Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le ministre, cher collègue, cher Wolfgang,
Mesdames et Messieurs,
Merci à tous de votre accueil et merci de votre invitation. Vous avez choisi de conclure vos universités d'été en invitant les deux ministres français et allemand des Finances, et je tiens à saluer votre initiative, tout comme je tiens à saluer ici Wolfgang SCHÄUBLE.
Je tiens à saluer l'homme, le ministre, son courage, à la fois politique et personnel, sa volonté, le sérieux de sa politique et sa détermination, qui est une force pour l'Allemagne, mais aussi pour tous ses partenaires.
Je mesure la portée symbolique de sa présence aujourd'hui, et je partage totalement ce choix que vous avez fait d'inscrire vos réflexions et vos débats dans un cadre franco-allemand et dans un cadre européen.
Le Premier ministre vous l'a dit hier : il n'y a pas d'avenir pour la France sans ses partenaires européens, et encore moins contre eux. Il n'y a pas de croissance possible en Europe dans le conflit ou la désunion de ses Etats-membres. L'Europe, ce ne sont pas des pays qui s'opposent, ce ne sont pas des pays qui cherchent chez leurs voisins une excuse ou une explication pour leurs propres échecs. L'Europe, c'est un projet, un espace de coopération, où chacun doit prendre ses responsabilités pour permettre aux autres de le faire aussi.
Nos économies sont interdépendantes, Wolfgang et moi le savons bien. Nous avons donc besoin d'une stratégie européenne cohérente en matière de croissance, mais cette stratégie ne peut se construire que sur une confiance commune et sur la responsabilité de chacun.
C'est là tout le sens de la politique que nous menons au niveau national et européen.
Nous avons une vision commune en matière d'investissement, et nous ferons des propositions communes en matière de transports, d'infrastructures, de développement numérique et de recherche-développement.
C'est un besoin fondamental pour nos économies. La zone euro dans son ensemble n'a pas retrouvé son niveau de richesse de 2008, même si, pour nos deux pays, ce niveau a été désormais dépassé. Le niveau du chômage européen est alarmant, le retard de croissance accumulé se traduit par des capacités productives sous utilisées Wolfgang le sait : son pays a fait des réformes dans un moment où la croissance européenne était forte en Europe, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. L'action de la BCE est très utile y compris par la baisse de l'euro qu'elle a engendrée, qui apportera un soutien à l'activité. Mais aujourd'hui, la croissance et l'inflation déçoivent en Europe. Je rejoins Mario DRAGHI lorsqu'il dit que nous devons recréer les conditions pour que l'Europe résorbe son retard de croissance et son chômage.
L'Europe n'est pas figée. Elle n'est pas aveugle aux réalités du monde, mais elle ne peut bouger que sur la base de la confiance et d'une entente commune entre ses membres, et d'abord entre nos deux pays.
C'est sur cette conviction que s'est toujours bâtie la relation franco-allemande, et j'ai encore le souvenir, lors de mon premier passage au ministère de l'Economie et des Finances, de cette période cruciale juste après la chute du mur de Berlin et la réunification, où nos deux pays ont su dépasser leurs intérêts divergents et avancer ensemble pour construire l'Euro.
A l'époque, c'était d'ailleurs l'Allemagne qui faisait face aux défis économiques de la réunification. Ce n'était pas une époque facile, mais l'Allemagne a réussi à surmonter cette épreuve. Elle a su se réformer. Certes? ces réformes ont pris du temps - plus de dix ans entre 2002 et 2012 - mais elles lui ont donné une force nouvelle. Et c'est aujourd'hui au tour de la France de rattraper son retard, et après avoir perdu beaucoup de temps pendant dix ans, de se redonner les moyens de sa croissance.
Je le dis avec toute la conviction qui est la mienne aujourd'hui : c'est notre responsabilité de nous réformer. La responsabilité du Gouvernement et de l'Etat en premier lieu.
Le Président de la République s'est engagé, il a assumé pleinement sa responsabilité de chef de l'Etat, il a engagé la parole de la France et l'avenir du pays dans une stratégie de compétitivité et de redressement qui implique des efforts, qui est tout sauf la voie de la facilité, mais qui est nécessaire.
