Interview de M. Kader Arif, secrétaire d'Etat aux anciens combattants et à la mémoire, avec France Bleu le 5 juin 2014, sur le 70ème anniversaire du Débarquement de Normandie.

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Média : France Bleu

Texte intégral

PHILIPPE THOMAS
Bonjour, Kader ARIF.
KADER ARIF
Bonjour.
PHILIPPE THOMAS
Merci d'être avec nous, ce matin, car votre temps, on l'a compris, on s'en doute évidemment, est compté en ce moment. Ca y est, nous y sommes, les premières commémorations ont lieu dès aujourd'hui. Le ballet diplomatique commence également avec les arrivées de Barack OBAMA, de Vladimir POUTINE, de la Reine d'Angleterre. J'ai envie de vous demander, ce 70ème anniversaire s'annonce d'ores et déjà comme une réussite ?
KADER ARIF
Je crois, en tout cas je l'espère. Tout a été fait grâce au comité de pilotage dirigé par Laurent BEAUVAIS, mais l'ensemble des élus, dépassant toute appartenance partisane, le préfet LALANDE, des équipes, mais je crois que tous les Normands qui ont envie que ça marche, et pour la première fois, moi, je m'en félicite. Par ailleurs ça sera une commémoration qui prendra en compte non seulement ce qu'a été la douleur des civils et le président de la République le fera demain matin, ce qu'ont été les victimes des bombardements. De la même manière, il y aura une tribune réservée aux Normands à Ouistreham, je crois que c'est une première en l'occurrence. Veiller à ce que des écrans soient partout, dans toutes les communes, là où ça a été possible pour que tout le monde puisse participer d'une manière ou d'une autre à ce que va être la cérémonie multilatérale de Ouistreham. Donc oui, je crois que ça va être un très, très bon moment et par ailleurs, très bon moment que l'on doit absolument réussir, parce que dans le cadre décennal, le temps faisant malheureusement son oeuvre, c'est peut-être la dernière fois… où on aura encore des vétérans et des anciens combattants qui ont participé à ce débarquement du 6 juin 1944.
PHILIPPE THOMAS
Justement Kader ARIF vous avez en charge les Anciens combattants, mais aussi la mémoire, c'est important, vous l'avez dit, parce qu'il faut transmettre aujourd'hui, c'est tout l'enjeu. Vous avez le sentiment, justement que cette transmission se fait actuellement ? Et comment se fait-elle ?
KADER ARIF
Moi, ce que je peux noter, depuis le début de ce cycle mémorial, depuis que j'ai pris mes fonctions, il faut absolument s'en féliciter, c'est l'appétence de nos concitoyens à notre mémoire. Quand on voit ce que sont la réussite des films, des livres, des reportages et j'en ai parlé avec différents représentants de chaînes de télévision ou de représentants de maisons d'édition, on s'aperçoit que les Français et les Françaises ont envie de prendre cette mémoire et de pouvoir ensuite, éventuellement la traduire. Et la transmission est importante au moins autour de deux sujets qu'il faut absolument rappeler. On croit que c'est souvent comme l'air du temps, des choses qui ne disparaitront jamais, mais moi, je fais très attention, au regard de ce qui peut se passer, ça ou là, de vents mauvais qui peuvent souffler, c'est la paix, toujours la paix ! Transmettre que ces jeunes gens sont venus se battre et mourir sur ce sol normand pour défendre l'idée…
PHILIPPE THOMAS
Et ça, on le sait en Normandie.
KADER ARIF
Voilà, et vous le savez en Normandie, qu'il faut absolument préserver cela et une deuxième valeur qui nous dépasse, c'est aussi la liberté. Vivre libre et c'est des choses qu'il faut toujours rappeler. Et si on peut se servir de ces commémorations pour rappeler ça, le faire porter par notre jeunesse et transmettre, c'est je crois, une belle victoire. Beaucoup de choses ont été faites d'ailleurs grâce à l'Education nationale, le monde culturel, le monde associatif et moi, je me félicite qu'il y ait aussi aujourd'hui 800 projets labellisés dont beaucoup venants de jeunes qui grâce à leurs enseignants, mais qui grâce à eux-mêmes, portent cette mémoire et ont envie ensuite de voir eux-mêmes la répercuter, la redire, la reporter, la retraduire à leurs enfants ou à leurs petits-enfants.
