Texte intégral
Monsieur le Commissaire,
Monsieur le Gouverneur,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux d'introduire vos travaux sur la mise en oeuvre de l'euro dans le cadre de ce forum international organisé par Les Echos, qui en est à sa deuxième édition. Je souhaite le faire en vous indiquant brièvement la perception qui est la mienne aujourd'hui de cette entreprise exceptionnelle cinq mois après le lancement réussi de l'euro sur les marchés, et deux ans et demi avant que l'euro n'entre dans sa phase matérielle ultime avec l'introduction des pièces et des billets.
1- Tout d'abord, je crois que nul ne conteste aujourd'hui que l'euro s'est imposé sur les marchés internationaux des capitaux.
Certes, nous avions anticipé ce succès car le désir de stabilité, le souhait aussi de diversifier les portefeuilles en devises, ne pouvaient que conduire à une demande forte d'euros chez les investisseurs internationaux.
Mais nous pouvions penser que cette internationalisation de l'euro prendrait un peu de temps, avec une montée en puissance assez progressive.
Tel n'a pas été le cas, puisque l'euro fait jeu égal avec le dollar sur le marché mondial des émissions obligataires. Depuis le début de l'année, 45 % des émissions ont été faites en dollars et 45 % en euros, alors que le total des émissions obligataires libellées en devises européennes en 1998 ne représentait que 36 %.
Nous avons là la première contribution concrète de l'euro à l'affirmation de l'Europe-puissance. Comme le dit le slogan des campagnes de communication sur l'euro menées par le gouvernement et la Commission européenne, l'euro fait la force, puisqu'il pèse plus - et même nettement plus - que la somme des onze devises préexistantes.
En même temps, certains observateurs, la presse économique, se sont fait l'écho d'inquiétudes relatives au glissement du taux de change euro/dollar depuis le début de l'année.
Nous en connaissons les raisons : le ralentissement conjoncturel au premier semestre en Europe, peut-être aussi les inquiétudes suscitées par la crise du Kosovo.
Sur cette question du change international, je ferai simplement trois brèves remarques :
- Ce glissement de quelques pourcents reste dans des limites normales, sinon la Banque centrale européenne serait intervenue ; si elle ne l'a pas fait, c'est qu'elle considère que ce glissement ne menace pas la stabilité des prix, ainsi que l'a dit son président, M. Wim Duisenberg.
- L'intérêt des investissements, des opérateurs en général, pour la parité euro/dollar atteste aussi que cette variable devient un élément de référence essentiel pour l'activité des entreprises. Nous devons donc continuer à affirmer avec force notre refus de toute forme de benign neglect réciproque, et assumer avec les Etats-Unis et le Japon nos responsabilités respectives dans le domaine de la coopération monétaire internationale, conformément aux recommandations du mémorandum remis par la France à ses partenaires de l'Union européenne en septembre dernier, à l'initiative de Dominique Strauss-Kahn.
- Enfin, il est clair que cette nouvelle architecture financière internationale verra le jour d'autant plus rapidement que nous pourrons nous mettre autour d'une table avec les Américains pour en discuter, ce qui suppose maintenant de régler rapidement la question de la représentation extérieure de la zone euro.
2 - D'autres inquiétudes se sont fait jour récemment au sujet du fonctionnement interne de la zone euro, et c'est le deuxième sujet que je voudrais évoquer devant vous ce matin.
Nous connaissons actuellement, c'est vrai, des écarts de croissance significatifs au sein même de la zone euro.
Certains pays croissent à un rythme soutenu. C'est le cas de l'Espagne et du Portugal, et cela me paraît un phénomène normal dans la mesure où ces pays n'ont pas achevé leur rattrapage économique.
D'autres pays, situés au coeur de l'Europe et au poids économique prépondérant, donnent des signes de ralentissement assez net de leur activité.
C'est le cas de l'Allemagne, probablement moins bien insérée dans l'échange international compte tenu du vieillissement de ses spécialisations industrielles traditionnelles.
C'est le cas de l'Italie surtout, qui paye sans doute aujourd'hui la sévérité de l'ajustement budgétaire qu'elle a dû mettre en oeuvre pour faire partie du premier train de l'euro.
La conséquence de cette situation, c'est que la France apparaît de fait aujourd'hui comme un leader de la croissance en Europe, après une année 1998 exceptionnelle à 3,2 %, et une année 1999 qui devrait se solder au-dessus de 2,5 % selon les plus récentes estimations de printemps.
