Texte intégral
« L'égalité en question ».
Tels sont les premiers mots de l'intitulé de ce colloque.
Et c'est bien là l'enjeu : comment faire en sorte que l'égalité qui constitue l'un des fondements de notre république soit réelle dans notre société ?
Car même si la France est une terre où ce mot revêt un sens profond et prend ses racines dans les idées des philosophes des lumières, même si la France est depuis longtemps en marche vers l'égalité de toutes et tous, trop d'inégalités persistent et nous ne pouvons pas le tolérer.
Les inégalités entre les femmes et les hommes sont en effet toujours bien ancrées dans notre société et malgré les avancées notables, il nous faut continuer le combat, encore et toujours, contre les stéréotypes, les discriminations en tous genres, les violences faites aux femmes ou encore les écarts de rémunérations.
Les sujets sont vastes et la tâche difficile mais, collectivement, nous luttons pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes et nous progressons.
Nous progressons et vous pouvez compter sur moi pour poursuivre ce combat avec détermination et pugnacité.
Vous pouvez compter sur moi car l'égalité réelle est l'une des priorités de notre Président de la République et du Gouvernement.
Vous pouvez compter sur moi car j'ai la lutte contre les discriminations chevillée au corps depuis toujours.
Vous pouvez compter sur moi car j'ai à coeur de remplir la mission qui m'a été confiée au service des Françaises et des Français.
Combattre les inégalités entre les filles et les garçons, entre les femmes et les hommes, qui existent au sein des formations et des métiers scientifiques et techniques, fait ainsi partie des défis que nous avons à relever ensemble.
Les stéréotypes sont coriaces et dans ce domaine, on voit bien qu'ils sont à l'origine des écarts profonds qui persistent.
80% des garçons qui s'estiment bons en maths vont en S contre seulement 60% des filles.
A l'issue de la classe de 3e, plus de 20% des jeunes se retrouvent dans des filières comportant moins de 30% d'élèves de l'autre sexe, filières qui sont très souvent professionnelles ou technologiques.
Au lycée, les Sections Technologiques Industrielles (STI) comptent moins de 11% de filles quand les Sciences et Technologies de la Santé et du Social (ST2S) comptent moins de 8% de garçons.
Et finalement, nous avons ce chiffre : 17% seulement des métiers sont mixtes.
Pourtant les femmes peuvent aussi bien que les hommes réussir dans les filières et métiers scientifiques et techniques, tout comme les hommes peuvent aussi bien que les femmes réussir dans les métiers sociaux.
Pourquoi alors de tels écarts ?
Parce que dès la petite enfance, nous sommes confrontés à un ensemble de préjugés qui nous conduisent à orienter nos choix, ou à nous les voir imposer. Cela conduit à une reproduction de la situation existante.
Nous avons dans l'idée qu'un homme à moins de qualités d'écoute et de sensibilité qu'une femme. Il n'a donc pas vocation à être assistante sociale, métier dans lequel il ne sera pas valorisé qui plus est.
Une femme est censée être plus faible qu'un homme sur le plan physique. On estime donc que sa place n'est pas dans les travaux publics parce que c'est une filière d'homme, une filière qui nécessite des muscles. Par contre, quand il s'agit de manipuler des patients, on ne se questionne pas sur la force requise et sur le travail physique accompli par l'aide soignante.
Pourquoi ?
Parce ce que c'est comme ça. Le chantier de construction c'est pour les hommes, aide soignante c'est pour les femmes.
Voilà ce qu'on enseigne à nos enfants.
Voilà ce qu'on inscrit profondément dans leurs représentations et ce qui constitue les codes de notre société.
Et bien ces codes il faut les combattre.
Ils sont contradictoires.
Ils sont infondés.
Et surtout, ils sont injustes.
Pourquoi un homme ne pourrait-il pas travailler dans une crèche ?
Pourquoi une femme ne pourrait-elle pas être garagiste ?
Nous sommes au 21e siècle. Le progrès technique a largement et depuis longtemps pris le pas sur la simple force physique.
A l'heure des nouvelles technologies et de la course mondiale vers la recherche et le progrès, la France a besoin de tous ses talents. Mais comment répondre à ce besoin si les femmes sont exclues des filières scientifiques et techniques par autocensure ou parce que la place qu'elles devraient avoir ne leur est pas accordée ?
Nous devons lutter contre ces stéréotypes dès l'enfance. Le papa avec un marteau et la maman avec le tablier dans les manuels d'éducation ou magazines pour nos enfants, c'est cela qu'il faut changer pour déconstruire les idées reçues.