Ce cap, le Premier ministre l'a redit devant vous : nous nous y tiendrons parce que c'est le bon.
Le Parlement a voté sur la stratégie globale d'économies et sur le Pacte. Un nouveau gouvernement a été formé, avec une ligne clarifiée. Nous naviguons face à des vents contraires, dans un contexte dégradé, c'est vrai. Mais ce n'est pas parce que nous rencontrons des difficultés qu'il faut abandonner ou rebrousser chemin. C'est la constance qui crée la confiance. Un engagement a été pris dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité, et il sera tenu.
La première de nos responsabilités c'est d'abord de redonner aux entreprises les marges qu'elles ont perdues.
Les marges des entreprises se sont effondrées depuis 2007. Elles ont atteint un point bas historique qui menace, non seulement notre compétitivité, mais aussi l'existence même de nombreuses entreprises. Les prélèvements ont augmenté sous le précédent quinquennat mais aussi sous le nôtre parce qu'il a fallu, dans l'urgence, faire face aux conséquences de la crise financière et reprendre le contrôle de nos comptes publics. L'ensemble que constituent le CICE et le volet entreprises du Pacte redonnera très exactement aux entreprises, je dirais même comptablement, l'équivalent des marges perdues avec la crise. C'est cela faire face à nos responsabilités.
Je voudrais d'ailleurs dissiper des idées fausses. On a beaucoup parlé de dividendes ces dernières semaines, et à la suite d'une enquête récente, certains ont cru, de plus ou moins bonne foi, que les entreprises françaises se portaient le mieux du monde et affichaient des résultats exceptionnels au profit de leurs actionnaires. Des entreprises qui s'enrichissent dans un pays qui s'appauvrit : voilà l'image qu'on a parfois tendance à laisser se diffuser. Et pourtant il n'y a rien de plus faux et de plus dangereux pour notre économie que ce discours-là.
Les dividendes de la quarantaine de multinationales concernées il faut le dire ! ne sont pas représentatifs de la situation des entreprises de notre pays. La réalité, ce n'est pas cela : certaines régions et certains secteurs s'en sortent bien. Pour eux la reprise a déjà commencé. Mais pour d'autres, les difficultés sont toujours là. Et pour beaucoup, c'est la question de la survie même de l'activité qui est parfois posée. Nier cela, faire croire que les ménages seraient les seuls à subir les conséquences de la crise dans notre pays, c'est n'avoir jamais mis les pieds dans des entreprises ! Et qu'on ne vienne pas m'expliquer que c'est grâce au CICE, perçu en 2014, que les entreprises ont pu distribuer des dividendes sur la base des revenus de 2013 !
Redonner des marges à nos entreprises, c'est d'abord leur redonner la capacité d'embaucher et d'investir, c'est nous redonner les moyens de la croissance.
C'est notre responsabilité et cela passe aussi par la stabilité et la visibilité dont elles ont besoin. C'est ce que nous faisons avec le Pacte. Mais nous irons encore plus loin. Et c'est pourquoi, en matière fiscale, nous mettrons en oeuvre le principe de non-rétroactivité en matière fiscale. J'ai demandé à mes services de travailler sur une "Charte" , sous forme de circulaire, qui affirmera ces principes.
Très concrètement, cela veut dire qu'il ne doit plus y avoir de suppléments d'impôts applicables à des exercices déjà clos, pas de majorations après la fin de l'année d'imposition, mais de la visibilité et la garantie que les règles du jeu sont connues suffisamment à l'avance.
L'objectif, c'est que ceux qui se lancent dans un projet, ceux qui prennent un risque puissent le faire en confiance et en connaissance de cause sans qu'en cours de route une nouvelle norme fiscale vienne tout changer. Voilà l'engagement que nous prenons aujourd'hui et qui répond à un besoin que vos représentants ont exprimé bien des fois lors des Assises de la fiscalité des entreprises.
Notre responsabilité, c'est la stabilité, c'est la visibilité, mais c'est aussi la maîtrise des dépenses publiques et la réduction des déficits.
