Texte intégral
- Israël - Territoires palestiniens -
Je pense que vous me recevez dans un moment difficile. J'aurai l'occasion dans quelques instants de rencontrer le Premier ministre de Jordanie, et c'est important que je puisse m'entretenir avec Nasser Joudeh qui est à la fois un collègue, un ami, avec lequel nous travaillons chaque semaine.
L'objectif de mon déplacement au Proche-Orient est de contribuer aux efforts qui sont entrepris pour casser la spirale de la violence et pour protéger le plus possible les populations civiles. Le bilan humain est déjà lourd, et il faut éviter qu'il ne s'alourdisse encore. Je répète ici à Amman que notre priorité absolue doit être le cessez-le-feu. Je me suis rendu d'abord en Égypte où j'ai rencontré notre homologue, M Choukri, et le président égyptien. L'Égypte a lancé une initiative, soutenue par la Ligue arabe et la Jordanie, et également par la France.
Au cours de ces journées, j'ai multiplié mes contacts avec nos partenaires et nos amis, pour qu'ils exercent leur influence dans un sens convergent. Je vais plaider également ce soir auprès du Premier ministre israélien, M. Netanyahou, pour la mise en œuvre de ce cessez-le-feu dont Israël a accepté le principe mais que le Hamas a rejeté.
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S'agissant du conflit israélo- palestinien, l'Europe, et singulièrement la France, ont leur rôle à jouer et nous pouvons également contribuer à l'établissement d'une paix durable. Mme Mogherini était ici il y a peu de temps ; je l'ai rencontrée de nouveau aujourd'hui en Égypte. D'autres amis européens étaient là dernièrement, notamment nos amis allemands. Il est possible que ce que l'on appelle la mission des superviseurs européens, Eubam, à Rafah puisse, le moment venu, jouer un rôle utile pour permettre, en liaison avec l'autorité palestinienne, de trouver des chemins pour faciliter les accès.
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Q - Comment peut-on vouloir obtenir un cessez-le-feu tout en refusant de parler au Hamas qui contrôle la situation sur le terrain ?
R - Il y a l'initiative égyptienne, je le répète, que nous soutenons. Que dit-elle essentiellement ? Priorité absolue au cessez-le-feu. Cette initiative a été acceptée par l'une des parties, pas encore par l'autre, et elle a été très très largement soutenue et endossée, à la fois par les pays arabes et puis par la communauté internationale. Il s'agit donc maintenant de faire en sorte que la partie qui ne l'a pas encore acceptée puisse l'accepter pour qu'on évite des pertes de vies humaines. Toute une série de contacts ont lieu pour permettre cette acceptation par les uns et par les autres.
L'initiative, comme le président Al-Sissi et le ministre égyptien Choukri me l'ont dit ce matin, reste sur la table. L'objectif de cette initiative, c'est le cessez-le-feu, c'est-à-dire arrêter de tirer, arrêter les morts et faire en sorte que l'on revienne à une situation plus pacifique où on peut discuter de tout. Sur cette initiative, la Jordanie fait sa part, la France fait sa part, d'autres pays font en sorte qu'elle puisse voir le jour.
Q - (Sur la condamnation du Hamas par le Conseil de sécurité des Nations unies)
R - Je pense que la position de la France, comme d'ailleurs la position de nombreux pays, est assez simple.
Bien évidemment, Israël a droit à la sécurité, comme tout État, et on ne peut donc pas admettre l'idée qu'un État, en l'occurrence Israël, reçoive des roquettes sur son sol ; c'est un des aspects. L'autre aspect, très important, c'est que les Palestiniens doivent pouvoir disposer d'un État. Cela fait très longtemps que la France, avec d'autres pays, le dit.
Par ailleurs, nous constatons, de façon absolument tragique, que les opérations qui ont été engagées ont abouties à la mort de nettement plus de 200 victimes palestiniennes. C'est la raison pour laquelle nous avons approuvé le cessez-le-feu. Le cessez-le-feu cela veut dire quoi ? Cela veut dire que, je vais être très concret - souvent on finit par oublier le sens du mot - qu'il n'y aura plus de roquettes envoyées par le Hamas sur Israël ; cela veut dire qu'Israël cessera ses opérations en direction de Gaza, donc il n'y aura plus de victimes palestiniennes.
