Texte intégral
Mon général,
Officiers, sous-officiers, soldats de la force Sangaris,
Depuis décembre dernier, c'est mon cinquième déplacement en Centrafrique. C'est toujours avec autant de satisfaction que je vous retrouve, vous qui portez haut les couleurs de notre pays sur ce théâtre très difficile. A chacune de mes visites auprès de vous, au fil des mois, je suis heureux de retrouver la même motivation et le même engagement devant les défis qui ne manquent pas ici.
J'avais prévu de me rendre à Bambari voir vos camarades. Une autre crise, au Nigeria, m'a retardé. Votre engagement me fait plaisir.
A Bangui d'abord, car le fonctionnement des institutions de transition n'a de sens qu'au sein d'une capitale apaisée. À l'exception de quelques zones bien identifiées, je constate que la violence quotidienne, le brigandage et l'impunité ont reculé et je tiens à vous en féliciter. Aux côtés des bataillons de la MISCA qui opèrent dans la ville, vous êtes les principaux acteurs de ce changement. Vous avez contribué à imposer le calme et le début d'un retour à la normale. Je le vois bien dans la vie quotidienne. Néanmoins, et je sais que vous l'observez lors de vos missions, la tension est encore palpable. Nous devons donc rester vigilants face aux incidents, souvent violents, d'autant qu'ils peuvent être instrumentalisés pour inquiéter telle ou telle communauté, et faire ainsi vaciller le fragile équilibre retrouvé.
D'autres défis marquent la province. Certaines parties du territoire sont toujours sous la coupe de milices et de groupes criminels, qui se comportent comme des prédateurs. La mort de notre compatriote, la journaliste Camille Lepage, en est le plus triste témoignage. Nous ne l'acceptons pas. Je ne vais pas énumérer ici la longue liste des exactions qui sont perpétrées dans le pays et qui affectent toutes les communautés. Cette situation est intolérable ; nous ne l'acceptons pas ; et c'est bien le principal enjeu de votre déploiement en province que de faire cesser ce cycle de vengeance et de prédation.
Nous n'agissons pas de notre propre chef, mais sur mandat de la communauté internationale et des Nations unies.
L'intervention du GTIA DRAGON dans la région de Boguila, le 5 mai dernier, a été remarquable et soyez certains qu'elle a été rermarquée. Au-delà de la neutralisation d'une bande de pillards sans foi ni loi, SANGARIS a fait passer un message clair à tous ceux qui abusent de cette situation chaotique : les forces françaises sont en mesure d'intervenir rapidement et efficacement contre tous ceux qui s'opposeront à la stabilisation du pays.
Je mesure la difficulté de conduire de telles opérations dans un pays immense, avec des élongations de plus de 800 kilomètres et une manuvre logistique d'une grande complexité. La saison des pluies renforce encore ces contraintes très lourdes. Mais je constate aussi que, malgré ces difficultés, SANGARIS poursuit sa mission avec une endurance et une détermination dont vous avez toutes les raisons d'être fiers.
Je tiens à saluer l'action des trois groupements tactiques, SAVOIE à Bangui, DRAGON dans le Nord et l'ouest et SCORPION dans l'Est.
Je félicite également les éléments d'appui et de soutien : j'ai pu en croiser quelques-uns, je sais qu'ils font des prodiges. Je veux enfin, devant vous, saluer de la manière la plus forte le général Soriano. Depuis cinq mois, il commande avec une intelligence et un sang-froid hors du commun l'ensemble de l'opération. J'ai une totale confiance dans son jugement et dans sa détermination à vous conduire tous vers le succès d'une mission difficile mais cruciale.
