Texte intégral
Cher-e-s ami-e-s,
Nous sommes à un moment de vérité. Pour notre parti. Pour la gauche. Pour notre pays.
Nous sortons de deux défaites électorales : à celle des municipales, a succédé une réplique toute aussi forte aux élections européennes. Comment d'ailleurs pouvait-il en être autrement moins de deux mois après un scrutin dévastateur ! A deux reprises, les Français nous ont dit clairement leur insatisfaction, leur impatience, leur colère.
Nous gouvernons, nous sommes aux responsabilités. Les Français nous ont confié ce mandat. Cette situation nous oblige à agir vite et à définir le sens de ce que nous faisons. Et c'est de cela dont je suis venu vous parler aujourd'hui, devant le Conseil national de mon parti.
Mais d'abord, un constat s'impose. Un constat lucide sur la situation de la France.
1. UN CONSTAT LUCIDE SUR LA SITUATION DE LA FRANCE
a / Notre pays n'a jamais été confronté à des crises si intenses
Jamais, notre pays n'a dû faire face à des crises d'une telle intensité.
D'abord, une crise économique et sociale.
Nous en connaissons les effets. Une croissance inexistante depuis 2008 et donc un PIB qui depuis 5 ans, a stagné. En 10 ans, nos entreprises, notre industrie n'ont cessé de perdre continuellement des parts de marchés. La conséquence : c'est le chômage de masse. Il fait mal, en particulier aux jeunes, aux seniors. Nos déficits et notre dette ont atteint des niveaux insupportables.
Les inégalités se sont accrues et beaucoup de nos compatriotes font face à la précarité. Les ménages les plus modestes ne sont plus les seuls à vivre dans l'angoisse des fins de mois. Et pour les plus fragiles, ces fins de mois commencent de plus en plus tôt. Pour les classes moyennes, et même une partie des cadres, la peur du dé-classement s'est installée.
Aujourd'hui, une bonne partie des Français n'a pas seulement le sentiment d'être des victimes de la mondialisation. Beaucoup ont aussi peur pour l'avenir de leurs enfants toujours plus diplômés mais toujours plus précaires , pour le financement de leur retraite. Ils se demandent qui va accompagner leurs parents dans la vieillesse. Et surtout, il y a ce sentiment que le pays tout entier est en train de perdre pied.
La crise, pour trop de Français, est devenue une habitude, un éternel recommencement. Malheureusement, de plus en plus souvent, un mode de vie
une crise d'identité et une crise de l'Europe
Cette crise alimente une deuxième crise, moins quantifiable, mais bien plus profonde : une crise d'identité.
Dans un monde qui change si vite, dans lequel les menaces sont multiples et permanentes, de nombreux Français s'interrogent. Les menaces, ce sont notamment les instabilités régionales et le terrorisme. Et la tragédie de Bruxelles le démontre. Un jeune djihadiste de nationalité Française a été formé en Syrie par un groupe terroriste, originaire d'Irak, et qui lutte pour s'emparer de Bagdad. Cette tragédie symbolise à elle seule la complexité et l'âpreté des défis que nous avons devant nous. Plusieurs centaines de Français sont engagés pour aller combattre en Syrie, trente y sont déjà morts. Jamais nous n'avons dû faire face à une telle menace terroriste. Chacun doit mesurer ce que cela représente comme péril pour notre propre cohésion nationale et pour L'Islam de France.
Chers amis,
Nombreux sont les Français qui doutent. Aujourd'hui, ce qui nous rassemble ne paraît plus aussi évident qu'hier. Nos institutions républicaines ne sont plus des repères. Leurs capacités à protéger, à promouvoir, à intégrer ne convainquent plus. Jusqu'à l'Ecole de la République qui est devenue trop souvent un lieu de reproduction, voire d'accroissement des inégalités. Enfin, la laïcité, ce ciment de la République, notre richesse, est mise à mal par l'irruption des communautarismes. Qui contestent nos lois, nos valeurs, nos principes.
Les fractures communautaires sont à l'oeuvre dans nos villes, dans nos quartiers. Mais il y a d'autres fractures, géographiques, culturelles. Elles divisent les territoires urbains et ruraux. Elles divisent les territoires entre ceux qui s'en sortent le mieux et ceux qui cumulent les difficultés. De la relégation spatiale, économique, civique naît le sentiment d'abandon, puis ensuite du désespoir.
Cette crise d'identité, cette insécurité culturelle et identitaire, c'est aussi la crise de l'Europe. Les Français y croient de moins en moins. L'Europe, c'est pour beaucoup une nouvelle démonstration de l'incapacité de la politique à agir.
une crise de confiance qui vient de l'incapacité à produire des résultats.
Car combien de fois les Français ont-ils déposé, avec espoir, leur bulletin dans l'urne pour que les résultats attendus ne se trouvent pas au rendez-vous ? Trop, beaucoup trop de fois ! « Le pays ne se sent pas écouté ; le pays ne se sent pas représenté ; des vies non racontées sont, de fait, des vies diminuées, niées, implicitement méprisées » : ces mots de Pierre ROSANVALLON sont toujours d'actualité.
La quatrième crise que nous traversons, c'est une crise de confiance qui vient de l'incapacité à produire des résultats.
Et cette incapacité, c'est le moteur le plus puissant de la défiance, de la perte d'autorité des pouvoirs publics. Car l'autorité repose sur le respect de la parole donnée et sur les résultats obtenus.
b / Notre pays peut donc se défaire et se donner à Marine LE PEN
Face à toutes ces crises, la France risque de se défaire. Et certains, en exploitant les peurs, les désespoirs, avancent leurs solutions. Des solutions démagogiques. Des solutions qui n'en sont pas. Ce sont les extrêmes, les populismes. Ils séduisent de plus en plus. Ils montent en puissance. Dangereusement.
Jusqu'à présent, nous vivions dans un schéma classique d'alternance. Elle intervenait entre la gauche et la droite. Mais toujours entre partis républicains.
C'est du moins la certitude que nous avions jusqu'au 21 avril 2002 Ce cataclysme qui a tétanisé la gauche. Car depuis 12 ans, avons-nous vraiment mis en oeuvre ce qui était nécessaire pour nous prémunir contre cela ?
Le 25 mai a apporté une réponse cinglante. En arrivant nettement en tête, le Front national a confirmé ce risque : la possibilité d'une alternance non plus entre des républicains, mais entre des républicains et des non-républicains. Non plus une alternance, mais une déliquescence.
