Texte intégral
A. Chabot - Le syndicat national des gynécologues-obstétriciens a maintenu son mot d'ordre de grève à partir du 1er août, ce qui signifie plus d'accouchements dans les cliniques privées à partir de cette date. Vous les avez reçus longuement avant-hier, est-ce que vous avez maintenant les moyens d'empêcher ce mouvement de grève, de leur donner satisfaction ?
- "Je le crois, je le pense, mais avant de parler des moyens, de cette longue discussion et des moyens qui sont proposés, je voudrais dire que la grève des accouchements n'est pas admissible. Elle n'est ni moralement admissible, ni déontologiquement admissible, bref, cela ne peut pas être, comme certains l'ont dit et j'ai été très choqué, la grève des camionneurs. Les femmes ne sont pas des camions et les obstétriciens ne sont pas des camionneurs. Il y a une obligation du service public et une obligation morale, médicale, le président du Conseil de l'ordre s'est d'ailleurs très bien exprimé à ce propos. Mais je suis sûr, enfin j'espère et je suis presque sûr, que les gynécos-obstétriciens n'en viendront pas là, parce que"
C'est-à-dire que vous leur lancez un appel à leurs responsabilités, simplement, ce matin ?
- "Oui, responsabilité et même plus que ça. Je leur demande d'être des médecins, je comprends qu'ils soient syndicalistes en même temps. Je sais qu'il faut améliorer l'ensemble du service de la naissance, cela s'appelle la périnatalité. Il y a eu des décrets comme ça. Il y a trois ans, ils ont été très très bien accueillis, et maintenant il faut pouvoir les mettre en uvre, d'accord. Mais ils demandaient en gros 30 millions. Nous leur accordons près de 100 millions. Pas seulement aux gynécos-obstétriciens, mais à toutes les professions de naissance, pour appliquer ces décrets de périnatalité pour que les femmes enceintes et les enfants, auxquels je pense avant les autres puissent naître dans la sécurité. Je pense que cela doit s'apaiser, il y a évidemment aussi d'autres mesures, la nomenclature des actes, c'est-à-dire la façon de rémunérer les actes, comme l'accouchement, l'anesthésie péridurale"
Ils sont moins bien payés que dans le public et ils trouvent ça assez anormal.
- "Non, en fait c'est payé différemment vous savez. Et puis tout ça; ce sont les Français qui paient. Moi j'aimerais bien pouvoir disposer d'une plus grosse enveloppe et un jour il faudra réformer ce système en fonction des besoins. Donc cette nomenclature des actes va être changée, je l'espère, en octobre. Il y a un soutien financier qui a déjà, en l'an 2001, été de 100 millions fléchés vers les maternités privées. Encore 100 millions, sinon plus, en 2002, une quarantaine de postes de praticiens hospitaliers. Des passerelles entre le privé et le public. Nous avons porté de 80 à 200 les postes de spécialité de gynéco-obstétrique au niveau de l'internat. Le quota des étudiants, le quota des sages-femmes va être augmenté. Un projet de loi de modernisation du système de santé qui fait que - ce que je déteste - les procédures, la judiciarisation du système de santé pourra être évité, bref, nous avons fait vraiment ce que nous avons pu. Au-delà ce n'est pas possible, je le dis clairement, et au-delà ce sera leurs responsabilités non seulement d'assumer - mais je ne crois pas une seconde - d'assumer cette grève, difficile à imaginer, impossible à imaginer et d'éventuelles difficultés."
Cela veut dire une nouvelle rencontre avec eux dans les jours qui viennent ou pas du tout, ce n'est pas nécessaire selon vous ?
- "Nous nous sommes parlés longuement hier soir encore. Par rapport à leur demande, ils auraient dû être surpris et contents, puisque les offres étaient supérieures. Je pense qu'ils se rendent compte que c'est un gros effort des Français, qu'on n'ira pas plus loin, mais nous nous revoyons fin août début septembre."