J'emploie à dessein ce terme anglo-saxon de leader, pour ne pas utiliser le terme de locomotive qui avait cours jusque dans les années quatre-vingt pour parler de l'Allemagne. La France n'a pas vocation à tirer durablement la croissance en Europe. Non, il nous faut, au contraire, apprendre à gérer cette diversité de situations de manière à trouver au niveau de la zone euro le policy-mix optimal, c'est-à-dire celui qui apparaît, en définitive, le mieux adapté aux besoins de la zone dans son ensemble.
La conjoncture présente montre à l'envi, pour ceux qui pouvaient en douter encore, la nécessité impérative d'une véritable coordination des politiques économiques en Europe.
Grâce à la pugnacité de Dominique Strauss-Kahn, nous avons pu obtenir en décembre 1997 à Luxembourg une résolution créant une enceinte spécifique pour mettre en place cette coordination.
Cette enceinte, c'est l'euro-11, qui s'est réuni 8 fois depuis sa création, et a su faire reconnaître toute sa place dans le paysage des instances communautaires. L'euro-11 a su engager un dialogue constructif avec la Banque centrale européenne. Je note ainsi que Wim Duisenberg a participé à une session sur deux de l'euro-11. L'euro-11 a su aussi mettre en place un système de surveillance rapide des conjonctures nationales.
Ce sont de premiers résultats très substantiels, qu'il va falloir cependant amplifier encore dans les mois qui viennent.
Sur le fond, il doit être clair que la coordination des politiques économiques ne se limite pas au réglage conjoncturel.
Elle doit se donner une ambition beaucoup plus vaste, visant à promouvoir au niveau européen un modèle de croissance à la fois plus soutenue, durable, équilibrée et riche en emplois.
C'est tout l'enjeu du chantier que la présidence allemande a ouvert, en lançant les premières réflexions sur le Pacte européen de croissance et d'emploi dont nous allons parler dans quelques jours au Conseil européen de Cologne.
Le soutien à l'innovation, le développement des nouveaux emplois dans les nouveaux services, l'accélération de l'harmonisation fiscale, le renforcement de la logique de bench-marking sur l'emploi, le développement du dialogue social au niveau européen sont autant d'éléments que nous souhaitons mettre au centre des réflexions sur le Pacte européen pour l'emploi. Nous aurons dès demain des échanges approfondis avec le gouvernement allemand à Toulouse dans le cadre d'un Sommet bilatéral largement consacré à la préparation de ce Pacte européen pour l'emploi.
Quant à la forme, il faut probablement veiller à ce que la coordination des politiques économiques soit plus visible, ce qui suppose peut-être de donner une plus grande publicité aux travaux de l'euro-11 et aussi d'améliorer la transparence dans les rapports que la Banque centrale européenne entretient avec l'euro-11, dans le strict respect des prérogatives de chacun, cela va de soi.
Il nous faudra aussi réfléchir assez rapidement à la manière de préserver le rôle essentiel de l'euro-11 dans le contexte de la future réforme institutionnelle que, nous souhaitons clore assez rapidement sous présidence française au second semestre de l'an 2000, en reprenant les "left-over" d'Amsterdam pour combler les lacunes du Traité d'Amsterdam, sur lesquelles je me suis exprimé à de nombreuses reprises : réforme du fonctionnement de la Commission, repondération des voix au Conseil et extension du vote à la majorité qualifiée.
3- J'en termine maintenant par des préoccupations plus concrètes relatives à l'euro pratique.
Le gouvernement n'a pas ménagé ses efforts de communication sur le plan de passage à l'euro, comme vous avez pu vous en rendre compte dans les fonctions qui sont les vôtres et, tout simplement aussi, comme simples citoyens.
Avec Dominique Strauss-Kahn et Yves-Thibault de Silguy, j'avais lancé en novembre dernier la deuxième grande campagne de communication sur l'euro. Celle-ci a été un succès incontestablement puisque, selon les enquêtes dont je dispose, 80 % des Français estiment que l'euro est une bonne chose pour leur avenir et 75 % des Français s'estiment bien informés.
Pour autant, il ne faut pas relâcher nos efforts, avec cette difficulté très particulière qui est de communiquer sur une période longue sur un objet qui n'existe pas encore matériellement pour le grand public.
