Déclaration de Mme Annick Girardin, secrétaire d'État au développement et à la francophonie, sur la couverture sanitaire universelle, à New York le 22 septembre 2014.

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Circonstance : Déplacement à New York (Etats-Unis) à l'occasion de la semaine ministérielle de l'assemblée générale des Nations unies et du forum des économies majeures, du 19 au 28 septembre 2014

Texte intégral

Je suis très heureuse que la France co-parraine cet événement sur la couverture sanitaire universelle, sujet essentiel pour la France et pour la ministre du développement que je suis.
Je ne peux pas commencer mon propos sur la CSU sans évoquer la tragédie que représente l'épidémie actuelle de maladie à virus Ebola.
Je me suis rendue la semaine dernière sur le terrain, en Guinée, à la rencontre des autorités, des personnels soignants locaux et internationaux, des ONG. La France prend toute sa part dans la mobilisation internationale qui se renforce chaque jour, pour que nous évitions le scénario du pire.
Cette épidémie, comme bien d'autres drames sanitaires, est au cœur du débat que nous allons avoir ce soir. La fragilité des systèmes de santé est, de manière générale, un facteur aggravant, voire amplifiant des crises.
Dans le cas de la propagation du virus Ebola, ceci est particulièrement vrai. Le manque de confiance de la population dans le personnel de santé et les autorités publiques en est un autre. Ces facteurs empêchent une prévention et une prise en charge efficaces. L'impact de l'épidémie s'étend ainsi au-delà des victimes directes d'Ebola et affecte le fonctionnement du système de santé dans sa globalité, et fragilise les économies dans leur ensemble. Toute la population, mais en particulier les femmes et les enfants, est impactée par l'interruption des services de santé au Liberia et en Sierra Leone par exemple.
Il ne peut donc pas y avoir, dans l'agenda qui est le nôtre, celui de la lutte contre l'extrême pauvreté, de réussite si nous ne renforçons pas durablement les systèmes de santé.
Nous ne pourrons pas réussir à atteindre nos objectifs, les objectifs du Millénaire pour le développement, ni ceux que nous allons nous fixer, les objectifs de développement durable, sans investir le champ du renforcement des systèmes de santé.
La CSU et des systèmes de santé renforcés sur le long terme permettent de faire face aux crises sanitaires. Une CSU facilite la démarche de consultation et augmente la confiance envers les structures de santé. Elle facilite de fait la détection et l'isolement des cas en situation d'épidémie. Les enquêtes sur l'épidémie actuelle d'Ebola montrent aussi que promulguer des soins intensifs classiques aux personnes infectées diminue considérablement la mortalité du virus, alors que nous n'avons pas encore de traitement spécifique ou de vaccin.
Le groupe de travail ouvert sur les objectifs de développement durable a abouti à une proposition ambitieuse, où la CSU est intégrée comme une des cibles de l'objectif santé. Je me félicite de ce résultat. Il importe désormais de veiller à préserver ce consensus afin que la CSU conserve une place centrale dans la perspective d'un accord en septembre 2015.
La CSU s'inscrit en effet en droite ligne avec le mandat que nous a donné Rio+20 pour l'agenda de développement après-2015.
Ce mandat, c'est celui, d'une part, de mettre la lutte contre la pauvreté au cœur du développement et, d'autre part, d'assurer un développement durable.
Généraliser la CSU, c'est notamment faire en sorte que les objectifs que nous nous fixons s'attaquent aux inégalités qui sont criantes dans ce domaine. Inégalités sociales, mais aussi inégalités de genre, inégalités géographiques entre les zones rurales et les pôles urbains.
Cela est d'autant plus important que de nouvelles menaces sanitaires apparaissent, liées notamment aux impacts du dérèglement climatique. Je pense par exemple au déplacement de certaines épidémies, ou encore à la multiplication des évènements extrêmes impliquant une mobilisation de tous les acteurs dans l'urgence.
La couverture sanitaire universelle relève, au premier chef, de la responsabilité des États. Chaque État est en effet responsable de la santé de ses citoyens et se doit de mettre en place un système permettant l'accès de tous à des traitements de qualité.
Cela nécessite la mobilisation de ressources domestiques même si bien sûr chacun reste libre ensuite de son modèle de financement.
La CSU est un investissement incontournable et économiquement rentable pour une stratégie de développement national. De nombreux ministres des Finances soutiennent la CSU, car elle peut sortir des millions de personnes de la pauvreté et peut permettre des gains de productivité et de croissance. Or, de trop nombreux pays négligent encore aujourd'hui cette réalité économique.
Le constat est simple : même en doublant ou en triplant l'APD, nous ne pourrions pas financer la CSU uniquement par ce mode, et cela n'aurait pas de sens. Il faut mobiliser les ressources nationales sur un tel enjeu structurel.
Mais ce n'est pas parce que les pays donateurs cherchent à se soustraire à leur solidarité : l'aide internationale est indispensable et a son rôle à jouer, pour accompagner les pays. La France soutient ainsi la Couverture sanitaire universelle de plusieurs manières, par des contributions globales annuelles de plus de 750 millions d'euros au secteur de la santé.
La France encourage les différents fonds thématiques de la santé, notamment le Fonds mondial et GAVI, à agir pour renforcer les systèmes de santé. C'est également la logique de notre assistance technique bilatérale, qui axe son action sur l'accès aux soins pour les populations vulnérables et le renforcement des systèmes de santé.
La communauté internationale doit poursuivre son appui aux systèmes de santé et à leur financement pérenne. Cet accompagnement passe par de l'assistance technique, tant il est important de construire des systèmes durables et responsables.
C'est ce que nous faisons avec l'Allemagne, dans l'initiative P4H sur le financement de la santé (Providing for Health), mise en œuvre par l'OMS.
Nous œuvrons également au travers de l'action du groupement d'intérêt public français appelé Santé Protection Sociale Internationale, qui met en œuvre des projets de coopération bilatérale avec des pays partenaires.
Pour conclure, généraliser la CSU nous semble une priorité, la terrible crise d'épidémie de maladie à virus Ebola nous le rappelle de manière abrupte.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 septembre 2014