Texte intégral
- Koweït - Relations bilatérales -
Merci Cher Collègue, Cher Ami, Monsieur le Ministre des affaires étrangères.
Mesdames et Messieurs, je suis heureux d'être ici au Koweït pour ma première visite officielle et je veux remercier chaleureusement nos hôtes koweïtiens de nous avoir accueillis avec l'importante délégation qui m'accompagne.
Ce matin, j'ai eu l'honneur d'être reçu par Son Altesse l'Émir, puis par Son Altesse le Premier ministre. Nous avions, en tout début de matinée, inauguré ensemble une très performante usine de désalinisation de l'eau de mer, réalisée en particulier par le groupe français Véolia en liaison avec son partenaire koweïtien.
J'ai pu également m'entretenir avec plusieurs ministres, avec le président du Parlement que j'avais reçu il y a de cela quelques mois, à Paris. Nous allons déjeuner ensemble et discuter avec mon collègue et ami ministre des affaires étrangères, puis je verrai Son Excellence le ministre des finances et les représentants de la société civile, sans oublier une très intéressante réunion à la Chambre du commerce où des investisseurs et entrepreneurs koweïtiens, d'une part, se sont retrouvés avec des investisseurs et entrepreneurs français, d'autre part, pour travailler ensemble.
C'est une journée bien remplie.
Quel est le sens de ma visite, porteuse d'un message d'amitié chaleureuse du président français pour Son Altesse l'Émir ? Le sens de ma visite est de dire à nos amis koweïtiens que nous voulons porter notre partenariat au plus haut niveau. J'ai parlé d'un partenariat «triple A» comme Amitié, Ambition et Action. Nos relations politiques sont excellentes ; elles le sont depuis longtemps. La France a été aux côtés du Koweït dans des temps difficiles, comme le Koweït a toujours été aux côtés de la France, qu'il s'agisse des moments aisés ou des moments plus dangereux. Sur le plan politique nous sommes donc davantage que des partenaires, nous sommes des amis, des frères.
Sur le plan économique, sur le plan culturel, sur le plan éducatif, sur le plan de nos relations de défense, il faut que l'on porte notre partenariat au même niveau. Déjà, beaucoup de choses ont été faites, mais cela n'est pas suffisant. L'esprit de ma visite, c'est justement - accompagné de délégations économiques et de partenaires culturels et éducatifs - de permettre ce pas en avant très significatif dans notre partenariat.
Nous avons signé il y a quelques instants des accords et il y a des décisions immédiates. D'une part, nous avons décidé que notre opérateur, «Business France», qui aide les investisseurs étrangers en France et les entreprises françaises vers l'étranger, aurait désormais une implantation spécifique au Koweït.
D'autre part, nous avons décidé que, désormais, les visas de tous les Koweïtiens qui veulent venir chez nous seront délivrés au maximum en quarante-huit heures. Ce sera le délai le plus court qui existe à travers le monde. Nous avons également pris les dispositions nécessaires - nous le devons à la partie koweïtienne que je remercie chaleureusement - pour que, très rapidement, les élèves des collèges, puis dans un second temps de l'enseignement primaire, ici, puissent apprendre systématiquement le français. Ce sera évidemment pour la génération qui va venir une amélioration considérable qui montre bien la volonté à la fois de nos amis koweïtiens et de nous-mêmes de travailler de plus en plus ensemble. Comme le disait avec humour mon collègue et ami, cela permettra à nos enfants ou à nos petits-enfants de parler entre eux sans que nous ne comprenions nécessairement.
D'une façon plus large, le Koweït a adopté un plan très ambitieux pour cinq ans - sur la période qui va de 2015 à 2019 - qui couvre toute une série de secteurs : le transport, le logement, la santé, l'énergie et d'autres encore. La France souhaite absolument s'inscrire dans un partenariat avec le Koweït pour la réalisation du plan. Les propos qui nous ont été tenus, à la fois par Son Altesse l'Émir, par Son Altesse le Premier ministre et par les différents ministres, sont extrêmement encourageants de ce point de vue.
