Texte intégral
WILLIAM LEYMERGIE
Pour « Les 4 vérités », ce matin Roland SICARD reçoit Najat VALLAUD-BELKACEM, ministre de l'Education nationale.
ROLAND SICARD
Bonjour à tous, bonjour Najat VALLAUD-BELKACEM.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bonjour.
ROLAND SICARD
C'est aujourd'hui la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, vous avez d'ailleurs le badge qui montre cette journée. C'est un problème qui est partout, partout y compris en France.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, c'est un problème qui est partout, on sait que l'année dernière encore il y a 121 femmes qui sont décédées sous les coups de leur conjoint. Moi, quand j'étais ministre des Droits des femmes, je m'étais faite une promesse, c'est de ne pas baisser la garde, une fois que je ne serais plus en charge de cette responsabilité-là, parce que c'est tellement important, et que si on veut vraiment faire reculer le nombre de femmes qui meurent ou qui sont simplement battues par leur conjoint, il faut qu'on se mobilise tous, donc aujourd'hui je suis à l'Education nationale, c'est un secteur, d'abord, qui n'est pas préservé des violences
ROLAND SICARD
Est-ce qu'il y a eu une évolution quand vous étiez au Droit des femmes ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Il y a eu une évolution, parce que nous avons adopté des outils et une loi, sur l'égalité entre les femmes et les hommes, qui permettent par exemple, je voyais que vous en parliez tout à l'heure, que le téléphone portable grand danger, puisse être mis à disposition de toutes les femmes qui se sentent menacées pour faire venir la police en dix minutes, que les mains courantes soient mieux traitées.
ROLAND SICARD
Justement, les femmes portent peu plainte contre ces violences.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, les femmes portent peu plainte, parce que pendant longtemps il y a eu une forme de tolérance de la société à l'égard de ces violences, on les banalisait d'une certaine façon, on ne les considérait pas comme des violences comme les autres, on les considérait comme des faits divers. Et moi, ce que j'ai passé mon temps à expliquer, c'est que ce n'était pas une succession de faits divers, les violences conjugales, c'est un fait social qui repose sur une hiérarchisation du monde, entre un sexe fort et un sexe faible, et c'est pour ça qu'il nous faut absolument agir, pour apprendre notamment à nos enfants, qu'il n'y a pas sexe fort et sexe faible, qu'il y a égalité entre les sexes, qu'il y a cette différence bien sûr, mais égalité entre les sexes, ce qui passe notamment par cette culture de l'égalité que l'on doit promouvoir à l'école.
ROLAND SICARD
Alors, justement, à l'école, vous allez distribuer un kit, une mallette, on ne sait pas très bien comment appeler ça, pour sensibiliser les professeurs à l'éducation, justement, à cette égalité entre les hommes et les femmes, à éviter ces violences. Il y aura quoi dans ce kit pédagogique ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors, il faut distinguer deux choses. Sur la question des violences, en effet, ce que nous allons dévoiler aujourd'hui, parce que je le disais, l'école n'est pas préservée, il y a des violences sexistes qui se produisent au collège, au lycée, tout le monde le sait bien, donc sur cette question des violences dans les établissements scolaires, nous allons mettre à disposition des personnels de l'Education nationale, des outils pédagogiques, des guides pour mieux savoir repérer et agir.
ROLAND SICARD
Et il y aura quoi dedans ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ça c'est sur la question des violences. Eh bien par exemple un numéro unique où appeler, des conseils, la façon de traiter la situation, la médiation, comment organiser une médiation quand elle s'impose parce qu'il y a du harcèlement scolaire, des choses comme ça, comment travailler avec les familles. Ça c'est sur la question des violences. Mais sur la question plus générale, j'allais dire, de comment on instaure une culture de l'égalité entre les filles et les garçons à l'école, là il y a besoin d'une véritable formation des enseignants, pour qu'ils sachent aborder ces questions, pour qu'ils sachent lutter contre l'autocensure des filles, contre les stéréotypes dans lesquels s'enferment les filles et les garçons et qui les bordent dans leurs ambitions ou dans leurs réalisations personnelles. Et donc, ce que nous faisons à l'école, c'est un, que nous formons les enseignants à ces sujets, et deux, que nous mettons à leur disposition des outils pédagogiques pour les aider à aborder systématiquement cette question de, oui les filles et les garçons sont égaux et ils ne doivent se borner
ROLAND SICARD
Vous en revenez pas à cette fameuse théorie du genre, qui dit que la différence entre les filles et les garçons, ce n'est pas une question de culture c'est une question de culture, plutôt, ce n'est pas une question de nature ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Il n'en a jamais été question. Il n'a jamais été question de remettre en cause la différence entre les filles et les garçons.