Nous mettrons en oeuvre le plan d'économies de 50 milliards d'économies que nous avons proposé au Parlement, et nous le ferons, non pas pour complaire à l'Europe ou à nos partenaires européens et Wolfgang SCHÄUBLE pourra en témoigner mais nous le ferons pour nous-mêmes, dans l'intérêt de notre pays et parce que nous considérons que c'est, à terme la puissance économique et financière de la France qui est en jeu, après tant de décennies où nous avons, comme d'autres pays européens, vécu à crédit.
C'est une responsabilité que nous prenons par rapport à nous-mêmes mais aussi par rapport aux générations futures, à nos enfants, aux Français de demain, vis-à-vis desquels nous avons une obligation. C'est l'avenir qui est en jeu, et c'est pour préserver et préparer l'avenir que nous travaillons.
50 milliards d'euros d'économies sur 3 ans, dont 21 milliards dès 2015 : c'est un effort sans précédent de ralentissement de la dépense publique mais qui préserve les priorités de demain : l'éducation, la qualité des soins, l'investissement. Car en reprenant le contrôle de nos finances publiques, nous redonnons des marges de manoeuvre à l'Etat pour investir là où il en a le plus besoin, nous nous donnons les moyens d'une politique volontariste en faveur des entreprises et de la compétitivité, nous créons les conditions d'un maintien durable des taux d'intérêts à un niveau attractif et favorable à l'investissement, et surtout nous nous inscrivons en cohérence avec les politiques économiques menées en commun au niveau européen.
A plus long terme, l'enjeu, c'est aussi de mener à bien des réformes en profondeur de notre pays. C'est la condition d'une croissance qui ne soit pas simplement liée au rebond de la conjoncture mais qui soit durable et structurelle. Je pense à la réforme des collectivités locales, à la réforme de l'Etat. Je pense au renforcement de la concurrence dans un certain nombre de secteurs où les règles actuelles ne sont plus adaptées et pénalisent l'activité économique.
Le Premier ministre a défini devant vous un véritable programme de réformes, ambitieux, audacieux et courageux, qui permettra à la France de rattraper son retard et de se donner toutes les chances pour son avenir.
C'est notre ligne politique, c'est la responsabilité, la lucidité, c'est la volonté d'agir sur les vrais leviers de la croissance.
Nous avons pris nos responsabilités. Nous avons pris nos risques, comme vous le faites vous-même au quotidien. Car des risques, Mesdames et Messieurs, il y en a de toutes natures, et chacun doit prendre le sien.
Mais en assumant totalement notre responsabilité, notre objectif, c'est aussi de créer les conditions pour chacun prenne les siennes.
A vous de constater maintenant que nous tenons fermement le cap et que nous tiendrons nos engagements avec force et détermination.
Bien sûr, la mise en oeuvre de ces décisions est échelonnée dans le temps, car nous ne prenons que des engagements que nous pouvons tenir, c'est-à-dire financer. Mais nous vous avons donné d'ores et déjà une visibilité sur trois ans : l'ensemble des mesures du Pacte pour 2015 ont été votées cet été, les suivantes le seront en temps utile, c'est le principe du Pacte.
Nous avions déjà eu les mêmes discussions au moment du CICE avant qu'il ne se mette en place, et vous constatez aujourd'hui son effectivité dans chacune de vos entreprises. Vous pouvez compter sur les engagements que nous avons pris et bâtir vos projets sur cette base.
C'est là que nous comptons sur vous, c'est là que tous les Français comptent sur vous, et c'est un rendez-vous crucial que nous avons collectivement avec eux.
L'enjeu, c'est de se préparer dès aujourd'hui pour être prêts, demain, à profiter au maximum de la reprise, à reconquérir des parts de marché, en pariant sur l'innovation, en investissant, en embauchant, bref, en prenant des risques à la hauteur des opportunités qui vous sont offertes.
C'est ce que doit permettre le Pacte : vous offrir un cadre d'opportunités sur lequel rebondir, en accélérant vos projets, en ressortant des tiroirs les projets auxquels vous avez renoncé à cause de la crise, en repartant de l'avant.