Je voudrais terminer en disant deux choses. D'une part, j'ai fait compliment aux dirigeants du Koweït pour leur rôle de paix dans la région. Nous avons apprécié, depuis déjà longtemps, à quel point votre pays joue un rôle précieux aussi bien au niveau régional qu'au niveau international, dans le sens de la paix ; c'est un médiateur. C'est aussi un acteur très important reconnu sur le plan humanitaire. Nous cheminons et nous allons cheminer la main dans la main et c'est bien nécessaire quand on a à faire face à des crises comme celles qui se passent en Palestine et Israël, celles qui se passent en Irak, celles qui se passent en Syrie, celles qui se passent au Yémen... je pourrais continuer la liste. Le fait que la France et le Koweït soient côte à côte est extrêmement utile.
Je termine ce court propos en disant que j'ai apporté à votre intention votre Excellence, Monsieur le Ministre des affaires étrangères, Chers Amis - je pense que cela vous fera plaisir - le fac-similé des lettres de créance que les premiers ambassadeurs du Koweït ont remis au général de Gaulle. Cinquante ans après, c'est un souvenir qui marque la continuité de l'amitié entre le Koweït et la France.
Enfin, au nom du président de la République et du Premier ministre, j'ai lancé une invitation à votre Premier ministre à venir en France et je suis sûr que cette visite permettra encore d'avancer sur le chemin du partenariat d'exception qui doit exister entre le Koweït et la France.
Je vous remercie.
Q - Premièrement, comment la France accueille-t-elle la démarche initiée par les autorités koweïtiennes en vue d'une exemption du visa Schengen pour les Koweïtiens ? Deuxièmement, êtes-vous arrivés à un accord en ce qui concerne le dossier nucléaire iranien ?
R - Concernant les visas, nous nous sommes organisés avec l'ambassadeur de France au Koweït qui, avec son équipe, fait un travail remarquable et que je tiens à souligner. De la même façon, l'ambassadeur du Koweït à Paris fait un travail également remarquable. Nous avons pris des dispositions pour que désormais, lorsque des citoyens du Koweït souhaitent se rendre en France, leur demande soit examinée et satisfaite dans un délai de quarante-huit heures. Bien évidemment cela demandait une organisation un peu nouvelle, mais nous l'avons mise en place et cela va permettre, nous l'espérons, soit aux hommes d'affaires, soit aux touristes de venir plus nombreux chez nous. Ils sont déjà nombreux d'ailleurs - je crois qu'ils sont 50 000 - mais nous souhaitons qu'ils soient encore plus nombreux. Alors vous allez me dire que c'est très difficile. Oui en effet, mais j'avais fait le même exercice l'année dernière avec la Chine et cet exercice a été réussi. Depuis janvier de l'année dernière, les Chinois qui veulent venir en France se voient délivrer un visa en quarante-huit heures. Je pense donc que si on a pu réaliser cela avec la «modeste» population chinoise, on doit pouvoir en se mobilisant y arriver avec la «nombreuse» population du Koweït. Et donc ce que nous voulons, c'est que les procédures soient plus simples. (...).
- Iran -
(...)
Concernant l'Iran, votre question porte sur le nucléaire iranien, sur la discussion que nous avons depuis déjà pas mal de temps avec les Iraniens. Vous savez que cette discussion est organisée au sein d'un groupe que l'on appelle le «5+1». Il y a, d'une part, les 5 membres permanents du Conseil de sécurité - la France est un des 5 membres permanents - ainsi que les Allemands et, d'autre part, nos collègues iraniens. C'est une discussion dans laquelle il faut aller à l'essentiel.
Quel est l'essentiel ? Un accord respectable qui permet de tirer toutes les leçons de cette affirmation de principe : l'Iran doit avoir le droit entier à l'utilisation du nucléaire civil ; en revanche, la bombe atomique, non. L'Iran est d'accord avec cette solution de principe mais il faut tirer toutes les conséquences techniques de cette position de principe qui sont assez compliquées : le nombre et la nature des centrifugeuses autorisées ; le devenir d'un certain nombre de réacteurs ; la manière dont le contrôle doit être opéré ; le devenir des sanctions existantes ; etc. Si l'Iran se place dans cette perspective, les sanctions qui existent n'ont plus lieu d'être. Comment les suspend-on ? Nous avons avancé dans la discussion, mais nous n'avons pas su jusqu'ici conclure, ce qui fait que nous avons eu un accord intérimaire l'année dernière. N'ayant pu conclure, nous avons retardé l'échéance ; désormais celle-ci est fixée au 30 mars, puis à la fin du mois de juin 2015.
