des informations dont nous disposons sur les conditions dans lesquelles sont morts ces enfants. Je veux redire qu'il s'agit d'un accident d'une exceptionnelle gravité.
Ces accidents survenus en milieu hospitalier sont liés à une contamination bactérienne de poches de nutrition délivrée par voie veineuse. Comme vous le savez, j'ai immédiatement demandé aux autorités sanitaires de tout mettre en uvre pour éclairer les circonstances de ce drame. Trois enquêtes ont été lancées parallèlement. Ce sont leurs résultats que je veux vous présenter.
1/ Je veux d'abord revenir sur la chronologie des événements de manière très factuelle.
En octobre dernier, le service de réanimation néonatale de l'hôpital de Chambéry a été confronté à un cas grave d'infection nosocomiale à staphylocoque. Ce cas a été signalé dans le cadre de l'infectiovigilance à l'Institut de Veille Sanitaire.
Les décès de Chloé et Théo, les 6 et 7 décembre, ainsi que celui de Milie dans la nuit du 11 au 12 décembre ont été initialement reliés à cet épisode nosocomial du mois d'octobre. Une cellule de crise a été constituée au sein de l'hôpital. L'agence régionale de santé de Rhône Alpes a été alertée par l'établissement le 12 décembre.
Le même jour, l'ARS a pris la décision, rare, de fermer le service de réanimation néo natale, afin que soit menée une désinfection complète et qu'il soit procédé à des contrôles microbiologiques de l'environnement.
Le 15 décembre au soir, la survenue, en néonatalogie, d'un choc septique chez un enfant alimenté par une poche de nutrition parentérale a orienté les soupçons des médecins sur les poches qu'avaient aussi reçues Chloé, Théo et Milie.
L'ARS, alertée le lendemain matin, le 16 décembre, a signalé sans attendre à l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) cet évènement grave, évoquant un défaut de qualité des poches de nutrition parentérale.
Dès le 16 décembre, l'hôpital a cessé d'utiliser des poches fabriquées à façon.
Le 17 décembre, l'ANSM a procédé au retrait immédiat de toutes les poches fabriquées le 28 novembre, lot commun aux trois enfants décédés et à celui victime d'un choc septique observé le 16 décembre. Cela concernait 137 poches de nutrition, distribuées à 7 établissements hospitaliers par le même fournisseur, le laboratoire Marette de Courseulles-sur-Mer. Pour Chambéry, cela représentait 35 poches livrées le 2 décembre. La plupart de ces poches avait déjà été utilisée sans que d'autres accidents se soient produits. 17 poches de Chambéry ont été analysées.
Parallèlement, l'ANSM a engagé une inspection détaillée du site du laboratoire Marette du 17 au 19 décembre.
A la fin du mois de décembre, les premiers résultats microbiologiques des prélèvements effectués sur les poches étant discordants, nous avons sollicité l'expertise de l'Institut Pasteur.
Le 7 janvier, les résultats de l'institut Pasteur ont indiqué que toutes les poches contaminées l'avaient été par un seul et même germe d'origine environnementale. A ma demande, une décision de police sanitaire de suspension de la production du laboratoire Marette a été immédiatement prise. Il a été par ailleurs demandé au laboratoire de mettre en quarantaine les poches stockées dans ses locaux. Dans le même temps, les établissements hospitaliers ont également reçu l'ordre de cesser d'utiliser ces poches et de les placer en quarantaine.
Voilà pour la chronologie précise des faits.
2/ Je souhaite maintenant vous détailler les trois volets de l'enquête administrative.
(i) Le premier volet de cette enquête a été conduit par l'ANSM. Il a concerné l'ensemble de la chaîne de production et de distribution des poches.
L'ANSM a mené des enquêtes de police sanitaire sur la fabrication des poches plastiques, sur les fournisseurs des matières premières, sur les laboratoires qui réalisent les contrôles pour le compte de Marette et sur la société chargée du transport des poches jusqu'à Chambéry. Au total, ce sont 6 inspections, qui ont été conduites dans des délais courts.