Mes chers camarades,
Oui, nous pourrions basculer dans une nouvelle ère, que Jean-Christophe CAMBA-DÉLIS a qualifiée de « tripolarisation de la vie politique ». Une ère dans laquelle le risque de voir Marine LE PEN au second tour de l'élection présidentielle existe. Une ère dans laquelle un des grands partis républicains et cette fois sans que cela soit une surprise peut être absent de ce grand rendez-vous électoral. Et rien n'est fait : ce peut être la droite. Ce peut être nous. Par conséquent, une ère dans laquelle la gauche peut aussi disparaître
2. DANS CE CONTEXTE, LA GAUCHE PEUT MOURIR, ELLE DOIT DONC ÊTRE CAPABLE DE SE DÉPASSER
a / Constat : la gauche est fragilisée.
Oui, la gauche peut mourir. Elle n'a jamais été aussi faible dans l'histoire de la Ve République : moins d'un tiers des voix aux européennes.
Et ces résultats sont clairs : il n'y a pas d'alternative à gauche. Notre échec électoral ne renforce pas la gauche de la gauche
Nous devons donc tirer un enseignement pour nos débats internes : c'est de nous que devra venir la solution ! Et, bien sûr, il faut toujours des alliances. Et je salue toutes les initiatives engagées par Jean Christophe, notamment les Etats Généraux de la gauche. Certes, le Parti socialiste a vocation à être au centre du jeu, à dialoguer sérieusement avec ceux qui veulent réellement exercer le pouvoir. Mais ne nous racontons pas d'histoire Nous ne pourrons pas apporter de nouvelles solutions avec de vieilles recettes
Nous ne pouvons plus, ajourner, repousser, éviter Il faut nous confronter à la ré-alité : la gauche aujourd'hui, celle que nous incarnons, a perdu de sa force. Et cette question ne se pose pas qu'à nous Socialistes. Elle se pose à toute la gauche : aux écologistes, aux communistes, et de la gauche la plus radicale jusqu'aux Sociaux-démocrates.
Un grand penseur espagnol, ORTEGA y GASSET, a eu cette belle phrase pour parler des moments où quelque chose d'important se joue, sans que l'on puisse pour autant le définir. Il disait « on ne sait pas ce qui se passe, mais c'est justement ce qui se passe ». Or tout l'enjeu est là. Nous sentons bien que nous sommes arrivés au bout de quelque chose, au bout peut-être même d'un cycle historique pour notre parti.
Il n'est plus synonyme d'espérance, de progrès, pour les classes moyennes, les ouvriers, les employés ... Par paresse, par confort, nous avons cru détenir un droit naturel à les représenter. Aujourd'hui, ils nous rappellent que la politique ne connaît pas de certitudes. Il est bien loin, le temps où, à l'aube d'une élection législative, JAURÈS pouvait dire que « Partout, la ferveur attentive du peuple ouvrier a répondu à la dignité, à la force, à l'élévation, à la franchise de la propagande socialiste ».
Et j'ai donc du mal à imaginer que les vieilles théories ou les stratégies du passé soient les sources appropriées de construction de l'avenir. J'imagine le PS comme une force moderne, attractive et conquérante, et non pas comme une force en difficulté cherchant dans des alliances improbables des sources de renouveau.
Nous devons donc nous réinventer. Et nous réinventer dans un contexte particulier : l'exercice du pouvoir, faute de ne l'avoir fait dans l'opposition.
Et nous devons le faire dans un moment particulier : la crise de la droite, en panne de projet et de leadership. Or, c'est une loi souvent vérifiée : on se construit plus facilement en s'opposant, en contestant. Il y a donc pour nous une difficulté supplémentaire. Mais c'est après tout aussi l'essence de la gauche : ne pas être unique-ment le contraire de la droite. Mais être à l'avant, comme éclaireur, comme moteur du progrès.
L'époque est au flou généralisé dans l'offre politique : la droite est exsangue, la gauche est déboussolée. Et le seul message identifié, c'est celui de l'extrême droite.
Peut-on laisser les Français dans ce brouillard ? Avec pour seul repère les prétendues « solutions » de l'extrême droite : le repli, le rejet de l'autre, la culpabilisation systématique de l'immigré ? NON !
A nous de parler clair ! De réexpliquer aux Français quel est le cap. Quels sont les objectifs de la gauche. Et d'agir. Agir et agir maintenant. Toujours. Sans relâche ! Et c'est ma responsabilité en tant que Premier ministre de le faire. Parce que le Président de la République m'a confié cette mission. Parce que j'ai reçu la confiance de l'Assemblée nationale. Parce que je me trouve de fait dans une position centrale, au coeur de la majorité. Et parce que je suis des vôtres, et ce depuis aussi loin que remonte mon engagement politique.
b / la gauche doit s'adapter
Ne laissons pas le monde et la France changer sans nous. Sortons du confort des idées connues, des mots qui ne fâchent pas, et des dogmes !
En vérité, mes chers camarades, beaucoup de slogans peinent à cerner les enjeux du monde actuel. Un monde en pleine recomposition.
L'Occident a perdu sa position dominante. Et il s'interroge sur ce qu'il sera demain. Les puissances émergentes la Chine, l'Inde, le Brésil font progressivement jeu égal avec nous. Dans 20 ans, leur force cumulée dépassera la somme de l'Europe et des États-Unis.
Cette recomposition s'accompagne d'une ouverture sans précédent des marchés, où tout entre désormais en concurrence : les entreprises, les Etats, les systèmes fiscaux et sociaux et bien évidemment les travailleurs, les individus, les salariés. C'est une source de perturbations et d'inquiétudes. Mais il y a aussi de formidables opportunités, y compris pour notre pays.
La gauche ne sait pas toujours comprendre ce monde qui change et en faire le récit. Or, elle le doit à ses militants et à ses électeurs.
Face à ces nouveaux enjeux, le rôle de l'État dans l'économie est profondément transformé. Notre force, notre atout pour l'avenir, c'est l'innovation. C'est pour cela que l'Etat doit investir dans les secteurs à fort potentiel de croissance. Et faire en sorte que la fiscalité ne décourage pas les entreprises qui innovent et qui exportent.
