Déclaration de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, en hommage aux combattants français de la Deuxième Guerre mondiale et aux militaires français d'aujourd'hui, à Clermont-Ferrand le 27 août 2014.

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Circonstance : Commémorations de la libération de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), le 27 août 2014

Texte intégral


Monsieur le Préfet,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs, chers Clermontois,
En ce jour de commémorations, la Place de Jaude, où nous nous sommes rassemblés, est une fenêtre sur l'Histoire. Soixante-dix ans après, elle résonne à nouveau de l'immense joie de la liberté retrouvée, celle que les Résistants d'Auvergne sont venus rendre aux Clermontois, le 27 août 1944.
Dans le Puy-de-Dôme, plus qu'ailleurs, la France était entrée en Résistance. Dès l'été 1940, dans l'ombre des maquis, des armes avaient été amassées, et des groupes - « Ardent »,
« Combat », « Franc-Tireur », « Libération » -s'étaient organisés.
Aujourd'hui, nous saluons les figures de cette glorieuse histoire. Parmi elles, le général Frère, fondateur de l'Organisation de Résistance de l'Armée, mort en déportation après avoir été incarcéré ici par la Gestapo ; les résistants Henry Ingrand et Emile Coulaudon, qui ont structuré les maquis d'Auvergne et conduit leurs combats ; le socialiste Alexandre Varenne, fondateur du journal La Montagne, qui préféra « briser sa plume »plutôt que la mettre au service de l'ennemi.
Tous, avec d'autres, ont été l'honneur de la France dans ces années terribles. A Clermont-Ferrand, occupée à partir de novembre 1942, ils ont connu le déshonneur d'un régime à la dérive. Mais en silence, ils ont préparé et finalement rendu possible la Libération de la France.
Celle de Clermont-Ferrand, grâce aux nombreux contacts entre les Forces Françaises de l'Intérieur et les Milices patriotiques, se passe dans le calme. Mais ce 27 août 1944, dans la liesse qui s'exprime ici, personne n'oublie les dernières exactions de l'Occupant nazi, ni d'ailleurs les tragiques bombardements alliés - tragiques parce que nécessaires - sur les usines Michelin de Cataroux et d'Aulnat.
Il y a soixante-dix ans, la Libération de la France nous a rappelé qu'il n'y avait pas de liberté sans combat. Aujourd'hui, en rendant hommage aux Auvergnats engagés dans la Résistance, comme à la population de Clermont-Ferrand victime de la guerre, nous nous souvenons qu'il n'y a pas non plus de liberté sans mémoire pour la défendre.
Dans ces années noires, c'est grâce au courage hors du commun de nos combattants, mais aussi à la solidarité extraordinaire de nos alliés, que la France s'est relevée de l'abîme, et qu'elle a renoué avec le destin qui a toujours été le sien, celui d'une grande nation, qui prend ses responsabilités devant les périls qui peuvent le menacer.
Si c'est à eux, combattants et alliés d'hier, que nous devons de vivre dans un espace désormais pacifié, honorer leur combat c'est aussi ouvrir les yeux, comme ils l'ont fait, sur la réalité du monde qui nous entoure.
En soixante-dix ans, le monde a considérablement changé. Notre ennemi commun, cependant, sous des visages différents, est demeuré le même : l'intolérance, le racisme, le fanatisme, la barbarie. Hier, cet ennemi terrorisait nos familles et asservissait en Europe des pays entiers. Aujourd'hui, il sème une même terreur parmi des populations amies, aux portes de l'Europe.
A l'égard de nombre de ces pays, nous avons une dette héritée de la Seconde Guerre mondiale. Comment en effet pourrions-nous rester les bras croisés alors que la liberté de ceux qui ont contribué à nous libérer hier est aujourd'hui menacée ?
Mais ce combat pour la liberté de nos alliés, dans un monde qui a rarement été aussi interdépendant, c'est aussi plus que jamais un combat pour notre propre sécurité.
Des groupes armés terroristes, comme AQMI ou celui qui se fait appeler l'Etat islamique, ne se contentent pas de piller, violer, anéantir des populations entières, ici au Sahel, là en Irak et en Syrie. Ils prolifèrent sur la faiblesse de ces États pour chercher à atteindre l'Europe et la France.
C'est pourquoi la France prend toutes ses responsabilités. Elle le fait au Mali depuis le 11 janvier 2013 avec l'opération Serval, et maintenant dans l'ensemble du Sahel, avec l'opération Barkhane, pour lutter contre des groupes terroristes. Elle le fait en Centrafrique, pour empêcher des exactions et prévenir l'effondrement d'un pays qui déstabiliserait le cœur du continent africain. Elle le fait encore dans l'Océan indien, lorsqu'elle défend la liberté des mers contre la piraterie. Elle le fait partout où nos concitoyens, nos intérêts de sécurité et nos valeurs peuvent être menacés.
Je veux rendre hommage, devant vous, à l'engagement de nos soldats. Souvent au péril de leur vie, avec un courage qui force l'admiration, ils veillent sur la tranquillité de la Nation - sans que nous nous en rendions toujours compte. Plusieurs sont parmi nous aujourd'hui. Je salue en particulier les « Gaulois » du 92e Régiment d'Infanterie. Ils sont les héritiers des maquisards d'Auvergne. Avec la 3e Brigade mécanisée, ils ont été au cœur du lancement de l'opération Serval. Ils portent fièrement nos couleurs sur les théâtres d'opérations où la France est engagée.
Ministre de la Défense, ma mission est de veiller avec tous nos soldats sur la sécurité des Français. Dans un monde dangereux, c'est une mission difficile. Elle appelle un effort important de la Nation. C'est à ce prix que notre armée sera la première en Europe en 2020, et que la France restera un grand pays pour affronter les urgences du présent et relever les défis de sa sécurité.
Défense de notre liberté hier, défense de notre sécurité aujourd'hui. Mesdames et Messieurs, tel est le devoir de vigilance que les héros de la Libération nous ont laissé en partage. À nous de l'exercer, et de nous montrer ainsi à la hauteur du combat qu'ils ont mené et qui reste,soixante-dix ans après, d'une brûlante actualité.
Vive la République !
Vive la France !
Source http://www.defense.gouv.fr, le 30 septembre 2014