Texte intégral
MARC VOINCHET
La saison des partiels va bientôt commencer, le temps pour les universités de préparer la rentrée 2014, également les emplois du temps. Or, depuis le remaniement les universités, les écoles, les IUT mais aussi les laboratoires de recherche qui s'y trouvent ne sont plus gérés par un ministère exclusif mais désormais par un secrétariat d'Etat ; nouveauté qui est tout de même contrebalancée par la permanence de la personnalité à qui en a échu la charge, madame Geneviève FIORASO. Bonjour.
MADAME LA SECRETAIRE D'ETAT GENEVIEVE FIORASO
Bonjour.
MARC VOINCHET
Vous êtes notre invitée ce matin pour Les Matins Politiques. On a parlé d'un « remaniement mais pas trop » qui fait tout de même grincer quelques dents. Nous nous intéresserons à ce grinçage-là mais vous avez, vous, évoqué au contraire la cohérence qu'il y a à regrouper en un seul ministère désormais, sous la tutelle de Benoît HAMON, toutes ces questions école, université, recherche, tout cela, qui nous parle de notre avenir. Un avenir ? Oui, mais lequel ? Nous allons parler de toutes ces questions et notamment des problèmes qu'il peut y avoir aujourd'hui au sein des universités et de la recherche, qui pétitionnent un petit peu, mais ce ne sera pas tout de suite le sujet de cette actualité. Il y a une actualité politique proprement dite à traiter avec vous. Benoît BOUSCAREL, re-bonjour.
BENOIT BOUSCAREL
Re-bonjour.
MARC VOINCHET
La nouvelle arrivée de Jean-Christophe CAMBADELIS au Parti socialiste.
BENOIT BOUSCAREL
Oui, élu hier Premier secrétaire. Vous soutenez Jean-Christophe CAMBADÉLIS, Geneviève FIORASO ? On entend dire que son arrivée à la tête du PS est plutôt téléguidée par l'Elysée.
GENEVIEVE FIORASO
Il y avait un besoin de renouvellement aussi bien au PS que, je dois dire d'ailleurs, pour le parcours d'Harlem DESIR. Il y a un nouveau secrétaire, ç'a été validé par un vote du conseil national. Ce n'est pas un nouveau venu en politique. Je pense qu'il ne faudrait pas d'ailleurs que ce soit un nouveau venu dans une période aussi complexe que celle que nous connaissons actuellement. Il est expérimenté. Il a pour objectif de rassembler et surtout, a-t-il dit, d'écouter, de répondre aux attentes à la fois des Français et des militants socialistes qui ont besoin d'être entendus.
BENOIT BOUSCAREL
C'est l'Elysée qui a placé Jean-Christophe CAMBADELIS à la tête du Parti socialiste ?
GENEVIEVE FIORASO
Ça n'est pas ainsi que ça se passe. Encore une fois, Jean-Christophe CAMBADELIS était déjà candidat à un moment donné au secrétariat du Parti socialiste. Je crois qu'il y a beaucoup réfléchi. Ce n'est pas un nouveau venu, il a eu le temps d'y penser puisqu'il n'y a pas accédé tout de suite lorsqu'il en avait exprimé le désir. Je crois qu'il sait exactement ce qu'il va faire. La première chose à faire dans cette période, et il l'a très bien dit, c'est de consulter, c'est d'écouter, c'est de rassembler et c'est de porter un projet.
BENOIT BOUSCAREL
« Le Parti socialiste est cocu » titre ce matin Libération, un titre-choc au sujet de la demande d'assouplissement de la règle des 3 % de déficit, assouplissement qui n'est visiblement plus à l'ordre du jour. C'est vrai, le gouvernement l'avait laissé entendre au début. Manuel VALLS la semaine dernière avait laissé entendre que la France pourrait aller négocier un assouplissement, au moins peut-être du rythme pour le retour aux 3 % ou peut-être même en-dessous du déficit. Aujourd'hui on ne sait plus si c'est encore à l'ordre, si ça n'a jamais été demandé à l'Europe. On en est où, Geneviève FIORASO ?