Nous espérons, nous la France - puissance indépendante, membre permanent du Conseil de sécurité, détenteurs nous-mêmes de l'arme nucléaire - que nous allons trouver une solution car cela permettrait de casser la prolifération nucléaire qui est un grand danger.
Vous avez évoqué les États-Unis. J'ai récemment écrit un article publié dans un grand journal américain pour dire que nous souhaitons qu'il y ait un accord, mais pour qu'il y ait un accord il faut que les Iraniens acceptent un certain nombre d'éléments qu'ils n'ont jusqu'à présent pas expressément acceptés. De plus, si nous voulons vraiment un accord, il serait tout à fait contre-productif d'ajouter des sanctions à celles qui existent déjà.
Voilà où nous en sommes, je ne peux pas vous garantir à 100 % le résultat parce que dans une négociation on est responsable de ses propositions mais pas de celles et de ceux qui sont en face de nous. J'espère que nous pourrons trouver une solution sérieuse qui nous permette de faire un pas très important vers le refus de la prolifération nucléaire. Voilà l'état exact de nos discussions (...).
- Lutte contre le terrorisme -
(...)
Q - Comment expliquez-vous la force de Daech, que la coalition internationale arrive difficilement à combattre ?
R - Je voudrais dire un mot dans le même sens que ce que mon collègue et ami vient de dire. Le terrorisme est un danger pour nous tous. C'est un danger international, la réponse doit donc être internationale ; c'est la raison pour laquelle nous sommes côte à côte. Je voudrais ajouter que la présentation des faits par certains terroristes, selon laquelle ils agiraient au nom d'une religion, est une présentation mensongère. Personne ne peut tuer au nom d'une religion et lorsque nous combattons contre le terrorisme, en fait, nous voulons combattre ces gens qui sont, non seulement des menteurs, mais des assassins. Ce sont d'abord les musulmans que nous protégeons puisque ce sont eux qui sont les premières victimes de ces terroristes.
Je vous rappelle que si la France a envoyé un certain nombre de ses hommes au Mali, c'était parce que le Mali était tombé sous la coupe des terroristes. Lorsque nous avons décidé d'aider nos amis en Irak, c'était pour empêcher que Daech progresse. Il est normal que le Koweït et la France soient côte à côte dans ce combat qui est difficile, multiforme et, comme l'a dit mon collègue et ami, nous devons absolument gagner parce que c'est l'existence même de ce que nous représentons qui est en jeu.
Q - Premièrement, pourquoi n'avez-vous pas pris en charge les propos de Jean-Marie Le Pen concernant Charlie Hebdo ? Deuxièmement, la presse française insulte le ministre français des affaires étrangères sur son discours au sujet du Qatar, dans lequel il dit qu'il n'y a aucune preuve qui prouve que le Qatar soutient le terrorisme. Comment répondez-vous à cette question ? Enfin, la réunion voulue par John Kerry qui aura lieu le 18 février 2015 à Washington va-t-elle mettre en place des moyens pour lutter contre le terrorisme ou s'agira-t-il uniquement d'un sommet politique ?
R - Au sujet de la réunion de Washington, nous avons interrogé notre collègue, M. Kerry. Je ne sais pas exactement quelle sera la forme de cette réunion, donc je ne peux pas vous répondre précisément ; ce que j'ai compris, c'est qu'elle serait destinée à réfléchir ensemble aux moyens de lutter contre le terrorisme, et notamment contre ce qu'on appelle les «Foreign Fighters», mais ce sera aux Américains de préciser quelles sont leurs idées.
En ce qui concerne les attaques terroristes qui ont eu lieu en France, nous ne nous situons pas par rapport aux déclarations de tel ou tel politicien français ; nous nous situons par rapport aux faits. Il y a un choc lourd au sein de la société française : des assassins ont successivement tué des journalistes puis des policiers et aussi des personnes de confession juive, parce qu'ils étaient juifs. Dans tout État civilisé, c'est une chose qui non seulement ne peut pas être acceptée mais qui doit être combattue. Les assassins ont été identifiés et vous connaissez leur fin. En ce moment, une enquête a lieu contre ces assassins qui se réclamaient de groupes terroristes, il faut donc à présent laisser la justice faire son travail.
