Interview de M. Benoit Hamon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche à RTL le 17 juin 2014, sur la perturbation des épreuves du baccalauréat notamment suite au grèves à la SNCF.

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Texte intégral


LAURENT BAZIN
Jean-Michel APHATIE, vous recevez donc ce matin le ministre de l'Education nationale, Benoît HAMON.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Benoît HAMON.
BENOIT HAMON
Bonjour Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Les épreuves du baccalauréat ont débuté hier, ont-elles été perturbées par la grève de la SNCF ?
BENOIT HAMON
Peu ou pas, nous avons enregistré un peu moins de 300 retards, ce qui nous met à peu près…
JEAN-MICHEL APHATIE
300 retards imputables à la grève ?
BENOIT HAMON
300 retards, probablement quelques-uns imputables à la grève, ce qui est l'équivalent presque d'une année ordinaire…
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais c'est très peu…
BENOIT HAMON
Ce qui montre que, eh bien, d'abord, les candidats avaient pris leurs dispositions, les familles aussi, le bac, c'est quelque chose qu'on prépare à l'avance, c'est vrai qu'on se lève toujours un peu plus tôt, peut-être encore un peu plus tôt cette fois-là, je voudrais remercier les personnels de l'Education nationale, les dirigeants et les responsables des centres d'examens qui ont accueilli ces retardataires et ont proposé des solutions, comme nous l'avions demandé, quand c'était nécessaire et pour pouvoir prolonger la composition d'un temps équivalent aux retards, donc ça s'est plutôt bien passé…
JEAN-MICHEL APHATIE
Bien passé. Les épreuves se poursuivent aujourd'hui, la grève aussi, donc, on surveille, pas de raison que ça se passe mal ?
BENOIT HAMON
Absolument. Oui, nous sommes attentifs, y compris aux cas particuliers, parce qu'il peut y avoir des situations un petit peu difficiles et singulières dans une Académie ou une autre. Nous sommes attentifs, et pour l'instant, en tout cas hier, ça s'est bien passé, je croise les doigts pour que ça continue toute la semaine jusqu'à lundi prochain.
JEAN-MICHEL APHATIE
Parlons des fuites aussi, les sujets de philosophie étaient disponibles sur les réseaux sociaux, sur un site au moins, vite après 8h d'ailleurs, donc… Alors, s'il y a des fuites, c'est que les enseignants qui sont au coeur du dispositif de préparation du bac donnent les sujets, vous les retrouverez ces enseignants ? On n'a jamais de nouvelles des auteurs.
BENOIT HAMON
Alors, quelques précisions, fuites, d'abord, il y a eu une information effectivement hier matin qui faisait état sur Internet de l'existence d'une fuite qui aurait pu avoir lieu dans la nuit, là, c'est grave…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça s'est révélé faux, ça…
BENOIT HAMON
Ça s'est révélé inexact, et la gendarmerie a fait son travail assez rapidement, il y a eu ensuite, mais surtout que ça aura été passible de peines assez lourdes, jusqu'à 9.000 euros d'amende, jusqu'à trois ans d'emprisonnement, pour une fuite de cette nature, qui suppose le cas échéant, si elle existe, qu'on remette en cause presque le principe de l'examen. Et ce que nous avons eu, et de manière assez, là encore, marginale, ce sont des divulgations des sujets, avant 09h30, pourquoi avant 09h30 ? Puisque nous avions prévu que jusqu'à 09h30, il n'y ait pas le droit de divulguer ces sujets, et ils n'ont pas été publiés dans la presse, et je remercie les médias d'ailleurs d'avoir joué le jeu, pour éviter justement, en raison des craintes que nous avions sur les retards, que ces sujets n'entrent en possession de retardataires. Bon, objectivement, quel est l'impact de ces divulgations à 08h20, 08h30 ?
JEAN-MICHEL APHATIE
Très faible.