Je voudrais revenir sur vos conditions de vie. Déjà venu ici à plusieurs reprises depuis la mi-décembre, j'avais déjà pleinement conscience qu'elles sont rudes, rustiques et exigeantes. À la suite de plusieurs informations qui me revenaient, j'ai souhaité parcourir le camp, j'ai parlé avec les uns et les autres. La rapidité de notre engagement explique pour beaucoup la situation. L'environnement de cette crise, les difficultés locales pour la vie quotidienne font le reste. Je sais que le général Soriano a, dès le début de l'opération, pris en compte ce problème. Un plan d'amélioration des conditions de vie est en cours de mise en oeuvre. C'est en train de se faire. J'ai demandé que ce plan soit accéléré et amplifié, afin que votre environnement quotidien puisse s'améliorer rapidement. J'ai aussi demandé à réactiver le sas lors de votre retour en France, pour que vous puissiez bénéficier d'une amélioration qui a déjà fait ses preuves pour le retour d'Afghanistan. La situation en RCA est très différente, mais elle peut être à bien des égards éprouvante. Il est utile de prévoir une transition. Je veux vous dire ici combien vos conditions de vie sont un sujet de préoccupation pour moi, que je sois sur le terrain ou à Paris. Je suivrai personnellement la mise en uvre de ce plan et je ne renoncerai pas, ni sur ce point ni sur un autre.
Je constate enfin, en venant ici à M'POKO, que l'action internationale s'organise et qu'elle se traduit par une forte mobilisation.
Le vote de la résolution des Nations unies 2149 le 10 avril dernier, autorisant le déploiement d'environ 12 000 casques bleus, témoigne de cet engagement. Nous devons tout faire pour que la montée en puissance de cette opération se déroule dans les meilleures conditions. Notre objectif, c'est que le 15 septembre une première capacité opérationnelle de la composante militaire de la MINUSCA soit effective. Dans cette perspective, nous apporterons à cette opération un appui important. Il est indispensable que les Nations unies puissent prendre le relai de la MISCA, afin d'apporter à la Centrafrique tout le poids politique et opérationnel qui s'impose.
Je me félicite par ailleurs de l'arrivée d'EUFOR RCA et je tiens à en saluer les premiers contingents, ici présents. Ces renforts vont permettre une densification des effectifs militaires sur la capitale. Le 30 avril dernier, la capacité opérationnelle initiale a été déclarée, avec une compagnie d'infanterie française, appuyée par le contingent estonien. Ensemble, vous assurez la garde de l'aéroport de M'Poko ainsi que l'accompagnement des policiers et gendarmes centrafricains. Et depuis le 10 mai, le contingent de l'Estonie, de 55 militaires, est au complet. Permettez-moi de saluer votre contribution à notre action collective et à celle des contingents africains. J'étais à Tallin il y a quelques semaines et j'ai pu évoquer votre mission avec vos autorités, - au moment même où nous déployions nos Rafale en Pologne, pour contribuer à la mission de Police du ciel dans les États baltes. Tanan Vaga !
Vous l'aurez tous compris, la période de transition qui est devant nous en RCA est particulièrement délicate. Au plan politique, elle requiert une véritable dynamique, dont je viens de m'entretenir avec la Présidente de transition ; j'ai vu hier le Président Déby, je m'apprête à rencontrer le Président du Gabon, ce soir, et demain le Président Sassou : sans la dynamique politique, la sécurité ne pourra véritablement être assurée. Au plan militaire, elle requiert à la fois tout votre professionnalisme et toute votre vigilance, afin de ne perdre aucun des objectifs que nous avons durement acquis.
Mais je voudrais, au moment de conclure, saluer une fois encore tous les progrès réalisés depuis cinq mois. Je connais votre efficacité opérationnelle. J'apprécie vos qualités de soldats. Aux côtés de vos frères d'armes africains, vous faites honneur à la France et à l'Europe. Votre cohésion, votre dévouement face à la difficulté de cette opération, votre sens du devoir, sont pour moi et nous tous qui suivons de près l'opération SANGARIS, pour le Président de la République, la meilleure raison de conserver notre détermination. La mission continue. Je sais que je peux compter sur vous. Vous avez toute ma confiance.Source http://www.defense.gouv.fr, le 26 mai 2014
Officiers, sous-officiers, soldats de la force Sangaris,
Depuis décembre dernier, c'est mon cinquième déplacement en Centrafrique. C'est toujours avec autant de satisfaction que je vous retrouve, vous qui portez haut les couleurs de notre pays sur ce théâtre très difficile. A chacune de mes visites auprès de vous, au fil des mois, je suis heureux de retrouver la même motivation et le même engagement devant les défis qui ne manquent pas ici.