Pour forcer le destin demain, il faut réamorcer dès aujourd'hui la machine économique du pays, en mobilisant toutes les forces de votre entreprise. Les forces économiques évidemment, mais aussi les forces sociales et je n'insisterai jamais assez sur l'importance du dialogue social. Wolfgang SCHÄUBLE pourra en témoigner : des réformes d'une telle ampleur demandent un énorme effort de concertation et de négociation. Cela a été vrai pour l'Allemagne, où pourtant les réformes ont pris près de 10 ans à être mises en oeuvre. Partout où le dialogue social a été négligé, la dynamique n'a pas pu s'enclencher. Partout où le dialogue social a pu être mené avec intelligence, dans l'intérêt collectif, la réussite a été au rendez-vous. Cela a valu pour l'Allemagne, cela vaut aussi pour la France, dont les modèles sont beaucoup plus proches qu'on ne croit, et en tout cas très différents du modèle anglo-saxon.
Vous connaissez mon attachement au dialogue social, qui associe tous les partenaires et qui place chacun face à ses responsabilités. C'est une exigence mutuelle à laquelle chacun se doit de participer, c'est la meilleure façon de dépasser les clivages ou de les réduire pour donner toutes ses chances à une mobilisation commune de toutes nos forces économiques et sociales au service de nos objectifs. Et c'est bien dans cet esprit et sur cette base que nous vous proposons d'avancer avec le Pacte de Responsabilité.
Nous prenons nos responsabilités au nom de l'Etat, je vous fais confiance pour prendre les vôtres, franchir le pas pour que notre pays, et avec lui tous ses citoyens, soit au rendez-vous du succès dans l'année qui vient.
C'est l'intérêt de chacun ici, c'est l'intérêt des entreprises, c'est l'intérêt de leurs dirigeants, c'est l'intérêt des salariés, de tous les Français, c'est l'intérêt de la France, l'intérêt de l'Allemagne, l'intérêt de l'Europe, et nous pouvons tous nous retrouver collectivement sur cet objectif !
Je vous remercie.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 9 septembre 2014
Monsieur le ministre, cher collègue, cher Wolfgang,
Mesdames et Messieurs,
Merci à tous de votre accueil et merci de votre invitation. Vous avez choisi de conclure vos universités d'été en invitant les deux ministres français et allemand des Finances, et je tiens à saluer votre initiative, tout comme je tiens à saluer ici Wolfgang SCHÄUBLE.
Je tiens à saluer l'homme, le ministre, son courage, à la fois politique et personnel, sa volonté, le sérieux de sa politique et sa détermination, qui est une force pour l'Allemagne, mais aussi pour tous ses partenaires.
Je mesure la portée symbolique de sa présence aujourd'hui, et je partage totalement ce choix que vous avez fait d'inscrire vos réflexions et vos débats dans un cadre franco-allemand et dans un cadre européen.
Le Premier ministre vous l'a dit hier : il n'y a pas d'avenir pour la France sans ses partenaires européens, et encore moins contre eux. Il n'y a pas de croissance possible en Europe dans le conflit ou la désunion de ses Etats-membres. L'Europe, ce ne sont pas des pays qui s'opposent, ce ne sont pas des pays qui cherchent chez leurs voisins une excuse ou une explication pour leurs propres échecs. L'Europe, c'est un projet, un espace de coopération, où chacun doit prendre ses responsabilités pour permettre aux autres de le faire aussi.
Nos économies sont interdépendantes, Wolfgang et moi le savons bien. Nous avons donc besoin d'une stratégie européenne cohérente en matière de croissance, mais cette stratégie ne peut se construire que sur une confiance commune et sur la responsabilité de chacun.
C'est là tout le sens de la politique que nous menons au niveau national et européen.
Nous avons une vision commune en matière d'investissement, et nous ferons des propositions communes en matière de transports, d'infrastructures, de développement numérique et de recherche-développement.