Voilà, je pense qu'il faut donner aux mots leur véritable sens. Le rôle d'un pays comme la France, qui est un pays de paix et de sécurité, qui a des relations depuis longtemps, à la fois avec les Palestiniens et à la fois avec Israël, est d'encourager un cessez-le-feu.
Q - Et la manifestation à Paris ? Son interdiction signifie-t-elle que la France soutient l'agression israélienne ?
R - Non, l'interprétation n'est pas celle-là, et je vous remercie beaucoup de poser cette question. En France, le droit de manifester pacifiquement est évidemment un droit extrêmement important. La France est, chacun le sait, une terre de liberté, et il n'est pas question de porter atteinte à ce droit. Simplement, la tradition de la France, pas seulement sa tradition, mais son système juridique, c'est que les manifestations ne doivent pas avoir comme conséquence de pouvoir porter atteinte à l'ordre public, ne peuvent pas avoir des conséquences dangereuses sur la sécurité.
Or, vous le savez probablement, très récemment, il y a eu des manifestations, que l'on pourrait appeler pro-palestiniennes, pour être simple, qui ont dégénéré et qui se sont portées vers des synagogues avec des affrontements violents. Donc le ministre de l'intérieur français, connaissant tous les paramètres, a estimé que la manifestation qui était prévue risquait de dégénérer et d'avoir des conséquences sur l'ordre public et sur la sécurité. C'est la raison pour laquelle, en conformité avec le droit, il n'a pas autorisé la manifestation, ce qui est quelque chose de tout à fait exceptionnel. Alors bien sûr, cette décision prise par le ministre de l'intérieur est susceptible de faire l'objet d'un recours devant les tribunaux.
Qu'on me comprenne bien, je vais être encore plus simple. La liberté de penser des choses différentes est évidemment entière en France, qui est la terre des libertés, mais nous ne voulons pas que cela ait des conséquences négatives sur la sécurité de l'ensemble du territoire, voilà. Mais cela ne signifie en aucun cas, bien sûr, que le gouvernement français prendrait position, par exemple, contre les Palestiniens. J'ai moi-même rencontré hier Mahmoud Abbas, qui est quelqu'un que nous connaissons depuis longtemps et pour lequel nous avons la plus grande estime. Donc il ne faut pas confondre les plans. Cette décision qui a été prise vise la sécurité de la population, et non pas les idées des uns et des autres qui sont totalement libres.
- Jordanie -
Monsieur le Ministre, Cher Ami Nasser, merci de votre amitié et de votre accueil.
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Je tiens à saluer la Jordanie, comme un acteur très important des démarches en cours [conflit israélo-palestinien]. Je salue son rôle constructif auprès de toutes les parties, et je salue aussi l'esprit de solidarité dont fait preuve la Jordanie puisque nous savons que vous accueillez beaucoup de blessés dans vos hôpitaux, aussi bien à Gaza qu'à Amman.
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Nasser Joudeh et moi avons, comme il l'a indiqué, également évoqué les crises en Syrie, en Irak et en Libye, qui menacent la stabilité de la région et pèsent très fortement sur tous nos pays, y compris bien sûr sur la Jordanie.
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Voilà les quelques mots que je voulais prononcer ici auprès de mon ami Nasser Joudeh, en rappelant l'excellence des relations entre la Jordanie et la France sur tous les plans. Vous avez bien voulu souligner que la France était l'un des grands investisseurs sur le plan économique, ici en Jordanie.
Nous le faisons parce que nous pensons que la Jordanie est un pays d'avenir, qui doit être appuyé. Nous le faisons aussi, parce que dans le passé il y a eu traditionnellement de très bonnes relations, des relations équilibrées, au profit des deux pays, c'est la loi de l'économie. Nous souhaitons qu'il en soit de même dans le futur, et que, sur le plan économique, comme sur le plan éducatif, culturel, scientifique, les relations entre nos deux pays puissent se développer. C'est l'esprit dans lequel nous travaillons, chaque semaine, avec Nasser Joudeh, que je remercie une nouvelle fois de son accueil
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- Irak -
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S'agissant de l'Irak, je veux souligner à nouveau aujourd'hui, après l'élection du président du Parlement, qu'il y a urgence à ce que les deux autres présidences soient nommées et je pense que le peuple irakien doit être uni pour faire face à la menace grave que représente l'EIIL, mais aussi pour la stabilité de la région toute entière.
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source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 juillet 2014