Texte intégral
Merci Monsieur le président. Mesdames, Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les députés, le 5 décembre dernier, le président de la République décidait denvoyer nos soldats en République centrafricaine et cela afin déviter à ce pays de sombrer dans le chaos. La Centrafrique était en effet en proie à une violence généralisée et à une dérive confessionnelle. Les Seleka, ces milices à dominante musulmane qui avaient déposé quelques mois auparavant le président Bozizé, multipliaient exactions et pillages. Les anti-balaka, recrutés parmi les populations chrétiennes, commençaient à sen prendre aux civils musulmans par esprit de vengeance comme aussi parfois pour des motifs crapuleux.
Sur la base dun mandat des Nations Unies et en appui à la force de lUnion africaine, lopération Sangaris avait deux objectifs : rétablir la sécurité en République centrafricaine et permettre le retour des organisations humanitaires, favoriser la montée en puissance de la force africaine, la MISCA, et son déploiement opérationnel. Cette intervention répondait à lurgence. Il ny avait plus, en Centrafrique, ni armée ni police ni justice. Les écoles et les hôpitaux avaient cessé de fonctionner. À la tête dun État failli, léquipe de transition avait perdu tout contrôle et la spirale de la violence prenait brutalement une ampleur nouvelle. À la veille de notre intervention, les massacres avaient fait pas moins de mille victimes dans la capitale.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce quétait la réalité centrafricaine. La France, par la voix du président de la République à la tribune de lassemblée générale des Nations Unies, avait, dès septembre 2013 je tiens à le rappeler ici , alerté la communauté internationale. Mais, à lexception des États voisins, de lUnion africaine et des acteurs humanitaires, notre mise en garde navait pas permis de surmonter une coupable indifférence et la République centrafricaine se trouvait au bord du gouffre.
Oui, Mesdames et Messieurs les députés, c'est la question que nous devons nous poser : fallait-il que la France, qui était, grâce à ses forces prépositionnées, la seule à pouvoir intervenir sans délai en appui à la MISCA, laisse se perpétuer ces activités, ces atrocités et le pays senfoncer dans une situation que certains à lONU ont qualifiée de « prégénocidaire » ? Fallait-il abandonner ce pays en plein cur de lAfrique, dans une région déjà très fragilisée par les conflits dans les Grands Lacs ou au Soudan ? Fallait-il prendre le risque de laisser se créer une zone de non-droit à la merci de tous les trafics et du terrorisme ? Fallait-il rester sourd à lappel au secours désespéré de la population centrafricaine et à la demande de soutien des Africains ? À lévidence, non ! Je sais que, comme moi, ce nest pas lidée que vous vous faites de la France et de ses valeurs. Ce nest pas la conception que nous avons du rôle de notre pays dans le monde. Cest dailleurs ce que vous aviez tous exprimé, Mesdames et Messieurs les députés, lors du précédent débat.
Bien au contraire, la France devait prendre ses responsabilités. Et cest parce que nous avons agi que des massacres de masse ont été évités, que chaque jour des vies sont sauvées et que la République centrafricaine a une chance de pouvoir reprendre en main son destin. Cest aussi parce que nous avons été capables douvrir la voie que, peu à peu, avec nos amis africains, nous entraînons nos autres partenaires internationaux. La France je le rappelle a donc pris ses responsabilités et, contrairement à ce que je lis parfois ou même entends, la France nest pas seule. Elle nest pas isolée. Elle a pris ses responsabilités et, en peu de temps, la MISCA est passée denviron deux mille cinq cents hommes au début de notre intervention à six mille aujourdhui. Elle accomplit un travail de grande qualité, en bonne coordination avec Sangaris. De nombreux pays contribuent aux opérations en cours par un soutien logistique indispensable et cest le cas des États-Unis et de nos partenaires européens. LUnion européenne apporte aussi un soutien financier à hauteur de cinquante millions deuros.
