Texte intégral
Je vais conclure rapidement parce que les propos qui ont été tenus par nos amis se suffisent à eux-mêmes.
La situation de départ est très mauvaise. Nous avons 60 milliards de déficit commercial. J'ai coutume de dire que le déficit de la balance extérieure est beaucoup plus grave que le déficit budgétaire. Le déficit budgétaire, il suffit, si je puis dire, que le Premier ministre dans les lettres-plafond qu'il nous envoie, dise «Là où vous dépassiez 100 cette année, vous dépenserez 95 l'année prochaine», ce n'est pas facile à réaliser mais on réalise.
Le déficit commercial, cela n'a rien à voir car ce sont les échanges de biens et de services. Et trait commun à ces deux déficits qu'oublient parfois, me semble-t-il, certains responsables politiques, c'est qu'il faut en général les rembourser.
Nous avons un déficit commercial massif ce qui est le juge de paix de notre compétitivité.
Il faut que, bien sûr, les entreprises arrivent, par leur action, à redresser les choses. Et, même si l'État n'a pas vocation à remplacer les entreprises, il doit faire tout ce qu'il peut pour favoriser les exportations et les investissements étrangers en France. C'est totalement prioritaire parce que - le président de la République y faisait allusion tout à l'heure - si on n'a pas une puissance économique suffisante, au bout d'un certain temps, notre rayonnement diplomatique s'arrête. D'abord parce que l'on n'a plus les moyens financiers d'assurer notre présence diplomatique et puis parce que un jour vient où l'un de nos collègues au Conseil de sécurité dit : «au fond, la France, vous êtes là mais à quel titre ?». Il ne faut surtout pas que cela arrive. Pour cela, il faut absolument que notre économie devienne davantage prospère.
Sur le dossier de l'AFII et d'Ubifrance. Nous avons décidé de fusionner ces deux maisons. C'est Mme Muriel Pénicaud, qui est très dynamique, compétente, qui a la charge de faire cette fusion. Ceci va être effectif à la fin de l'année et ensuite Mme Pénicaud va s'occuper du rapprochement avec la SOPEXA. C'est un point que beaucoup d'entre vous m'avaient signalé. Il n'y a pas de raison d'avoir plusieurs circuits. Il faut faire cela d'une façon souple, mais c'est l'objectif.
Parallèlement, nous allons rassembler tous les organismes d'expertise parce que l'on constate qu'il y a toute une série de très bonnes expertises françaises mais c'est tellement dispersé que le produit global n'est pas bon. Là-dessus, nous sommes devancés par nos amis allemands.
Nous allons avoir la fusion UBIFRANCE-AFII ; le regroupement de tout ce qui concerne l'expertise et le rapprochement avec la SOPEXA. Et, parallèlement, c'est le sens des décisions qui ont été prises en ce qui concerne le ministère, c'est-à-dire la responsabilité en matière de commerce extérieur et en matière de tourisme.
Ce qui permet d'avoir une vision et une action globales et, si possible, cohérentes. Cela ne veut pas dire que le ministère des affaires étrangères et du développement international va tout faire tout seul, ce serait une absurdité. Il y a, bien évidemment, en ce qui me concerne, une action à mener avec tous mes collègues ministres à Paris. Mais, en ce qui concerne vos pays de résidence, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, c'est vous les patrons.
Mais, quand on est patron - n'est-ce pas Monsieur Plassat ? -, on juge aux résultats. La contrepartie de la responsabilité, c'est que l'on regarde les résultats. Évidemment, il y a des diversités de situations géographiques et puis, je ne vais pas me contredire, ce ne sont quand même pas les ambassadeurs qui vont faire le solde du commerce extérieur.
Madame Pénicaud a le dynamisme, elle va avoir les moyens juridiques pour travailler dans ce sens. Évidemment, elle ne peut le faire qu'en liaison étroite avec les ambassadeurs. Avec un double mouvement : augmentation de nos exportations et, si possible, augmentation de l'investissement étranger en France.
Augmentation de nos exportations, c'est tout ce qui a été très bien dit par les uns et par les autres, dont nos ambassadeurs MM. François Delattre à Washington et Denis Pietton à Brasilia. Il faut vraiment s'y atteler pour que nous soyons davantage présents.
Je ne rentre pas dans le débat «faut-il être présent par les investissements ?». Bien sûr, il faut être présent par les investissements, non pas par des investissements de délocalisation mais, le marché étant mondial, il y a des opportunités que l'on ne va pas saisir si l'on n'est pas présent à l'étranger. Mais pour les exportations on regarde le solde commercial et, de ce point de vue-là, à la fois l'administration et les entreprises doivent faire des efforts supplémentaires. Ce qu'a dit M. Sourdive sur les familles d'activité, c'est tout à fait exemplaire. Mais, même si, compte tenu de la clarté de sa présentation, nous avons eu le sentiment que tout cela était parfaitement cartésien, dans la réalité, ce n'est pas encore tout à fait le cas.
