Interview de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales à RTL le 3 avril 2014, sur la composition du Gouvernement de Manuel Valls et le pacte de solidarité.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral


LAURENT BAZIN
Jean-Michel APHATIE, vous recevez donc la nouvelle ministre des Affaires sociales, Marisol TOURAINE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Bonjour Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous étiez – alors le titre change un peu – mais ministre de la Santé dans le gouvernement AYRAULT, vous le demeurez, puisque les Affaires sociales… mais pourquoi il n'y a pas la Santé dans l'intitulé du ministère, on a oublié ?
MARISOL TOURAINE
Vous savez gouvernement resserré, parfois, titre resserré, voilà, ce n'est pas plus compliqué que cela.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et du coup, Marisol TOURAINE, vous symbolisez ce matin la critique qu'on fait à ce gouvernement, peu de têtes nouvelles, peu de changements, au fond ; tout ça pour ça, que répondez-vous ?
MARISOL TOURAINE
Quel était l'enjeu de ce changement d'équipe ? D'avoir davantage de force, de combattivité, de resserrement, et cela passe par une équipe avec des personnes qui ont de l'expérience et de la solidité. Je vous ai entendu ce matin, Jean-Michel APHATIE, qui disiez que, en France, nous avions la fâcheuse tendance de faire valser les ministres alors que chez nos principaux partenaires européens, on constatait une grande stabilité des postes ministériels, ce qui était plutôt un gage d'efficacité. Eh bien, nous y voilà, nous voulons une équipe resserrée pour être efficaces, un gouvernement de combat, a dit le Premier ministre, mais un gouvernement de combat, ce doit être un gouvernement de conquête, de conquête pour les Français, de conquête pour la France, parce que nous sommes aujourd'hui dans une situation difficile, et nous devons répondre aux exigences des Français qu'ils ont exprimées avec beaucoup de force, à l'occasion des dernières élections municipales, exigences sociales notamment.
JEAN-MICHEL APHATIE
Finalement, le problème, c'était Jean-Marc AYRAULT.
MARISOL TOURAINE
Vous savez…
JEAN-MICHEL APHATIE
On peut le dire ?
MARISOL TOURAINE
Non, là, il n'y a pas une question d'homme…
JEAN-MICHEL APHATIE
Eh bien, puisque pas grand-chose change, sauf le Premier ministre, ah ben, pourquoi avoir changé de Premier ministre sinon !
MARISOL TOURAINE
Il s'agit d'aller plus vite plus loin, mais dans la même direction…
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais lui n'allait pas assez vite…
MARISOL TOURAINE
La direction, c'est celle qu'a fixée le président de la République, nous avons des objectifs pour armer la France, armer les Français face à la crise qui est extrêmement forte et qui touche le pays. Et donc vous savez, ne faisons pas des affaires de personnes les enjeux principaux, il y a un nouveau Premier ministre, et je sais, je suis certaine…
JEAN-MICHEL APHATIE
Eh oui, c'est donc une affaire de personne…
MARISOL TOURAINE
Je suis certaine que Manuel VALLS saura mettre son énergie au service du pays, de la France, et de la politique fixée par le président de la République.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est : la ligne est la même, mais s'il s'agit d'aller plus vite, c'est donc que le précédent, il n'allait pas assez vite…
MARISOL TOURAINE
Mais il s'agit d'entendre ce qu'ont dit les Français à l'occasion des dernières élections municipales, parce que des messages ont été passés, à savoir que les résultats ne venaient pas assez vite, qu'il y a une souffrance sociale, des attentes sociales, qui s'expriment de manière extrêmement forte, et le pacte de solidarité qu'a annoncé le président de la République, il est au coeur de la politique que nous allons mener. Vous savez, je suis en charge des Affaires sociales, et donc j'y suis évidemment particulièrement sensible, parce que si nous sommes dans une situation économique difficile, ce qui nous oblige à prendre des mesures importantes pour renforcer notre pays, nous ne devons pas le faire en sacrifiant notre modèle social, notre modèle de santé, nos services publics, la solidarité, parce que, il y a certains, notamment à droite, qui disent : au fond, la solution, elle est toute trouvée, si on veut faire des économies, si on veut faire plaisir à Bruxelles, nous n'avons qu'une solution, c'est couper dans les dépenses sociales. Eh bien, moi, je dis très clairement, comme je l'ai d'ailleurs toujours dit, il s'agit, tout en étant très responsable dans notre politique économique, de mieux protéger les Français, de garantir les Français, face aux risques auxquels ils peuvent être confrontés, la maladie, la retraite ou d'autres choses.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous dites que le pacte de solidarité est au coeur de votre politique, mais alors, il a quatre jours pour nous, on l'a découvert lundi soir, je ne sais pas vous si vous l'avez découvert aussi lundi soir, le pacte de solidarité…
MARISOL TOURAINE
Oui, oui, oui, bien sûr !