Mais au-delà de ce soutien, lUnion européenne a décidé dengager directement des troupes sur le terrain en établissant, à lunanimité, le 10 février dernier, lopération EUFOR-RCA. Elle a pris cette décision plus vite quelle ne lavait jamais fait dans des circonstances comparables et, dans les prochains jours, un premier échelon devrait arriver sur le terrain. Cette force européenne aura pour mission principale dassurer la sécurité de laéroport de Bangui et de certains quartiers, ce qui permettra à la MISCA et à Sangaris de continuer à se déployer en province où leur intervention est très attendue.
À ce jour, une dizaine de partenaires européens ont fait part de leur intention dy contribuer. Le processus de génération de forces se poursuit. Comme la annoncé la chancelière Merkel à loccasion du Conseil des ministres franco-allemand la semaine dernière, lAllemagne devrait, elle-aussi, participer à cet effort par des moyens logistiques.
Il appartient aux Nations Unies de faire davantage et de faire plus vite. Cest le souhait exprimé par le secrétaire général lui-même. LONU doit notamment être en mesure de coordonner laide humanitaire, de préparer le désarmement et la réinsertion des combattants, ainsi que daider le gouvernement centrafricain à avancer vers les élections. Les Nations Unies ont un rôle évident à jouer dans la lutte contre limpunité grâce au déploiement dune commission denquête internationale dont le travail complètera celui de la Cour pénale internationale. Enfin la préparation dune opération de maintien de la paix, en partenariat avec lUnion africaine, doit saccélérer. Jy reviendrai dans un instant.
Mesdames et Messieurs les députés, nos efforts ont commencé à porter leurs fruits. Lembrasement généralisé qui menaçait a été évité. La mobilisation internationale sorganise. Sangaris poursuit avec opiniâtreté les objectifs qui lui sont assignés. À Bangui même, linsécurité ne se concentre plus que dans quelques quartiers. La plupart des combattants ex-Seleka ont été désarmés et cantonnés sous le contrôle de la MISCA et nombre dentre eux sont repartis vers le nord du pays. Dans la capitale, la menace vient principalement des anti-balaka contre lesquels nous agissons de manière très vigoureuse. Dans la moitié occidentale du pays, des affrontements entre communautés ont toujours lieu. En lien étroit avec la MISCA, nos forces font le maximum pour protéger les populations chrétiennes et musulmanes avec une totale impartialité. À lest, il convient de veiller à ce que les regroupements dex-Seleka naboutissent pas à une coupure de fait entre cette région et le reste du pays.
Le départ massif de populations musulmanes constitue un sujet de vive inquiétude dans un pays où les religions ont longtemps vécu en bonne harmonie. Les pays voisins, à commencer par le Tchad et le Cameroun, font preuve de beaucoup de solidarité en accueillant un nombre important de réfugiés. Ils doivent pouvoir compter sur lappui de la communauté internationale. Celui de la France leur est pleinement acquis.
En matière humanitaire, la situation reste en effet très critique avec deux cent cinquante mille réfugiés, huit cent vingt-cinq mille déplacés dont quatre cent mille dans la capitale. Un habitant sur deux a besoin de soins médicaux durgence, un sur cinq daide alimentaire et le départ de nombreux musulmans, qui animaient le commerce, fragilise encore davantage léconomie. Sur place, les agences des Nations Unies sefforcent de faire face. Le Programme alimentaire mondial a mis en place un pont aérien qui permet de ravitailler les déplacés en attendant que la MISCA, soutenue par Sangaris, sécurise totalement laxe vital entre Bangui et le Cameroun. De nombreuses ONG, qui navaient pas pu jusquà présent agir, sont très actives dont Médecins Du Monde et Médecins Sans Frontières qui gèrent le seul hôpital resté ouvert à Bangui.
Sur le plan politique, la nouvelle présidente de transition, Catherine Samba-Panza, qui est la première femme à diriger un pays dAfrique francophone, a su créer une dynamique et je tiens à lui renouveler devant vous le soutien de la France. Il faut maintenant que cette dynamique puisse se concrétiser dans la vie quotidienne de la population, que le paiement du salaire des fonctionnaires reprenne afin que les institutions de base recommencent à fonctionner. Les pays de la région ont promis leur aide. Il est important que les institutions financières internationales, elles-aussi, soient au rendez-vous. La France agit en ce sens.