Le temps où l'on pouvait accroître la dépense publique, et combattre les déficits par la hausse de l'impôt, est révolu. Cette méthode est devenue un handicap. Elle empêche l'État d'investir dans les secteurs stratégiques et étouffe ses marges de manoeuvres. Et nous voyons bien que nos propres électeurs n'en peuvent plus de la pression fiscale. C'est pourquoi nous avons agi sur la feuille d'impôt, en baissant, dès septembre prochain, l'impôt sur le revenu de 3,7 millions de foyers. Et en faisant sortir 1,9 million de l'impôt. Et nous devrons aller encore plus loin dans le cadre de la prochaine loi de finances.
La question de l'État, elle reste fondamentale. Je crois au rôle de l'Etat. Ce n'est pas un concept dépassé. Il demeure le levier majeur pour construire l'avenir, à condition qu'il sache s'adapter, se réformer. C'est la raison pour laquelle je crois que le travail sur l'avenir de l'État doit être au coeur des réflexions des socialistes.
3. L'ACTION DU GOUVERNEMENT
a / un réformisme assumé
Le gouvernement s'inscrit pleinement dans cette logique. Avec détermination. Avec constance. Avec ambition.
Je l'ai dit dès les premiers jours, dès mon discours de politique générale : nous devons réduire la dépense publique. Il existe un large consensus sur ce point, en témoigne la confiance qui m'a été accordée. Si nous voulons d'un État efficace et fort nous devons impérativement redéfinir son périmètre et réorienter ses missions. Réduire la dépense publique, ce n'est pas affaiblir l'Etat. Ce n'est pas le montant de la dépense publique qui fait son efficacité.
Le deuxième axe c'est permettre aux entreprises ces organisations d'hommes et de femmes, de travailleurs, de salariés de restaurer leur compétitivité. Sans compétitivité, pas d'investissements et pas de création d'emplois. Je pense tout particulièrement aux petites et moyennes entreprises qui sont le coeur de notre tissu économique, et qui ont besoin de soutien. Réduire les charges, ce n'est pas faire des cadeaux aux chefs d'entreprises qui luttent pour leur survie. Réduire les charges des entreprises, c'est les aider à affronter une compétition mondiale féroce.
Certains disent : vous menez une politique de l'offre ? Je ne suis pas certain que ce questionnement passionnent nos concitoyens Mais j'y réponds : non seulement je la mène, mais je l'assume. Et puis, en quoi une telle politique serait-elle une poli-tique de droite ? La politique de l'offre n'est pas un choix idéologique. Elle est encore moins l'expression d'une politique tournant le dos à la demande. Car nous agissons aussi pour le pouvoir d'achat. En baissant les impôts, je l'ai dit. Mais en agissant aussi sur les salaires de Français aux revenus les plus modestes, ceux qui gagnent autour du SMIC. Dès le 1er janvier 2015, ils bénéficieront d'une augmentation de salaire de 500 net par an, soit la moitié d'un treizième mois de salaire.
J'insiste : la politique de l'offre, ce n'est pas un choix idéologique, c'est un choix stratégique guidé par la transformation des règles du jeu mondial que je viens d'évoquer.
Alors me direz-vous : sommes-nous sûrs que cette politique ramènera la croissance, les emplois et la confiance ?
Je n'ai que cette certitude : prendre un autre chemin nous conduirait à l'échec. C'est pourquoi je suis très déterminé à quelques jours des votes importants que nous avons au Parlement. C'est notre crédibilité qui est en jeu.
Alors oui, cette stratégie a sa part d'aléa. Mais c'est la nature même de la politique que de faire des choix. De faire les bons choix, au bon moment. Faire des choix, c'est agir, c'est avancer. Et les choix que fait ce gouvernement, c'est celui des réformes structurelles et ambitieuses qui seules nous sortiront de l'ornière. Qui seules nous permettront d'échapper à l'austérité.
Il nous faut davantage de réformes pour nous prémunir contre l'austérité. Voilà un axe de combat sur lequel tous les socialistes doivent se retrouver.
Le redressement de nos comptes publics, le Pacte de responsabilité et de solidarité, la réforme ambitieuse de l'État, couplée à celles de nos collectivités territoriales, avec des régions plus fortes et des intercommunalités consolidées : c'est notre dé-marche.
Et il y faut de la constance. Car la politique en zigzag, par à-coups, mine la confiance chez nos concitoyens. Il nous faut aussi du temps. J'entends l'impatience. Parfois même dans nos rangs et dans la société. Mais le temps de la politique, le temps de l'économie, le temps du redressement ce n'est pas le temps des médias.
Des réformes, nous en avons portées depuis deux ans. Nous en portons chaque jour au Parlement. Je pense aux projets de loi sur l'Egalité femmes-hommes, sur l'économie sociale et solidaire, qui seront adoptés prochainement. Et parce que nous sommes de gauche et que nous avons le souci d'améliorer le quotidien des Français, nous portons aussi ces grandes lois sur la Santé et sur la transition énergétique. Une transition énergétique qui ne signifie pas la perte de notre capacité dans le domaine nucléaire.
Nous devons rendre notre système fiscal plus stable, plus prévisible, plus favorable à l'innovation, c'est aussi une priorité d'action de mon gouvernement. Ce n'est que comme cela que nous parviendrons à nous montrer encore plus exigeants vis-à-vis des entreprises en termes de contreparties.
Il nous faudra aussi explorer d'autres chemins, sans tabou.
Je pense à la baisse de la fiscalité des ménages et notamment des classes moyennes. Car je l'ai dit, les impôts sont trop lourds. Mais nous ne pourrons nous engager dans cette voie que si nous avons réduit la dépense publique.
Je pense aussi au desserrement de la contrainte budgétaire européenne, car la réduction des déficits n'a jamais été, et ne sera jamais, une fin en soi. Mais cette option n'est envisageable que si nous nous montrons crédibles sur notre effort budgétaire et nos réformes de structures.
L'Europe, elle doit être à l'écoute. Et ne boudons pas notre plaisir : après l'avoir de-mandé pendant longtemps, la BCE a décidé de baisser son taux directeur. L'Euro est trop cher, je l'ai dit dès mon discours de politique générale. Et les choses sont en train de changer. La présidence italienne du Conseil de l'Union européenne, avec Matteo RENZI, c'est aussi l'occasion de faire progresser ce pourquoi nous nous bat-tons : une Europe au service de la croissance, au service de l'emploi.
b / la république intransigeante
Mes chers camarades,
Le redressement de la France passe par l'économie, par le réformisme assumé. Mais nous devons y associer une conception intransigeante de la République. La République, c'est la solution. Face aux doutes, aux incertitudes, aux difficultés. La République, c'est le socle premier de la confiance.