GENEVIEVE FIORASO
Ecoutez, la négociation ce n'est pas de la magie. On peut afficher un objectif de négociation qui est de desserrer un peu les contraintes européennes tout en restant crédible pour pouvoir emprunter à un taux qui nous permette d'investir. La ligne d'équilibre est extrêmement fragile. C'est important d'affirmer un objectif mais ce n'est pas parce qu'on affirme un objectif qu'on va forcément l'atteindre.
BENOIT BOUSCAREL
Mais on a demandé un assouplissement ou pas ?
GENEVIEVE FIORASO
On montre la voie.
BENOIT BOUSCAREL
La semaine dernière, on croyait que Michel SAPIN par exemple, le ministre des Finances, allait demander à Bruxelles un délai supplémentaire. Mais hier il dit : « Finalement non, je ne l'ai même pas demandé ».
GENEVIEVE FIORASO
Ecoutez, si les journaux l'ont indiqué, c'est que cela a été dit et que ça a dû être demandé.
MARC VOINCHET
Pardonnez-moi. Par exemple, l'éditorial d'Eric DECOUTY dans Libération raconte au fond qu'un rappel au dogme européen a contraint Manuel VALLS et Michel SAPIN à jurer qu'ils tiendraient leur engagement. Le Premier ministre avait relayé la parole présidentielle, laissé croire à sa majorité qu'il allait renégocier. Quelques jours plus tard, Bruxelles fait savoir aux émissaires du gouvernement que rien n'est négociable.
GENEVIEVE FIORASO
Non. Mais au contraire, ce n'est pas parce qu'on dit qu'on va négocier et qu'on veut négocier que forcément, on obtient satisfaction. Vous avez tous négocié un jour dans votre vie. Toutes les négociations n'aboutissent pas au résultat escompté, mais c'est quand même bien de montrer une détermination. C'est entendu malgré tout.
MARC VOINCHET
L'enjeu est aussi de comprendre comment le gouvernement, le président de la République et le Premier ministre vont trouver les 50 milliards d'économies à faire, ce qui fait d'ailleurs du coup beaucoup de rumeurs, beaucoup d'inquiétude. Par exemple, vous avez d'ailleurs passé la journée d'hier avec Benoît HAMON à démentir qu'on ne rognerait pas, on ne supprimerait pas, on n'attaquerait pas les APL, Geneviève FIORASO.
GENEVIEVE FIORASO
Oui, les Aides Personnalisées au Logement pour les étudiants plus précisément.
MARC VOINCHET
Pourtant très critiquées dans un rapport de la Cour des comptes qui dit qu'après tout ce n'est pas le principe en soi qui est mauvais, mais c'est le fonctionnement qui pourrait peut-être passer d'un budget à l'autre.
GENEVIEVE FIORASO
D'abord, la Cour des comptes n'est pas le gouvernement ; ça ne vous aura pas échappé. Si elle émet des préconisations, c'est bien le gouvernement qui tranche, ce sont les politiques qui tranchent le Parlement en l'occurrence. Il n'a jamais été question de réduire les APL. Pourquoi ? Aujourd'hui, le parc de logements destiné aux étudiants ne répond qu'à 9 % des demandes des étudiants. Il y a eu un grand retard dans la construction de résidences universitaires. Moi, j'ai une feuille de route de construction de 40 000 logements pour les étudiants pendant cette mandature. Nous en avons programmé déjà 30 000, nous en avons 8 500 à la rentrée 2013. Ça ne suffit pas ; en particulier, dans les secteurs très en tension où le logement est plus cher qu'ailleurs. Je pense notamment à Paris-Ile-de-France mais aussi à des métropoles comme Lyon, Bordeaux, même Grenoble, le Pas-de-Calais autour de Lille, autour de Nantes. Ça représente en moyenne pour un étudiant 50 % de son budget mensuel.