C'est un besoin fondamental pour nos économies. La zone euro dans son ensemble n'a pas retrouvé son niveau de richesse de 2008, même si, pour nos deux pays, ce niveau a été désormais dépassé. Le niveau du chômage européen est alarmant, le retard de croissance accumulé se traduit par des capacités productives sous utilisées Wolfgang le sait : son pays a fait des réformes dans un moment où la croissance européenne était forte en Europe, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. L'action de la BCE est très utile y compris par la baisse de l'euro qu'elle a engendrée, qui apportera un soutien à l'activité. Mais aujourd'hui, la croissance et l'inflation déçoivent en Europe. Je rejoins Mario DRAGHI lorsqu'il dit que nous devons recréer les conditions pour que l'Europe résorbe son retard de croissance et son chômage.
L'Europe n'est pas figée. Elle n'est pas aveugle aux réalités du monde, mais elle ne peut bouger que sur la base de la confiance et d'une entente commune entre ses membres, et d'abord entre nos deux pays.
C'est sur cette conviction que s'est toujours bâtie la relation franco-allemande, et j'ai encore le souvenir, lors de mon premier passage au ministère de l'Economie et des Finances, de cette période cruciale juste après la chute du mur de Berlin et la réunification, où nos deux pays ont su dépasser leurs intérêts divergents et avancer ensemble pour construire l'Euro.
A l'époque, c'était d'ailleurs l'Allemagne qui faisait face aux défis économiques de la réunification. Ce n'était pas une époque facile, mais l'Allemagne a réussi à surmonter cette épreuve. Elle a su se réformer. Certes? ces réformes ont pris du temps - plus de dix ans entre 2002 et 2012 - mais elles lui ont donné une force nouvelle. Et c'est aujourd'hui au tour de la France de rattraper son retard, et après avoir perdu beaucoup de temps pendant dix ans, de se redonner les moyens de sa croissance.
Je le dis avec toute la conviction qui est la mienne aujourd'hui : c'est notre responsabilité de nous réformer. La responsabilité du Gouvernement et de l'Etat en premier lieu.
Le Président de la République s'est engagé, il a assumé pleinement sa responsabilité de chef de l'Etat, il a engagé la parole de la France et l'avenir du pays dans une stratégie de compétitivité et de redressement qui implique des efforts, qui est tout sauf la voie de la facilité, mais qui est nécessaire.
Ce cap, le Premier ministre l'a redit devant vous : nous nous y tiendrons parce que c'est le bon.
Le Parlement a voté sur la stratégie globale d'économies et sur le Pacte. Un nouveau gouvernement a été formé, avec une ligne clarifiée. Nous naviguons face à des vents contraires, dans un contexte dégradé, c'est vrai. Mais ce n'est pas parce que nous rencontrons des difficultés qu'il faut abandonner ou rebrousser chemin. C'est la constance qui crée la confiance. Un engagement a été pris dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité, et il sera tenu.
La première de nos responsabilités c'est d'abord de redonner aux entreprises les marges qu'elles ont perdues.
Les marges des entreprises se sont effondrées depuis 2007. Elles ont atteint un point bas historique qui menace, non seulement notre compétitivité, mais aussi l'existence même de nombreuses entreprises. Les prélèvements ont augmenté sous le précédent quinquennat mais aussi sous le nôtre parce qu'il a fallu, dans l'urgence, faire face aux conséquences de la crise financière et reprendre le contrôle de nos comptes publics. L'ensemble que constituent le CICE et le volet entreprises du Pacte redonnera très exactement aux entreprises, je dirais même comptablement, l'équivalent des marges perdues avec la crise. C'est cela faire face à nos responsabilités.
Je voudrais d'ailleurs dissiper des idées fausses. On a beaucoup parlé de dividendes ces dernières semaines, et à la suite d'une enquête récente, certains ont cru, de plus ou moins bonne foi, que les entreprises françaises se portaient le mieux du monde et affichaient des résultats exceptionnels au profit de leurs actionnaires. Des entreprises qui s'enrichissent dans un pays qui s'appauvrit : voilà l'image qu'on a parfois tendance à laisser se diffuser. Et pourtant il n'y a rien de plus faux et de plus dangereux pour notre économie que ce discours-là.