BENOIT HAMON
Il est extrêmement faible, pourquoi ? Parce qu'il concerne… il aurait pu aider qui ? Quelques retardataires qui, courant jusqu'à leur salle d'examens, auraient eu le temps de consulter les sujets, de réviser le cas échéant quelques lignes de KANT ou de je ne sais qui, bon…
JEAN-MICHEL APHATIE
Pas d'annulation d'épreuves ? C'est ce que vous voulez dire…
BENOIT HAMON
Non, voilà…
JEAN-MICHEL APHATIE
Les épreuves n'ont pas été perturbées par ces fuites.
BENOIT HAMON
Et objectivement, c'est un sujet pour tous les pays, pour tous les examens que de faire attention…
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais vous cherchez activement les auteurs de ces fuites ou on se dit : bon, on laisse tomber, parce que de toute façon…
BENOIT HAMON
Eh bien, là, en l'occurrence, les recherches se sont concentrées sur un compte Tweeter, et qui a été fermé depuis, et…
JEAN-MICHEL APHATIE
Oui, mais qui l'a alimenté, qui a alimenté celui qui a le compte Tweeter, ça, c'est des gens qui sont dans le cadre de la mécanique de préparation…
BENOIT HAMON
Ça peut être un surveillant, ça peut être un candidat, voilà, mais en l'occurrence, honnêtement, il ne s'est pas passé quoi que ce soit de nature à perturber le déroulement du bac hier et remettre en cause l'examen…
JEAN-MICHEL APHATIE
Voilà, vous êtes un ministre de l'Education plutôt serein ce matin au coeur du déroulement de ce baccalauréat ?
BENOIT HAMON
… Pour l'instant, ça se passe bien, pour l'instant…
JEAN-MICHEL APHATIE
Si vous avez un peu de sérénité, on peut parler de politique ?
BENOIT HAMON
Si vous voulez.
JEAN-MICHEL APHATIE
Grève SNCF, le Premier ministre a dit hier : cette grève, personne en comprend le sens, il faut que cette grève s'arrête, vous diriez ça, vous, Benoît HAMON ?
BENOIT HAMON
Ecoutez, je dis aujourd'hui que sur cette grève qui mobilise principalement les effectifs de deux syndicats…
JEAN-MICHEL APHATIE
CGT et SUD RAIL ?
BENOIT HAMON
Oui, il est incontestable que du point de vue de l'opinion, mais même d'autres cheminots, de l'immense majorité des cheminots, cette grève apparaît être en décalage par rapport, 1°) : au sens de la réforme, ce qui avait été discuté beaucoup, et y compris avec les deux syndicats qui aujourd'hui font grève. Cela étant dit, moi, je l'ai dit, on peut constater que cette grève embarrasse, gêne, mais que, objectivement, on aurait pu poursuivre sur la voie du dialogue social sans pour autant utiliser l'arme de la grève, en même temps, moi…
JEAN-MICHEL APHATIE
Il faut arrêter cette grève, dit le Premier ministre.
BENOIT HAMON
Moi, je pense qu'il faut que, on s'achemine vers un accord rapidement, pourquoi ? Parce que pour la SNCF elle-même, pour les cheminots eux-mêmes, il est clair que la perception du sens de cette grève n'est plus claire et est très confuse, oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc il faut qu'elle s'arrête ?
BENOIT HAMON
Il faut avancer un accord.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc il faut qu'elle s'arrête ?
BENOIT HAMON
Si vous voulez.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est moi qui l'ai dit, ce n'est pas vous. Il faut qu'elle s'arrête.
BENOIT HAMON
Il faut trouver un accord, oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il n'y a pas d'Education sans Culture, alors, ce n'est pas une épreuve de philo, ça, le gouvernement doit-il agréer l'accord UNEDIC ?
BENOIT HAMON
C'est un sujet, moi, j'ai vu les intermittents, je suis très heureux que le Premier ministre ait annoncé à la fois que le principe d'un accord s'impose dès lors qu'il est majoritaire, mais que, il allait falloir prendre des mesures spécifiques en direction d'un certain nombre d'intermittents, qui peuvent être fragilisés par cet accord. Ce qui est en jeu, ce n'est pas simplement…
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc il faut agréer l'accord UNEDIC ?