J'avais prévu de me rendre à Bambari voir vos camarades. Une autre crise, au Nigeria, m'a retardé. Votre engagement me fait plaisir.
A Bangui d'abord, car le fonctionnement des institutions de transition n'a de sens qu'au sein d'une capitale apaisée. À l'exception de quelques zones bien identifiées, je constate que la violence quotidienne, le brigandage et l'impunité ont reculé et je tiens à vous en féliciter. Aux côtés des bataillons de la MISCA qui opèrent dans la ville, vous êtes les principaux acteurs de ce changement. Vous avez contribué à imposer le calme et le début d'un retour à la normale. Je le vois bien dans la vie quotidienne. Néanmoins, et je sais que vous l'observez lors de vos missions, la tension est encore palpable. Nous devons donc rester vigilants face aux incidents, souvent violents, d'autant qu'ils peuvent être instrumentalisés pour inquiéter telle ou telle communauté, et faire ainsi vaciller le fragile équilibre retrouvé.
D'autres défis marquent la province. Certaines parties du territoire sont toujours sous la coupe de milices et de groupes criminels, qui se comportent comme des prédateurs. La mort de notre compatriote, la journaliste Camille Lepage, en est le plus triste témoignage. Nous ne l'acceptons pas. Je ne vais pas énumérer ici la longue liste des exactions qui sont perpétrées dans le pays et qui affectent toutes les communautés. Cette situation est intolérable ; nous ne l'acceptons pas ; et c'est bien le principal enjeu de votre déploiement en province que de faire cesser ce cycle de vengeance et de prédation.
Nous n'agissons pas de notre propre chef, mais sur mandat de la communauté internationale et des Nations unies.
L'intervention du GTIA DRAGON dans la région de Boguila, le 5 mai dernier, a été remarquable et soyez certains qu'elle a été rermarquée. Au-delà de la neutralisation d'une bande de pillards sans foi ni loi, SANGARIS a fait passer un message clair à tous ceux qui abusent de cette situation chaotique : les forces françaises sont en mesure d'intervenir rapidement et efficacement contre tous ceux qui s'opposeront à la stabilisation du pays.
Je mesure la difficulté de conduire de telles opérations dans un pays immense, avec des élongations de plus de 800 kilomètres et une manuvre logistique d'une grande complexité. La saison des pluies renforce encore ces contraintes très lourdes. Mais je constate aussi que, malgré ces difficultés, SANGARIS poursuit sa mission avec une endurance et une détermination dont vous avez toutes les raisons d'être fiers.
Je tiens à saluer l'action des trois groupements tactiques, SAVOIE à Bangui, DRAGON dans le Nord et l'ouest et SCORPION dans l'Est.
Je félicite également les éléments d'appui et de soutien : j'ai pu en croiser quelques-uns, je sais qu'ils font des prodiges. Je veux enfin, devant vous, saluer de la manière la plus forte le général Soriano. Depuis cinq mois, il commande avec une intelligence et un sang-froid hors du commun l'ensemble de l'opération. J'ai une totale confiance dans son jugement et dans sa détermination à vous conduire tous vers le succès d'une mission difficile mais cruciale.