Notre objectif est de faire en sorte que, d'ici fin 2001, chacun s'habitue à penser en euros, plus qu'à payer en euros.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous nous félicitons des résultats très encourageants de la pratique du double affichage des prix, notamment dans la grande distribution qui aura un rôle stratégique à jouer pour acclimater progressivement les esprits à l'euro.
Pour les entreprises, l'objectif doit être plus ambitieux.
A l'évidence, elles ont intérêt à basculer rapidement dans l'euro. Un passage tardif, dans le courant de l'année 2001 par exemple, entraînera inévitablement des surcoûts liés à l'urgence, en même temps que des risques d'échec aux conséquences financières et commerciales très dommageables.
Dans la plupart des cas, un couplage avec la préparation du passage à l'an 2000 constituera un plan de marche intelligent et prudent à la fois. Les grandes entreprises en sont d'ores et déjà convaincues fort heureusement. Il reste sans doute un effort spécifique de communication à mener en direction des PME.
*
Je souhaite maintenant conclure.
Vous avez à juste titre placé votre dernière table ronde sous le signe du changement. Je suis profondément convaincu que l'euro est un vecteur de changement. Sans méconnaître l'ampleur du travail qui reste à accomplir, vous comprendrez que le responsable politique que je suis se tourne maintenant vers l'Europe après l'euro, et évoque en quelques mots la construction de l'Europe politique, notre prochain grand chantier.
Pour relever ce défi, les acquis de l'euro nous seront précieux :
- D'abord parce que l'euro confortera l'influence de l'Europe sur la scène mondiale ;
- Ensuite parce que l'euro représente un changement d'échelle dans notre volonté d'ériger l'Europe en un ensemble économique cohérent, en partie à l'abri des turbulences mondiales, et d'affirmer la validité d'un certain modèle européen alliant compétitivité de nos entreprises et progrès social.
La réalisation de l'Union économique et monétaire a été de bout en bout un processus éminemment politique. Elle nous montre le sens des progrès à accomplir demain pour doter l'Europe d'une dimension politique qui lui permettra alors d'exister dans toute sa plénitude sur la scène internationale. C'est le grand dessein auquel nous devons nous atteler dans les années qui viennent, en lui souhaitant le même succès qu'à l'euro.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 31 mai 1999)
Monsieur le Gouverneur,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux d'introduire vos travaux sur la mise en oeuvre de l'euro dans le cadre de ce forum international organisé par Les Echos, qui en est à sa deuxième édition. Je souhaite le faire en vous indiquant brièvement la perception qui est la mienne aujourd'hui de cette entreprise exceptionnelle cinq mois après le lancement réussi de l'euro sur les marchés, et deux ans et demi avant que l'euro n'entre dans sa phase matérielle ultime avec l'introduction des pièces et des billets.
1- Tout d'abord, je crois que nul ne conteste aujourd'hui que l'euro s'est imposé sur les marchés internationaux des capitaux.
Certes, nous avions anticipé ce succès car le désir de stabilité, le souhait aussi de diversifier les portefeuilles en devises, ne pouvaient que conduire à une demande forte d'euros chez les investisseurs internationaux.
Mais nous pouvions penser que cette internationalisation de l'euro prendrait un peu de temps, avec une montée en puissance assez progressive.
Tel n'a pas été le cas, puisque l'euro fait jeu égal avec le dollar sur le marché mondial des émissions obligataires. Depuis le début de l'année, 45 % des émissions ont été faites en dollars et 45 % en euros, alors que le total des émissions obligataires libellées en devises européennes en 1998 ne représentait que 36 %.
Nous avons là la première contribution concrète de l'euro à l'affirmation de l'Europe-puissance. Comme le dit le slogan des campagnes de communication sur l'euro menées par le gouvernement et la Commission européenne, l'euro fait la force, puisqu'il pèse plus - et même nettement plus - que la somme des onze devises préexistantes.
En même temps, certains observateurs, la presse économique, se sont fait l'écho d'inquiétudes relatives au glissement du taux de change euro/dollar depuis le début de l'année.
Nous en connaissons les raisons : le ralentissement conjoncturel au premier semestre en Europe, peut-être aussi les inquiétudes suscitées par la crise du Kosovo.
Sur cette question du change international, je ferai simplement trois brèves remarques :
- Ce glissement de quelques pourcents reste dans des limites normales, sinon la Banque centrale européenne serait intervenue ; si elle ne l'a pas fait, c'est qu'elle considère que ce glissement ne menace pas la stabilité des prix, ainsi que l'a dit son président, M. Wim Duisenberg.