Et des priorités ont été arrêtées en matière de justice, de sécurité, d'éducation, d'école. Cette école que nous devons faire évoluer dans le seul intérêt des enfants. Une école dans laquelle nous devons investir, et que nous devons aussi défendre quand elle est attaquée. Car elle au coeur de la promesse républicaine. Et donc au coeur de la gauche.
La promesse républicaine, c'est la lutte contre toutes les formes d'inégalités et d'injustices. Celles qui enferment les individus, les empêchent de s'élever et de trouver leur juste place dans la société. Car quelle plus belle ambition pour la gauche que de permettre à chacun de devenir pleinement ce qu'il est ? Et nous avons une responsabilité pour redonner de l'espoir à notre jeunesse. Et notamment celle de nos quartiers qui, souvent, parce qu'elle subit les discriminations, se dit que la France n'a rien à lui apporter. Et nous devons lutter de toute notre force contre cela.
Mais en disant aussi que la réalisation individuelle, elle doit se faire que dans le cadre de la Nation, de ses lois, de ses principes. Une Nation que nous, la gauche, défendons depuis toujours. Car quelle belle idée que celle d'individus ayant choisi de mettre en commun leurs destins, pour construire ensemble un avenir meilleur. Nous continuons de refuser les communautarismes, ces dérives qui enferment les femmes et les hommes dans des identités historiques, religieuses, ou des appartenances géographiques. Et c'est pour cela que nous sommes des défenseurs acharnés de la laïcité. Car là aussi, le combat doit être mené. Un combat que la gauche a trop longtemps abandonné. Et nous l'avons aussi payé à l'occasion des dernières municipales.
Alors oui, nous devons reprendre le combat des valeurs ; celles qui sont essentielles pour tous les Français : la justice et l'égalité, le mérite et le travail, le courage et la fraternité.
La gauche doit défendre la République, ne pas rougir d'employer les mots de Nation et de patrie.
C'est la gauche, qui avec le Front Populaire a instauré les congés payés, la réduction du temps de travail et les conventions collectives. C'est la gauche qui a convergé pour poser les bases du Conseil national de la résistance. C'est la gauche, qui a su se regrouper pour fonder le programme commun. C'est la gauche, enfin, qui a su, ces dernières années, porter les grandes réformes dont notre pays avait tant besoin : de la gauche plurielle du gouvernement de Lionel JOSPIN, aux engagements de François HOLLANDE le mariage pour tous, le non-cumul des mandats, la ré-forme pénale ! C'est à nous de porter cet héritage, d'en être fiers, et d'en faire notre boussole.
Deux enseignements doivent nous guider. Le premier, c'est que la gauche n'est jamais aussi forte que lorsque les socialistes sont unis et donnent l'exemple, jamais aussi grande que quand elle s'adresse à tous les Français ; ne soyons pas sectaires et rassemblons tous les Français.
Le second, c'est qu'il nous faut savoir durer. La gauche ne peut se contenter de pas-sages au pouvoir, pour y faire progresser la société, avant de retourner dans l'opposition.
Mes chers amis,
Oui gouverner, c'est difficile Mais renoncer, c'est indigne.
Il nous faut tenir. Tenir. Y compris face à la radicalité de certains mouvements sociaux. La radicalité en interne ou dans la société mène à une impasse. C'est le réformisme qui est en jeu. Tenir dans la durée. Nous avons encore trois ans devant nous. Trois ans pour réussir et pour continuer à gouverner. Autour du Président de la République. Autour de François HOLLANDE.
L'obsession qui doit être la nôtre, c'est d'en finir avec la gauche du « un petit tour et puis s'en va ». Durer, donc, non pas pour nous-même, mais durer pour installer durablement du mieux vivre dans le quotidien des Français.
La nouvelle étape du quinquennat, c'est aussi le sens du dialogue que je veux construire avec vous, avec la majorité, avec le Parlement. Un dialogue permanent empreint de respect, de confiance et de responsabilité.
Mais ce dialogue appelle beaucoup d'intelligence politique. Si la tradition de la Ve République, de la majorité parlementaire automatique sous menace du 49-3 n'a jamais fait partie de notre culture, celle de la reparlementarisation à outrance des institutions n'est pas tenable. Ce serait la voie ouverte à la multiplication d'initiatives minoritaires qui feraient exploser le bloc central de la majorité et qui mettrait celle-ci à la merci de toutes les manoeuvres, on connaît l'issue
L'intelligence collective doit faire vivre le dialogue permanent et l'acceptation par tous du cap fixé par le Président de la République le 14 janvier dernier. Dialogue, initiative parlementaire et stabilité politique, ce triptyque ne signifie pas non plus la répartition des tâches que certains voudraient imposer : aux uns la contestation, aux autres la charge de porter les mesures difficiles. Il doit constituer le bien commun qui permet de faire vivre une démocratie vivante et apaisée.
Je veux aussi installer dans ce monde qui va trop vite un nouveau rapport au temps. Un rapport au temps long. La réactivité c'est essentiel, mais aller chercher les fruits du temps long avec nos réformes de structures, c'est aussi cela le devoir de la gauche.
Et dans ces moment troubles, dans ces moments de doutes, je veux que nous ne perdions pas de vue notre talisman commun à nous socialistes. Ce talisman a deux faces.
La première c'est l'humain. L'humain au centre de tout ce que nous faisons. Qu'on ne s'y perde pas : le redressement économique de la France, toute notre stratégie économique ne vise qu'une seule chose. Un mieux-être pour l'humain.
La seconde, enfin, c'est notre réussite collective : nous rendre tous assez forts pour peser. Peser sur notre destin commun. Ne plus simplement subir les aléas de la mondialisation, mais en devenir les acteurs forts.
Contre le déclinisme, le cynisme, le ressentiment, je veux renouer avec l'optimisme qui doit être le fruit de la lucidité et du courage.
Voilà ce que doit être le génie de la gauche d'aujourd'hui. Une gauche en mouve-ment, qui doit servir à son tour, comme elle l'a toujours fait, le génie de la France.