BENOIT HAMON
Oui, je pense qu'il faut l'agréer, mais qu'il faut… je n'ai pas… honnêtement, je ne suis pas ministre de la Culture et je n'ai pas le détail des mesures qui pourraient être annoncées par Aurélie FILIPPETTI, par le Premier ministre. Mais je souhaite…
JEAN-MICHEL APHATIE
On n'a pas de détails, on agrée l'accord UNEDIC, mais après…
BENOIT HAMON
Mais le Premier ministre a annoncé…
JEAN-MICHEL APHATIE
Il faut l'agréer ou pas…
BENOIT HAMON
A annoncé qu'il pourrait y avoir des mesures supplémentaires, ce que je vous dis…
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, non, non…
BENOIT HAMON
Mais ce que je vous dis, c'est que, moi, ce qui m'importe, c'est qu'à la fois, les festivals se déroulent, que, économiquement, tout ça continue à fonctionner, mais qu'on soit attentif au sort d'hommes et de femmes qui ne sont pas les privilégiés de la République.
JEAN-MICHEL APHATIE
Je vous pose ces questions parce que vous voyez bien, et puis, on le note entre les lignes dans vos propos, qui ne sont pas d'un allant extraordinaire sur ces sujets, on voit bien que la gauche se divise, on voit bien que ces questions-là, SNCF, intermittents, débats économiques, fracturent la gauche.
BENOIT HAMON
Vous dites « fracturent », elles ne fracturent pas le gouvernement, et…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ah ? Ça ne va pas être loin un jour.
BENOIT HAMON
Non, eh bien écoutez, pour l'instant, le gouvernement, il travaille, il y a des débats au sein de la majorité, on reprocherait à la majorité d'être silencieuse et muette au moment où les élections municipales, comme les élections européennes sont venues rappeler à la gauche que pour gouverner, il y avait besoin aussi de soutien de son électorat.
JEAN-MICHEL APHATIE
Des députés socialistes qui menacent de ne pas voter les textes budgétaires, ce n'est quand même pas du débat, c'est une menace, c'est autre chose…
BENOIT HAMON
Mais laissez-moi terminer ! Mais ce débat-là, il existe, et il existe au sein des députés socialistes et toute la majorité, est-ce qu'il y a un seul de ces députés qui a dit : non, non, je n'appartiens plus à la majorité aujourd'hui, je fais le choix de me mettre en dehors, non. Mais je le dis, c'est important que cette majorité, elle soit l'interprète de ce qui se passe dans notre électorat. Et notre électorat effectivement, comme l'avait dit le président de la République, il demande des résultats à cette politique, la politique que l'on fait, et il demande de la justice sociale, c'est-à-dire un équilibre dans les choix qui sont faits…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous êtes à l'aise ce matin au gouvernement ?
BENOIT HAMON
Oui, sinon, je partirais, le jour où je serais… vous savez, je serais assez tranquille pour vous le dire si je ne suis plus à l'aise, mais en fait, tout le monde se moque un peu de savoir si un ministre est à l'aise ou pas, ça, non…
JEAN-MICHEL APHATIE
Pas moi…
BENOIT HAMON
Pas vous, l'essentiel, c'est que chacun dans son domaine fasse son travail, et je pense que la politique dans le champ de l'Education nationale est une vraie politique de gauche, parce qu'elle nous redonne les moyens de lutter contre une réalité de l'école française, c'est qu'elle est très inégalitaire en dépit du fait que nous affichons la déclaration des Droits de l'Homme et des citoyens à l'entrée de tous les établissements scolaires. Voilà.
JEAN-MICHEL APHATIE
Benoît HAMON, ministre à l'aise, était l'invité de RTL ce matin. Bonne journée.
LAURENT BAZIN
Bonne journée.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonne journée Benoît HAMON.
LAURENT BAZIN
A demain Jean-Michel.
JEAN-MICHEL APHATIE
A demain Laurent.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 18 juin 2014