Interview de M. Christian Eckert, secrétaire d'Etat au budget, à "Radio Classique" le 6 février 2015, sur les prévisions économiques pour la France.

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Média : Radio Classique

Texte intégral

NICOLAS PIERRON
Le secrétaire d'Etat au Budget est donc avec nous ce matin, bonjour Christian ECKERT.
CHRISTIAN ECKERT
Bonjour.
NICOLAS PIERRON
On va commencer par les bonnes nouvelles, pour une fois la croissance sera sans doute meilleure que prévue cette année, 1 % dit la Commission européenne, ce qui rejoint désormais la prévision du gouvernement. Ça pourrait même être un peu plus ?
CHRISTIAN ECKERT
Ecoutez, il faut rester prudent, les prévisions de croissance sont toujours un exercice où les économistes, les différents instituts prévisionnistes changent leurs chiffres tous les mois. Nous avions tablé sur 1 % dans l'élaboration de la loi de finance, aujourd'hui la Commission s'aligne sur ce chiffre. Voilà si nous faisons 1 %, ce sera bien et tout ce qui sera en plus, ce sera, si j'ose dire, du bonus.
NICOLAS PIERRON
Vous n'avez pas relevé la prévision donc pour l'instant.
CHRISTIAN ECKERT
Non, non il n'est pas question de changer nos prévisions macroéconomique.
NICOLAS PIERRON
Mais l'effet pétrole, l'effet eurodollar joue à plein en ce moment.
CHRISTIAN ECKERT
Alors il y a plusieurs effets sur le pétrole, vous avez bien sûr un effet positif qui donne du pouvoir d'achat aux Français d'abord et puis aux ministères aussi si j'ose dire.
NICOLAS PIERRON
Un milliard d'euros parait-il d'économies pour la Défense avec les économies de carburant, puisque les militaires sont très gourmands en carburant.
CHRISTIAN ECKERT
Nous sommes en train de travailler sur ces questions puisque c'est vrai que les plafonds de dépenses qui ont été fixés pour 2015 n'avaient pas anticipé une baisse du pétrole aussi importante, parce que le pétrole c'est aussi le fioul, c'est aussi le chauffage, ça ne concerne pas que la Défense. Et puis il y a aussi un phénomène sur l'inflation qui fait qu'il y a une baisse des prix, en tout cas une stabilisation des prix. Autant d'ailleurs sur la croissance, nous avons prévu 1 %, je pense que c'est un chiffre qui sera atteint, autant sur l'inflation nous avions prévu 0,9, je pense que ce sera un chiffre qui ne sera pas atteint.
NICOLAS PIERRON
On sera à combien plutôt 0,5 ?
CHRISTIAN ECKERT
On sera plus proche de 0,5 que de 0,9 oui.
NICOLAS PIERRON
On est quasiment à zéro en ce moment en terme d'inflation en France, du côté du déficit public, il reste toujours prévu à 4,1 % pour cette année ?
CHRISTIAN ECKERT
Oui pour 2015, nous avons prévu 1 %, d'ailleurs la Commission valide ces chiffres, c'est une première que la Commission valide les chiffres de prévision du gouvernement, ce n'est pas l'habitude.
NICOLAS PIERRON
Sauf qu'elle prévoit aussi 4,1 % pour 2016.
CHRISTIAN ECKERT
Oui mais 2016, c'est encore plus loin de nous, 2016, il y aura l'effet de l'inflation, il y aura l'effet aussi des mesures que nous allons prendre, que nous sommes en train de prendre, les mesures d'économies qui ont été parfaitement calibrées pour 2015, qui sont en cours de finalisation pour 2016, enfin cours de finalisation, en tout cas on a commencé le travail avec le ministère pour 2016.
NICOLAS PIERRON
15 milliards d'économies prévus pour 2016.
CHRISTIAN ECKERT
C'est ça oui, c'était 50 milliards sur trois ans, nous avons fait 21 milliards en 2015, il en reste 29, si on divise par deux, sur deux ans, ça fait 14,5, 15 milliards.
NICOLAS PIERRON
Pourquoi le déficit ne baisse pas alors, 4,1 % ?
CHRISTIAN ECKERT
Ecoutez, il baisse puisqu'il était à 4,4, enfin il est prévu à 4,4 %, c'est-à-dire un chiffre aussi que la Commission valide, même améliore un peu. Nous verrons bien mi-mars les résultats, mais c'est une baisse néanmoins et ceci dit la baisse de l'inflation n'a pas que des effets positifs, c'est-à-dire qu'elle ne fait pas que redonner du pouvoir d'achat, aussi bien aux ménages qu'aux administrations publiques ou qu'aux entreprises. La baisse de l'inflation souvent entraine une baisse des recettes, si vous prenez la TVA par exemple vous avez mécaniquement une baisse des recettes de TVA lorsque l'inflation n'est pas à la hauteur de ce que vous aviez prévu.
