Texte intégral
Q - Comment analysez-vous le succès de Syriza ?
R - Ce parti est clairement en adéquation avec un peuple qui souffre. Les Grecs ont fait des efforts immenses, qu'ils aient été volontaires ou imposés : les pensions et salaires ont été massivement diminués, les impôts, pour peu qu'ils soient payés, ont considérablement augmenté, la fonction publique a été fortement réduite. Il est évident qu'un pays qui a perdu un quart de sa richesse en cinq ans est un pays qui souffre.
Q - Les Grecs ne sont-ils pas aussi déçus de ne pas avoir été payés de retour, les partis traditionnels n'étant pas parvenus à réformer un État clientéliste, inefficace, corrompu ?
R - Un État transparent, non corrompu, où chacun paie ses impôts, c'est clairement une volonté d'une majorité du peuple grec. Quand Syriza dit, à l'unisson de la zone euro et du Fonds monétaire international, qu'il faut un système fiscal juste où tout le monde paie des impôts, cela correspond au ressentiment d'une partie des Grecs qui estiment avoir payé leur dû, alors que d'autres ne le feraient pas. Or, on ne peut pas dire que les gouvernements précédents aient vraiment abouti sur cette question.
(...)
Q - Que peut faire la zone euro pour aider la Grèce à alléger le fardeau de la dette et les politiques d'austérité ?
R - Victoire de Syriza ou pas, le sujet de la dette est sur la table. Nous avions convenu, fin 2012, que nous en parlerions lorsque la Grèce aurait avancé dans ses réformes et serait en excédent budgétaire primaire, c'est-à-dire hors intérêts de la dette. On y est : les dépenses sont équilibrées par les recettes depuis 2013. Les Grecs ont fait un effort gigantesque, bien plus élevé que ceux que nous avons faits, et c'est pour cela qu'on ne peut pas parler d'austérité en France. Pour autant, il est hors de question d'accepter que le budget grec soit à nouveau déséquilibré et reparte dans une spirale de déficit. De toute façon, pour financer une telle politique, il faudrait que le gouvernement se finance sur les marchés ou auprès des bailleurs de fonds, et je pense que personne ne serait prêt à lui prêter de l'argent sans condition.
Q - Concrètement, que peut-on faire ?
R - Il y a toute une série de modalités techniques possibles à discuter. Mais, attention, nous le ferons en tenant compte des engagements de réformes que prendra la Grèce. Le plus douloureux, le rééquilibrage budgétaire, est déjà accompli, mais le plus facile à faire sur le papier, la réforme de l'État grec, les réformes structurelles, restent encore largement en jachère. Il faut bâtir un État moderne, efficace, une administration fiscale indépendante et capable de faire rentrer l'impôt, sans que personne ne bénéficie d'un traitement privilégié. Ce sont des réformes qui ne sont pas si simples à faire, mais qui font partie du programme de Syriza et sur lesquelles nous pourrions insister.
Q - Ce discours, notamment en Allemagne, peut-il être entendu ?
R - Des maladresses ont été commises c'est vrai, notamment en Allemagne. Si les déclarations officielles ont toujours été correctes, cela n'a pas été le cas de citations anonymes qui n'ont pas aidé à la maîtrise du discours sur la Grèce et à un débat serein sur place. Il reste que le gouvernement allemand, comme les autres, a déjà commencé à réfléchir à la suite. Aujourd'hui, la dette de la Grèce représente 177 % du PIB, PIB qui a baissé d'un quart depuis 2008. Si son PIB était du même niveau qu'en 2008, le niveau de la dette ne serait que de 125 %... Autrement dit, l'absence de croissance est centrale dans cette affaire. La Grèce, qui renoue tout juste avec la croissance, doit donc être aidée.
Q - Excluez-vous un «Grexit» ?
R - Totalement. Une sortie de la zone euro n'est voulue par personne, ni en Grèce ni dans les autres pays de la zone euro.
Q - En décidant d'un programme massif de rachat de dettes, la BCE ne dit-elle pas que la zone euro est confrontée à un niveau de dette insupportable ?