Mesdames et Messieurs les députés, la situation de la République centrafricaine, je viens de la décrire et je lai fait sans fard. Oui, il faut bien le dire, les difficultés sont considérables. Non, la France ne les sous-estime pas et ne cherche pas à les minimiser. Pour autant, les premiers progrès sont réels et une perspective se dessine dans tous les domaines. Des élections doivent être organisées dici février 2015 et des étapes importantes ont été franchies : le code électoral a été adopté et lautorité électorale est désormais en place. Il y a urgence à ce que la communauté internationale mette les moyens nécessaires au respect de ce calendrier.
Pour son développement, la République centrafricaine, qui a longtemps fait partie des « orphelins » de laide, a besoin de lassistance internationale. À Bruxelles, le 20 janvier dernier, près dun demi-milliard de dollars ont été promis pour faire face aux défis humanitaires les plus pressants et engager dès maintenant la reconstruction économique et sociale du pays. La France sest engagée à hauteur de trente-cinq millions deuros pour 2014. Notre assistance technique redémarre et nous travaillons à accélérer la remise en marche de lÉtat. Ceci est nécessaire pour permettre le retour des principaux bailleurs le FMI, la Banque Mondiale, la Banque Africaine De Développement et lUnion européenne.
Quant à la sécurité, une opération de maintien de la paix sous Casque bleu nous paraît seule à même de répondre aux besoins de la Centrafrique. La MISCA effectue un travail indispensable qui doit être conforté dans la durée. La mise en place dune OMP permettra de garantir les renforts nécessaires sur le plan militaire et dassurer, sur le plan civil, le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des combattants, ainsi que lorganisation des élections. Le secrétaire général des Nations Unies présentera, dans les tout prochains jours, un rapport en ce sens. Nous souhaitons que le Conseil de sécurité lexamine début mars afin que lopération puisse être déployée au plus vite.
Dici là, Sangaris assurera son rôle de relai aux côtés de la MISCA et de lopération EUFOR-RCA. Afin de répondre à la situation et à lappel du secrétaire général de lONU, le président de la République a décidé, à la suite du Conseil de défense restreint du 14 février dernier, den porter les effectifs à deux mille hommes. Notre effort supplémentaire comprend le déploiement anticipé de forces de combat et de gendarmes français qui participeront ensuite à lopération européenne. Au-delà, la France pourra réduire son effort et maintenir une présence en appui à lopération des Nations Unies, mais elle na pas vocation à se substituer aux forces internationales auxquelles il incombe dassurer, dans la durée, la sécurisation de la République centrafricaine.
Mesdames et Messieurs les députés, à Bangui et partout en République centrafricaine, nos soldats ont trouvé un pays dévasté. Comme toujours, ils ont fait preuve dun grand courage et dun professionnalisme particulièrement élevé et qui sont lhonneur de la France. Je salue leur engagement et je rends hommage à nos trois soldats qui ont perdu la vie lors de missions opérationnelles : les caporaux Nicolas Vokaer et Antoine Le Quinio le 10 décembre dernier et vous lavez rappelé, Monsieur le président de lAssemblée nationale , le caporal Damien Dolet, ce dimanche. Je salue aussi la mémoire de leurs compagnons darmes, les soldats de la MISCA tués en opérations. Dans cette épreuve, la nation a su se rassembler. Dès le déclenchement de notre opération, ça a été le cas et je voudrais en remercier tous les parlementaires, de la majorité comme de lopposition.
Une délégation de députés, conduite par la présidente de la commission des affaires étrangères, Madame Élisabeth Guigou, est allée à Bangui la semaine dernière pour se rendre compte par elle-même de la situation et le gouvernement continuera je my engage à informer régulièrement, autant que nécessaire, la représentation nationale.
Mesdames, Messieurs les députés, chacun est conscient ici que notre action nest pas terminée et cest la raison pour laquelle, conformément à larticle 35, alinéa 3, de la Constitution, je suis venu vous demander, aujourdhui, dautoriser la prolongation de notre intervention. Cette intervention a permis déviter la destruction totale de la Centrafrique. Laction et le courage de nos soldats forcent ladmiration. Les conditions sont réunies pour quun accompagnement international robuste militaire, humanitaire et politique permette à la Centrafrique de retrouver le chemin de la paix. Dici là, il nous revient de continuer à assumer nos responsabilités. Je le sais, cest un défi, mais cest aussi lhonneur de la France.