Mais vous dites quoi au fond : ils font du corporatisme ou ils ont un vrai souci de la santé, à la fois des femmes et des enfants à naître ?
- "Je dis beaucoup plus que ça, ils le disent aussi d'ailleurs. Les vocations en médecine sont en train d'évoluer, les métiers pénibles sont fuis et c'est vrai que leur métier est pénible et c'est vrai que je les comprends et c'est vrai que c'est beau de donner le jour aux enfants. Lorsqu'il faut prendre des gardes, lorsqu'il faut rester chez soi, lorsqu'il faut se lever la nuit, c'est de la pénibilité comme on dit, bref, c'est une vie difficile par rapport à d'autres professions, par rapport à d'autres spécialités dans la profession médicale que j'aime. Oui, c'est vrai, cela évolue, on demande plus aux gens, on demande plus aux médecins, je comprends très bien qu'entre le privé et le public, il y ait des ajustements et des évolutions, c'est dur."
C'est-à-dire qu'on disait autrefois que c'était ceux du privé qui étaient grands bénéficiaires et privilégiés, ce n'est plus vrai, dans ce domaine comme dans d'autres.
- "Oui, les différences de salaire sont grandes, mais bien entendu, le fonctionnement n'est pas le même et il faut penser que dans les hôpitaux il y a aussi d'autres tâches de recherches, d'éducation, de formation. C'est un autre univers, il est beaucoup plus coûteux, il est beaucoup plus grand en terme d'activités. Mais nous avons besoin du privé, 40 % des naissances ont eu lieu dans le privé. Je vous signale que le pays, heureusement, la France connaît une progression du nombre des naissances, près de 800.000. Ils sont 3.500 les gynécos-obstétriciens, cela fait du travail en plus, je les comprends, nous les avons compris. Maintenant je crois qu'il faut s'arrêter."
Depuis hier soir, vous avez le rapport des ingénieurs du Centre scientifique et technique du bâtiment à propos de l'hôpital Georges-Pompidou. Alors est-ce qu'on va savoir une bonne foi et grâce à ce rapport, pourquoi, comment ces cas de légionellose se développent? Pourquoi on n'arrive pas à trouver de solutions ?
- "Dans le système de santé, il n'y a pas que des choses qui ne marchent pas "
Il y a les tuyaux !
- "Oui, il y a les tuyaux, l'hôpital Pompidou marche, il est bon, il accueille des malades et ceux-là on n'en parle pas. Il y en a plus de 20.000 qui ont été bien traités, pensons à ça aussi. Oui, alors j'ai ce rapport dans les mains, je ne dis pas qu'il me tombe des mains, d'ailleurs il sera rendu public, mais il est terriblement technique. Alors je voudrais dire deux choses, en ce qui concerne les légionelloses, c'est-à-dire ce qui intéresse les malades"
Il y en a combien au fond, parce qu'on n'a jamais les mêmes chiffres, combien de cas déclarés, combien de morts ?
- "Si, on sait qu'en l'an 2000, il y a eu neuf cas, dont quatre décès, dont deux seulement étaient imputables à une légionellose qui aurait été contractée à Pompidou. En 2001, il y a eu trois cas, deux décès, dont un seulement imputable. Mais je voudrais dire d'abord, oui, il y a des risques et je tente d'en faire la pédagogie, c'est-à-dire l'information, l'apprentissage du risque moderne. Dans les hôpitaux, on ne va pas éradiquer, c'est-à-dire supprimer tous les risques de légionellose."
Mais il n'y en a pas plus qu'ailleurs ?