Les dividendes de la quarantaine de multinationales concernées il faut le dire ! ne sont pas représentatifs de la situation des entreprises de notre pays. La réalité, ce n'est pas cela : certaines régions et certains secteurs s'en sortent bien. Pour eux la reprise a déjà commencé. Mais pour d'autres, les difficultés sont toujours là. Et pour beaucoup, c'est la question de la survie même de l'activité qui est parfois posée. Nier cela, faire croire que les ménages seraient les seuls à subir les conséquences de la crise dans notre pays, c'est n'avoir jamais mis les pieds dans des entreprises ! Et qu'on ne vienne pas m'expliquer que c'est grâce au CICE, perçu en 2014, que les entreprises ont pu distribuer des dividendes sur la base des revenus de 2013 !
Redonner des marges à nos entreprises, c'est d'abord leur redonner la capacité d'embaucher et d'investir, c'est nous redonner les moyens de la croissance.
C'est notre responsabilité et cela passe aussi par la stabilité et la visibilité dont elles ont besoin. C'est ce que nous faisons avec le Pacte. Mais nous irons encore plus loin. Et c'est pourquoi, en matière fiscale, nous mettrons en oeuvre le principe de non-rétroactivité en matière fiscale. J'ai demandé à mes services de travailler sur une "Charte" , sous forme de circulaire, qui affirmera ces principes.
Très concrètement, cela veut dire qu'il ne doit plus y avoir de suppléments d'impôts applicables à des exercices déjà clos, pas de majorations après la fin de l'année d'imposition, mais de la visibilité et la garantie que les règles du jeu sont connues suffisamment à l'avance.
L'objectif, c'est que ceux qui se lancent dans un projet, ceux qui prennent un risque puissent le faire en confiance et en connaissance de cause sans qu'en cours de route une nouvelle norme fiscale vienne tout changer. Voilà l'engagement que nous prenons aujourd'hui et qui répond à un besoin que vos représentants ont exprimé bien des fois lors des Assises de la fiscalité des entreprises.
Notre responsabilité, c'est la stabilité, c'est la visibilité, mais c'est aussi la maîtrise des dépenses publiques et la réduction des déficits.
Nous mettrons en oeuvre le plan d'économies de 50 milliards d'économies que nous avons proposé au Parlement, et nous le ferons, non pas pour complaire à l'Europe ou à nos partenaires européens et Wolfgang SCHÄUBLE pourra en témoigner mais nous le ferons pour nous-mêmes, dans l'intérêt de notre pays et parce que nous considérons que c'est, à terme la puissance économique et financière de la France qui est en jeu, après tant de décennies où nous avons, comme d'autres pays européens, vécu à crédit.
C'est une responsabilité que nous prenons par rapport à nous-mêmes mais aussi par rapport aux générations futures, à nos enfants, aux Français de demain, vis-à-vis desquels nous avons une obligation. C'est l'avenir qui est en jeu, et c'est pour préserver et préparer l'avenir que nous travaillons.
50 milliards d'euros d'économies sur 3 ans, dont 21 milliards dès 2015 : c'est un effort sans précédent de ralentissement de la dépense publique mais qui préserve les priorités de demain : l'éducation, la qualité des soins, l'investissement. Car en reprenant le contrôle de nos finances publiques, nous redonnons des marges de manoeuvre à l'Etat pour investir là où il en a le plus besoin, nous nous donnons les moyens d'une politique volontariste en faveur des entreprises et de la compétitivité, nous créons les conditions d'un maintien durable des taux d'intérêts à un niveau attractif et favorable à l'investissement, et surtout nous nous inscrivons en cohérence avec les politiques économiques menées en commun au niveau européen.
A plus long terme, l'enjeu, c'est aussi de mener à bien des réformes en profondeur de notre pays. C'est la condition d'une croissance qui ne soit pas simplement liée au rebond de la conjoncture mais qui soit durable et structurelle. Je pense à la réforme des collectivités locales, à la réforme de l'Etat. Je pense au renforcement de la concurrence dans un certain nombre de secteurs où les règles actuelles ne sont plus adaptées et pénalisent l'activité économique.