Source http://www.gouvernement.fr, le 27 février 2014
Sur la base dun mandat des Nations Unies et en appui à la force de lUnion africaine, lopération Sangaris avait deux objectifs : rétablir la sécurité en République centrafricaine et permettre le retour des organisations humanitaires, favoriser la montée en puissance de la force africaine, la MISCA, et son déploiement opérationnel. Cette intervention répondait à lurgence. Il ny avait plus, en Centrafrique, ni armée ni police ni justice. Les écoles et les hôpitaux avaient cessé de fonctionner. À la tête dun État failli, léquipe de transition avait perdu tout contrôle et la spirale de la violence prenait brutalement une ampleur nouvelle. À la veille de notre intervention, les massacres avaient fait pas moins de mille victimes dans la capitale.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce quétait la réalité centrafricaine. La France, par la voix du président de la République à la tribune de lassemblée générale des Nations Unies, avait, dès septembre 2013 je tiens à le rappeler ici , alerté la communauté internationale. Mais, à lexception des États voisins, de lUnion africaine et des acteurs humanitaires, notre mise en garde navait pas permis de surmonter une coupable indifférence et la République centrafricaine se trouvait au bord du gouffre.
Oui, Mesdames et Messieurs les députés, c'est la question que nous devons nous poser : fallait-il que la France, qui était, grâce à ses forces prépositionnées, la seule à pouvoir intervenir sans délai en appui à la MISCA, laisse se perpétuer ces activités, ces atrocités et le pays senfoncer dans une situation que certains à lONU ont qualifiée de « prégénocidaire » ? Fallait-il abandonner ce pays en plein cur de lAfrique, dans une région déjà très fragilisée par les conflits dans les Grands Lacs ou au Soudan ? Fallait-il prendre le risque de laisser se créer une zone de non-droit à la merci de tous les trafics et du terrorisme ? Fallait-il rester sourd à lappel au secours désespéré de la population centrafricaine et à la demande de soutien des Africains ? À lévidence, non ! Je sais que, comme moi, ce nest pas lidée que vous vous faites de la France et de ses valeurs. Ce nest pas la conception que nous avons du rôle de notre pays dans le monde. Cest dailleurs ce que vous aviez tous exprimé, Mesdames et Messieurs les députés, lors du précédent débat.
Bien au contraire, la France devait prendre ses responsabilités. Et cest parce que nous avons agi que des massacres de masse ont été évités, que chaque jour des vies sont sauvées et que la République centrafricaine a une chance de pouvoir reprendre en main son destin. Cest aussi parce que nous avons été capables douvrir la voie que, peu à peu, avec nos amis africains, nous entraînons nos autres partenaires internationaux. La France je le rappelle a donc pris ses responsabilités et, contrairement à ce que je lis parfois ou même entends, la France nest pas seule. Elle nest pas isolée. Elle a pris ses responsabilités et, en peu de temps, la MISCA est passée denviron deux mille cinq cents hommes au début de notre intervention à six mille aujourdhui. Elle accomplit un travail de grande qualité, en bonne coordination avec Sangaris. De nombreux pays contribuent aux opérations en cours par un soutien logistique indispensable et cest le cas des États-Unis et de nos partenaires européens. LUnion européenne apporte aussi un soutien financier à hauteur de cinquante millions deuros.
Mais au-delà de ce soutien, lUnion européenne a décidé dengager directement des troupes sur le terrain en établissant, à lunanimité, le 10 février dernier, lopération EUFOR-RCA. Elle a pris cette décision plus vite quelle ne lavait jamais fait dans des circonstances comparables et, dans les prochains jours, un premier échelon devrait arriver sur le terrain. Cette force européenne aura pour mission principale dassurer la sécurité de laéroport de Bangui et de certains quartiers, ce qui permettra à la MISCA et à Sangaris de continuer à se déployer en province où leur intervention est très attendue.