- "Seulement 20 % des légionelloses viennent des hôpitaux et les 80 autres, pourquoi on n'en parle pas ? Il faut en parler, il y a des systèmes modernes, qui sont des systèmes qu'on appelle hydro-réfrigérants, auto-réfrigérants, plein de trucs réfrigérants et ceux-là sont dangereux. Et d'ailleurs on le sait, j'attire l'intention encore une fois de France 2, France 3, il y a des tours qui crachent des légionelles dans l'atmosphère parisien, il n'y a pas qu'eux bien sûr, au-dessus de bien des immeubles. Alors en ce moment à Pompidou, pour répondre à votre question, je crois que le circuit dans les chambres à risques, là où les malades sont fragiles - parce que vous comprenez, non seulement il y en a très peu par rapport au reste, 20 % dans les hôpitaux, mais ils atteignent des gens qui sont en moindre résistance - donc je crois que dans les chambres à risques, on a mis des filtres sur les robinets, eau chaude, eau froide. Il faudra étendre le nombre de ces filtres sur toutes les autres chambres."
Mais les tuyaux sont en cause ou pas dans cette affaire ? C'est ça le fond du rapport ?
- "Oui, les tuyaux sont en cause, sur dix-huit qu'on a examinés, seize étaient normaux, deux étaient corrodés, il y a un problème d'acier galvanisé. Eventuellement, il faudra que les techniciens le disent, il y aura encore des efforts à faire."
C'est-à-dire changer la tuyauterie de l'hôpital, cela paraît vraisemblable ou pas ?
- "Soyons plus précis : Pompidou est ouvert, Georges-Pompidou fonctionne, l'hôpital marche"
On ne fermera pas ses services pendant une période ?
- "Il ne fermera pas après ce rapport, sûrement pas, mais nous surveillons, nous continuonsC'est difficile, vous savez, cette expertise là. C'est un problème de bureau d'études, c'est un problème de matériaux, de provenance de matériaux etc. Le rapport sera public, on s'en rendra compte."
Donc les décisions seront prises plus tard, c'est ça que vous nous dites ce matin, pas tout de suite.
- "Non, ce que l'on peut dire, c'est qu'aujourd'hui, il n'y a pas de décision à prendre. Nous sommes plutôt satisfaits, ce n'est pas parfait, mais nous sommes plutôt satisfaits de ce qui est sorti de ce rapport, oui."
Alors si on change de sujet
- "Eh bien dites donc, on change beaucoup !"
Après le sommet de Gênes, vous avez dit qu'il y avait un risque, au fond, de "mai 68 au niveau du monde". On voit bien qu'aujourd'hui, il y a des manifestations, encore hier soir à Paris, en Italie, en Allemagne, au Canada. Qu'est-ce que cela veut dire "mai 68 mondial", la révolte du monde contre la mondialisation ?
- "Mais oui, il faut que la jeunesse trouve ses motifs d'exaltation et de combat. Elle est en train de les trouver autour du développement durable, autour de cette fracture entre le monde pauvre et le monde riche. Et surtout, je crains qu'une fracture se creuse, une deuxième, une double fracture. Cela existe physiologiquement, des doubles fractures entre les générations. Ce n'est pas parce que les parents, comme on dit, ont fait mai 68, que les enfants n'ont pas les dents agacées. Chaque génération doit conquérir son territoire, chaque génération doit trouver son exaltation, son idéal et son destin. C'est en train de se faire. Moi j'ai dit mai 68 mondial, ce n'était pas tellement péjoratif dans ma bouche, mais oui, cela se poursuit et cela se poursuivra. Et quand on demande... - et je sais que ce n'est pas l'orthodoxie, et je suis persuadé qu'il y a des difficultés - mais moi je pense qu'il y aura à terme et de manière volontaire une taxation des mouvements de capitaux pour le tiers monde."
La taxe Tobin ?
- "Ce n'est pas exactement la taxe Tobin. Il y a déjà les fonds éthiques. Les fonds éthiques de placement, ils n'existaient pas il y a cinq ans. C'est la même chose, tout cela va se poursuivre. Alors oui, bien sûr, mai 68 mondial, globalisation, mondialisation des batailles, eh bien c'est normal. Il y a une globalisation de l'intérêt, une mondialisation, il y a ce qu'on a appelé le droit d'ingérence, il y a maintenant des tribunaux internationaux, évidemment il y a des militants internationaux."