- L'intérêt des investissements, des opérateurs en général, pour la parité euro/dollar atteste aussi que cette variable devient un élément de référence essentiel pour l'activité des entreprises. Nous devons donc continuer à affirmer avec force notre refus de toute forme de benign neglect réciproque, et assumer avec les Etats-Unis et le Japon nos responsabilités respectives dans le domaine de la coopération monétaire internationale, conformément aux recommandations du mémorandum remis par la France à ses partenaires de l'Union européenne en septembre dernier, à l'initiative de Dominique Strauss-Kahn.
- Enfin, il est clair que cette nouvelle architecture financière internationale verra le jour d'autant plus rapidement que nous pourrons nous mettre autour d'une table avec les Américains pour en discuter, ce qui suppose maintenant de régler rapidement la question de la représentation extérieure de la zone euro.
2 - D'autres inquiétudes se sont fait jour récemment au sujet du fonctionnement interne de la zone euro, et c'est le deuxième sujet que je voudrais évoquer devant vous ce matin.
Nous connaissons actuellement, c'est vrai, des écarts de croissance significatifs au sein même de la zone euro.
Certains pays croissent à un rythme soutenu. C'est le cas de l'Espagne et du Portugal, et cela me paraît un phénomène normal dans la mesure où ces pays n'ont pas achevé leur rattrapage économique.
D'autres pays, situés au coeur de l'Europe et au poids économique prépondérant, donnent des signes de ralentissement assez net de leur activité.
C'est le cas de l'Allemagne, probablement moins bien insérée dans l'échange international compte tenu du vieillissement de ses spécialisations industrielles traditionnelles.
C'est le cas de l'Italie surtout, qui paye sans doute aujourd'hui la sévérité de l'ajustement budgétaire qu'elle a dû mettre en oeuvre pour faire partie du premier train de l'euro.
La conséquence de cette situation, c'est que la France apparaît de fait aujourd'hui comme un leader de la croissance en Europe, après une année 1998 exceptionnelle à 3,2 %, et une année 1999 qui devrait se solder au-dessus de 2,5 % selon les plus récentes estimations de printemps.
J'emploie à dessein ce terme anglo-saxon de leader, pour ne pas utiliser le terme de locomotive qui avait cours jusque dans les années quatre-vingt pour parler de l'Allemagne. La France n'a pas vocation à tirer durablement la croissance en Europe. Non, il nous faut, au contraire, apprendre à gérer cette diversité de situations de manière à trouver au niveau de la zone euro le policy-mix optimal, c'est-à-dire celui qui apparaît, en définitive, le mieux adapté aux besoins de la zone dans son ensemble.
La conjoncture présente montre à l'envi, pour ceux qui pouvaient en douter encore, la nécessité impérative d'une véritable coordination des politiques économiques en Europe.
Grâce à la pugnacité de Dominique Strauss-Kahn, nous avons pu obtenir en décembre 1997 à Luxembourg une résolution créant une enceinte spécifique pour mettre en place cette coordination.
Cette enceinte, c'est l'euro-11, qui s'est réuni 8 fois depuis sa création, et a su faire reconnaître toute sa place dans le paysage des instances communautaires. L'euro-11 a su engager un dialogue constructif avec la Banque centrale européenne. Je note ainsi que Wim Duisenberg a participé à une session sur deux de l'euro-11. L'euro-11 a su aussi mettre en place un système de surveillance rapide des conjonctures nationales.
Ce sont de premiers résultats très substantiels, qu'il va falloir cependant amplifier encore dans les mois qui viennent.
Sur le fond, il doit être clair que la coordination des politiques économiques ne se limite pas au réglage conjoncturel.
Elle doit se donner une ambition beaucoup plus vaste, visant à promouvoir au niveau européen un modèle de croissance à la fois plus soutenue, durable, équilibrée et riche en emplois.
C'est tout l'enjeu du chantier que la présidence allemande a ouvert, en lançant les premières réflexions sur le Pacte européen de croissance et d'emploi dont nous allons parler dans quelques jours au Conseil européen de Cologne.