R - Elle signale que lorsque le taux d'inflation est égal à zéro, voire négatif, le poids de la dette est un problème pour tous.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 janvier 2015
R - Ce parti est clairement en adéquation avec un peuple qui souffre. Les Grecs ont fait des efforts immenses, qu'ils aient été volontaires ou imposés : les pensions et salaires ont été massivement diminués, les impôts, pour peu qu'ils soient payés, ont considérablement augmenté, la fonction publique a été fortement réduite. Il est évident qu'un pays qui a perdu un quart de sa richesse en cinq ans est un pays qui souffre.
Q - Les Grecs ne sont-ils pas aussi déçus de ne pas avoir été payés de retour, les partis traditionnels n'étant pas parvenus à réformer un État clientéliste, inefficace, corrompu ?
R - Un État transparent, non corrompu, où chacun paie ses impôts, c'est clairement une volonté d'une majorité du peuple grec. Quand Syriza dit, à l'unisson de la zone euro et du Fonds monétaire international, qu'il faut un système fiscal juste où tout le monde paie des impôts, cela correspond au ressentiment d'une partie des Grecs qui estiment avoir payé leur dû, alors que d'autres ne le feraient pas. Or, on ne peut pas dire que les gouvernements précédents aient vraiment abouti sur cette question.
(...)
Q - Que peut faire la zone euro pour aider la Grèce à alléger le fardeau de la dette et les politiques d'austérité ?
R - Victoire de Syriza ou pas, le sujet de la dette est sur la table. Nous avions convenu, fin 2012, que nous en parlerions lorsque la Grèce aurait avancé dans ses réformes et serait en excédent budgétaire primaire, c'est-à-dire hors intérêts de la dette. On y est : les dépenses sont équilibrées par les recettes depuis 2013. Les Grecs ont fait un effort gigantesque, bien plus élevé que ceux que nous avons faits, et c'est pour cela qu'on ne peut pas parler d'austérité en France. Pour autant, il est hors de question d'accepter que le budget grec soit à nouveau déséquilibré et reparte dans une spirale de déficit. De toute façon, pour financer une telle politique, il faudrait que le gouvernement se finance sur les marchés ou auprès des bailleurs de fonds, et je pense que personne ne serait prêt à lui prêter de l'argent sans condition.
Q - Concrètement, que peut-on faire ?
R - Il y a toute une série de modalités techniques possibles à discuter. Mais, attention, nous le ferons en tenant compte des engagements de réformes que prendra la Grèce. Le plus douloureux, le rééquilibrage budgétaire, est déjà accompli, mais le plus facile à faire sur le papier, la réforme de l'État grec, les réformes structurelles, restent encore largement en jachère. Il faut bâtir un État moderne, efficace, une administration fiscale indépendante et capable de faire rentrer l'impôt, sans que personne ne bénéficie d'un traitement privilégié. Ce sont des réformes qui ne sont pas si simples à faire, mais qui font partie du programme de Syriza et sur lesquelles nous pourrions insister.
Q - Ce discours, notamment en Allemagne, peut-il être entendu ?
R - Des maladresses ont été commises c'est vrai, notamment en Allemagne. Si les déclarations officielles ont toujours été correctes, cela n'a pas été le cas de citations anonymes qui n'ont pas aidé à la maîtrise du discours sur la Grèce et à un débat serein sur place. Il reste que le gouvernement allemand, comme les autres, a déjà commencé à réfléchir à la suite. Aujourd'hui, la dette de la Grèce représente 177 % du PIB, PIB qui a baissé d'un quart depuis 2008. Si son PIB était du même niveau qu'en 2008, le niveau de la dette ne serait que de 125 %... Autrement dit, l'absence de croissance est centrale dans cette affaire. La Grèce, qui renoue tout juste avec la croissance, doit donc être aidée.
Q - Excluez-vous un «Grexit» ?
R - Totalement. Une sortie de la zone euro n'est voulue par personne, ni en Grèce ni dans les autres pays de la zone euro.
Q - En décidant d'un programme massif de rachat de dettes, la BCE ne dit-elle pas que la zone euro est confrontée à un niveau de dette insupportable ?
R - Elle signale que lorsque le taux d'inflation est égal à zéro, voire négatif, le poids de la dette est un problème pour tous.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 janvier 2015