Pour la campagne de 2002, on annonce au Parti socialiste, des idées décapantes pour L. Jospin. Pourriez-vous aussi donner des idées décapante, comme celles que vous venez d'avancer ?
- "Décapons les tuyaux, oui absolument, j'espère."
Là, vous participerez à la campagne par exemple ?
- " Oui je crois."
Aucun débat n'est tabou, aucun sujet n'est tabou ?
- "J'espère bien !"
Par exemple si je reviens sur l'euthanasie, c'était un débat tabou pour vous ?
- "Non, c'était une incompréhension et qu'on cesse Je suis celui qui a développé les soins palliatifs en France, j'en suis assez fier. Vendredi dernier, j'étais encore à la maison à Gardanne, avec l'ensemble des groupes de soins palliatifs de PACA. Qu'on m'arrête de me chercher cette mauvaise querelle. Il y a pleins de mots pour dire des choses semblables, mais qui ne sont quand même pas exactement pareilles : la mort douce, la mort digne, le soulagement de la douleur, le soins palliatifs, l'euthanasie active, l'euthanasie passive, etc. . De Monseigneur Lustiger aux associations, des réanimateurs à tous les spécialistes et à tous les moralistes et les philosophes, nous avons tenu des séances formidables, vous verrez, je ne suis pas pressé, je ne fais pas le malin, je crois qu'il faut faire évoluer notre société. Les soins palliatifs prennent en charge au mieux, mais il faut encore les développer, près de 95 % de la population. Il reste 5 % de cas très difficiles qui n'ont rien à voir avec ce que j'ai dit. Moi j'ai parlé de guerre, de gens qui allaient mourir et qu'il fallait soulager."
Mais enfin c'est un débat qu'il faudra un jour ou l'autre avoir.
- "Mais qu'on arrête de me chercher querelle avec ça. C'est difficile, suffisamment difficile pour qu'on ne joue pas au chat et à la souris."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 30 juillet 2001)
- "Je le crois, je le pense, mais avant de parler des moyens, de cette longue discussion et des moyens qui sont proposés, je voudrais dire que la grève des accouchements n'est pas admissible. Elle n'est ni moralement admissible, ni déontologiquement admissible, bref, cela ne peut pas être, comme certains l'ont dit et j'ai été très choqué, la grève des camionneurs. Les femmes ne sont pas des camions et les obstétriciens ne sont pas des camionneurs. Il y a une obligation du service public et une obligation morale, médicale, le président du Conseil de l'ordre s'est d'ailleurs très bien exprimé à ce propos. Mais je suis sûr, enfin j'espère et je suis presque sûr, que les gynécos-obstétriciens n'en viendront pas là, parce que"
C'est-à-dire que vous leur lancez un appel à leurs responsabilités, simplement, ce matin ?
- "Oui, responsabilité et même plus que ça. Je leur demande d'être des médecins, je comprends qu'ils soient syndicalistes en même temps. Je sais qu'il faut améliorer l'ensemble du service de la naissance, cela s'appelle la périnatalité. Il y a eu des décrets comme ça. Il y a trois ans, ils ont été très très bien accueillis, et maintenant il faut pouvoir les mettre en uvre, d'accord. Mais ils demandaient en gros 30 millions. Nous leur accordons près de 100 millions. Pas seulement aux gynécos-obstétriciens, mais à toutes les professions de naissance, pour appliquer ces décrets de périnatalité pour que les femmes enceintes et les enfants, auxquels je pense avant les autres puissent naître dans la sécurité. Je pense que cela doit s'apaiser, il y a évidemment aussi d'autres mesures, la nomenclature des actes, c'est-à-dire la façon de rémunérer les actes, comme l'accouchement, l'anesthésie péridurale"
Ils sont moins bien payés que dans le public et ils trouvent ça assez anormal.