En ce qui concerne le Qatar, oui, il y a depuis quelques temps dans certains milieux en France des imputations concernant d'ailleurs différents pays. Nous, la France, combattons le terrorisme et notre position par rapport à cela, c'est de dire «ni complaisance, ni médisance». La complaisance signifie que nous n'avons pas à être particulièrement aimables à l'égard de gens qui ne le méritent pas. La médisance consisterait à écouter des bruits faux, mais parce qu'ils existent.
Donc, nous sommes partenaires avec le Qatar mais nous refusons la médisance et la complaisance. Nous combattons le terrorisme, nous combattons aussi ceux qui financent le terrorisme et si nous avions connaissance que tel ou tel État finançait le terrorisme nous en tirerions évidemment les conséquences.
Q - Premièrement, peut-on savoir le nombre de djihadistes français en Syrie et en Libye et d'après vos enquêtes qui finance le terrorisme, puisque vous avez écarté le Qatar ? Deuxièmement, concernant la lutte contre Daech, comptez-vous renforcer votre rôle au sein de la coalition internationale ? Troisièmement, les Français musulmans se sentent menacés en France, quelles sont donc vos mesures pour protéger ces citoyens ?
R - Sur la question du nombre, les évaluations données par notre ministre de l'intérieur sont des évaluations malheureusement très élevées. Pour le nombre de Français - ils peuvent d'ailleurs être binationaux - identifiés comme ayant combattu en Syrie et dans la région voisine, il a cité le chiffre de 400, mais des personnes sont suspectées de pouvoir se rendre dans la région ou d'en revenir et dans ce cas, le nombre se situe au-dessus de 1.000. Vous voyez que ce sont des nombres importants et, évidemment, ces personnes font l'objet d'une surveillance extrêmement attentive.
Quant au financement, il ne demande pas des sommes considérables. Une personne qui vit en France et qui veut aller combattre en Syrie va - et nous essayons de lutter contre cela - acheter un billet et passer probablement par la Turquie et arriver à destination.
Pour ce qui concerne l'armement - c'est un autre aspect -, nous avons décidé au plan français et au plan européen de mener une action extrêmement vigoureuse contre les trafics d'armes. On observe que ces trafics qui concernent les armes concernent parfois la drogue. Il faut que l'on soit extrêmement actif et vigilant par rapport à cela. Il n'est pas question bien sûr d'accepter des financements ; une réunion au Bahreïn a eu lieu il y a très peu de temps.
D'autres actions sont menées. Il faut s'attaquer à toutes les racines du terrorisme, que ce soit le financement, le trafic d'armes, les liaisons par Internet - beaucoup sont malheureusement recrutés par cette voie - et tout cela ne peut pas être pratiqué au nom de la religion, c'est un mensonge. La réalité c'est que ce sont des gens qui veulent détruire tous ceux qui ne pensent pas comme eux ; il ne faut donc pas tout confondre et dire les choses avec force et simplicité.
S'agissant de l'Irak nous intervenons avec nos forces aériennes et nous sommes le deuxième pays qui opère le plus de raids aériens dans le cadre de la coalition.
Enfin, je tiens à réaffirmer, si c'est nécessaire, que tous les Français quelle que soit leur religion doivent être également respectés et qu'il n'est pas question d'accepter en France une hostilité à l'islam. Nous considérons que l'islam est une religion modérée. De toute manière en France, comme vous le savez sans doute, il y a depuis le début du XXe siècle une séparation entre l'Église - chacun peut avoir la religion qu'il veut ou pas de religion - et l'État. Donc, à chaque fois qu'un musulman, puisque c'est l'exemple que vous prenez, se sentirait menacé parce qu'il est musulman ou à chaque fois qu'une mosquée serait menacée, la réaction doit être extrêmement ferme. Ce n'est pas une opinion comme une autre, c'est un délit et le délit peut être sanctionné, je suis donc extrêmement ferme là-dessus.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 janvier 2015
Merci Cher Collègue, Cher Ami, Monsieur le Ministre des affaires étrangères.