Mais la partie la plus importante de l'enquête de l'ANSM a concerné le processus de fabrication au sein du laboratoire Marette, inspecté du 17 au 19 décembre, puis de nouveau les 6 et 7 janvier.
Ce sont ces enquêtes qui ont conduit à la suspension de l'ensemble de l'activité du laboratoire Marette.
Les autres investigations n'ont pas montré de dysfonctionnement sur le reste de la chaîne.
(ii) Le deuxième volet de l'enquête, conduit par l'ARS Rhône Alpes, a concerné le Centre hospitalier de Chambéry.
Je veux d'abord rappeler que le service de réanimation néo natale, une fois terminées les opérations de désinfection générale mises en en uvre à compter du 12 décembre, a pu de nouveau accueillir des nouveau-nés à compter du 20 décembre.
Le 7 janvier a eu lieu une inspection sur site, dirigée par l'ARS, en présence d'un inspecteur de l'ANSM et de plusieurs spécialistes des infections nosocomiales.
Elle a porté sur de nombreux points :
- la livraison et le stockage des poches en pharmacie ;
- le transport interne entre la pharmacie et le service de réanimation, ainsi que le stockage dans ce même service ;
- le respect de la chaîne du froid, du circuit du médicament, des modalités de délivrance et de contrôle ultime de la date limite d'utilisation et de la limpidité des poches ;
- le circuit de signalement des incidents de matério et de pharmaco vigilance ;
- le dispositif assurant la qualité et la sécurité des soins, ainsi que la lutte contre les infections nosocomiales.
Le rapport d'inspection, adressé le 14 janvier à l'établissement, a fait l'objet d'une procédure contradictoire d'une durée de huit jours. Cela a permis au centre hospitalier d'apporter des réponses détaillées aux observations et aux remarques de l'inspection.
Les principales conclusions de cette enquête sont les suivantes :
Les 35 poches fabriquées pour Chambéry le 28 novembre ont toutes été livrées le 2 décembre. Six enfants ont reçu des poches de ce lot sans aucune conséquence. Par ailleurs, les investigations ont permis de constater que toutes les poches qui se sont avérées contaminées après analyse, ou qui ont été utilisées en dernier lieu chez les nourrissons décédés, avaient été produites dans une période de temps limitée au cours de la journée du 28 novembre.
La mission d'inspection à Chambéry n'a pas établi de lien entre les pratiques de l'établissement et un risque de contamination des poches de nutrition parentérale utilisées. Néanmoins, plusieurs remarques et prescriptions ont été formulées par la mission sur des points de vigilance concernant la qualité et la sécurité des soins, en particulier, les conditions de conservation des poches, le respect des dates limites d'utilisation, le contrôle de limpidité des poches, et l'amélioration des contrôles environnementaux.
(iii) Le troisième volet de l'enquête a été diligenté par la direction générale de la santé avec l'aide de l'Institut de veille sanitaire. Il a concerné la totalité des établissements de santé utilisant des poches issues du laboratoire Marette.
Il s'agissait ici d'identifier tout évènement grave, potentiellement lié à l'utilisation de poches de nutrition parentérale, et survenu pendant l'année 2013.
Tous les clients du laboratoire Marette en 2013 ont été identifiés : ils sont au nombre de 19. Je veux souligner que cette enquête, menée par la DGS, s'est faite dans des conditions permettant le respect de la confidentialité médicale.
Sur les 19 établissements concernés, 9 cas potentiellement suspects ont été recensés.
Sur ces 9 cas, 3 cas ont été signalés dans 3 établissements différents. Ces cas sont en cours d'exploration et les enfants vont bien.
Les 6 autres concernent Chambéry avec :
- Les 4 cas déjà identifiés : les 3 décès et l'enfant ayant été victime d'un choc septique, en décembre 2013.