- "Non, en fait c'est payé différemment vous savez. Et puis tout ça; ce sont les Français qui paient. Moi j'aimerais bien pouvoir disposer d'une plus grosse enveloppe et un jour il faudra réformer ce système en fonction des besoins. Donc cette nomenclature des actes va être changée, je l'espère, en octobre. Il y a un soutien financier qui a déjà, en l'an 2001, été de 100 millions fléchés vers les maternités privées. Encore 100 millions, sinon plus, en 2002, une quarantaine de postes de praticiens hospitaliers. Des passerelles entre le privé et le public. Nous avons porté de 80 à 200 les postes de spécialité de gynéco-obstétrique au niveau de l'internat. Le quota des étudiants, le quota des sages-femmes va être augmenté. Un projet de loi de modernisation du système de santé qui fait que - ce que je déteste - les procédures, la judiciarisation du système de santé pourra être évité, bref, nous avons fait vraiment ce que nous avons pu. Au-delà ce n'est pas possible, je le dis clairement, et au-delà ce sera leurs responsabilités non seulement d'assumer - mais je ne crois pas une seconde - d'assumer cette grève, difficile à imaginer, impossible à imaginer et d'éventuelles difficultés."
Cela veut dire une nouvelle rencontre avec eux dans les jours qui viennent ou pas du tout, ce n'est pas nécessaire selon vous ?
- "Nous nous sommes parlés longuement hier soir encore. Par rapport à leur demande, ils auraient dû être surpris et contents, puisque les offres étaient supérieures. Je pense qu'ils se rendent compte que c'est un gros effort des Français, qu'on n'ira pas plus loin, mais nous nous revoyons fin août début septembre."
Mais vous dites quoi au fond : ils font du corporatisme ou ils ont un vrai souci de la santé, à la fois des femmes et des enfants à naître ?
- "Je dis beaucoup plus que ça, ils le disent aussi d'ailleurs. Les vocations en médecine sont en train d'évoluer, les métiers pénibles sont fuis et c'est vrai que leur métier est pénible et c'est vrai que je les comprends et c'est vrai que c'est beau de donner le jour aux enfants. Lorsqu'il faut prendre des gardes, lorsqu'il faut rester chez soi, lorsqu'il faut se lever la nuit, c'est de la pénibilité comme on dit, bref, c'est une vie difficile par rapport à d'autres professions, par rapport à d'autres spécialités dans la profession médicale que j'aime. Oui, c'est vrai, cela évolue, on demande plus aux gens, on demande plus aux médecins, je comprends très bien qu'entre le privé et le public, il y ait des ajustements et des évolutions, c'est dur."
C'est-à-dire qu'on disait autrefois que c'était ceux du privé qui étaient grands bénéficiaires et privilégiés, ce n'est plus vrai, dans ce domaine comme dans d'autres.
- "Oui, les différences de salaire sont grandes, mais bien entendu, le fonctionnement n'est pas le même et il faut penser que dans les hôpitaux il y a aussi d'autres tâches de recherches, d'éducation, de formation. C'est un autre univers, il est beaucoup plus coûteux, il est beaucoup plus grand en terme d'activités. Mais nous avons besoin du privé, 40 % des naissances ont eu lieu dans le privé. Je vous signale que le pays, heureusement, la France connaît une progression du nombre des naissances, près de 800.000. Ils sont 3.500 les gynécos-obstétriciens, cela fait du travail en plus, je les comprends, nous les avons compris. Maintenant je crois qu'il faut s'arrêter."
Depuis hier soir, vous avez le rapport des ingénieurs du Centre scientifique et technique du bâtiment à propos de l'hôpital Georges-Pompidou. Alors est-ce qu'on va savoir une bonne foi et grâce à ce rapport, pourquoi, comment ces cas de légionellose se développent? Pourquoi on n'arrive pas à trouver de solutions ?