Le Premier ministre a défini devant vous un véritable programme de réformes, ambitieux, audacieux et courageux, qui permettra à la France de rattraper son retard et de se donner toutes les chances pour son avenir.
C'est notre ligne politique, c'est la responsabilité, la lucidité, c'est la volonté d'agir sur les vrais leviers de la croissance.
Nous avons pris nos responsabilités. Nous avons pris nos risques, comme vous le faites vous-même au quotidien. Car des risques, Mesdames et Messieurs, il y en a de toutes natures, et chacun doit prendre le sien.
Mais en assumant totalement notre responsabilité, notre objectif, c'est aussi de créer les conditions pour chacun prenne les siennes.
A vous de constater maintenant que nous tenons fermement le cap et que nous tiendrons nos engagements avec force et détermination.
Bien sûr, la mise en oeuvre de ces décisions est échelonnée dans le temps, car nous ne prenons que des engagements que nous pouvons tenir, c'est-à-dire financer. Mais nous vous avons donné d'ores et déjà une visibilité sur trois ans : l'ensemble des mesures du Pacte pour 2015 ont été votées cet été, les suivantes le seront en temps utile, c'est le principe du Pacte.
Nous avions déjà eu les mêmes discussions au moment du CICE avant qu'il ne se mette en place, et vous constatez aujourd'hui son effectivité dans chacune de vos entreprises. Vous pouvez compter sur les engagements que nous avons pris et bâtir vos projets sur cette base.
C'est là que nous comptons sur vous, c'est là que tous les Français comptent sur vous, et c'est un rendez-vous crucial que nous avons collectivement avec eux.
L'enjeu, c'est de se préparer dès aujourd'hui pour être prêts, demain, à profiter au maximum de la reprise, à reconquérir des parts de marché, en pariant sur l'innovation, en investissant, en embauchant, bref, en prenant des risques à la hauteur des opportunités qui vous sont offertes.
C'est ce que doit permettre le Pacte : vous offrir un cadre d'opportunités sur lequel rebondir, en accélérant vos projets, en ressortant des tiroirs les projets auxquels vous avez renoncé à cause de la crise, en repartant de l'avant.
Pour forcer le destin demain, il faut réamorcer dès aujourd'hui la machine économique du pays, en mobilisant toutes les forces de votre entreprise. Les forces économiques évidemment, mais aussi les forces sociales et je n'insisterai jamais assez sur l'importance du dialogue social. Wolfgang SCHÄUBLE pourra en témoigner : des réformes d'une telle ampleur demandent un énorme effort de concertation et de négociation. Cela a été vrai pour l'Allemagne, où pourtant les réformes ont pris près de 10 ans à être mises en oeuvre. Partout où le dialogue social a été négligé, la dynamique n'a pas pu s'enclencher. Partout où le dialogue social a pu être mené avec intelligence, dans l'intérêt collectif, la réussite a été au rendez-vous. Cela a valu pour l'Allemagne, cela vaut aussi pour la France, dont les modèles sont beaucoup plus proches qu'on ne croit, et en tout cas très différents du modèle anglo-saxon.
Vous connaissez mon attachement au dialogue social, qui associe tous les partenaires et qui place chacun face à ses responsabilités. C'est une exigence mutuelle à laquelle chacun se doit de participer, c'est la meilleure façon de dépasser les clivages ou de les réduire pour donner toutes ses chances à une mobilisation commune de toutes nos forces économiques et sociales au service de nos objectifs. Et c'est bien dans cet esprit et sur cette base que nous vous proposons d'avancer avec le Pacte de Responsabilité.
Nous prenons nos responsabilités au nom de l'Etat, je vous fais confiance pour prendre les vôtres, franchir le pas pour que notre pays, et avec lui tous ses citoyens, soit au rendez-vous du succès dans l'année qui vient.
C'est l'intérêt de chacun ici, c'est l'intérêt des entreprises, c'est l'intérêt de leurs dirigeants, c'est l'intérêt des salariés, de tous les Français, c'est l'intérêt de la France, l'intérêt de l'Allemagne, l'intérêt de l'Europe, et nous pouvons tous nous retrouver collectivement sur cet objectif !
Je vous remercie.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 9 septembre 2014