- Les 2 autres cas sont un décès survenu en décembre 2012 et un autre en mars 2013, ce dernier ayant déjà été signalé au Procureur de la République. Ces décès pourraient, selon les médecins, être liés à l'usage des poches en l'absence d'autre cause évidente, mais il sera très difficile d'établir leur cause en raison de leur ancienneté.
Au vu des résultats des trois enquêtes dont je viens de vous donner le détail, l'hypothèse la plus probable est aujourd'hui celle d'un accident de production isolé sur le site de Marette, survenu le 28 novembre lors de la préparation des poches destinées au CH de Chambéry.
Les causes exactes de l'accident n'ont pu être déterminées plus précisément.
Je veux aussi rappeler que :
- l'intégralité du lot suspect du 28 novembre a été retirée dès le 17 décembre en l'absence de signal sur un autre lot et de signal venant d'un autre établissement de santé ;
- aucun cas d'évènement indésirable lié à un autre lot produit par le laboratoire Marette n'a été signalé entre l'alerte de Chambéry le 16 décembre et la décision de police sanitaire intervenue le 7 janvier ;
- la production Marette étant totalement suspendue depuis le 7 janvier, il n'y a plus de risque lié à cette production à façon pour les personnes, enfants comme adultes, sous alimentation parentérale.
3/ Je veux tirer toutes les leçons de ces drames et lance dès aujourd'hui une importante mission confiée à l'inspection générale des affaires sociales.
La première partie de la mission sera consacrée spécifiquement à la gestion de la qualité et de la sécurité des soins au Centre Hospitalier de Chambéry. Elle a pour objectif compte tenu des observations établies par la mission d'inspection d'analyser les responsabilités des différents acteurs de l'hôpital avec l'appui d'experts extérieurs, spécialistes en pharmacie et en réanimation. J'attends les conclusions de cette mission dans un mois et prendrai si nécessaire toutes les mesures qui s'imposent.
La seconde partie de la mission portera plus généralement sur les poches de nutrition parentérale utilisées en pédiatrie et préparées à façon au sein d'établissements pharmaceutiques ou en pharmacie hospitalière.
La mission devra dresser le bilan et formuler des préconisations sur les indications médicales, les modalités de prescription, de fabrication, de supplémentation, de transport et de stockage. Des recommandations sont également attendues en matière de conservation au sein des pharmacies hospitalières ou dans le service prescripteur, de gestion des stocks, de délivrance et de traçabilité des poches. Plus largement, la mission s'attachera à comparer les bénéfices et les risques des préparations magistrales en nutrition parentérale, des préparations industrielles et des supplémentations. J'attends un premier point d'étape à la fin du mois de mars et un rapport définitif fin mai.
Mesdames et messieurs,
Vous le constatez, j'ai souhaité, après avoir informé préalablement les familles de Chloé, Théo et Milie, vous présenter en toute transparence l'ensemble des éléments dont nous disposons. Le rapport d'inspection de l'ARS est rendu public aujourd'hui, à l'exception du détail des dossiers médicaux des enfants. Les rapports d'inspection de l'ANSM seront rendus publics pour leur part mi-février, dès que la procédure contradictoire qui les concerne sera close. En attendant, une synthèse qui détaille les investigations réalisées par l'ANSM est publiée aujourd'hui même. L'ensemble de ces documents sera accessible sur les sites du ministère et de l'ANSM.
Par ailleurs, l'enquête judiciaire qui déploie en ce moment ses propres moyens d'investigation se poursuit.
Pour davantage de détails, je passe désormais la parole :
- au directeur général de l'ANSM, le Pr Dominique MARANINCHI, qui détaillera toutes les inspections menées par ses agents ;
- au Directeur général de la santé, le Pr Benoit VALLET, qui va vous présenter la recherche rétrospective et active de cas suspects, ainsi que les mesures qui ont été prises ;
- au Directeur général de l'offre de soins, qui reviendra sur les résultats de l'enquête concernant le site de l'hôpital de Chambéry.
Je vous remercie.
Source http://www.social-sante.gouv.fr, le 28 janvier 2014