Texte intégral
Le président de la Confédération Générale des Cadres qui rencontrait Lionel Jospin mardi 19 juin 2001, propose que le gouvernement stimule l'emploi et la formation des quinquagénaires. Jean-Luc Cazettes souhaite, par ailleurs, que la contribution Delalande soit abrogée.
Job50'Mag : Vous avez rencontré Lionel Jospin, mardi 19 juin, et vous avez évoqué le thème des cadres de 50 ans. Quel a été la teneur de votre entretien ?
Jean-Luc Cazettes : Le Premier Ministre, qui souhaite relancer le dialogue social, voulait que nous lui proposions quelques thèmes de réflexion. Je tenais à lui parler des salariés âgés : il s'accorde à reconnaître que le terme est affreux. A 50 ans et plus, on est encore dans la force de l'âge.
Mais par delà ce problème de vocabulaire, il existe une exception française : un quinquagénaire sur trois seulement dispose d'un emploi. Les deux tiers sont au chômage, en pré-retraite en convention FNE (NDLR: les cadres en activité peuvent suivre - dans le cadre du congé individuel formation ou du congé de conversion- un stage du Fonds National pour l'Emploi afin d'actualiser leurs compétences). Ces mesures étaient compréhensibles lorsque les restructurations se multipliaient. Mais la France n'est plus vraiment dans ce cas de figure. C'est devenu au fil du temps un moyen pour les employeurs de réduire la charge des salaires (les seniors ont en effet des rémunérations plus élevées). C'est dramatique car les entreprises perdent leur mémoire et entament le débat sur les retraites.
Job50'Mag : Que proposez vous ?
J-L C : J'ai longuement discuté avec des DRH et des responsables du Medef . Ils confirment que l'exclusion des quinquas est bien liée au poids de leurs rémunérations. C'est la principale raison. Je pense donc qu'il faut durcir les textes sur la non-discrimination, favoriser la formation et le déroulement des carrières. Pourquoi ne pas jouer avec un système d'exonérations fiscales ou sociales. En tout cas, il faut abandonner la contribution Delalande (NDLR : pénalité financière versée par les entreprises licenciant des quinquagénaires, lien avec " les licenciements des quinquagénaires ").
La survivance de cette contribution souligne un drame français : on prend des mesures dans une situation donnée sans l'adapter ou l'abroger ensuite ! Lorsque Jean-Pierre Delalande a fait voter sa contribution, les restructurations seules rythmaient la conjoncture économique française. Aujourd'hui, la donne est différente puisque nous sommes en période de reprise. De fait, cette pénalité a aujourd'hui un effet pervers puisqu'elle dissuade les employeurs d'embaucher des quinquagénaires (par peur d'avoir à payer cette amende s'ils doivent ensuite procéder à un licenciement). Jean-Pierre Delalande, lui-même, me l'a affirmé : " je suis le premier à vouloir la suppression de mon amendement. Mais dans l'Hexagone, on préfère entasser les législations Maintenant il s'agit de manier la carotte plutôt que le bâton !
Job50'Mag: Quelle fut la réaction de Lionel Jospin ?
J-L C: Il est intéressé car c'est un point de passage obligé avant le débat sur les retraites. Tant qu'en effet un tiers seulement des quinquas est actif nous ne pouvons rien construire de cohérent. J'espère qu'il prendra en compte nos revendications.
Dans ce domaine, le Medef n'est pas à une contradiction près. Il affirme clairement et officiellement le fait que les salariés seniors coûtent chers et encourage les entreprises à rajeunir leurs effectifs. Il y a une contradiction manifeste à réclamer, à la fois, le recul de l'âge de la retraite et précipiter les départs des salariés âgés. Certains quinquas ont toujours autant de mal à faire la soudure. Ils ont entre 50 et 55 ans, éprouvent d'immenses difficultés à retrouver du travail et ne peuvent encore bénéficier d'une pré-retraite.
Job50'Mag: A ce propos, quelle est votre position en matière de pré-retraite ?
J-L C: Elle est la solution la moins pénalisante pour les entreprises qui veulent améliorer le ratio charges salariales/ résultats. Je pense qu'il faudrait conditionner le recours au système de pré-retraite à la situation financière de l'entreprise. En 2000, les constructeurs automobiles ont signé avec l'Etat un accord facilitant le départ massifs en pré-retraite de salariés âgés. C'est oublier que ce type de mesures bloque la formation des quinquagénaires.
Job50'Mag: Ne faut-il pas développer l'offre en matière de formation encore insuffisante pour les quinquas ?
J-L C: Des mesures évitant la discrimination par l'âge en matière de formation devraient être prises. Beaucoup de salariés seniors se voient refuser des stages alors qu'ils en font la demande. On estime qu'il est inutile d'investir sur eux. On leur reproche ensuite de ne plus être aptes aux fonctions qu'ils occupent ou qu'ils pourraient occuper. Des pénalités permettraient de limiter cette pratique.
Job50'Mag: Comment se positionnent les quinquas quant à vos propositions syndicales? Ils sont peu syndiqués et moins revendicatifs que leurs cadets
J-L C: C'est vrai. Beaucoup ont commencé leurs carrières durant les Trente Glorieuses. Il entretenaient un rapport charnel avec leur entreprise et se sentaient moins revendicatifs. Mais ils sont en train de le devenir ! Quant aux jeunes, au début, ils sont plein d'espoir sur leur carrière puis comprennent qu'il en est malheureusement autrement
(source http://www.job50mag.fr, le 29 août 2001)
Job50'Mag : Vous avez rencontré Lionel Jospin, mardi 19 juin, et vous avez évoqué le thème des cadres de 50 ans. Quel a été la teneur de votre entretien ?