- "Dans le système de santé, il n'y a pas que des choses qui ne marchent pas "
Il y a les tuyaux !
- "Oui, il y a les tuyaux, l'hôpital Pompidou marche, il est bon, il accueille des malades et ceux-là on n'en parle pas. Il y en a plus de 20.000 qui ont été bien traités, pensons à ça aussi. Oui, alors j'ai ce rapport dans les mains, je ne dis pas qu'il me tombe des mains, d'ailleurs il sera rendu public, mais il est terriblement technique. Alors je voudrais dire deux choses, en ce qui concerne les légionelloses, c'est-à-dire ce qui intéresse les malades"
Il y en a combien au fond, parce qu'on n'a jamais les mêmes chiffres, combien de cas déclarés, combien de morts ?
- "Si, on sait qu'en l'an 2000, il y a eu neuf cas, dont quatre décès, dont deux seulement étaient imputables à une légionellose qui aurait été contractée à Pompidou. En 2001, il y a eu trois cas, deux décès, dont un seulement imputable. Mais je voudrais dire d'abord, oui, il y a des risques et je tente d'en faire la pédagogie, c'est-à-dire l'information, l'apprentissage du risque moderne. Dans les hôpitaux, on ne va pas éradiquer, c'est-à-dire supprimer tous les risques de légionellose."
Mais il n'y en a pas plus qu'ailleurs ?
- "Seulement 20 % des légionelloses viennent des hôpitaux et les 80 autres, pourquoi on n'en parle pas ? Il faut en parler, il y a des systèmes modernes, qui sont des systèmes qu'on appelle hydro-réfrigérants, auto-réfrigérants, plein de trucs réfrigérants et ceux-là sont dangereux. Et d'ailleurs on le sait, j'attire l'intention encore une fois de France 2, France 3, il y a des tours qui crachent des légionelles dans l'atmosphère parisien, il n'y a pas qu'eux bien sûr, au-dessus de bien des immeubles. Alors en ce moment à Pompidou, pour répondre à votre question, je crois que le circuit dans les chambres à risques, là où les malades sont fragiles - parce que vous comprenez, non seulement il y en a très peu par rapport au reste, 20 % dans les hôpitaux, mais ils atteignent des gens qui sont en moindre résistance - donc je crois que dans les chambres à risques, on a mis des filtres sur les robinets, eau chaude, eau froide. Il faudra étendre le nombre de ces filtres sur toutes les autres chambres."
Mais les tuyaux sont en cause ou pas dans cette affaire ? C'est ça le fond du rapport ?
- "Oui, les tuyaux sont en cause, sur dix-huit qu'on a examinés, seize étaient normaux, deux étaient corrodés, il y a un problème d'acier galvanisé. Eventuellement, il faudra que les techniciens le disent, il y aura encore des efforts à faire."
C'est-à-dire changer la tuyauterie de l'hôpital, cela paraît vraisemblable ou pas ?
- "Soyons plus précis : Pompidou est ouvert, Georges-Pompidou fonctionne, l'hôpital marche"
On ne fermera pas ses services pendant une période ?
- "Il ne fermera pas après ce rapport, sûrement pas, mais nous surveillons, nous continuonsC'est difficile, vous savez, cette expertise là. C'est un problème de bureau d'études, c'est un problème de matériaux, de provenance de matériaux etc. Le rapport sera public, on s'en rendra compte."
Donc les décisions seront prises plus tard, c'est ça que vous nous dites ce matin, pas tout de suite.
- "Non, ce que l'on peut dire, c'est qu'aujourd'hui, il n'y a pas de décision à prendre. Nous sommes plutôt satisfaits, ce n'est pas parfait, mais nous sommes plutôt satisfaits de ce qui est sorti de ce rapport, oui."
Alors si on change de sujet
- "Eh bien dites donc, on change beaucoup !"