Mesdames et Messieurs, je suis heureux d'être ici au Koweït pour ma première visite officielle et je veux remercier chaleureusement nos hôtes koweïtiens de nous avoir accueillis avec l'importante délégation qui m'accompagne.
Ce matin, j'ai eu l'honneur d'être reçu par Son Altesse l'Émir, puis par Son Altesse le Premier ministre. Nous avions, en tout début de matinée, inauguré ensemble une très performante usine de désalinisation de l'eau de mer, réalisée en particulier par le groupe français Véolia en liaison avec son partenaire koweïtien.
J'ai pu également m'entretenir avec plusieurs ministres, avec le président du Parlement que j'avais reçu il y a de cela quelques mois, à Paris. Nous allons déjeuner ensemble et discuter avec mon collègue et ami ministre des affaires étrangères, puis je verrai Son Excellence le ministre des finances et les représentants de la société civile, sans oublier une très intéressante réunion à la Chambre du commerce où des investisseurs et entrepreneurs koweïtiens, d'une part, se sont retrouvés avec des investisseurs et entrepreneurs français, d'autre part, pour travailler ensemble.
C'est une journée bien remplie.
Quel est le sens de ma visite, porteuse d'un message d'amitié chaleureuse du président français pour Son Altesse l'Émir ? Le sens de ma visite est de dire à nos amis koweïtiens que nous voulons porter notre partenariat au plus haut niveau. J'ai parlé d'un partenariat «triple A» comme Amitié, Ambition et Action. Nos relations politiques sont excellentes ; elles le sont depuis longtemps. La France a été aux côtés du Koweït dans des temps difficiles, comme le Koweït a toujours été aux côtés de la France, qu'il s'agisse des moments aisés ou des moments plus dangereux. Sur le plan politique nous sommes donc davantage que des partenaires, nous sommes des amis, des frères.
Sur le plan économique, sur le plan culturel, sur le plan éducatif, sur le plan de nos relations de défense, il faut que l'on porte notre partenariat au même niveau. Déjà, beaucoup de choses ont été faites, mais cela n'est pas suffisant. L'esprit de ma visite, c'est justement - accompagné de délégations économiques et de partenaires culturels et éducatifs - de permettre ce pas en avant très significatif dans notre partenariat.
Nous avons signé il y a quelques instants des accords et il y a des décisions immédiates. D'une part, nous avons décidé que notre opérateur, «Business France», qui aide les investisseurs étrangers en France et les entreprises françaises vers l'étranger, aurait désormais une implantation spécifique au Koweït.
D'autre part, nous avons décidé que, désormais, les visas de tous les Koweïtiens qui veulent venir chez nous seront délivrés au maximum en quarante-huit heures. Ce sera le délai le plus court qui existe à travers le monde. Nous avons également pris les dispositions nécessaires - nous le devons à la partie koweïtienne que je remercie chaleureusement - pour que, très rapidement, les élèves des collèges, puis dans un second temps de l'enseignement primaire, ici, puissent apprendre systématiquement le français. Ce sera évidemment pour la génération qui va venir une amélioration considérable qui montre bien la volonté à la fois de nos amis koweïtiens et de nous-mêmes de travailler de plus en plus ensemble. Comme le disait avec humour mon collègue et ami, cela permettra à nos enfants ou à nos petits-enfants de parler entre eux sans que nous ne comprenions nécessairement.
D'une façon plus large, le Koweït a adopté un plan très ambitieux pour cinq ans - sur la période qui va de 2015 à 2019 - qui couvre toute une série de secteurs : le transport, le logement, la santé, l'énergie et d'autres encore. La France souhaite absolument s'inscrire dans un partenariat avec le Koweït pour la réalisation du plan. Les propos qui nous ont été tenus, à la fois par Son Altesse l'Émir, par Son Altesse le Premier ministre et par les différents ministres, sont extrêmement encourageants de ce point de vue.