BENOIT BOUSCAREL
Et parfois beaucoup plus.
GENEVIEVE FIORASO
Beaucoup plus en région parisienne.
BENOIT BOUSCAREL
C'est dramatique : vous dites que ça ne suffit pas ! Qu'est-ce qu'on fait alors ?
GENEVIEVE FIORASO
C'est justement la raison pour laquelle on ne supprime pas les APL et pour laquelle on agit et on construit. Le seul moyen de desserrer cette tension, c'est de construire. En attendant, les étudiants se débrouillent ; vous savez bien, ils sont en colocation. Il y a seulement un tiers des étudiants qui se loge ailleurs que dans le logement familial, un gros tiers, ce qui fait qu'il y a 800 000 étudiants aujourd'hui sur les 2,4 millions d'étudiants qui bénéficient d'une APL. L'APL tient déjà un peu compte des revenus familiaux, du montant du loyer parce qu'il y a un plafonnement, et du territoire. C'est-à-dire qu'il y a une prime en plus pour les territoires où le foncier, le logement et l'immobilier, est très en tension.
BENOIT BOUSCAREL
Est-ce que pour pouvoir continuer cet effort sur le logement étudiant, pour pouvoir faire en sorte que les frais d'inscription n'augmentent pas, est-ce que pour pouvoir aussi faire en sorte que les budgets de fonctionnement des universités soient un peu moins serrés, il ne faut pas justement aller demander un peu plus de temps à Bruxelles pour le retour sur les 3 % de déficit ? Je reviens à l'Europe.
GENEVIEVE FIORASO
D'abord sur la situation factuelle. Le budget des universités a augmenté au cours de ces dernières années. Le problème, c'est qu'au moment du passage à l'autonomie réelle qui été opéré par mes prédécesseurs, en particulier par Valérie PECRESSE, le compte n'y était pas. C'est-à-dire que l'évolution des salaires, ce qu'on appelle en termes techniques le GVT, le Glissement Vieillissement Technicité, n'a pas été budgété. Aujourd'hui en réalité, comme il augmente puisque la population des enseignants vieillit, que la pyramide des âges fait qu'il y a moins de départs à la retraite depuis que le temps d'activité a été un peu augmenté, on se retrouve avec une population dont le GVT augmente, autrement dit l'évolution salariale globale. Du coup, les mille postes par an dont j'ai pu bénéficier, une augmentation de 2,9 % cumulée depuis le budget 2013, c'est vrai qu'ils se diluent un peu dans tous ces frais qui n'ont pas été pris en compte au moment du transfert. Deuxième point, quand on transfert les salaires, 85 % environ du budget des universités est fourni par l'argent de l'Etat. Le problème ne tient pas à ces 85 % qui sont acquis ; ce sont tous les salaires qui sont en base, pas les contractuels que les universités ont pu embaucher qui viennent s'ajouter à ça. Mais sur les 15 % restants, il peut effectivement y avoir parfois un problème pour complètement les financer. Ce qu'a donc fait notre gouvernement, c'est qu'il a financé ce fameux GVT pour moitié environ à la fin de l'année. L'an dernier, ça a représenté quand même près de 30 millions d'euros en plus à la fin de l'année. Et puis nous les accompagnons, parce que toute entreprise quand elle opère des changements dans l'organisation, elle forme ; ça s'appelle la conduite du changement. Si vous avez des présidents d'université, des équipes de présidence et des directeurs généraux des services qui se retrouvent du jour au lendemain avec un budget qui passe de 30 millions à 300 millions avec des règles comptables différentes et avec un transfert où le compte n'y est pas, il ne faut pas s'étonner que quelques années après, quand ils ont embauché des contractuels parce qu'on les y avait poussés précédemment, ils se retrouvent dans une situation difficile. Là encore, nous les accompagnons.