Je voudrais revenir sur vos conditions de vie. Déjà venu ici à plusieurs reprises depuis la mi-décembre, j'avais déjà pleinement conscience qu'elles sont rudes, rustiques et exigeantes. À la suite de plusieurs informations qui me revenaient, j'ai souhaité parcourir le camp, j'ai parlé avec les uns et les autres. La rapidité de notre engagement explique pour beaucoup la situation. L'environnement de cette crise, les difficultés locales pour la vie quotidienne font le reste. Je sais que le général Soriano a, dès le début de l'opération, pris en compte ce problème. Un plan d'amélioration des conditions de vie est en cours de mise en oeuvre. C'est en train de se faire. J'ai demandé que ce plan soit accéléré et amplifié, afin que votre environnement quotidien puisse s'améliorer rapidement. J'ai aussi demandé à réactiver le sas lors de votre retour en France, pour que vous puissiez bénéficier d'une amélioration qui a déjà fait ses preuves pour le retour d'Afghanistan. La situation en RCA est très différente, mais elle peut être à bien des égards éprouvante. Il est utile de prévoir une transition. Je veux vous dire ici combien vos conditions de vie sont un sujet de préoccupation pour moi, que je sois sur le terrain ou à Paris. Je suivrai personnellement la mise en uvre de ce plan et je ne renoncerai pas, ni sur ce point ni sur un autre.
Je constate enfin, en venant ici à M'POKO, que l'action internationale s'organise et qu'elle se traduit par une forte mobilisation.
Le vote de la résolution des Nations unies 2149 le 10 avril dernier, autorisant le déploiement d'environ 12 000 casques bleus, témoigne de cet engagement. Nous devons tout faire pour que la montée en puissance de cette opération se déroule dans les meilleures conditions. Notre objectif, c'est que le 15 septembre une première capacité opérationnelle de la composante militaire de la MINUSCA soit effective. Dans cette perspective, nous apporterons à cette opération un appui important. Il est indispensable que les Nations unies puissent prendre le relai de la MISCA, afin d'apporter à la Centrafrique tout le poids politique et opérationnel qui s'impose.
Je me félicite par ailleurs de l'arrivée d'EUFOR RCA et je tiens à en saluer les premiers contingents, ici présents. Ces renforts vont permettre une densification des effectifs militaires sur la capitale. Le 30 avril dernier, la capacité opérationnelle initiale a été déclarée, avec une compagnie d'infanterie française, appuyée par le contingent estonien. Ensemble, vous assurez la garde de l'aéroport de M'Poko ainsi que l'accompagnement des policiers et gendarmes centrafricains. Et depuis le 10 mai, le contingent de l'Estonie, de 55 militaires, est au complet. Permettez-moi de saluer votre contribution à notre action collective et à celle des contingents africains. J'étais à Tallin il y a quelques semaines et j'ai pu évoquer votre mission avec vos autorités, - au moment même où nous déployions nos Rafale en Pologne, pour contribuer à la mission de Police du ciel dans les États baltes. Tanan Vaga !
Vous l'aurez tous compris, la période de transition qui est devant nous en RCA est particulièrement délicate. Au plan politique, elle requiert une véritable dynamique, dont je viens de m'entretenir avec la Présidente de transition ; j'ai vu hier le Président Déby, je m'apprête à rencontrer le Président du Gabon, ce soir, et demain le Président Sassou : sans la dynamique politique, la sécurité ne pourra véritablement être assurée. Au plan militaire, elle requiert à la fois tout votre professionnalisme et toute votre vigilance, afin de ne perdre aucun des objectifs que nous avons durement acquis.
Mais je voudrais, au moment de conclure, saluer une fois encore tous les progrès réalisés depuis cinq mois. Je connais votre efficacité opérationnelle. J'apprécie vos qualités de soldats. Aux côtés de vos frères d'armes africains, vous faites honneur à la France et à l'Europe. Votre cohésion, votre dévouement face à la difficulté de cette opération, votre sens du devoir, sont pour moi et nous tous qui suivons de près l'opération SANGARIS, pour le Président de la République, la meilleure raison de conserver notre détermination. La mission continue. Je sais que je peux compter sur vous. Vous avez toute ma confiance.Source http://www.defense.gouv.fr, le 26 mai 2014