Source http://www.fdesr62.com, le 25 juin 2014
Nous sommes à un moment de vérité. Pour notre parti. Pour la gauche. Pour notre pays.
Nous sortons de deux défaites électorales : à celle des municipales, a succédé une réplique toute aussi forte aux élections européennes. Comment d'ailleurs pouvait-il en être autrement moins de deux mois après un scrutin dévastateur ! A deux reprises, les Français nous ont dit clairement leur insatisfaction, leur impatience, leur colère.
Nous gouvernons, nous sommes aux responsabilités. Les Français nous ont confié ce mandat. Cette situation nous oblige à agir vite et à définir le sens de ce que nous faisons. Et c'est de cela dont je suis venu vous parler aujourd'hui, devant le Conseil national de mon parti.
Mais d'abord, un constat s'impose. Un constat lucide sur la situation de la France.
1. UN CONSTAT LUCIDE SUR LA SITUATION DE LA FRANCE
a / Notre pays n'a jamais été confronté à des crises si intenses
Jamais, notre pays n'a dû faire face à des crises d'une telle intensité.
D'abord, une crise économique et sociale.
Nous en connaissons les effets. Une croissance inexistante depuis 2008 et donc un PIB qui depuis 5 ans, a stagné. En 10 ans, nos entreprises, notre industrie n'ont cessé de perdre continuellement des parts de marchés. La conséquence : c'est le chômage de masse. Il fait mal, en particulier aux jeunes, aux seniors. Nos déficits et notre dette ont atteint des niveaux insupportables.
Les inégalités se sont accrues et beaucoup de nos compatriotes font face à la précarité. Les ménages les plus modestes ne sont plus les seuls à vivre dans l'angoisse des fins de mois. Et pour les plus fragiles, ces fins de mois commencent de plus en plus tôt. Pour les classes moyennes, et même une partie des cadres, la peur du dé-classement s'est installée.
Aujourd'hui, une bonne partie des Français n'a pas seulement le sentiment d'être des victimes de la mondialisation. Beaucoup ont aussi peur pour l'avenir de leurs enfants toujours plus diplômés mais toujours plus précaires , pour le financement de leur retraite. Ils se demandent qui va accompagner leurs parents dans la vieillesse. Et surtout, il y a ce sentiment que le pays tout entier est en train de perdre pied.
La crise, pour trop de Français, est devenue une habitude, un éternel recommencement. Malheureusement, de plus en plus souvent, un mode de vie
une crise d'identité et une crise de l'Europe
Cette crise alimente une deuxième crise, moins quantifiable, mais bien plus profonde : une crise d'identité.
Dans un monde qui change si vite, dans lequel les menaces sont multiples et permanentes, de nombreux Français s'interrogent. Les menaces, ce sont notamment les instabilités régionales et le terrorisme. Et la tragédie de Bruxelles le démontre. Un jeune djihadiste de nationalité Française a été formé en Syrie par un groupe terroriste, originaire d'Irak, et qui lutte pour s'emparer de Bagdad. Cette tragédie symbolise à elle seule la complexité et l'âpreté des défis que nous avons devant nous. Plusieurs centaines de Français sont engagés pour aller combattre en Syrie, trente y sont déjà morts. Jamais nous n'avons dû faire face à une telle menace terroriste. Chacun doit mesurer ce que cela représente comme péril pour notre propre cohésion nationale et pour L'Islam de France.
Chers amis,
Nombreux sont les Français qui doutent. Aujourd'hui, ce qui nous rassemble ne paraît plus aussi évident qu'hier. Nos institutions républicaines ne sont plus des repères. Leurs capacités à protéger, à promouvoir, à intégrer ne convainquent plus. Jusqu'à l'Ecole de la République qui est devenue trop souvent un lieu de reproduction, voire d'accroissement des inégalités. Enfin, la laïcité, ce ciment de la République, notre richesse, est mise à mal par l'irruption des communautarismes. Qui contestent nos lois, nos valeurs, nos principes.
Les fractures communautaires sont à l'oeuvre dans nos villes, dans nos quartiers. Mais il y a d'autres fractures, géographiques, culturelles. Elles divisent les territoires urbains et ruraux. Elles divisent les territoires entre ceux qui s'en sortent le mieux et ceux qui cumulent les difficultés. De la relégation spatiale, économique, civique naît le sentiment d'abandon, puis ensuite du désespoir.
Cette crise d'identité, cette insécurité culturelle et identitaire, c'est aussi la crise de l'Europe. Les Français y croient de moins en moins. L'Europe, c'est pour beaucoup une nouvelle démonstration de l'incapacité de la politique à agir.
une crise de confiance qui vient de l'incapacité à produire des résultats.
Car combien de fois les Français ont-ils déposé, avec espoir, leur bulletin dans l'urne pour que les résultats attendus ne se trouvent pas au rendez-vous ? Trop, beaucoup trop de fois ! « Le pays ne se sent pas écouté ; le pays ne se sent pas représenté ; des vies non racontées sont, de fait, des vies diminuées, niées, implicitement méprisées » : ces mots de Pierre ROSANVALLON sont toujours d'actualité.
La quatrième crise que nous traversons, c'est une crise de confiance qui vient de l'incapacité à produire des résultats.
Et cette incapacité, c'est le moteur le plus puissant de la défiance, de la perte d'autorité des pouvoirs publics. Car l'autorité repose sur le respect de la parole donnée et sur les résultats obtenus.
b / Notre pays peut donc se défaire et se donner à Marine LE PEN
Face à toutes ces crises, la France risque de se défaire. Et certains, en exploitant les peurs, les désespoirs, avancent leurs solutions. Des solutions démagogiques. Des solutions qui n'en sont pas. Ce sont les extrêmes, les populismes. Ils séduisent de plus en plus. Ils montent en puissance. Dangereusement.
Jusqu'à présent, nous vivions dans un schéma classique d'alternance. Elle intervenait entre la gauche et la droite. Mais toujours entre partis républicains.
C'est du moins la certitude que nous avions jusqu'au 21 avril 2002 Ce cataclysme qui a tétanisé la gauche. Car depuis 12 ans, avons-nous vraiment mis en oeuvre ce qui était nécessaire pour nous prémunir contre cela ?
Le 25 mai a apporté une réponse cinglante. En arrivant nettement en tête, le Front national a confirmé ce risque : la possibilité d'une alternance non plus entre des républicains, mais entre des républicains et des non-républicains. Non plus une alternance, mais une déliquescence.