Le travail réalisé dans ce sens par le Secrétariat des Droits des Femmes et par le Ministère de l'Education est très important. En effet, un plan d'action pour l'égalité entre les filles et les garçons à l'école est mis en oeuvre depuis cette rentrée.
Il repose sur : -la généralisation de la formation à l'égalité filles-garçons pour les enseignants et cadres de l'éducation nationale - l'enrichissement des séquences pédagogiques à partir d'outils rénovés et simplifiés - l'inscription dans les projets d'école et d'établissement de l'égalité entre les filles et les garçons. Ce sera ainsi l'occasion d'impliquer les parents et de leur faire partager ce projet éducatif. Ces trois points sont essentiels car l'école est à la fois l'un des principaux lieux de socialisation donc de transmission d'un certain nombre de préjugés, et l'un des principaux vecteurs pour lutter contre les stéréotypes.
Parallèlement, nous devons poursuivre l'objectif de parité dans tous les métiers, y compris dans les métiers scientifiques et techniques : à l'Université, et vous en avez longuement discuté lors du colloque de l'an passé, dans le secteur du BTP ou encore dans l'agriculture.
La parité dans les métiers donc, mais aussi dans leurs organes de représentation.
Et c'est ce que nous faisons.
La loi du 4 août 2014 pour l'Egalité réelle entre les femmes et les hommes s'est donnée comme objectif de favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales.
Les chambres d'agriculture, les chambres des métiers et de l'artisanat, les chambres de commerce et d'industrie ou encore le Conseil Supérieur de l'Education sont ainsi concernés par la loi et doivent respecter les critères de parité imposés. Les entreprises de plus de 250 salariés non cotées en bourse sont elles aussi désormais soumises aux obligations de parité dans leur conseil d'administration.
Ce sont de grandes avancées car en changeant le paysage des représentants, les représentations globales seront-elles aussi amenées à se modifier.
Alors bien sur, la parité ne fait pas tout.
La mixité ne se résume pas à la coprésence des hommes et des femmes et mixité ne veut pas dire égalité.
Mais c'est néanmoins un pas en avant, un pas obligatoire pour faire avancer les mentalités, un pas pour qu'au plus haut niveau de chaque organisation, tout le monde soit sensibilisé sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Le Premier Ministre a fixé comme objectif qu'un tiers des métiers soit mixte d'ici à 2025. C'est un objectif ambitieux mais qu'il est indispensable de tenir.
C'est pourquoi nous avons lancé une plateforme d'actions pour la mixité des métiers avec une trentaine de partenaires dont des régions, des entreprises et des fédérations professionnelles. Mettre la question de la mixité au coeur du nouveau service public régional de l'orientation ou mobiliser la commande publique comme levier de promotion de la mixité, notamment dans les grands chantiers, font ainsi partie des actions visées et qui sont pour certaines déjà engagées. Nous voulons faire basculer dix secteurs d'activité clés : l'accueil, la petite enfance, le grand âge, les services à la personne, la sécurité civile, l'énergie, les transports et le développement durable qui est porteur d'emplois.
Avec la Fondation Egalité Mixité, la fondation Face, IMS et leur réseau de 5000 entreprises, nous allons poursuivre avec détermination la mise en oeuvre de cette plate forme.
De même, avec les Conférences de l'Egalité, à travers lesquelles chaque Ministère rend compte de son action pour l'égalité femmes-hommes, c'est dans chaque politique publique que nous luttons contre les discriminations dont les femmes sont victimes.
Ces différents dispositifs répondent bien aux 20 propositions des femmes scientifiques et ingénieures pour préparer l'avenir et ils posent les bases d'un changement dans les pratiques et les mentalités de l'ensemble des acteurs et actrices de l'éducation et de l'orientation professionnelle.
Ces bases nous ne les posons pas seuls.
Le travail que vous faîtes est remarquable et s'inscrit dans cette dynamique et cette dynamique est partenariale et primordiale.
Nous sommes en mouvement.
Et il vous revient à vous, la nouvelle génération, vous qui étudiez dans les lycées, de rejoindre ce mouvement et d'y participer.
C'est pour vous que nous engageons tant d'énergie, pour bâtir une société plus juste, cette société dans laquelle vous vivrez.
Et c'est donc avec vous que nous y parviendrons.
En refusant les stéréotypes d'un autre temps.
En luttant contre toutes les formes de discriminations.
Les choses changent. Nous rencontrons des obstacles mais elles changent.
Dans les années 80, seulement 3% des ingénieurs étaient des femmes, elles sont aujourd'hui 34%. Ce n'est pas encore 50% mais c'est bien le signe qu'en persévérant, nous avançons dans la bonne direction, la direction de l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Je vous remercie.
Source http://www.femmesetsciences.fr, le 16 octobre 2014