Après le sommet de Gênes, vous avez dit qu'il y avait un risque, au fond, de "mai 68 au niveau du monde". On voit bien qu'aujourd'hui, il y a des manifestations, encore hier soir à Paris, en Italie, en Allemagne, au Canada. Qu'est-ce que cela veut dire "mai 68 mondial", la révolte du monde contre la mondialisation ?
- "Mais oui, il faut que la jeunesse trouve ses motifs d'exaltation et de combat. Elle est en train de les trouver autour du développement durable, autour de cette fracture entre le monde pauvre et le monde riche. Et surtout, je crains qu'une fracture se creuse, une deuxième, une double fracture. Cela existe physiologiquement, des doubles fractures entre les générations. Ce n'est pas parce que les parents, comme on dit, ont fait mai 68, que les enfants n'ont pas les dents agacées. Chaque génération doit conquérir son territoire, chaque génération doit trouver son exaltation, son idéal et son destin. C'est en train de se faire. Moi j'ai dit mai 68 mondial, ce n'était pas tellement péjoratif dans ma bouche, mais oui, cela se poursuit et cela se poursuivra. Et quand on demande... - et je sais que ce n'est pas l'orthodoxie, et je suis persuadé qu'il y a des difficultés - mais moi je pense qu'il y aura à terme et de manière volontaire une taxation des mouvements de capitaux pour le tiers monde."
La taxe Tobin ?
- "Ce n'est pas exactement la taxe Tobin. Il y a déjà les fonds éthiques. Les fonds éthiques de placement, ils n'existaient pas il y a cinq ans. C'est la même chose, tout cela va se poursuivre. Alors oui, bien sûr, mai 68 mondial, globalisation, mondialisation des batailles, eh bien c'est normal. Il y a une globalisation de l'intérêt, une mondialisation, il y a ce qu'on a appelé le droit d'ingérence, il y a maintenant des tribunaux internationaux, évidemment il y a des militants internationaux."
Pour la campagne de 2002, on annonce au Parti socialiste, des idées décapantes pour L. Jospin. Pourriez-vous aussi donner des idées décapante, comme celles que vous venez d'avancer ?
- "Décapons les tuyaux, oui absolument, j'espère."
Là, vous participerez à la campagne par exemple ?
- " Oui je crois."
Aucun débat n'est tabou, aucun sujet n'est tabou ?
- "J'espère bien !"
Par exemple si je reviens sur l'euthanasie, c'était un débat tabou pour vous ?
- "Non, c'était une incompréhension et qu'on cesse Je suis celui qui a développé les soins palliatifs en France, j'en suis assez fier. Vendredi dernier, j'étais encore à la maison à Gardanne, avec l'ensemble des groupes de soins palliatifs de PACA. Qu'on m'arrête de me chercher cette mauvaise querelle. Il y a pleins de mots pour dire des choses semblables, mais qui ne sont quand même pas exactement pareilles : la mort douce, la mort digne, le soulagement de la douleur, le soins palliatifs, l'euthanasie active, l'euthanasie passive, etc. . De Monseigneur Lustiger aux associations, des réanimateurs à tous les spécialistes et à tous les moralistes et les philosophes, nous avons tenu des séances formidables, vous verrez, je ne suis pas pressé, je ne fais pas le malin, je crois qu'il faut faire évoluer notre société. Les soins palliatifs prennent en charge au mieux, mais il faut encore les développer, près de 95 % de la population. Il reste 5 % de cas très difficiles qui n'ont rien à voir avec ce que j'ai dit. Moi j'ai parlé de guerre, de gens qui allaient mourir et qu'il fallait soulager."
Mais enfin c'est un débat qu'il faudra un jour ou l'autre avoir.
- "Mais qu'on arrête de me chercher querelle avec ça. C'est difficile, suffisamment difficile pour qu'on ne joue pas au chat et à la souris."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 30 juillet 2001)