Interview de Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports à France 2 le 16 avril 2014, sur l'Europe du droit des femmes dans le cadre des élections européennes du 25 mai 2014.

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Média : France 2

Texte intégral


GILLES BRONSTEIN
Bonjour madame la ministre des Droits, des Sports et de la Ville (sic) si j'ai bien compris…
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Et de la Jeunesse !
GILLES BRONSTEIN
Et de la Jeunesse ! Absolument. La France célèbre aujourd'hui le 70ème anniversaire du droit de vote et d'éligibilité des femmes, vous lancez une plateforme pour une Europe des droits des femmes, en quoi cela consiste ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ecoutez, c'est bien simple, nous sommes à quelques semaines maintenant d'une échéance importante : les Elections Européennes…
GILLES BRONSTEIN
Le 25 mai !
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Absolument ! Et, ces Elections Européennes, il faut que ce soit l'occasion d'aborder le projet de société, si on veut que les électeurs, les citoyens Européens puissent adhérer et… Voilà ! Et trouver un sens à voter. Il faut qu'on leur dise que l'Union européenne ce n'est pas qu'une simple construction économique, certes utile, qui peut leur paraître parfois loin, loin d'eux, c'est aussi une construction sociale, c'est aussi ce qui a permis depuis maintenant quelques décennies d'avoir des droits fondamentaux qui ont été adoptés comme un socle commun - pardon – et donc qu'aujourd'hui on est capables d'aller encore plus loin - notamment sur la question des droits des femmes - le droit des femmes, à l'origine le Traité de Rome, c'est ce qui avait permis d'imposer l'égalité salariale entre les hommes et les femmes. Or, depuis quelques années, c'est un sujet qui a un peu disparu des radars européens et, nous, nous voulons qu'il réapparaisse sous 2 femmes : d'abord, en imposant la parité dans les institutions européennes – après tout si on l'impose dans les gouvernements par exemple comme nous le faisons ou dans les assemblées législatives des pays – c'est normal qu'on la retrouve dans les institutions de l'Union européenne ; et la deuxième, c'est que l'Union européenne puisse se saisir des libertés fondamentales des femmes, par exemple le droit des femmes à disposer de leur corps, l'autonomie des femmes, l'accès des femmes à l'emploi et qu'elles les défendent sur tout le territoire européen.
GILLES BRONSTEIN
En mot de politique, si vous le voulez bien. A l'occasion des 2 ans du premier tour de l'Election Présidentielle, sondage OpinionWay dans le Figaro ce matin, François HOLLANDE ne serait même pas au 2ème tour, il en serait même très loin, comment en est-on arrivés ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Honnêtement, c'est toujours difficile de commenter ce type de sondage, c'est de la politique fiction tout cela, donc nous savons que nous sommes dans une période qui est difficile, qui réclame beaucoup de courage, beaucoup d'audace de la part des responsables politiques et puis surtout un cap et donc, le cap, il a été réaffirmé par le président de la République, un gouvernement a été reconfiguré, resserré, au travail, donc les Français comprendront très bien qu'il faille – comme on dit – payer les musiciens à la fin du bal. Donc attendons que ce quinquennat soit terminé pour pouvoir juger de l'effet des réformes qui ont été adoptées, elles sont nombreuses, laissons le temps au temps.
GILLES BRONSTEIN
François HOLLANDE est-il aujourd'hui forcément le meilleur candidat et doit-il éventuellement se soumettre à des primaires, comme l'a proposé Julien DRAY ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors vraiment je pense que si l'on ne veut pas introduire encore davantage de confusion dans l'esprit des électeurs qui nous ont montré lors des dernières Elections Municipales qu'ils étaient les proies d'un certain désarroi quand même ou d'une certaine incompréhension, ce n'est vraiment pas le moment de parler de ces choses-là. Aujourd'hui, concentrons-nous sur ce que les Français attendent de nous, c'est-à-dire que nous résolvions leurs problèmes de chômage, leurs problèmes d'accès au logement, leurs problèmes d'accès aux soins et moi, en tout cas dans le portefeuille qui est désormais le mien, dans les responsabilités qui sont les miennes, je peux vous dire que je suis entièrement concentrée sur ma tâche.
GILLES BRONSTEIN