Je voudrais terminer en disant deux choses. D'une part, j'ai fait compliment aux dirigeants du Koweït pour leur rôle de paix dans la région. Nous avons apprécié, depuis déjà longtemps, à quel point votre pays joue un rôle précieux aussi bien au niveau régional qu'au niveau international, dans le sens de la paix ; c'est un médiateur. C'est aussi un acteur très important reconnu sur le plan humanitaire. Nous cheminons et nous allons cheminer la main dans la main et c'est bien nécessaire quand on a à faire face à des crises comme celles qui se passent en Palestine et Israël, celles qui se passent en Irak, celles qui se passent en Syrie, celles qui se passent au Yémen... je pourrais continuer la liste. Le fait que la France et le Koweït soient côte à côte est extrêmement utile.
Je termine ce court propos en disant que j'ai apporté à votre intention votre Excellence, Monsieur le Ministre des affaires étrangères, Chers Amis - je pense que cela vous fera plaisir - le fac-similé des lettres de créance que les premiers ambassadeurs du Koweït ont remis au général de Gaulle. Cinquante ans après, c'est un souvenir qui marque la continuité de l'amitié entre le Koweït et la France.
Enfin, au nom du président de la République et du Premier ministre, j'ai lancé une invitation à votre Premier ministre à venir en France et je suis sûr que cette visite permettra encore d'avancer sur le chemin du partenariat d'exception qui doit exister entre le Koweït et la France.
Je vous remercie.
Q - Premièrement, comment la France accueille-t-elle la démarche initiée par les autorités koweïtiennes en vue d'une exemption du visa Schengen pour les Koweïtiens ? Deuxièmement, êtes-vous arrivés à un accord en ce qui concerne le dossier nucléaire iranien ?
R - Concernant les visas, nous nous sommes organisés avec l'ambassadeur de France au Koweït qui, avec son équipe, fait un travail remarquable et que je tiens à souligner. De la même façon, l'ambassadeur du Koweït à Paris fait un travail également remarquable. Nous avons pris des dispositions pour que désormais, lorsque des citoyens du Koweït souhaitent se rendre en France, leur demande soit examinée et satisfaite dans un délai de quarante-huit heures. Bien évidemment cela demandait une organisation un peu nouvelle, mais nous l'avons mise en place et cela va permettre, nous l'espérons, soit aux hommes d'affaires, soit aux touristes de venir plus nombreux chez nous. Ils sont déjà nombreux d'ailleurs - je crois qu'ils sont 50 000 - mais nous souhaitons qu'ils soient encore plus nombreux. Alors vous allez me dire que c'est très difficile. Oui en effet, mais j'avais fait le même exercice l'année dernière avec la Chine et cet exercice a été réussi. Depuis janvier de l'année dernière, les Chinois qui veulent venir en France se voient délivrer un visa en quarante-huit heures. Je pense donc que si on a pu réaliser cela avec la «modeste» population chinoise, on doit pouvoir en se mobilisant y arriver avec la «nombreuse» population du Koweït. Et donc ce que nous voulons, c'est que les procédures soient plus simples. (...).
- Iran -
(...)
Concernant l'Iran, votre question porte sur le nucléaire iranien, sur la discussion que nous avons depuis déjà pas mal de temps avec les Iraniens. Vous savez que cette discussion est organisée au sein d'un groupe que l'on appelle le «5+1». Il y a, d'une part, les 5 membres permanents du Conseil de sécurité - la France est un des 5 membres permanents - ainsi que les Allemands et, d'autre part, nos collègues iraniens. C'est une discussion dans laquelle il faut aller à l'essentiel.
Quel est l'essentiel ? Un accord respectable qui permet de tirer toutes les leçons de cette affirmation de principe : l'Iran doit avoir le droit entier à l'utilisation du nucléaire civil ; en revanche, la bombe atomique, non. L'Iran est d'accord avec cette solution de principe mais il faut tirer toutes les conséquences techniques de cette position de principe qui sont assez compliquées : le nombre et la nature des centrifugeuses autorisées ; le devenir d'un certain nombre de réacteurs ; la manière dont le contrôle doit être opéré ; le devenir des sanctions existantes ; etc. Si l'Iran se place dans cette perspective, les sanctions qui existent n'ont plus lieu d'être. Comment les suspend-on ? Nous avons avancé dans la discussion, mais nous n'avons pas su jusqu'ici conclure, ce qui fait que nous avons eu un accord intérimaire l'année dernière. N'ayant pu conclure, nous avons retardé l'échéance ; désormais celle-ci est fixée au 30 mars, puis à la fin du mois de juin 2015.