BENOIT BOUSCAREL
Geneviève FIORASO, il y a des universités qui sont dans des situations difficiles. À Montpellier 3, Versailles-Saint-Quentin, il y a des situations budgétaires qui sont parfois dramatiques. Est-ce que ce matin vous nous dites qu'on peut faire avec ces règles européennes, dans ce cadre de rigueur ?
GENEVIEVE FIORASO
Ce qu'on peut faire déjà, c'est accompagner ces situations parce que la responsabilité est tout de même parfois partagée. Si on prend l'université Versailles-Saint-Quentin, l'Etat n'a pas cessé de l'aider et d'augmenter son aide, mais ils ont conclu deux PPP qui leur sont extrêmement préjudiciables, l'Etat a dû les aider à les renégocier. Ils avaient quand même inscrit à leur budget prévisionnel, en 2011 et 2012, 18 millions d'euros de recettes qui ne se sont pas avérés mais qui ont été dépensés, et puis ils n'ont pas recouvré leurs factures. Lorsqu'on a regardé leurs comptes, nous nous en sommes aperçus et en une semaine, nous avons pu recouvrer plus de deux millions d'euros de factures. Il y a donc aussi des problèmes de management. J'ai entendu dire et on me disait : « C'est la ministre du Management » ; certes. Mais enfin, quand on gère un budget entre 150 et 300 millions d'euros, il vaut mieux quand même savoir ce qu'il y a dans le budget et savoir le gérer, sans que ce soit préjudiciable aux étudiants.
MARC VOINCHET
Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, à terme c'est mort.
GENEVIEVE FIORASO
Pas du tout ! Là, c'est exactement le discours contre lequel je me suis battue.
MARC VOINCHET
C'est ce qui se dit beaucoup.
GENEVIEVE FIORASO
Mais ce n'est pas parce que ça se dit beaucoup que c'est vrai.
MARC VOINCHETO
n voit d'ailleurs la limite du corporatisme des chercheurs qui, tout de même quand une université est en difficulté ça et là, ne sont pas non plus tous comme un seul homme dans la rue. On va laisser une espèce de situation Schumpeterienne qui fait que les universités doivent mourir ou vont mourir ; c'est la sélection par les faibles.
GENEVIEVE FIORASO
Non, pas du tout. Pas du tout ! Ça, c'était l'idée du président SARKOZY quand il a mis en place dix pôles dits d'excellence qui allaient être en compétition les uns avec les autres.
MARC VOINCHET
Oui, mais ça n'a pas changé, ça.
GENEVIEVE FIORASO
Il va y avoir trente regroupements, une trentaine de regroupements où les gens vont être partenaires.
BENOIT BOUSCAREL
Ce sont plus ou moins des pôles d'excellence, Geneviève FIORASO.
GENEVIEVE FIORASO
Non, non. Ça s'appelle des communautés, vous voyez que le terme a une connotation différente.
BENOIT BOUSCAREL
Avec un chef de file qui sera seul, en lien avec le gouvernement.
GENEVIEVE FIORASO
Ici à la radio, vous avez un chef de file ; ce n'est pas de l'autogestion. Dans aucune organisation il n'y a de l'autogestion, surtout des organisations avec des missions d'Etat. Oui, il y a une organisation ; oui, il y a une collégialité retrouvée. C'était l'idée. Aller dans la rue pour l'université Versailles-Saint-Quentin, ça ne me paraît pas être la bonne solution. En revanche, l'Etat a fait deux avances : une de 800 000 euros pour que justement les salaires continuent d'être payés et que l'université perdure. Je rassure les parents et les étudiants, cette université va perdurer avec une avance sur trésorerie également de 2,6 millions euros cette année. Mais on voit bien qu'il y a des choses à faire dans cette université de 15 000 étudiants et de plus d'une quarantaine de sites. Il y a aussi une réorganisation et il y a aussi une aide du ministère qui ne va pas laisser les universités se débrouiller pour que les plus faibles meurent, comme vous l'avez dit. Ça n'est pas du tout notre objectif.
