Déclaration de M. Pascal Canfin, ministre du développement, sur la coopération décentralisée, à Paris le 14 janvier 2014.

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Circonstance : Séance plénière de la Commission nationale de la coopération décentralisée, à Paris le 14 janvier 2014

Texte intégral


Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les membres de la CNCD,
Madame, Monsieur,
Nous voilà réunis pour la troisième fois dans le cadre de la CNCD, la commission nationale de la coopération décentralisée.
D’ores et déjà nos travaux par leur périodicité et leur densité s’inscrivent dans la volonté affichée par le Ministre des affaires étrangères, Laurent FABIUS et moi-même de refonder notre commission à la suite des recommandations contenues dans le rapport d’André LAIGNEL.
La revitalisation de notre enceinte commune nous permet d’aborder des sujets d’actualité, de présenter des priorités du ministère sur le terrain du développement et pour une première fois ici d’échanger sur les enjeux globaux, en particulier dans le perspective de la conférence de Paris sur le Climat en 2015.
Lorsque nous nous sommes vus il y a un an, nous étions en plein dans le tourbillon des Assises du développement et de la solidarité internationale avec tous les acteurs et les actrices du développement. Nous avons fini les Assises le 1er mars dernier, avec la participation du Président de la République.
Lors de la dernière réunion de la CNCD [1erjuillet 2013], nous attendions la convocation du CICID, qui ne s’était pas réuni depuis 2008. Le CICID s’est réuni le 31 juillet pour acter les grandes priorités de la politique de développement. Nous sommes maintenant, comme promis, et comme annoncé par le Président de la République devant un projet de loi d’orientation et de programmation, soumis au Parlement. La rénovation de notre politique continue.
Engagement tenu.
Issu des travaux des assises du développement et de la solidarité et de la feuille de route que le Président de la République avait fixé au gouvernement, ce projet de loi, le premier de toute l’histoire de la Vème République, vise à préciser les objectifs de notre politique de développement et à renforcer son contrôle démocratique. Efficacité, transparence, critères de redevabilité de l’aide, critères de responsabilité de l’aide, sujets auxquels nos collectivités territoriales sont également attachées et sur lesquels vos réflexions, vos suggestions seront bienvenues. . Un article de la loi reconnait le rôle des collectivités et leur action à l’international. Et également valorise et sécurise leur action. Je salue d’ailleurs la concertation menée en préalable avec l’ensemble des réseaux d’élus et les associations.
Nous en discuterons dans un deuxième temps tout à l’heure de façon plus détaillée.
Ainsi, entre les Assises, le CICID, le projet de loi, l’action du gouvernement pour plus de transparence et d’efficacité de notre politique de développement. Le CNDSI (Conseil national du développement et de la solidarité internationale), dans lequel les collectivités territoriales auront toute leur place (collège de 8 membres), pour discuter et s’approprier la politique française de développement. Renouer le dialogue entre l’Etat et les acteurs du développement, mais également entre tous les acteurs et les actrices du développement entre eux, était un engagement. Cet engagement est tenu.
Engagement tenu, également, devant vous, membres de la CNCD, sur la refondation de votre instance. André LAIGNEL nous exposera tout à l’heure les principales avancées et la mise en œuvre de ses recommandations.
La refondation de la CNCD, conformément aux recommandations d’André Laignel dans son rapport l’année dernière, doit nous autoriser à aborder les sujets de fond relatifs aux enjeux globaux. C’est pourquoi j’ai proposé que nous consacrions un temps de débat spécifique à la préparation de la conférence de Paris sur le Climat et au contenu du rapport établi par les Sénateurs Ronan DANTEC [nous étions encore à New York ensemble la semaine dernière] et Michel DELEBARRE, à la demande du Premier Ministre, sur la contribution des collectivités territoriales à cette préparation. J’y reviendrai au terme de la première partie de nos débats.
Je crois profondément au rôle des collectivités, qui sont amenés à jouer un rôle d’autant plus important qu’aujourd’hui 50% de la population mondiale vit en ville. Les villes et les collectivités sont donc les premières à vivre concrètement les impacts du changement climatique, mais elles sont également en première ligne pour pouvoir s’y adapter. Vous le savez, lors de la plupart de mes déplacements sur le terrain, je rencontre des élus locaux. C’était le cas à Dakar en septembre dernier, où j’ai pu une nouvelle fois constater que les élus sont en première ligne. Quand vous être confronté à tous les défis du quotidien, que sont l’accès à l’énergie, l’assainissement, l’eau, mais aussi la dynamique économique du territoire, et que vous éprouvez, en direct, les premiers impacts du changement climatique, lié à l’érosion côtière, il paraît impensable que les collectivités territoriales et les élus qui les représentent ne soient pas mieux associés aux négociations sur le climat.
Mieux associés en raison des impacts, mais aussi parce que – et c’est l’un des premiers enseignements du rapport des Sénateurs Dantec et Delebarre qui vous le présenteront tout à l’heure – les collectivités territoriales sont des partie intégrantes des solutions.