Il y a plusieurs familles d'activité. Il y a la famille «santé» au sens large, il y a la famille «ville durable», il y a la famille «agroalimentaire» et il y a la famille «communication». J'y ajoute deux familles : la famille «tourisme» et la famille «industrie culturelle et créative» - on emploie ce terme qui n'est pas très aimable pour les autres parce qu'il y a quand même beaucoup d'industries créatives autres que culturelles, mais on voit bien de quoi il s'agit.
Il faut donc organiser tout cela, aller chasser en meute. Et, dans mon esprit - j'y reviendrai dans mon propos final demain -, le rôle des ambassadeurs ce n'est pas simplement de faciliter les choses. Ils le font très bien. C'est d'aller chercher les opportunités.
C'est vrai en particulier sur l'investissement étranger en France. Bien sûr, il y a les bureaux de l'AFII, mais personne n'a une meilleure connaissance, un meilleur entregent pour favoriser l'investissement étranger en France que les ambassadeurs quand ils font bien leur travail.
À nous de nous organiser pour ce que ce soit possible. Il faut, le matin, se lever en se disant : qu'est-ce que je vais pouvoir faire pour développer l'investissement dans le pays où je suis ? Évidemment, en tenant compte de la diversité : il y a des pays où c'est plus facile, et d'autres plus difficile. Mais c'est un point central.
M. Plassat, président de Carrefour, nous a expliqué, en termes très concrets, ce qu'il faisait et ce qu'il attendait des ambassadeurs. C'est très intéressant. Petit reproche que je ne ferai pas à M. Plassat : il faut que nos entreprises portent sur leurs épaules toute une série d'entreprises, de biens et de services français. Évidemment, M. Plassat ne va pas pouvoir imposer la consommation de tel ou tel produit français aux consommateurs de tel ou tel pays qui les souhaitent ou ne les souhaitent pas.
Mais je trouve quand même que nous avons un travail supplémentaire de conviction à faire. Il y a des filières qui le font comme le nucléaire, l'aéronautique. C'est assez facile car, d'abord, elles sont habituées à travailler avec des groupes français, des entreprises françaises, et puis il y a des considérations de sécurité.
Mais le réflexe français, il faut que nous l'acquérions, que nous le développions. Je pense que nous sommes un peu en-dessous de ce que nous pourrions faire par rapport à d'autres pays. Denis Pietton a donné d'excellents exemples de ce que l'on peut faire. M. Sourdive a aussi été extrêmement clair. Mme Pénicaud en a parlé ainsi que M Delattre. Les États-Unis sont un pays à la fois très important et très particulier.il est vrai que l'on a pu faire jaillir et on doit faire encore jaillir bien davantage cent fleurs là-bas, avec des initiatives. M. Araud qui va vous succéder va suivre le mouvement. On a besoin de cela car, évidemment, c'est un marché énorme. Bien évidemment, quand on regarde les soldes commerciaux, on a un travail considérable.
M. Thomas Thévenoud, quand on regarde les soldes, on parle toujours de la Chine, on a raison : 25-26 milliards de déficit, c'est énorme ! Mais il n'y a pas que cela : avec l'Europe : nous avons un peu plus de 20 milliards de déficit avec nos amis allemands et avec les Pays-Bas. Pour le seul secteur agricole : 1 milliard et demi de déficit à notre détriment. Il n'y a pas d'excédent qui soit jamais satisfaisant et il n'y a pas de déficit que l'on ne puisse pas remonter.
Autant je considère que les ambassadeurs ont une mission globale - n'abandonnons jamais la dimension stratégique, la dimension culturelle -, autant l'économie est en tête dans ce que vous avez à faire. Du coup, bien évidemment, le ministère à Paris doit s'organiser pour cela. D'où la direction des entreprises, d'où le fait que, désormais, à côté de chaque directeur géographique, il y aura un directeur adjoint chargé spécifiquement de l'économie, d'où le fait qu'à côté de M. Masset, le Secrétaire général, viendra le rejoindre M. Rémy Rioux, qui était auparavant directeur de cabinet d'un ministre de l'économie et qui va être chargé spécialement et transversalement de l'action économique.
Si nous voulons être rayonnants diplomatiquement, il faut que nous soyons performants économiquement. On nous a donné à nous, Quai d'Orsay, les moyens administratifs de bien travailler, il faut continuer à bien travailler.
Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 septembre 2014