BENOIT BOUSCAREL
Ce n'est pas ce qui va se passer dans les faits, tout simplement.
GENEVIEVE FIORASO
Non, pourquoi êtes-vous si pessimiste ? Qu'est-ce qui se passe ? Elle est fermée, l'université aujourd'hui ? Non ! Les étudiants vont en cours. Simplement, peut-être qu'avoir une quarantaine de sites pour 15 000 étudiants, il y a quelque chose d'une aberration. On va donc aider l'université à réorganiser les choses et nous sommes en dialogue avec l'équipe des administrateurs, le président du conseil d'administration. Je l'ai régulièrement dans mon bureau et au téléphone. Nous sommes en accompagnement, nous ne laisserons pas tomber les universités qui sont en difficulté. D'ailleurs, sur les cinq qui étaient en double déficit il y a deux ans, cinq en sont sorties.
BENOIT BOUSCAREL
Pour revenir sur le remaniement ou le mini-remaniement qu'évoquait tout à l'heure Marc VOINCHET, vous n'êtes plus ministre de plein exercice mais secrétaire d'Etat à l'Enseignement supérieur et vous vous retrouvez donc sous l'autorité de Benoît HAMON, plutôt représentant de l'aile gauche du PS, qui lui-même est sous l'autorité de Manuel VALLS qui est plutôt représentant de ce qu'on pourrait appeler l'aile droite du PS. Est-ce que pour vous ce n'est pas trop difficile de vous positionner politiquement dans ce nouvel organigramme, Geneviève FIORASO ?
GENEVIEVE FIORASO
Mais la France est diverse et la gauche est diverse.
BENOIT BOUSCAREL
On l'a vu, on l'a vu.
GENEVIEVE FIORASO
Oui, mais c'est une richesse aussi. On pointe toujours les différences comme quelque chose de péjoratif. Moi, les dictatures monolithiques c'est plutôt ça qui me ferait peur. Quand on regarde la carte électorale, on voit bien qu'il n'y a plus un seul parti qui domine vraiment. Il y a une pluralité d'opinions et je trouve assez normal que le gouvernement reflète cette diversité, pour peu qu'on ait un langage unique et une ligne cohérente qui nous permette d'être efficaces. Benoît HAMON et moi, on partage ce que le président de la République nous a donné comme priorité. Faire accéder davantage de jeunes, en particulier ceux qui sont issus des milieux les plus défavorisés, parce qu'ils sont de moins en moins présents à l'université ; faire remarcher l'ascenseur social et qualifier les jeunes qui sont issus de tous les milieux ; c'est pourquoi j'ai établi une priorité étudiante. J'ai tout de même obtenu dans un contexte européen qui n'était ni favorable, ni défavorable en l'occurrence, 458 millions d'euros de plus pour les bourses parce que la réussite des étudiants se joue en premier cycle. Elle se joue certes avant, c'est pour ça que c'est bien d'avoir un grand ministère de l'Avenir avec Benoît HAMON, parce qu'en réalité la réussite du parcours se décide très tôt dans la scolarité. Mais avec les bourses, ça permet quand même d'avoir des conditions de vie qui sont plus favorables à la réussite. Quand vous devez travailler quinze-vingt heures dans une grande surface en plus de vos études à l'université, là vous êtes sûr de vous planter. Ça n'est pas l'objectif.
MARC VOINCHET
Sur ces questions-là, vous avez noté évidemment qu'il y a quelques divergences mais nous prendrons davantage le temps d'y revenir dans la seconde partie sur le malaise qui a lieu aujourd'hui, qui fait qu'il y a aussi plusieurs pétitions et mouvements qui vous interpellent. Nous y reviendrons en deuxième partie mais je voudrais vous poser une question sur un cas qui doit tout de même vous intéresser sacrément. Un de vos collègues, Jean-Marie LE GUEN, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, a dit par exemple : « La rue de Solferino est morte, le PS n'existe plus ». Vous devez avoir un oeil aussi tout à fait particulier sur la région de Grenoble qui a perdu son socialisme historique au profit d'un Vert, Grenoble qui fait aussi parler d'elle avec Pierre GATTAZ qui, lui, veut par exemple assouplir si j'ose dire, ou amoindrir le barème du smic. Comment vous voyez toute cette actualité-là vue de Grenoble que vous connaissez bien ?