À ce jour, une dizaine de partenaires européens ont fait part de leur intention dy contribuer. Le processus de génération de forces se poursuit. Comme la annoncé la chancelière Merkel à loccasion du Conseil des ministres franco-allemand la semaine dernière, lAllemagne devrait, elle-aussi, participer à cet effort par des moyens logistiques.
Il appartient aux Nations Unies de faire davantage et de faire plus vite. Cest le souhait exprimé par le secrétaire général lui-même. LONU doit notamment être en mesure de coordonner laide humanitaire, de préparer le désarmement et la réinsertion des combattants, ainsi que daider le gouvernement centrafricain à avancer vers les élections. Les Nations Unies ont un rôle évident à jouer dans la lutte contre limpunité grâce au déploiement dune commission denquête internationale dont le travail complètera celui de la Cour pénale internationale. Enfin la préparation dune opération de maintien de la paix, en partenariat avec lUnion africaine, doit saccélérer. Jy reviendrai dans un instant.
Mesdames et Messieurs les députés, nos efforts ont commencé à porter leurs fruits. Lembrasement généralisé qui menaçait a été évité. La mobilisation internationale sorganise. Sangaris poursuit avec opiniâtreté les objectifs qui lui sont assignés. À Bangui même, linsécurité ne se concentre plus que dans quelques quartiers. La plupart des combattants ex-Seleka ont été désarmés et cantonnés sous le contrôle de la MISCA et nombre dentre eux sont repartis vers le nord du pays. Dans la capitale, la menace vient principalement des anti-balaka contre lesquels nous agissons de manière très vigoureuse. Dans la moitié occidentale du pays, des affrontements entre communautés ont toujours lieu. En lien étroit avec la MISCA, nos forces font le maximum pour protéger les populations chrétiennes et musulmanes avec une totale impartialité. À lest, il convient de veiller à ce que les regroupements dex-Seleka naboutissent pas à une coupure de fait entre cette région et le reste du pays.
Le départ massif de populations musulmanes constitue un sujet de vive inquiétude dans un pays où les religions ont longtemps vécu en bonne harmonie. Les pays voisins, à commencer par le Tchad et le Cameroun, font preuve de beaucoup de solidarité en accueillant un nombre important de réfugiés. Ils doivent pouvoir compter sur lappui de la communauté internationale. Celui de la France leur est pleinement acquis.
En matière humanitaire, la situation reste en effet très critique avec deux cent cinquante mille réfugiés, huit cent vingt-cinq mille déplacés dont quatre cent mille dans la capitale. Un habitant sur deux a besoin de soins médicaux durgence, un sur cinq daide alimentaire et le départ de nombreux musulmans, qui animaient le commerce, fragilise encore davantage léconomie. Sur place, les agences des Nations Unies sefforcent de faire face. Le Programme alimentaire mondial a mis en place un pont aérien qui permet de ravitailler les déplacés en attendant que la MISCA, soutenue par Sangaris, sécurise totalement laxe vital entre Bangui et le Cameroun. De nombreuses ONG, qui navaient pas pu jusquà présent agir, sont très actives dont Médecins Du Monde et Médecins Sans Frontières qui gèrent le seul hôpital resté ouvert à Bangui.
Sur le plan politique, la nouvelle présidente de transition, Catherine Samba-Panza, qui est la première femme à diriger un pays dAfrique francophone, a su créer une dynamique et je tiens à lui renouveler devant vous le soutien de la France. Il faut maintenant que cette dynamique puisse se concrétiser dans la vie quotidienne de la population, que le paiement du salaire des fonctionnaires reprenne afin que les institutions de base recommencent à fonctionner. Les pays de la région ont promis leur aide. Il est important que les institutions financières internationales, elles-aussi, soient au rendez-vous. La France agit en ce sens.
Mesdames et Messieurs les députés, la situation de la République centrafricaine, je viens de la décrire et je lai fait sans fard. Oui, il faut bien le dire, les difficultés sont considérables. Non, la France ne les sous-estime pas et ne cherche pas à les minimiser. Pour autant, les premiers progrès sont réels et une perspective se dessine dans tous les domaines. Des élections doivent être organisées dici février 2015 et des étapes importantes ont été franchies : le code électoral a été adopté et lautorité électorale est désormais en place. Il y a urgence à ce que la communauté internationale mette les moyens nécessaires au respect de ce calendrier.