JEAN-MICHEL APHATIE
Le pacte de responsabilité, c'est un peu plus ancien, ça, c'est la baisse des charges des entreprises, mais alors c'est quoi le pacte de solidarité ? On n'a pas compris.
MARISOL TOURAINE
Le pacte de solidarité, c'est indiquer avec clarté et fermeté que, il n'y a pas d'un côté le redressement économique du pays…
JEAN-MICHEL APHATIE
Oui, mais quel est le contenu, non, non, mais quel est le contenu…
MARISOL TOURAINE
Et de l'autre côté, au fond, une attention à la situation sociale…
JEAN-MICHEL APHATIE
Oui, vous ne ferez pas que des coupes budgétaires ?
MARISOL TOURAINE
C'est que les deux redressements vont de pair…
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est combien ? C'est quoi le pacte de solidarité ? On n'a pas compris.
MARISOL TOURAINE
Et ce ne sont pas uniquement des enjeux financiers. C'est quoi ? C'est se préoccuper du pouvoir d'achat de nos concitoyens, en particulier de ceux qui sont dans les situations les plus modestes. C'est garantir le maintien des services publics, l'Education, mais puisque je suis en charge de la Santé, je vous dirais évidemment la Santé. C'est faire en sorte que lorsque nous allons définir les économies nécessaires à réaliser, nous le fassions avec des principes extrêmement clairs. En matière sociale, il y a des lignes rouges à ne pas franchir. Nous ne pouvons pas affaiblir notre système de santé, nous ne pouvons pas multiplier ou procéder à des déremboursements en direction des Français, les Français doivent savoir qu'ils seront protégés, que leur système de santé va être consolidé, c'est cela le pacte de solidarité…
JEAN-MICHEL APHATIE
Alors le président de la République, lundi soir, a dit : le pacte de solidarité : réduction d'impôts, et baisse des cotisations payées par les salariés, alors…
MARISOL TOURAINE
Oui, c'est du pouvoir d'achat !
JEAN-MICHEL APHATIE
Cotisations payées, c'est quoi l'enveloppe des cotisations ?
MARISOL TOURAINE
Nous y travaillons, c'est du pouvoir d'achat, concrètement…
JEAN-MICHEL APHATIE
Et c'est deux milliards, c'est un milliard, dix milliards ?
MARISOL TOURAINE
Nous allons regarder cela maintenant que le gouvernement est installé, que la feuille de route est fixée, mais le message…
JEAN-MICHEL APHATIE
On dit que la prime pour l'emploi pourrait…
MARISOL TOURAINE
Le message, il est extrêmement clair…
JEAN-MICHEL APHATIE
Rien de concret, là, ce matin ?
MARISOL TOURAINE
Le message…
JEAN-MICHEL APHATIE
On dit que la prime pour l'emploi pourrait être supprimée, pour financer une partie des baisses des cotisations…
MARISOL TOURAINE
Vous savez, la prime pour l'emploi, elle s'additionne avec une partie du revenu de solidarité active, rendons le système plus lisible, plus clair, et faisons en sorte que cela se traduise par une amélioration du pouvoir d'achat de ceux qui en ont le plus besoin, donc simplifier…
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc une refonte ?
MARISOL TOURAINE
Améliorer le système…
JEAN-MICHEL APHATIE
Et la prime pour l'emploi disparaît ?
MARISOL TOURAINE
Pas nécessairement, nous verrons comment simplifier le dispositif, et renforcer le pouvoir d'achat des Français les plus modestes.
JEAN-MICHEL APHATIE
Puisque vous étiez au coeur de cette réflexion déjà dans le gouvernement AYRAULT, vous confirmez qu'il y aura une baisse des dépenses publiques de cinquante milliards ?