NICOLAS PIERRON
Si on est à 0,5 sur cette année, vous avez déjà chiffré l'impact pour la TVA, pour les recettes de TVA ?
CHRISTIAN ECKERT
Non parce que comme je vous l'ai dit, il y a des impacts positifs et des impacts négatifs. La TVA est également impactée par la croissance bien sûr, plus de croissance, c'est plus de recettes de TVA, donc tous ces phénomènes peuvent parfois se compenser les uns avec les autres.
NICOLAS PIERRON
Je disais bonne nouvelle la croissance sera à 1 % et peut-être à près de 2 % l'an prochain, mauvaise nouvelle en revanche Bruxelles demande toujours 4 milliards d'euros d'efforts supplémentaires avant de valider le budget 2015, où allez-vous les trouver ?
CHRISTIAN ECKERT
Non, Bruxelles n'a pas demandé 4 milliards d'euros supplémentaires, Bruxelles discute sur ce qu'on appelle l'effort structurel. Alors qui est encore plus compliqué, qui échappe à la plupart des Françaises et des Français, l'effort structurel, c'est celui qui regarde ce qui se serait passé s'il n'y avait pas eu la crise, pour faire simple.
NICOLAS PIERRON
C'est les vraies économies budgétaires si on peut dire.
CHRISTIAN ECKERT
Oui, mais vous savez tout dépend aussi de ce qu'on considère comme étant ce qu'on appelle la croissance potentielle, qui là aussi agite le monde des économistes et des prévisionnistes. Tout ça est très technique, donne lieu à des discussions, ce n'est pas nouveau. Nous avons en tout cas toujours rempli notre objectif sur l'effort structurel, parfois même nous avons fait un effort structurel de plus de 1 %, personne n'en a parlé, ce qui est quand même un effort considérable en matière d'économie.
NICOLAS PIERRON
Christian ECKERT, est-ce que vous avez chiffré le coût de l'extension du service civique annoncé hier par François HOLLANDE, 170 millions budgétisés pour cette année, on parle de 600 millions ?
CHRISTIAN ECKERT
Il y aura bien sûr un coût supplémentaire, mais ce sont des mesures qui vont monter en puissance parce que pouvoir répondre à la demande de service universel nécessite aussi d'avoir une offre, c'est-à-dire des structures d'accueil, c'est-à-dire des collectivités ou des secteurs qui demandent d'accueillir des jeunes en service civique ou en service universel. Donc nous avions quand même prévu une augmentation, monsieur le Président de la République avait déjà fixé un objectif.
NICOLAS PIERRON
On sera à quoi, 600 millions alors ?
CHRISTIAN ECKERT
Non c'est trop tôt là encore pour vous le dire, nous avions prévu une augmentation, il y aura quelques centaines de millions d'euros supplémentaires sur ce team budgétaire. Vous savez il y a eu d'autres décisions qui ont été annoncées en terme de sécurité, en terme de justice, grosso modo…
NICOLAS PIERRON
Là aussi vous avez prévu des compensations déjà.
CHRISTIAN ECKERT
Oui, nous travaillons, je vous ai dit tout à l'heure que l'inflation faisait que les prix y compris pour nos administrations baissent, donc ça veut dire que ce sont des sources d'économies. Vous avez évoqué un chiffre probablement un peu élevé pour la Défense.
NICOLAS PIERRON
Un milliard.
CHRISTIAN ECKERT
Je pense qu'un milliard c'est un peu fort, mais nous y travaillons. C'est justement le fait que les ministères vont avoir des dépenses un peu moins importantes liées à la faible inflation ou aux faibles prix du pétrole, des carburants et des énergies, qui vont nous permettre de faire des économies pour financer les mesures nouvelles. Des mesures nouvelles qui ont été annoncées par le président ou qui ont déjà été annoncées il y a quelques jours, quelques semaines, seront financées par des mesures d'économies et n'impacteront pas le déficit budgétaire.
NICOLAS PIERRON
Merci Christian ECKERT, secrétaire d'Etat au Budget.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 février 2015