Le soutien à l'innovation, le développement des nouveaux emplois dans les nouveaux services, l'accélération de l'harmonisation fiscale, le renforcement de la logique de bench-marking sur l'emploi, le développement du dialogue social au niveau européen sont autant d'éléments que nous souhaitons mettre au centre des réflexions sur le Pacte européen pour l'emploi. Nous aurons dès demain des échanges approfondis avec le gouvernement allemand à Toulouse dans le cadre d'un Sommet bilatéral largement consacré à la préparation de ce Pacte européen pour l'emploi.
Quant à la forme, il faut probablement veiller à ce que la coordination des politiques économiques soit plus visible, ce qui suppose peut-être de donner une plus grande publicité aux travaux de l'euro-11 et aussi d'améliorer la transparence dans les rapports que la Banque centrale européenne entretient avec l'euro-11, dans le strict respect des prérogatives de chacun, cela va de soi.
Il nous faudra aussi réfléchir assez rapidement à la manière de préserver le rôle essentiel de l'euro-11 dans le contexte de la future réforme institutionnelle que, nous souhaitons clore assez rapidement sous présidence française au second semestre de l'an 2000, en reprenant les "left-over" d'Amsterdam pour combler les lacunes du Traité d'Amsterdam, sur lesquelles je me suis exprimé à de nombreuses reprises : réforme du fonctionnement de la Commission, repondération des voix au Conseil et extension du vote à la majorité qualifiée.
3- J'en termine maintenant par des préoccupations plus concrètes relatives à l'euro pratique.
Le gouvernement n'a pas ménagé ses efforts de communication sur le plan de passage à l'euro, comme vous avez pu vous en rendre compte dans les fonctions qui sont les vôtres et, tout simplement aussi, comme simples citoyens.
Avec Dominique Strauss-Kahn et Yves-Thibault de Silguy, j'avais lancé en novembre dernier la deuxième grande campagne de communication sur l'euro. Celle-ci a été un succès incontestablement puisque, selon les enquêtes dont je dispose, 80 % des Français estiment que l'euro est une bonne chose pour leur avenir et 75 % des Français s'estiment bien informés.
Pour autant, il ne faut pas relâcher nos efforts, avec cette difficulté très particulière qui est de communiquer sur une période longue sur un objet qui n'existe pas encore matériellement pour le grand public.
Notre objectif est de faire en sorte que, d'ici fin 2001, chacun s'habitue à penser en euros, plus qu'à payer en euros.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous nous félicitons des résultats très encourageants de la pratique du double affichage des prix, notamment dans la grande distribution qui aura un rôle stratégique à jouer pour acclimater progressivement les esprits à l'euro.
Pour les entreprises, l'objectif doit être plus ambitieux.
A l'évidence, elles ont intérêt à basculer rapidement dans l'euro. Un passage tardif, dans le courant de l'année 2001 par exemple, entraînera inévitablement des surcoûts liés à l'urgence, en même temps que des risques d'échec aux conséquences financières et commerciales très dommageables.
Dans la plupart des cas, un couplage avec la préparation du passage à l'an 2000 constituera un plan de marche intelligent et prudent à la fois. Les grandes entreprises en sont d'ores et déjà convaincues fort heureusement. Il reste sans doute un effort spécifique de communication à mener en direction des PME.
*
Je souhaite maintenant conclure.
Vous avez à juste titre placé votre dernière table ronde sous le signe du changement. Je suis profondément convaincu que l'euro est un vecteur de changement. Sans méconnaître l'ampleur du travail qui reste à accomplir, vous comprendrez que le responsable politique que je suis se tourne maintenant vers l'Europe après l'euro, et évoque en quelques mots la construction de l'Europe politique, notre prochain grand chantier.
Pour relever ce défi, les acquis de l'euro nous seront précieux :
- D'abord parce que l'euro confortera l'influence de l'Europe sur la scène mondiale ;
- Ensuite parce que l'euro représente un changement d'échelle dans notre volonté d'ériger l'Europe en un ensemble économique cohérent, en partie à l'abri des turbulences mondiales, et d'affirmer la validité d'un certain modèle européen alliant compétitivité de nos entreprises et progrès social.
La réalisation de l'Union économique et monétaire a été de bout en bout un processus éminemment politique. Elle nous montre le sens des progrès à accomplir demain pour doter l'Europe d'une dimension politique qui lui permettra alors d'exister dans toute sa plénitude sur la scène internationale. C'est le grand dessein auquel nous devons nous atteler dans les années qui viennent, en lui souhaitant le même succès qu'à l'euro.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 31 mai 1999)