Nous espérons, nous la France - puissance indépendante, membre permanent du Conseil de sécurité, détenteurs nous-mêmes de l'arme nucléaire - que nous allons trouver une solution car cela permettrait de casser la prolifération nucléaire qui est un grand danger.
Vous avez évoqué les États-Unis. J'ai récemment écrit un article publié dans un grand journal américain pour dire que nous souhaitons qu'il y ait un accord, mais pour qu'il y ait un accord il faut que les Iraniens acceptent un certain nombre d'éléments qu'ils n'ont jusqu'à présent pas expressément acceptés. De plus, si nous voulons vraiment un accord, il serait tout à fait contre-productif d'ajouter des sanctions à celles qui existent déjà.
Voilà où nous en sommes, je ne peux pas vous garantir à 100 % le résultat parce que dans une négociation on est responsable de ses propositions mais pas de celles et de ceux qui sont en face de nous. J'espère que nous pourrons trouver une solution sérieuse qui nous permette de faire un pas très important vers le refus de la prolifération nucléaire. Voilà l'état exact de nos discussions (...).
- Lutte contre le terrorisme -
(...)
Q - Comment expliquez-vous la force de Daech, que la coalition internationale arrive difficilement à combattre ?
R - Je voudrais dire un mot dans le même sens que ce que mon collègue et ami vient de dire. Le terrorisme est un danger pour nous tous. C'est un danger international, la réponse doit donc être internationale ; c'est la raison pour laquelle nous sommes côte à côte. Je voudrais ajouter que la présentation des faits par certains terroristes, selon laquelle ils agiraient au nom d'une religion, est une présentation mensongère. Personne ne peut tuer au nom d'une religion et lorsque nous combattons contre le terrorisme, en fait, nous voulons combattre ces gens qui sont, non seulement des menteurs, mais des assassins. Ce sont d'abord les musulmans que nous protégeons puisque ce sont eux qui sont les premières victimes de ces terroristes.
Je vous rappelle que si la France a envoyé un certain nombre de ses hommes au Mali, c'était parce que le Mali était tombé sous la coupe des terroristes. Lorsque nous avons décidé d'aider nos amis en Irak, c'était pour empêcher que Daech progresse. Il est normal que le Koweït et la France soient côte à côte dans ce combat qui est difficile, multiforme et, comme l'a dit mon collègue et ami, nous devons absolument gagner parce que c'est l'existence même de ce que nous représentons qui est en jeu.
Q - Premièrement, pourquoi n'avez-vous pas pris en charge les propos de Jean-Marie Le Pen concernant Charlie Hebdo ? Deuxièmement, la presse française insulte le ministre français des affaires étrangères sur son discours au sujet du Qatar, dans lequel il dit qu'il n'y a aucune preuve qui prouve que le Qatar soutient le terrorisme. Comment répondez-vous à cette question ? Enfin, la réunion voulue par John Kerry qui aura lieu le 18 février 2015 à Washington va-t-elle mettre en place des moyens pour lutter contre le terrorisme ou s'agira-t-il uniquement d'un sommet politique ?
R - Au sujet de la réunion de Washington, nous avons interrogé notre collègue, M. Kerry. Je ne sais pas exactement quelle sera la forme de cette réunion, donc je ne peux pas vous répondre précisément ; ce que j'ai compris, c'est qu'elle serait destinée à réfléchir ensemble aux moyens de lutter contre le terrorisme, et notamment contre ce qu'on appelle les «Foreign Fighters», mais ce sera aux Américains de préciser quelles sont leurs idées.
En ce qui concerne les attaques terroristes qui ont eu lieu en France, nous ne nous situons pas par rapport aux déclarations de tel ou tel politicien français ; nous nous situons par rapport aux faits. Il y a un choc lourd au sein de la société française : des assassins ont successivement tué des journalistes puis des policiers et aussi des personnes de confession juive, parce qu'ils étaient juifs. Dans tout État civilisé, c'est une chose qui non seulement ne peut pas être acceptée mais qui doit être combattue. Les assassins ont été identifiés et vous connaissez leur fin. En ce moment, une enquête a lieu contre ces assassins qui se réclamaient de groupes terroristes, il faut donc à présent laisser la justice faire son travail.