PHILIPPE THOMAS
Kader ARIF, vous allez inaugurer dans quelques instants, ouvrir un forum économique, on va l'appeler comme ça. Ca fait grincer quelques dents. Est-ce que c'est le lieu pour le faire ?
KADER ARIF
J'étais invité, je crois qu'il y a ce lien particulier, singulier, entre la France, les Etats-Unis. La relation avec les Etats-Unis est une relation forte, plus de 9000 soldats américains sont tombés, pendant cette bataille de Normandie. Ce n'est pas rien ! Ce lien où les Français entretiennent avec les Etats-Unis est très fort et inscrit dans la durée. Il y a un lien politique, il y a aussi ce lien économique. Donc moi, ce matin, je vais parler pas de ce que va être le traité entre les Etats-Unis et l'Union européenne, je vais parler de la mémoire, de ce que l'on peut retenir sur le plan moral, de ce que l'on peut retenir sur le plan historique, de ce qu'a été le 6 juin 1944. Donc je suis dans ma fonction et dans mon rôle.
PHILIPPE THOMAS
Je voudrais parler également avec vous d'une signature importante aujourd'hui, vous l'avez dit demain au Mémorial de Caen François HOLLANDE rendra hommage aux victimes civiles normandes et bientôt sur ce thème va voir le jour à Falaise, ça y est c'est sûr ?
KADER ARIF
Oui ! C'est un projet qui est porté depuis longtemps par l'ensemble des élus, les collectivités, l'Etat, et je sais qu'il a fallu du temps pour que tout le monde puisse déboucher sur un projet. Oui ! Ce projet est lancé, ce projet est financé, j'espère que ce projet ensuite verra le jour rapidement maintenant que tout est acquis, que je signerai… en tout cas que le préfet LALANDE, en ma présence, signera tout à l'heure cette convention. Et en même temps ça permet de rappeler ce qu'a été Falaise, parfois oubliée, c'est quelque chose d'important pour nos amis Polonais : 1.500 Polonais tués dans la poche de Falaise, une des bataille les plus dures de ce qu'a été la bataille Normandie, à la fin de cette bataille de Normandie en août 44, d'une violence, d'une horreur absolue, et je pense que c'était un rappel par rapport cela tant pour les victimes militaires que pour les victimes civiles et que c'est très bien que ce projet voit le jour.
PHILIPPE THOMAS
Un dernier mot simplement, Kader ARIF, nous poserons tout à l'heure la question à nos auditeurs, on ne peut pas quand on est Normand aujourd'hui éviter - on les voit les jeeps, les tenues militaires d'époque – vous, en tant que secrétaire d'Etat, est-ce que ça vous choque ? Est-ce que ça vous gêne ? Est-ce que ça vous dérange ou pas ou vous dites finalement ça fait partie aussi des commémorations ?
KADER ARIF
Moi je crois que ça fait partie des commémorations ! Pour autant qu'on le fasse de manière réglementée, qu'on sache qui est qui, pourquoi c'est fait, mais ça ne me gêne pas, je l'ai vu en d'autres lieux, j'étais avec le président de la République en Corse pour la libération de la Corse en octobre dernier 2013, pour les 70 ans, il y avait déjà ce type de personnes mais aussi de matériels qui les accompagnent, ça fait partie j'allais dire de cette mémoire qu'on évoquait ou cette transmission de mémoire qu'on peut évoquer. Après je suis prudent, aujourd'hui c'est réglementé, ça va dans le bon sens, je suis prudent quant à l'apparition de gens demain qui pourraient porter l'uniforme nazi, des sigles nazis… je crois qu'il y a des choses qu'il faut savoir éviter et, en même temps, ne pas trop en faire pour ne pas non plus… la mémoire est une chose qu'il faut savoir prendre dans ce qu'elle est dans sa réalité, ne pas seulement la scénariser cette mémoire-là pour des intérêts qui, parfois, ne sont pas liés à l'histoire.
PHILIPPE THOMAS
Merci Kader ARIF d'avoir été avec nous…
KADER ARIF
Merci à vous.
PHILIPPE THOMAS
D'avoir trouvé du temps pour France Bleu Basse-Normandie dans votre agenda serré…
KADER ARIF
Merci à vous, merci à vous.
PHILIPPE THOMAS
Bonne journée.
KADER ARIF
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 juin 2014