Texte intégral
VERONIQUE SAVIUC
Merci d'être avec nous en direct ce matin sur France Bleu Isère. On va y revenir, vous serez à Grenoble pour la remise d'un rapport destiné à améliorer la situation des femmes migrantes. Mais une question tout d'abord, vous êtes attendue dans le quartier de la Villeneuve, un quartier qu'on dit sensible où le Front national progresse, où l'abstention progresse aussi, est-ce qu'à un mois des élections municipales vous venez aussi faire passer un message ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je crois que cest important en effet à quelques semaines des élections municipales de veiller à lutter contre l'abstention. Vous savez quand on repense aux élections municipales de 2008 il y avait eu un taux de participation de quelques 66 %, on peut faire mieux. Les élections locales sont des élections importantes, ce sont des élections aux enjeux locaux, mais ce sont des moments de participation citoyenne des Français et donc tous les messages qui peuvent être passés dans ce sens bien sur le seront.
VERONIQUE SAVIUC
Et puis en même temps vous venez aussi, il ne faut pas le cacher, soutenir votre collègue socialiste du Conseil régional Jérôme SAFAR, vous ne craignez pas un effet contreproductif, les sondages ne sont pas très bons pour le gouvernement en ce moment ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je le dis à nouveau, moi je suis persuadée d'une chose, quoi qu'il en soit, c'est que les élections locales se jouent sur des enjeux locaux. Et en l'occurrence Jérôme SAFAR est un très bon candidat et c'est vrai que je le soutiens avec grand plaisir. Et il peut se prévaloir du bilan d'une équipe sortante avec Michel DESTOT qui a vraiment fait de Grenoble ces dernières années une ville à la fois attractive, dynamique, assez exemplaire sur le plan social. Donc il a un bilan dont il peut se prévaloir, et je crois que les électeurs vont d'abord regarder cela avant de se prononcer.
VERONIQUE SAVIUC
Alors on revient à ce rapport que vous commandez à Olivier NOBLECOURT, l'adjoint en charge des affaires sociales à Grenoble pour améliorer la situation des femmes migrantes. Pour vous elles sont doublement pénalisées ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui. Mon ministère comme vous le savez s'intéresse évidemment de très près aux inégalités entre les hommes et les femmes, et tente de les résorber. Et dans ce secteur on s'est rendu compte très vite qu'il est une catégorie de femmes qui sont encore plus en difficulté que les autres, ce sont des femmes migrantes, souvent parce que insécurisées sur le plan juridique, sur le plan administratif, avec des droits qui s'appliquent à elles, le droit français, mais d'autres droits de leur pays, et donc qui sont souvent dans la précarité, moins en emploi que peuvent l'être les hommes d'immigrés par exemple, parfois victimes de violences conjugales donc elles ont un mal terrible à sortir parce qu'il y a un vrai chantage qui s'opère sur elle par rapport au fait de quitter le domicile et de se retrouver sans papier. Donc quand vous mettez bout à bout toutes ces difficultés là, tout ce quotidien terrible, eh bien il y a un moment où il faut que les pouvoirs publics se saisissent de ce sujet, et Olivier NOBLECOURT a accepté de présider aux travaux de ce groupe de travail qui depuis quelques mois travaille sur ce sujet de l'immigration des femmes et de notre capacité à apporter des réponses à leurs problèmes, et aujourd'hui il va me remettre des conclusions qui j'espère pourront en effet enrichir le projet de loi que je porte en ce moment au Parlement sur l'égalité entre les femmes et les hommes.
VERONIQUE SAVIUC
Alors quelle solution, qu'est-ce qu'on va trouver dans ce rapport ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Par exemple sur la question des violences conjugales que j'évoquais à l'instant, il y a un certain nombre de dispositions qui peuvent être prises pour que les femmes se sentent davantage protégées soit de fait administrativement protégées lorsqu'elle sorte du cycle de la spirale des violences et qu'elles se présentent en préfecture ou qu'elles se présentent devant un juge. Il faut que leur situation administrative ne soit pas un frein de plus à la sortie des violences. Donc il y aura vraisemblablement des propositions en ce sens. S'agissant de l'emploi des femmes il s'agit tout simplement de faire en sorte, lorsque les migrantes arrivent sur le territoire dès les toutes premières années, qu'elles aient accès à une formation diplomate, l'apprentissage du français, des mécaniques d'insertion par l'emploi qui leur permette de ne pas s'isoler pendant de longues années, comme on a pu le voir vraiment d'expérience, mais au contraire d'être incitées très tôt à participer au marché du travail. Et c'est une façon de leur garantir aussi une autonomie économique, une indépendance financière, qui permettra d'éviter la précarisation et parfois les violences.
VERONIQUE SAVIUC
Alors pour leur donner plus de citoyenneté à ces femmes migrantes, pourquoi le gouvernement tarde-t-il à leur donner le droit de vote aux élections locales ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ça c'est un engagement que le président de la République avait pris. La question, comme vous le savez elle est tout simplement celle de la majorité qu'il faut trouver, la majorité des 3/5ème qu'il faut trouver pour réviser la constitution. Donc ça c'est un sujet qui reviendra en temps utile quand nous trouverons cette majorité utile. En tout état de cause, comme vous le savez ça ne vaut pas pour les toutes prochaines élections locales qui vont se dérouler, les élections municipales, mais la citoyenneté des femmes migrantes on peut en tout cas l'améliorer, par exemple en encourageant leur participation à des associations, et au sein même de ces associations en ayant des mécaniques d'incitation à prendre part aux conseils d'administration, de valorisation des responsabilités qu'elles pourraient avoir. Si vous voulez il y a des
VERONIQUE SAVIUC
Il y a plusieurs façons
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, il y a plusieurs façons de valoriser la citoyenneté. Et l'une des façons tient, et je pense que Olivier NOBLECOURT l'aura inscrit dans ses conclusions, l'une des façons c'est aussi évidemment au niveau local dans les villes de faire en sorte qu'on entende la voix tout simplement de ces femmes, et de ces hommes aussi d'ailleurs, mais il se trouve que la voix des femmes migrantes est la voix qu'on entend sans doute le moins fort, le moins souvent. Et comme on ne l'entend pas quand on est dans des processus de concertation des habitants, pour leur qualité de vie, etc, eh bien parfois il y a des problèmes très spécifiques qui ne sont pas pris en considération. On a remarqué par exemple que dans un certain nombre de quartiers difficiles, les femmes et tout particulièrement les femmes migrantes se sentaient un peu exclues de l'espace public, qu'elles ne trouvaient pas vraiment leur place, que le soir elles n'osaient pas rentrer tard le soir chez elles parce qu'elles n'étaient pas à l'aise, elles ne se sentaient pas en sécurité en traversant des places publiques mal éclairées.
VERONIQUE SAVIUC
Merci Najat VALLAUD-BELKACEM, je suis obligée d'interrompre votre interview puisque nous allons écouter le journal de 8h. Vous nous avez donc présenté les pistes de ce rapport qui vous sera rendu tout à l'heure à la Villeneuve en ce qui concerne l'amélioration des femmes migrantes.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 février 2014