Texte intégral
Je suis extrêmement heureux d'accueillir, pour la première fois, le ministre italien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Paolo Gentiloni. Je veux d'abord te remercier, Paolo, d'avoir pris le temps, dès les premières jours de tes nouvelles responsabilités, de cette visite à Paris, et je te l'ai dit et te le confirme : tu es ici chez toi.
J'avais noué avec ta prédécesseure, Madame Federica Mogherini, une relation de travail très efficace et très confiante. Elle a été appelée à de hautes fonctions et je suis sûr que la relation sera excellente avec toi.
Nos deux pays sont extraordinairement proches sur tous les plans. Nous partageons la même conception de l'Europe et du monde.
L'Italie assume, jusqu'à la fin de cette année, la responsabilité de la présidence du Conseil de l'Union européenne et je tiens à dire qu'elle exerce cette responsabilité avec talent et efficacité.
Nous savons que l'Italie peut compter sur le soutien de la France et que la réciproque est vraie : le soutien de la France sur les travaux en cours, sur ceux qui vont débuter à Bruxelles et qui sont si importants pour nos pays. Le soutien à la croissance est un des thèmes dont nous avons parlé, puisque l'Italie et la France partagent la même conviction. Il faut à la fois du sérieux budgétaire et, en même temps, des investissements pour favoriser la croissance. Si l'on veut réformer - l'Italie et la France ont besoin de réformes -, il faut en même temps qu'il y ait une certaine croissance. Mais il n'y a pas de croissance s'il n'y a pas d'investissements. Et, dans la mesure où nos deux pays ne peuvent pas, sur le plan budgétaire, débourser des sommes énormes, c'est à l'Europe de favoriser ces investissements utiles.
De la même façon, nous sommes à l'unisson dans le domaine de l'énergie et du climat. Ce sont des thèmes importants pour nous tous. La présidence italienne a joué un rôle tout à fait décisif dans la formation du consensus qui a permis le nouveau paquet énergie-climat au mois d'octobre au niveau de l'Europe, qui a été complété hier par le très important accord entre la Chine et les États-Unis.
Nous sommes également à l'unisson en ce qui concerne un certain nombre de défis auxquels nos deux pays sont confrontés. Le trafic des êtres humains, l'exploitation de la misère humaine. L'Italie a assumé avec un grand courage des situations très difficiles au cours des derniers mois. Et l'action de ton pays doit être saluée de ce point de vue.
Et puis, nous avons, bien sûr discuté d'un certain nombre de questions vives qui se posent à nous en ce moment pour des régions dans lesquelles nous sommes engagées, auxquelles nous attachons un prix particulier. Nous avons parlé de la Libye qui est une préoccupation commune ; nous avons parlé de l'Ukraine, de la situation à Gaza, en Palestine et en Israël et, d'une façon générale, de la politique méditerranéenne.
Nous avons une très grande proximité dans ce que j'appellerais nos «lectures du monde» et des réponses qu'il convient d'y apporter. Nous sommes convenus, avec Paolo, de nous concerter d'une façon systématique avant toute réunion ou toute décision importante. Je pense que c'est ainsi que deux pays très amis et très proches doivent se comporter.
Bref, j'aurai un très grand plaisir à travailler avec toi et je voudrais te remercier d'avoir sans tarder pris le chemin du Quai d'Orsay où tu es chez toi. (...).
* Iran
(...)
Q - Votre directeur politique revient de Mascate avec des discussions sur l'Iran. Êtes-vous plutôt positif ou négatif sur l'éventualité d'un accord la semaine prochaine ? Ou est-ce que vous pensez qu'un compromis serait une prolongation de ces négociations ?
R - Il y a en effet eu des discussions que je suis de très près. Je suis en contact avec les différents interlocuteurs de ces discussions. Tout ce que je peux vous dire c'est que je souhaite que l'on puisse parvenir à un accord, bien sûr. Mais il y a encore des questions importantes à régler. C'est à partir du 18 novembre que nos directeurs des affaires politiques vont se rencontrer pour essayer d'aplanir les difficultés qui restent, la date butoir est le 24 novembre. Ensuite, j'ai réservé les quelques derniers jours ou quelques dernières nuits de ce mois de novembre pour, le cas échéant, me rendre à Vienne pour discuter de l'aspect final.
Je souhaite bien sûr que l'on puisse trouver une solution positive. Mais cette solution ne peut être trouvée que dans le cadre de l'objectif qui a été fixé dès le début : nous sommes favorables à l'énergie nucléaire civil et d'une manière la plus large possible, mais nous sommes opposés à la bombe atomique. Et ce sont les conséquences de cette affirmation de principe, qui est celle de la communauté internationale, qui doivent être tirées aussi par les Iraniens.
Voilà où nous en sommes. Je ne peux pas faire de pronostic à l'heure actuelle parce que je pense que c'est seulement le 24 novembre que l'on pourra dresser un bilan.
Q - Votre position est-elle plus ferme que celle des États-Unis vis-à-vis de l'Iran ? Avez-vous l'impression que votre collègue américain est prêt pour plus de concessions que vous, vous ne l'êtes ?
R - Vous faites, je crois référence à ce que l'on appelle l'accord intérimaire de Genève pour lequel il y avait effectivement eu plusieurs phases dans la discussion. J'avais eu l'occasion de dire, à un certain moment de la discussion, que l'accord qui nous était présenté ne nous paraissait pas satisfaisant, ce dont finalement tout le monde était convenu puisque l'accord final intérimaire avait repris les propositions qui étaient les nôtres.
Là, nous sommes dans une situation différente. Nous avons une concertation étroite avec tous nos partenaires du 5+1, c'est-à-dire les cinq membres permanents du Conseil de sécurité plus les Allemands. Mon collègue américain est venu à Paris spécialement la semaine dernière pour que nous puissions discuter ensemble et, bien sûr, nous sommes en contact très régulièrement. Je souhaite qu'il y ait un accord dans la position définie par les 5+1. C'est dans cet esprit-là que nous travaillons. (...).
* Ukraine
(...)
Q - Une petite question sur l'Ukraine. L'OTAN a confirmé hier l'arrivée d'équipements militaires russes dans l'Est de l'Ukraine. La violation du cessez-le-feu et, donc, de l'accord de Minsk vous inquiète-t-elle ?
R - Bien sûr, nous sommes extrêmement préoccupés par les nouvelles que nous recevons de là-bas. Nous en avons d'ailleurs parlé avec Paolo. Il y a eu des arrivées importantes de forces et des combats ont été durs avec des pertes et, du même coup, un accroissement de la tension.
Ce sont des sujets dont nous allons avoir l'occasion de parler lundi puisqu'il y a un conseil des Affaires étrangères à Bruxelles et, à l'ordre du jour, il y a en particulier la situation en Ukraine. Il y a aussi la situation qui nous inquiète, mais c'est un tout autre contexte, en Israël et en Palestine.
Oui, nous sommes inquiets. Nous continuons à défendre la même position qui est depuis le début celle de la France. Il faut faire preuve de fermeté car il y a des comportements qui sont inacceptables et qui violent le droit international. Et dans le même temps, il faut garder les voies du dialogue pour arriver à des solutions responsables. Nous en sommes là mais, je vous le confirme, nous sommes effectivement préoccupés par une élévation de la tension qui a eu lieu ces derniers jours.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 novembre 2014