Mes chers camarades,
Oui, nous pourrions basculer dans une nouvelle ère, que Jean-Christophe CAMBA-DÉLIS a qualifiée de « tripolarisation de la vie politique ». Une ère dans laquelle le risque de voir Marine LE PEN au second tour de l'élection présidentielle existe. Une ère dans laquelle un des grands partis républicains et cette fois sans que cela soit une surprise peut être absent de ce grand rendez-vous électoral. Et rien n'est fait : ce peut être la droite. Ce peut être nous. Par conséquent, une ère dans laquelle la gauche peut aussi disparaître
2. DANS CE CONTEXTE, LA GAUCHE PEUT MOURIR, ELLE DOIT DONC ÊTRE CAPABLE DE SE DÉPASSER
a / Constat : la gauche est fragilisée.
Oui, la gauche peut mourir. Elle n'a jamais été aussi faible dans l'histoire de la Ve République : moins d'un tiers des voix aux européennes.
Et ces résultats sont clairs : il n'y a pas d'alternative à gauche. Notre échec électoral ne renforce pas la gauche de la gauche
Nous devons donc tirer un enseignement pour nos débats internes : c'est de nous que devra venir la solution ! Et, bien sûr, il faut toujours des alliances. Et je salue toutes les initiatives engagées par Jean Christophe, notamment les Etats Généraux de la gauche. Certes, le Parti socialiste a vocation à être au centre du jeu, à dialoguer sérieusement avec ceux qui veulent réellement exercer le pouvoir. Mais ne nous racontons pas d'histoire Nous ne pourrons pas apporter de nouvelles solutions avec de vieilles recettes
Nous ne pouvons plus, ajourner, repousser, éviter Il faut nous confronter à la ré-alité : la gauche aujourd'hui, celle que nous incarnons, a perdu de sa force. Et cette question ne se pose pas qu'à nous Socialistes. Elle se pose à toute la gauche : aux écologistes, aux communistes, et de la gauche la plus radicale jusqu'aux Sociaux-démocrates.
Un grand penseur espagnol, ORTEGA y GASSET, a eu cette belle phrase pour parler des moments où quelque chose d'important se joue, sans que l'on puisse pour autant le définir. Il disait « on ne sait pas ce qui se passe, mais c'est justement ce qui se passe ». Or tout l'enjeu est là. Nous sentons bien que nous sommes arrivés au bout de quelque chose, au bout peut-être même d'un cycle historique pour notre parti.
Il n'est plus synonyme d'espérance, de progrès, pour les classes moyennes, les ouvriers, les employés ... Par paresse, par confort, nous avons cru détenir un droit naturel à les représenter. Aujourd'hui, ils nous rappellent que la politique ne connaît pas de certitudes. Il est bien loin, le temps où, à l'aube d'une élection législative, JAURÈS pouvait dire que « Partout, la ferveur attentive du peuple ouvrier a répondu à la dignité, à la force, à l'élévation, à la franchise de la propagande socialiste ».
Et j'ai donc du mal à imaginer que les vieilles théories ou les stratégies du passé soient les sources appropriées de construction de l'avenir. J'imagine le PS comme une force moderne, attractive et conquérante, et non pas comme une force en difficulté cherchant dans des alliances improbables des sources de renouveau.
Nous devons donc nous réinventer. Et nous réinventer dans un contexte particulier : l'exercice du pouvoir, faute de ne l'avoir fait dans l'opposition.
Et nous devons le faire dans un moment particulier : la crise de la droite, en panne de projet et de leadership. Or, c'est une loi souvent vérifiée : on se construit plus facilement en s'opposant, en contestant. Il y a donc pour nous une difficulté supplémentaire. Mais c'est après tout aussi l'essence de la gauche : ne pas être unique-ment le contraire de la droite. Mais être à l'avant, comme éclaireur, comme moteur du progrès.
L'époque est au flou généralisé dans l'offre politique : la droite est exsangue, la gauche est déboussolée. Et le seul message identifié, c'est celui de l'extrême droite.
Peut-on laisser les Français dans ce brouillard ? Avec pour seul repère les prétendues « solutions » de l'extrême droite : le repli, le rejet de l'autre, la culpabilisation systématique de l'immigré ? NON !
A nous de parler clair ! De réexpliquer aux Français quel est le cap. Quels sont les objectifs de la gauche. Et d'agir. Agir et agir maintenant. Toujours. Sans relâche ! Et c'est ma responsabilité en tant que Premier ministre de le faire. Parce que le Président de la République m'a confié cette mission. Parce que j'ai reçu la confiance de l'Assemblée nationale. Parce que je me trouve de fait dans une position centrale, au coeur de la majorité. Et parce que je suis des vôtres, et ce depuis aussi loin que remonte mon engagement politique.
b / la gauche doit s'adapter
Ne laissons pas le monde et la France changer sans nous. Sortons du confort des idées connues, des mots qui ne fâchent pas, et des dogmes !
En vérité, mes chers camarades, beaucoup de slogans peinent à cerner les enjeux du monde actuel. Un monde en pleine recomposition.
L'Occident a perdu sa position dominante. Et il s'interroge sur ce qu'il sera demain. Les puissances émergentes la Chine, l'Inde, le Brésil font progressivement jeu égal avec nous. Dans 20 ans, leur force cumulée dépassera la somme de l'Europe et des États-Unis.
Cette recomposition s'accompagne d'une ouverture sans précédent des marchés, où tout entre désormais en concurrence : les entreprises, les Etats, les systèmes fiscaux et sociaux et bien évidemment les travailleurs, les individus, les salariés. C'est une source de perturbations et d'inquiétudes. Mais il y a aussi de formidables opportunités, y compris pour notre pays.
La gauche ne sait pas toujours comprendre ce monde qui change et en faire le récit. Or, elle le doit à ses militants et à ses électeurs.
Face à ces nouveaux enjeux, le rôle de l'État dans l'économie est profondément transformé. Notre force, notre atout pour l'avenir, c'est l'innovation. C'est pour cela que l'Etat doit investir dans les secteurs à fort potentiel de croissance. Et faire en sorte que la fiscalité ne décourage pas les entreprises qui innovent et qui exportent.