MARISOL TOURAINE
Le président de la République a annoncé une baisse des dépenses publiques…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous le confirmez ?
MARISOL TOURAINE
De cinquante milliards.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il n'y en aura pas moins ?
MARISOL TOURAINE
Mais encore une fois, il y a…
JEAN-MICHEL APHATIE
La baisse ne baisse pas ?
MARISOL TOURAINE
Non, mais il faut réduire les déficits…
JEAN-MICHEL APHATIE
Cinquante milliards ?
MARISOL TOURAINE
Il faut réduire la dette. Nous avons hérité d'une situation qui nous oblige à prendre des mesures importantes, pas pour Bruxelles, comme je l'entends parfois, mais tout simplement pour la qualité de notre économie. Vous savez, quand le bateau ou le navire prend l'eau, ça n'est pas en écopant avec une petite cuillère qu'on lui évite de sombrer au fond de la mer. Donc nous avons des décisions résolues à prendre…
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc il faut faire le travail ?
MARISOL TOURAINE
Mais en même temps, je le dis et j'insiste là-dessus, cela ne doit pas signifier, cela ne veut pas signifier pour nous une remise en cause de notre modèle social, ça, c'est ce que préconise la droite, ça, c'est ce que nous disent les libéraux de tous poils que l'on peut trouver à l'étranger ou chez nous, pour nous, il s'agit de conforter le modèle social, c'est quand même une chose importante, c'est ça quand on est de gauche qui permet de procéder à la fois au redressement de l'économie et au redressement social du pays.
JEAN-MICHEL APHATIE
On les connaîtra quand les arbitrages ?
MARISOL TOURAINE
Très prochainement, puisque le discours de politique générale sera présenté mardi par le Premier ministre, et les décisions devraient être annoncées dans les mêmes eaux.
JEAN-MICHEL APHATIE
Deux petites questions personnelles, enfin, pas qui vous concernent vous, mais qui concernent des personnes, Ségolène ROYAL peut-elle garder la région Poitou- Charentes ?
MARISOL TOURAINE
Moi, je ne l'ai pas entendue dire cela, et je me souviens que Ségolène ROYAL a été l'une des premières personnalités socialistes à s'appliquer à elle-même le principe du non-cumul lorsqu'elle a été présidente du Conseil régional, elle a renoncé à son mandat de députée…
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc vous pensez qu'elle va démissionner…
MARISOL TOURAINE
Donc je crois qu'elle est tout à fait emblématique de cette ligne de modernisation de la vie politique.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc elle va abandonner la présidence de la région Poitou-Charentes.
MARISOL TOURAINE
Ecoutez, en tout cas, je ne lui ai pas entendue dire le contraire.
JEAN-MICHEL APHATIE
Le contraire. Donc elle va le faire. Pierre MOSCOVICI, ancien ministre de l'Economie, pourrait être commissaire européen, vous le confirmez aussi ?
MARISOL TOURAINE
Ah écoutez, moi, je n'ai pas d'information directe, mais en tout cas, je trouve que ce serait un excellent choix.
JEAN-MICHEL APHATIE
D'accord. Allez, eh bien voilà, Marisol TOURAINE, qui était et qui reste ministre de la Santé, était l'invitée de RTL ce matin.
LAURENT BAZIN
Merci Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Bonne journée…
JEAN-MICHEL APHATIE
… Secrétaire d'Etat, excusez-moi, j'ai oublié, tiens, vous…
MARISOL TOURAINE
Ah, les secrétaires d'Etat, c'est la semaine prochaine !
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous en aurez un, vous ? Secrétaire d'Etat à la Santé ?
MARISOL TOURAINE
Oh écoutez, j'avais des ministres délégués, donc nous travaillons à l'organisation du ministère, et les décisions seront prises la semaine prochaine.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il faut attendre un petit peu alors. Bonne journée.
LAURENT BAZIN
Pas trop quand même si c'est un gouvernement resserré, je dis ça comme ça parce que les auditeurs vous le signalent ce matin. Merci d'avoir été avec nous. Bonne journée à vous.
MARISOL TOURAINE
Bonne journée à vous.
LAURENT BAZIN
Jean-Michel, à demain !
JEAN-MICHEL APHATIE
A demain.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 avril 2014