Pour son développement, la République centrafricaine, qui a longtemps fait partie des « orphelins » de laide, a besoin de lassistance internationale. À Bruxelles, le 20 janvier dernier, près dun demi-milliard de dollars ont été promis pour faire face aux défis humanitaires les plus pressants et engager dès maintenant la reconstruction économique et sociale du pays. La France sest engagée à hauteur de trente-cinq millions deuros pour 2014. Notre assistance technique redémarre et nous travaillons à accélérer la remise en marche de lÉtat. Ceci est nécessaire pour permettre le retour des principaux bailleurs le FMI, la Banque Mondiale, la Banque Africaine De Développement et lUnion européenne.
Quant à la sécurité, une opération de maintien de la paix sous Casque bleu nous paraît seule à même de répondre aux besoins de la Centrafrique. La MISCA effectue un travail indispensable qui doit être conforté dans la durée. La mise en place dune OMP permettra de garantir les renforts nécessaires sur le plan militaire et dassurer, sur le plan civil, le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des combattants, ainsi que lorganisation des élections. Le secrétaire général des Nations Unies présentera, dans les tout prochains jours, un rapport en ce sens. Nous souhaitons que le Conseil de sécurité lexamine début mars afin que lopération puisse être déployée au plus vite.
Dici là, Sangaris assurera son rôle de relai aux côtés de la MISCA et de lopération EUFOR-RCA. Afin de répondre à la situation et à lappel du secrétaire général de lONU, le président de la République a décidé, à la suite du Conseil de défense restreint du 14 février dernier, den porter les effectifs à deux mille hommes. Notre effort supplémentaire comprend le déploiement anticipé de forces de combat et de gendarmes français qui participeront ensuite à lopération européenne. Au-delà, la France pourra réduire son effort et maintenir une présence en appui à lopération des Nations Unies, mais elle na pas vocation à se substituer aux forces internationales auxquelles il incombe dassurer, dans la durée, la sécurisation de la République centrafricaine.
Mesdames et Messieurs les députés, à Bangui et partout en République centrafricaine, nos soldats ont trouvé un pays dévasté. Comme toujours, ils ont fait preuve dun grand courage et dun professionnalisme particulièrement élevé et qui sont lhonneur de la France. Je salue leur engagement et je rends hommage à nos trois soldats qui ont perdu la vie lors de missions opérationnelles : les caporaux Nicolas Vokaer et Antoine Le Quinio le 10 décembre dernier et vous lavez rappelé, Monsieur le président de lAssemblée nationale , le caporal Damien Dolet, ce dimanche. Je salue aussi la mémoire de leurs compagnons darmes, les soldats de la MISCA tués en opérations. Dans cette épreuve, la nation a su se rassembler. Dès le déclenchement de notre opération, ça a été le cas et je voudrais en remercier tous les parlementaires, de la majorité comme de lopposition.
Une délégation de députés, conduite par la présidente de la commission des affaires étrangères, Madame Élisabeth Guigou, est allée à Bangui la semaine dernière pour se rendre compte par elle-même de la situation et le gouvernement continuera je my engage à informer régulièrement, autant que nécessaire, la représentation nationale.
Mesdames, Messieurs les députés, chacun est conscient ici que notre action nest pas terminée et cest la raison pour laquelle, conformément à larticle 35, alinéa 3, de la Constitution, je suis venu vous demander, aujourdhui, dautoriser la prolongation de notre intervention. Cette intervention a permis déviter la destruction totale de la Centrafrique. Laction et le courage de nos soldats forcent ladmiration. Les conditions sont réunies pour quun accompagnement international robuste militaire, humanitaire et politique permette à la Centrafrique de retrouver le chemin de la paix. Dici là, il nous revient de continuer à assumer nos responsabilités. Je le sais, cest un défi, mais cest aussi lhonneur de la France.
Source http://www.gouvernement.fr, le 27 février 2014