Jean-Luc Cazettes : Le Premier Ministre, qui souhaite relancer le dialogue social, voulait que nous lui proposions quelques thèmes de réflexion. Je tenais à lui parler des salariés âgés : il s'accorde à reconnaître que le terme est affreux. A 50 ans et plus, on est encore dans la force de l'âge.
Mais par delà ce problème de vocabulaire, il existe une exception française : un quinquagénaire sur trois seulement dispose d'un emploi. Les deux tiers sont au chômage, en pré-retraite en convention FNE (NDLR: les cadres en activité peuvent suivre - dans le cadre du congé individuel formation ou du congé de conversion- un stage du Fonds National pour l'Emploi afin d'actualiser leurs compétences). Ces mesures étaient compréhensibles lorsque les restructurations se multipliaient. Mais la France n'est plus vraiment dans ce cas de figure. C'est devenu au fil du temps un moyen pour les employeurs de réduire la charge des salaires (les seniors ont en effet des rémunérations plus élevées). C'est dramatique car les entreprises perdent leur mémoire et entament le débat sur les retraites.
Job50'Mag : Que proposez vous ?
J-L C : J'ai longuement discuté avec des DRH et des responsables du Medef . Ils confirment que l'exclusion des quinquas est bien liée au poids de leurs rémunérations. C'est la principale raison. Je pense donc qu'il faut durcir les textes sur la non-discrimination, favoriser la formation et le déroulement des carrières. Pourquoi ne pas jouer avec un système d'exonérations fiscales ou sociales. En tout cas, il faut abandonner la contribution Delalande (NDLR : pénalité financière versée par les entreprises licenciant des quinquagénaires, lien avec " les licenciements des quinquagénaires ").
La survivance de cette contribution souligne un drame français : on prend des mesures dans une situation donnée sans l'adapter ou l'abroger ensuite ! Lorsque Jean-Pierre Delalande a fait voter sa contribution, les restructurations seules rythmaient la conjoncture économique française. Aujourd'hui, la donne est différente puisque nous sommes en période de reprise. De fait, cette pénalité a aujourd'hui un effet pervers puisqu'elle dissuade les employeurs d'embaucher des quinquagénaires (par peur d'avoir à payer cette amende s'ils doivent ensuite procéder à un licenciement). Jean-Pierre Delalande, lui-même, me l'a affirmé : " je suis le premier à vouloir la suppression de mon amendement. Mais dans l'Hexagone, on préfère entasser les législations Maintenant il s'agit de manier la carotte plutôt que le bâton !
Job50'Mag: Quelle fut la réaction de Lionel Jospin ?
J-L C: Il est intéressé car c'est un point de passage obligé avant le débat sur les retraites. Tant qu'en effet un tiers seulement des quinquas est actif nous ne pouvons rien construire de cohérent. J'espère qu'il prendra en compte nos revendications.
Dans ce domaine, le Medef n'est pas à une contradiction près. Il affirme clairement et officiellement le fait que les salariés seniors coûtent chers et encourage les entreprises à rajeunir leurs effectifs. Il y a une contradiction manifeste à réclamer, à la fois, le recul de l'âge de la retraite et précipiter les départs des salariés âgés. Certains quinquas ont toujours autant de mal à faire la soudure. Ils ont entre 50 et 55 ans, éprouvent d'immenses difficultés à retrouver du travail et ne peuvent encore bénéficier d'une pré-retraite.
Job50'Mag: A ce propos, quelle est votre position en matière de pré-retraite ?
J-L C: Elle est la solution la moins pénalisante pour les entreprises qui veulent améliorer le ratio charges salariales/ résultats. Je pense qu'il faudrait conditionner le recours au système de pré-retraite à la situation financière de l'entreprise. En 2000, les constructeurs automobiles ont signé avec l'Etat un accord facilitant le départ massifs en pré-retraite de salariés âgés. C'est oublier que ce type de mesures bloque la formation des quinquagénaires.
Job50'Mag: Ne faut-il pas développer l'offre en matière de formation encore insuffisante pour les quinquas ?
J-L C: Des mesures évitant la discrimination par l'âge en matière de formation devraient être prises. Beaucoup de salariés seniors se voient refuser des stages alors qu'ils en font la demande. On estime qu'il est inutile d'investir sur eux. On leur reproche ensuite de ne plus être aptes aux fonctions qu'ils occupent ou qu'ils pourraient occuper. Des pénalités permettraient de limiter cette pratique.
Job50'Mag: Comment se positionnent les quinquas quant à vos propositions syndicales? Ils sont peu syndiqués et moins revendicatifs que leurs cadets
J-L C: C'est vrai. Beaucoup ont commencé leurs carrières durant les Trente Glorieuses. Il entretenaient un rapport charnel avec leur entreprise et se sentaient moins revendicatifs. Mais ils sont en train de le devenir ! Quant aux jeunes, au début, ils sont plein d'espoir sur leur carrière puis comprennent qu'il en est malheureusement autrement
(source http://www.job50mag.fr, le 29 août 2001)