L’Agence française de développement (dont je salue les représentants ici présents) va bientôt adopter son nouveau cadre d’intervention stratégique concernant les villes durables. La doctrine de l’AFD en matière d’infrastructures et de villes durable doit être concertée avec vous. C’est d’ailleurs un prérequis indispensable que vous soyez en première ligne. La phase de concertation commence avec tous les réseaux et les associations d’élus en ce début 2014.
Par ailleurs, l’AFD réfléchit actuellement à lancer un guichet de financement direct des collectivités, la FICOL complémentaire aux appels à projets du Ministère des affaires étrangères (mais avec un ticket d’entrée beaucoup plus élevé). Dans ce cadre, je souhaiterais que, à terme après la phase pilote de cette année, la FICOL soit soumise aux mêmes règles concernant le co-bénéfice climat des projets soutenus. Car les infrastructures qui bâtiront la ville durable de demain doivent être pensées aussi en termes d’adaptation au changement climatique.
La coopération décentralisée française a des atouts à faire valoir. Elle s’inscrit dans la durée, elle renforce les institutions locales, elle établit une relation de partenariat d’égal à égal. Ces atouts sont déterminants pour le développement des territoires au Sud. J’ai pu les constater lors de mes multiples déplacements sur le terrain. Des collectivités territoriales dotées de capacités financières et humaines, en rapprochant les citoyens des décideurs publics, contribuent à l’amélioration des services publics et sociaux locaux. Il est indispensable d’appuyer les expériences de décentralisation.
C’est ainsi un enjeu particulier au Mali où le retour des services publics sur l’ensemble du territoire est un facteur de paix. La France dispose à travers l’expérience de ses collectivités d’une expertise précieuse en la matière que nous entendons partager. Les collectivités territoriales françaises traditionnellement très présentes au Mali y ont pris leur part et se sont mobilisées dans l’urgence et dans la reprise de leur projet de coopération avec les collectivités territoriales malienne. Un an pile après le début de l’intervention Serval, l’effort doit désormais porter sur la reconstruction et le développement. La réunion de Lyon le 19 mars 2013 a été un moment fort de mobilisation et d’expression d’une solidarité politique et humanitaire. Lors de la conférence des donateurs à Bruxelles le 15 mai 2013, votre contribution a été portée et reconnue. Notre effort commun doit se poursuivre. Je propose, si vous en êtes d’accord, que soit organisée juste avant l’anniversaire de Bruxelles +1, en avril 2014 (après les élections municipales par exemple) une réunion technique qui rassemblerait en premier lieu les collectivités françaises engagées au Mali (via le groupe pays de CUF), mais également l’Etat, l’AFD, et quelques autres acteurs français mobilisés en amont de Bruxelles. La bataille du développement est engagée. A nous de montrer que depuis 2011 et les dernières assises de la coopération décentralisée franco-maliennes, les choses ont évolué, les relations avec les partenaires se sont renforcées, et les projets ont mûri.
Depuis quelques semaines une crise humanitaire sans précèdent a amené la France à intervenir en République Centrafricaine dans le cadre de la légalité internationale et avec le soutien de la communauté internationale, avant tout de l’Union Africaine et des pays de la sous-région. Dans quelques jours, le 20 janvier se tiendra une conférence des donateurs
Un an après la remise de son rapport par André Laignel et la présentation du plan d’action ministériel, nous ferons le point sur la mise en œuvre de ses recommandations. Sans dévoiler ce qui nous sera présenté ce matin par André Laignel, je crois pouvoir dire que nous avons atteint l’essentiel des objectifs fixés il y a douze mois. Cela est le fruit d’un investissement de toutes et de tous et en particulier de chacun des membres de la CNCD qui y apporte sa contribution ainsi qu’à l’équipe de la DAECT. La vigilance et la détermination d’André Laignel y a fortement contribué.
Enfin, vous avez souhaité consacrer un temps d’échanges à la problématique essentielle en termes de développement durable de l’eau et de l’assainissement. A mi-parcours entre le forum mondial de l’eau que la France avait accueilli à Marseille et le prochain qui se tiendra au printemps 2015 en Corée du Sud, je remercie le Sénateur Jacques OUDIN, [à l’origine de la loi éponyme sur le financement dans le domaine de l’eau de projets de coopération décentralisée], et Henri BEGORRE de leurs présences et de leurs présentations.
Vous l’avez compris, et nos débats de ce matin devraient le confirmer la CNCD à vocation à devenir cet espace de concertation, de dialogue et de retour d’expérience qui nous permette les uns et les autres à être plus efficace et mieux coordonné dans nos politiques de développement et d’action extérieure. La diplomatie des territoires, comme aime l’appeler Laurent Fabius, est devenue un élément clef de notre action extérieure. A chacun de mes déplacements, je m’intéresse et je visite des projets portés par des collectivités territoriales.
Au-delà des projets concrets que vous mettez en œuvre, la diplomatie des territoires diffuse une culture démocratique locale, elle s’appuie sur des valeurs communes, elle répond à des critères de responsabilité et de transparence.
Une CNCD renforcée est le meilleur garant d’un dialogue nourri et fructueux entre l’Etat et les collectivités représentées ici par leurs associations dont je salue l’action et l’engagement.
Je laisse maintenant la parole à Anne-Marie DESCÔTES, la directrice générale de la mondialisation pour qu’elle présente l’engagement et la volonté de ses équipes à mettre la coopération décentralisée au cœur du travail de la DGM. Je vous remercie.Source http://www.cercoop.org, le 18 février 2014