ROLAND SICARD
Vous n'allez pas relancer la polémique ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Eh bien écoutez, en tout cas, moi, mon intention n'est pas celle-là, mon intention c'est de dire qu'une différence entre filles et garçons ne doit pas justifier une inégalité et que notre société en a produit beaucoup des inégalités et que si on ne veut pas avoir tous les ans, à déplorer à nouveau 121 femmes mortes sous les coups de leur compagnon, il faut peut -être se demander comment est-ce que dès le plus jeune âge on instaure une culture de l'égalité et du respect entre les sexes, parce que la différence ne veut pas dire la hiérarchie.
ROLAND SICARD
Mais vous savez qu'on va vous faire la critique.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ceux qui sont de mauvaise foi, ceux qui refusent d'avancer, mais pour ce qui est de tous les enseignants, de tous les personnels de l'Education nationale qui se rendent compte au quotidien, qu'il y a un vrai sujet, parce que contrairement à ce que l'on croit, les choses ne vont pas forcément dans le sens du progrès, donc les inégalités se creusent aussi, et qu'il y a besoin d'outils pour contrer ces inégalités, pour contrer les stéréotypes et pour faire comprendre aux filles et aux garçons, qu'ils et elles ont le droit d'être ce qu'ils veulent être, tout simplement, je pense que ces outils seront les bienvenus.
ROLAND SICARD
Il y a une question importante aussi à l'éducation, c'est la radicalisation islamiste dans les établissements. Qu'est-ce que vous faites pour lutter contre cette radicalisation ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est une mobilisation interministérielle sur cette question de la radicalisation, qui est sujet grave, puisqu'on est quasiment face à un phénomène de dérive sectaire, avec une emprise mentale, un embrigadement sur certains jeunes, qui sont d'ailleurs des jeunes, on le voit bien dans les profils dont on parle, qui sont sans histoire, qui se sont convertis sur le tard, qui sont fortement influençables, et donc, ce que nous faisons d'abord, c'est accompagner, accompagner les familles notamment, lorsqu'elles tirent la sonnette d'alarme, il faut qu'elles puissent parler et nous avons mis en place avec le ministre de l'Intérieur, un numéro national, unique, pour leur offrir ce service-là, et puis évidemment pour ce qui est de l'Education nationale, lutter contre les dangers d'Internet, parce que c'est souvent au contact avec les réseaux sociaux que les choses se déclenchent, et donc aller dans les classes pour expliquer qu'on ne peut pas croire tout ce qu'on lit sur Internet et qu'il faut faire attention à ce qu'on laisse de sa vie privée sur Internet, ça fait partie des mesures que nous avons prises. Et puis les personnels eux-mêmes doivent être formés, nous élaborons une formation pour ces personnels, pour qu'ils puissent là aussi réagir, repérer et réagir.
ROLAND SICARD
Une dernière question, un petit peu personnelle. Votre mari a été nommé secrétaire général adjoint de l'Elysée aux côtés de Jean-Pierre JOUYET ; il n'y a pas une gestion un petit peu familiale du pouvoir ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je ne dirais pas cela. Mon époux a une carrière, a exercé des responsabilités par le passé, dans lesquelles il a démontré tout son potentiel. Il se trouve que par ailleurs c'est mon époux, nous partageons je crois la même philosophie politique, les mêmes engagements, donc voilà, il sera amené à exercer des responsabilités à l'Elysée, moi au gouvernement, nous appartenons à une seule et même équipe, voilà.
ROLAND SICARD
Merci.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Merci.
ROLAND SICARD
William, c'est à vous.
WILLIAM LEYMERGIE
Oui. On passe à la météo maintenant.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 26 novembre 2014