GENEVIEVE FIORASO
Que je connais bien mais que je vois un peu moins qu'avant. Grenoble a toujours été une ville assez atypique. D'abord c'est une ville où il y a beaucoup d'universitaires et de chercheurs, beaucoup de communautés culturelles différentes plus de 50. Fernand RAYNAUD disait que c'est une ville d'ingénieurs : « Ne me parlez pas de Grenoble, tous des ingénieurs, tous des prétentieux », ce n'est pas tout à fait vrai. C'est une ville ouverte et souvent en avance : la révolution des Tuiles en 1788, les maquis de la Résistance avec le Vercors, l'Oisans.
MARC VOINCHET
Et les Verts qui chassent les socialistes !
GENEVIEVE FIORASO
C'est une ville qui a une caractéristique : c'est qu'elle n'aime pas trop l'establishment, les choses établies. J'ai beaucoup travaillé avec Hubert DUBEDOUT pour lequel j'ai beaucoup d'admiration. Il m'a convaincue que la politique c'était vraiment bien, que ce n'était pas la « combinazione » mais que c'était vraiment avoir des priorités, des objectifs et des valeurs. Il a été battu pour son quatrième mandat alors même que trois mois auparavant, dans L'Express, il avait été défini comme le meilleur maire de France. Vous voyez que rien n'est jamais acquis.
MARC VOINCHET
Et le chef d'entreprise grenoblois, patron des patrons, Pierre GATTAZ ?
GENEVIEVE FIORASO
Rien n'est jamais acquis et il y a effectivement une configuration un peu nouvelle à Grenoble. On va voir ce que ça donne. La dynamique était de ce côté-là, c'est ce que les électeurs ont vu. Ça été franc et massif.
BENOIT BOUSCAREL
C'est-à-dire qu'elle n'est plus du tout du côté du Parti socialiste.
GENEVIEVE FIORASO
Ce n'est pas une question de Parti socialiste ou pas. Le quatrième mandat, c'est quelque chose de compliqué. Il faut renouveler, il faut s'y prendre à l'avance.
BENOIT BOUSCAREL
Oui, mais vous le dites vous-même : ce n'est pas le maire sortant qui a perdu, c'est le probablement le PS, François HOLLANDE qui est désavoué.
GENEVIEVE FIORASO
Non, regardez à Paris. Ils ont préparé la relève bien longtemps à l'avance. Anne HIDALGO a pu affirmer sa personnalité propre. On a vu qu'elle avait une belle personnalité et elle est passée. D'abord il n'y a pas de dauphin à Grenoble ; même si on est dans le Dauphinois, il n'y a pas d'héritage. Il faut se montrer et montrer son projet, on n'est jamais élu sur un bilan. Moi, je crois que c'est ça qu'il faut retenir ; on est élu sur une dynamique.
MARC VOINCHET
Bon, ça grogne dans les universités et dans le milieu de la recherche ; ce sera le sujet de la deuxième partie des Matins qu'introduira le camarade COUTURIER. Bonjour Brice.
BRICE COUTURIER
Bonjour Marc. Oui, je vais parler de gros sous comme toujours. Pour 180 euros de droits d'inscription par étudiant, la participation de l'Etat est de 10 000 euros par année d'études. Une hausse raisonnable des droits d'inscription ne serait-elle pas de nature à faire des consommateurs après tout les étudiants eux-mêmes les arbitres de la concurrence que se livrent les établissements d'enseignement supérieur ?
MARC VOINCHET
Merci Brice. Ce sera pour la deuxième partie des Matins.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 avril 2014