En ce qui concerne le Qatar, oui, il y a depuis quelques temps dans certains milieux en France des imputations concernant d'ailleurs différents pays. Nous, la France, combattons le terrorisme et notre position par rapport à cela, c'est de dire «ni complaisance, ni médisance». La complaisance signifie que nous n'avons pas à être particulièrement aimables à l'égard de gens qui ne le méritent pas. La médisance consisterait à écouter des bruits faux, mais parce qu'ils existent.
Donc, nous sommes partenaires avec le Qatar mais nous refusons la médisance et la complaisance. Nous combattons le terrorisme, nous combattons aussi ceux qui financent le terrorisme et si nous avions connaissance que tel ou tel État finançait le terrorisme nous en tirerions évidemment les conséquences.
Q - Premièrement, peut-on savoir le nombre de djihadistes français en Syrie et en Libye et d'après vos enquêtes qui finance le terrorisme, puisque vous avez écarté le Qatar ? Deuxièmement, concernant la lutte contre Daech, comptez-vous renforcer votre rôle au sein de la coalition internationale ? Troisièmement, les Français musulmans se sentent menacés en France, quelles sont donc vos mesures pour protéger ces citoyens ?
R - Sur la question du nombre, les évaluations données par notre ministre de l'intérieur sont des évaluations malheureusement très élevées. Pour le nombre de Français - ils peuvent d'ailleurs être binationaux - identifiés comme ayant combattu en Syrie et dans la région voisine, il a cité le chiffre de 400, mais des personnes sont suspectées de pouvoir se rendre dans la région ou d'en revenir et dans ce cas, le nombre se situe au-dessus de 1.000. Vous voyez que ce sont des nombres importants et, évidemment, ces personnes font l'objet d'une surveillance extrêmement attentive.
Quant au financement, il ne demande pas des sommes considérables. Une personne qui vit en France et qui veut aller combattre en Syrie va - et nous essayons de lutter contre cela - acheter un billet et passer probablement par la Turquie et arriver à destination.
Pour ce qui concerne l'armement - c'est un autre aspect -, nous avons décidé au plan français et au plan européen de mener une action extrêmement vigoureuse contre les trafics d'armes. On observe que ces trafics qui concernent les armes concernent parfois la drogue. Il faut que l'on soit extrêmement actif et vigilant par rapport à cela. Il n'est pas question bien sûr d'accepter des financements ; une réunion au Bahreïn a eu lieu il y a très peu de temps.
D'autres actions sont menées. Il faut s'attaquer à toutes les racines du terrorisme, que ce soit le financement, le trafic d'armes, les liaisons par Internet - beaucoup sont malheureusement recrutés par cette voie - et tout cela ne peut pas être pratiqué au nom de la religion, c'est un mensonge. La réalité c'est que ce sont des gens qui veulent détruire tous ceux qui ne pensent pas comme eux ; il ne faut donc pas tout confondre et dire les choses avec force et simplicité.
S'agissant de l'Irak nous intervenons avec nos forces aériennes et nous sommes le deuxième pays qui opère le plus de raids aériens dans le cadre de la coalition.
Enfin, je tiens à réaffirmer, si c'est nécessaire, que tous les Français quelle que soit leur religion doivent être également respectés et qu'il n'est pas question d'accepter en France une hostilité à l'islam. Nous considérons que l'islam est une religion modérée. De toute manière en France, comme vous le savez sans doute, il y a depuis le début du XXe siècle une séparation entre l'Église - chacun peut avoir la religion qu'il veut ou pas de religion - et l'État. Donc, à chaque fois qu'un musulman, puisque c'est l'exemple que vous prenez, se sentirait menacé parce qu'il est musulman ou à chaque fois qu'une mosquée serait menacée, la réaction doit être extrêmement ferme. Ce n'est pas une opinion comme une autre, c'est un délit et le délit peut être sanctionné, je suis donc extrêmement ferme là-dessus.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 janvier 2015