Alors justement vous avez sèchement refusé hier l'idée d'un SMIC jeune que proposait le patron du MEDEF, pourtant beaucoup à gauche pensent aujourd'hui qu'un emploi – même faiblement payé – c'est mieux que pas d'emploi du tout, ce n'est pas votre avis ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Absolument pas ! Evidemment que nous sommes résolument opposés à l'idée d'un SMIC jeune, quel serpent de mer qui revient depuis maintenant des années et voire plus, ça reste une fausse bonne idée, d'ailleurs c'est juste une mauvaise idée pour dire les choses plus clairement. Pourquoi c'est une mauvaise idée ? Parce que ça reviendrait à créer un sous-salariat au sein de l'entreprise ! Vous voyez vous auriez d'un côté les seigneurs, d'un côté les jeunes qu'on enfermerait…
GILLES BRONSTEIN
Ca permettrait peut-être à des jeunes de rentrer dans l'emploi ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non ! Non. Parce qu'aujourd'hui, quand moi je rencontre des chefs d'entreprise, ils ne me disent jamais que ce qui les empêche d'embaucher un jeune c'est que le SMIC soit trop élevé et surtout pas – et ils oseraient encore moins de me le dire - à un moment où par exemple on se réjouit de voir notre voisin allemand adopter à son tour le SMIC, donc ce n'est pas le moment pour nous de revenir en arrière. En revanche ce que nous disent les chefs d'entreprise en question, c'est qu'ils ne trouvent pas nécessairement les jeunes avec la bonne formation adaptée aux postes qu'ils peuvent ou qu'ils sont en mesure d'ouvrir chez eux et donc, là, ça nous pose la question de véritables politiques publiques comme celle par exemple de l'apprentissage que j'ai bien l'intention de prendre à bras-le-corps, parce que je pense que notre pays peut aller beaucoup plus loin en matière d'apprentissage - et nous allons y travailler - et c'est de sujet comme cela qu'il faut que nous parlions avec monsieur GATTAZ et avec les partenaires sociaux plutôt que de provocation inutile.
GILLES BRONSTEIN
Votre périmètre ministériel interroge : femmes, sports, ville, jeunes, ce matin Mohamed MECHMACHE, le fondateur d'A.C LE FEU, parle de ministère fourre-tout pour acheter la paix sociale. Qu'est-ce que vous lui répondez ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Eh bien vous savez quand on lance des jugements à l'emporte-pièce sans laisser même le temps en l'occurrence à la ministre concernée de s'exprimer sur les dossiers, je trouve tout ça un peu étrange. Moi je vais vous dire mon ministère au fond, puisque beaucoup de gens s'interrogent sur sa cohérence, il y a une chose qui me surprend c'est que certains observateurs s'interrogent, quand je vais moi dans les quartiers - j'ai fait beaucoup de déplacements depuis que j'ai été nommée - quand je vais à la rencontre des jeunes, des associations ou des habitants des quartiers, ils comprennent très, très bien la cohérence de mon ministère, ils avaient besoin, ils ont besoin, notre pays a besoin d'avoir un ministère qui est complètement concentré sur cette question de l'égalité, l'égalité entre les citoyens, entre les générations, entre les sexes, entre les quartiers et donc c'est à cela que je m'attelle tout simplement. Pour faire cela il faut, à la fois s'appuyer sur les richesses, à la fois des quartiers en question, parce que je moi je suis persuadée que ces quartiers regorgent de talent, regorgent de jeunesse – la jeunesse est j'allais dire notre première richesse - il nous faut investir en elle parce que c'est elle qui nous permettra, qui permettra à notre pays de renouer avec la croissance. Investir en elle, ça veut dire qui ? Ça veut dire la former, ça veut dire l'écouter, ça veut dire lui donner les moyens de son autonomie – et vous voyez on n'a pas le temps d'évoquer tout ça, je reviendrai j'espère – mais en tout cas, sur cette question de l'autonomie, aujourd'hui la jeunesse de France vit un nouvel âge entre 18 et 25 ans dans lequel tous les jeunes ne se ressemblent pas en fonction de la famille laquelle ils appartiennent, des moyens qu'ils ont de se chercher, de tâtonner pour trouver leur voie professionnelle, eh bien aujourd'hui moi c'est ma priorité de faire en sorte que l'autonomie ne soit pas un vain mot pour la jeunesse de France.
GILLES BRONSTEIN
Merci beaucoup Najat VALLAUD-BELKACEM.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Merci.
GILLES BRONSTEIN
Bonne journée à tous, merci Thierry, à demain.
THIERRY BECCARO
Merci Gilles, à demain.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 avril 2014