Le temps où l'on pouvait accroître la dépense publique, et combattre les déficits par la hausse de l'impôt, est révolu. Cette méthode est devenue un handicap. Elle empêche l'État d'investir dans les secteurs stratégiques et étouffe ses marges de manoeuvres. Et nous voyons bien que nos propres électeurs n'en peuvent plus de la pression fiscale. C'est pourquoi nous avons agi sur la feuille d'impôt, en baissant, dès septembre prochain, l'impôt sur le revenu de 3,7 millions de foyers. Et en faisant sortir 1,9 million de l'impôt. Et nous devrons aller encore plus loin dans le cadre de la prochaine loi de finances.
La question de l'État, elle reste fondamentale. Je crois au rôle de l'Etat. Ce n'est pas un concept dépassé. Il demeure le levier majeur pour construire l'avenir, à condition qu'il sache s'adapter, se réformer. C'est la raison pour laquelle je crois que le travail sur l'avenir de l'État doit être au coeur des réflexions des socialistes.
3. L'ACTION DU GOUVERNEMENT
a / un réformisme assumé
Le gouvernement s'inscrit pleinement dans cette logique. Avec détermination. Avec constance. Avec ambition.
Je l'ai dit dès les premiers jours, dès mon discours de politique générale : nous devons réduire la dépense publique. Il existe un large consensus sur ce point, en témoigne la confiance qui m'a été accordée. Si nous voulons d'un État efficace et fort nous devons impérativement redéfinir son périmètre et réorienter ses missions. Réduire la dépense publique, ce n'est pas affaiblir l'Etat. Ce n'est pas le montant de la dépense publique qui fait son efficacité.
Le deuxième axe c'est permettre aux entreprises ces organisations d'hommes et de femmes, de travailleurs, de salariés de restaurer leur compétitivité. Sans compétitivité, pas d'investissements et pas de création d'emplois. Je pense tout particulièrement aux petites et moyennes entreprises qui sont le coeur de notre tissu économique, et qui ont besoin de soutien. Réduire les charges, ce n'est pas faire des cadeaux aux chefs d'entreprises qui luttent pour leur survie. Réduire les charges des entreprises, c'est les aider à affronter une compétition mondiale féroce.
Certains disent : vous menez une politique de l'offre ? Je ne suis pas certain que ce questionnement passionnent nos concitoyens Mais j'y réponds : non seulement je la mène, mais je l'assume. Et puis, en quoi une telle politique serait-elle une poli-tique de droite ? La politique de l'offre n'est pas un choix idéologique. Elle est encore moins l'expression d'une politique tournant le dos à la demande. Car nous agissons aussi pour le pouvoir d'achat. En baissant les impôts, je l'ai dit. Mais en agissant aussi sur les salaires de Français aux revenus les plus modestes, ceux qui gagnent autour du SMIC. Dès le 1er janvier 2015, ils bénéficieront d'une augmentation de salaire de 500 net par an, soit la moitié d'un treizième mois de salaire.
J'insiste : la politique de l'offre, ce n'est pas un choix idéologique, c'est un choix stratégique guidé par la transformation des règles du jeu mondial que je viens d'évoquer.
Alors me direz-vous : sommes-nous sûrs que cette politique ramènera la croissance, les emplois et la confiance ?
Je n'ai que cette certitude : prendre un autre chemin nous conduirait à l'échec. C'est pourquoi je suis très déterminé à quelques jours des votes importants que nous avons au Parlement. C'est notre crédibilité qui est en jeu.
Alors oui, cette stratégie a sa part d'aléa. Mais c'est la nature même de la politique que de faire des choix. De faire les bons choix, au bon moment. Faire des choix, c'est agir, c'est avancer. Et les choix que fait ce gouvernement, c'est celui des réformes structurelles et ambitieuses qui seules nous sortiront de l'ornière. Qui seules nous permettront d'échapper à l'austérité.
Il nous faut davantage de réformes pour nous prémunir contre l'austérité. Voilà un axe de combat sur lequel tous les socialistes doivent se retrouver.
Le redressement de nos comptes publics, le Pacte de responsabilité et de solidarité, la réforme ambitieuse de l'État, couplée à celles de nos collectivités territoriales, avec des régions plus fortes et des intercommunalités consolidées : c'est notre dé-marche.
Et il y faut de la constance. Car la politique en zigzag, par à-coups, mine la confiance chez nos concitoyens. Il nous faut aussi du temps. J'entends l'impatience. Parfois même dans nos rangs et dans la société. Mais le temps de la politique, le temps de l'économie, le temps du redressement ce n'est pas le temps des médias.
Des réformes, nous en avons portées depuis deux ans. Nous en portons chaque jour au Parlement. Je pense aux projets de loi sur l'Egalité femmes-hommes, sur l'économie sociale et solidaire, qui seront adoptés prochainement. Et parce que nous sommes de gauche et que nous avons le souci d'améliorer le quotidien des Français, nous portons aussi ces grandes lois sur la Santé et sur la transition énergétique. Une transition énergétique qui ne signifie pas la perte de notre capacité dans le domaine nucléaire.
Nous devons rendre notre système fiscal plus stable, plus prévisible, plus favorable à l'innovation, c'est aussi une priorité d'action de mon gouvernement. Ce n'est que comme cela que nous parviendrons à nous montrer encore plus exigeants vis-à-vis des entreprises en termes de contreparties.
Il nous faudra aussi explorer d'autres chemins, sans tabou.
Je pense à la baisse de la fiscalité des ménages et notamment des classes moyennes. Car je l'ai dit, les impôts sont trop lourds. Mais nous ne pourrons nous engager dans cette voie que si nous avons réduit la dépense publique.
Je pense aussi au desserrement de la contrainte budgétaire européenne, car la réduction des déficits n'a jamais été, et ne sera jamais, une fin en soi. Mais cette option n'est envisageable que si nous nous montrons crédibles sur notre effort budgétaire et nos réformes de structures.
L'Europe, elle doit être à l'écoute. Et ne boudons pas notre plaisir : après l'avoir de-mandé pendant longtemps, la BCE a décidé de baisser son taux directeur. L'Euro est trop cher, je l'ai dit dès mon discours de politique générale. Et les choses sont en train de changer. La présidence italienne du Conseil de l'Union européenne, avec Matteo RENZI, c'est aussi l'occasion de faire progresser ce pourquoi nous nous bat-tons : une Europe au service de la croissance, au service de l'emploi.
b / la république intransigeante
Mes chers camarades,
Le redressement de la France passe par l'économie, par le réformisme assumé. Mais nous devons y associer une conception intransigeante de la République. La République, c'est la solution. Face aux doutes, aux incertitudes, aux difficultés. La République, c'est le socle premier de la confiance.
Et des priorités ont été arrêtées en matière de justice, de sécurité, d'éducation, d'école. Cette école que nous devons faire évoluer dans le seul intérêt des enfants. Une école dans laquelle nous devons investir, et que nous devons aussi défendre quand elle est attaquée. Car elle au coeur de la promesse républicaine. Et donc au coeur de la gauche.
La promesse républicaine, c'est la lutte contre toutes les formes d'inégalités et d'injustices. Celles qui enferment les individus, les empêchent de s'élever et de trouver leur juste place dans la société. Car quelle plus belle ambition pour la gauche que de permettre à chacun de devenir pleinement ce qu'il est ? Et nous avons une responsabilité pour redonner de l'espoir à notre jeunesse. Et notamment celle de nos quartiers qui, souvent, parce qu'elle subit les discriminations, se dit que la France n'a rien à lui apporter. Et nous devons lutter de toute notre force contre cela.
Mais en disant aussi que la réalisation individuelle, elle doit se faire que dans le cadre de la Nation, de ses lois, de ses principes. Une Nation que nous, la gauche, défendons depuis toujours. Car quelle belle idée que celle d'individus ayant choisi de mettre en commun leurs destins, pour construire ensemble un avenir meilleur. Nous continuons de refuser les communautarismes, ces dérives qui enferment les femmes et les hommes dans des identités historiques, religieuses, ou des appartenances géographiques. Et c'est pour cela que nous sommes des défenseurs acharnés de la laïcité. Car là aussi, le combat doit être mené. Un combat que la gauche a trop longtemps abandonné. Et nous l'avons aussi payé à l'occasion des dernières municipales.
Alors oui, nous devons reprendre le combat des valeurs ; celles qui sont essentielles pour tous les Français : la justice et l'égalité, le mérite et le travail, le courage et la fraternité.
La gauche doit défendre la République, ne pas rougir d'employer les mots de Nation et de patrie.
C'est la gauche, qui avec le Front Populaire a instauré les congés payés, la réduction du temps de travail et les conventions collectives. C'est la gauche qui a convergé pour poser les bases du Conseil national de la résistance. C'est la gauche, qui a su se regrouper pour fonder le programme commun. C'est la gauche, enfin, qui a su, ces dernières années, porter les grandes réformes dont notre pays avait tant besoin : de la gauche plurielle du gouvernement de Lionel JOSPIN, aux engagements de François HOLLANDE le mariage pour tous, le non-cumul des mandats, la ré-forme pénale ! C'est à nous de porter cet héritage, d'en être fiers, et d'en faire notre boussole.
Deux enseignements doivent nous guider. Le premier, c'est que la gauche n'est jamais aussi forte que lorsque les socialistes sont unis et donnent l'exemple, jamais aussi grande que quand elle s'adresse à tous les Français ; ne soyons pas sectaires et rassemblons tous les Français.
Le second, c'est qu'il nous faut savoir durer. La gauche ne peut se contenter de pas-sages au pouvoir, pour y faire progresser la société, avant de retourner dans l'opposition.
Mes chers amis,
Oui gouverner, c'est difficile Mais renoncer, c'est indigne.
Il nous faut tenir. Tenir. Y compris face à la radicalité de certains mouvements sociaux. La radicalité en interne ou dans la société mène à une impasse. C'est le réformisme qui est en jeu. Tenir dans la durée. Nous avons encore trois ans devant nous. Trois ans pour réussir et pour continuer à gouverner. Autour du Président de la République. Autour de François HOLLANDE.
L'obsession qui doit être la nôtre, c'est d'en finir avec la gauche du « un petit tour et puis s'en va ». Durer, donc, non pas pour nous-même, mais durer pour installer durablement du mieux vivre dans le quotidien des Français.
La nouvelle étape du quinquennat, c'est aussi le sens du dialogue que je veux construire avec vous, avec la majorité, avec le Parlement. Un dialogue permanent empreint de respect, de confiance et de responsabilité.
Mais ce dialogue appelle beaucoup d'intelligence politique. Si la tradition de la Ve République, de la majorité parlementaire automatique sous menace du 49-3 n'a jamais fait partie de notre culture, celle de la reparlementarisation à outrance des institutions n'est pas tenable. Ce serait la voie ouverte à la multiplication d'initiatives minoritaires qui feraient exploser le bloc central de la majorité et qui mettrait celle-ci à la merci de toutes les manoeuvres, on connaît l'issue
L'intelligence collective doit faire vivre le dialogue permanent et l'acceptation par tous du cap fixé par le Président de la République le 14 janvier dernier. Dialogue, initiative parlementaire et stabilité politique, ce triptyque ne signifie pas non plus la répartition des tâches que certains voudraient imposer : aux uns la contestation, aux autres la charge de porter les mesures difficiles. Il doit constituer le bien commun qui permet de faire vivre une démocratie vivante et apaisée.
Je veux aussi installer dans ce monde qui va trop vite un nouveau rapport au temps. Un rapport au temps long. La réactivité c'est essentiel, mais aller chercher les fruits du temps long avec nos réformes de structures, c'est aussi cela le devoir de la gauche.
Et dans ces moment troubles, dans ces moments de doutes, je veux que nous ne perdions pas de vue notre talisman commun à nous socialistes. Ce talisman a deux faces.
La première c'est l'humain. L'humain au centre de tout ce que nous faisons. Qu'on ne s'y perde pas : le redressement économique de la France, toute notre stratégie économique ne vise qu'une seule chose. Un mieux-être pour l'humain.
La seconde, enfin, c'est notre réussite collective : nous rendre tous assez forts pour peser. Peser sur notre destin commun. Ne plus simplement subir les aléas de la mondialisation, mais en devenir les acteurs forts.
Contre le déclinisme, le cynisme, le ressentiment, je veux renouer avec l'optimisme qui doit être le fruit de la lucidité et du courage.
Voilà ce que doit être le génie de la gauche d'aujourd'hui. Une gauche en mouve-ment, qui doit servir à son tour, comme elle l'a toujours fait, le génie de la France.
Source http://www.fdesr62.com, le 25 juin 2014