Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Yves LE DRIAN, bonjour.
JEAN-YVES LE DRIAN
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous partez pour l'Egypte, dans combien de temps ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Dans quelques heures. Vers 10h, absolument pour signer ce contrat exceptionnel, à la fois pour nos industries de défense et la reconnaissance de la qualité de l'industrie de défense, de l'équipe de France de l'industrie de défense ; et puis aussi c'est une manière de renforcer notre relation avec l'Egypte. C'est un moment important, qui va aussi valoriser cette action de chasse, le Rafale, que l'on avait un peu trop coutume à relativiser dans le passé et qui aujourd'hui retrouve à l'exportation des couleurs. C'est la valorisation d'un avion très performant, reconnu comme tel par les autorités égyptiennes. Et puis c'est aussi un bon contrat pour DNCS puisque c'est une frégate qui va être désormais chargée d'assurer, entre autres, la sécurité du Canal de Suez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Yves LE DRIAN, 24 Rafale donc, une frégate et des missiles. Ce contrat, vous allez le signer, mais c'est une entreprise privée qui construit
JEAN-YVES LE DRIAN
Ce sont les entreprises qui vont les signer
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous vous allez assister à la signature ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Oui. Je suis le grand témoin avec DCSN, MBDA, DASSAULT, SAGEM, SAFRAN, beaucoup d'entreprises aussi petites et moyennes qui ont contribué à ce succès qui est le succès de la technologie française. Donc ne boudons pas notre plaisir, c'est une avancée technologique importante et c'est aussi une reconnaissance de cette avancée technologique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est allé très vite, en cinq mois de négociation le gouvernement a choisi l'avion français, on sait qu'il est un peu brouillé avec les Etats-Unis. Qu'est-ce qui se passe ? Il faut aider le président SISSI à lutter contre le terrorisme, c'est cela ? Les Egyptiens qui viennent de bombarder Daesh en Libye d'ailleurs au passage.
JEAN-YVES LE DRIAN
Absolument. Il a d'abord le président SISSI une nécessité stratégique, c'est d'assurer la sécurité du Canal de Suez. Canal de Suez par lequel passe une grande partie du trafic mondial. Il a la responsabilité de cette sécurité et c'est la première raison de l'urgence d'avoir à la fois les capacités navales et les capacités aériennes pour assurer cette sécurité. Il a un deuxième sujet, c'est le risque fondamentaliste au Sinaï, contre le quel il est affronté tous les jours. Et puis il a un troisième sujet c'est la lutte contre le fondamentalisme djihadiste partout. Et les évènements récents, en particulier la décapitation spectaculaire, morbide de chrétiens enlevés en Egypte et assassinés en Libye par Daesh est une raison supplémentaire d'avoir des éléments de sécurité. Puis l'Egypte c'est un très grand pays, 85 millions d'habitants, c'est un pays essentiel pour la stabilité à venir que l'on espère tous au Moyen Orient, et c'est une raison supplémentaire pour le président SISSI d'assurer sa propre sécurité. Parce que le développement et la démocratie c'est postérieur à la sécurité. Il faut d'abord la sécurité pour être sur ensuite d'engager son pays dans une stratégie positive et qui aujourd'hui n'était pas encore au rendez vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'Egypte qui bombarde en Libye, on s'aperçoit, et le grand public n'y pensait pas et ne le savait peut-être pas, on s'aperçoit que l'Etat islamique est aussi en Libye, pas qu'en Syrie et en Irak.
JEAN-YVES LE DRIAN
Absolument. Ca fait plusieurs semaines que ce risque est pointé par un certain nombre d'observateurs, y compris par moi-même. Il y a là dans le chaos libyen les risques de jonction entre ce qu'est Daesh au Levant et Daesh en Libye. Et aujourd'hui preuve est faite qu'il y a des centres d'entrainement et qu'il y a des actions spécifiques de Daesh en Libye. Et la Libye c'est de l'autre côté de la Méditerranée, c'est très proche de nous. D'où la nécessité d'être extrêmement vigilants et d'être alliés avec les pays de la coalition comme d'ailleurs l'est l'Egypte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Yves LE DRIAN certains défenseurs des Droits de l'homme ne comprennent pas qu'on puisse vendre des avions de guerre à l'Egypte alors que l'Egypte, le gouvernement condamne à mort des centaines de frères musulmans et s'assoit quand même bien souvent sur les Droits de l'homme ! Qu'est-ce que vous répondez à cela ?
JEAN-YVES LE DRIAN
La stabilité de l'Egypte n'est pas encore tout à fais assurée. C'est une réalité. L'autre réalité c'est que le président SISSI a été élu par son peuple et qu'il prépare des élections législatives. Et la réalité c'est aussi que la sécurité est l'élément d'urgence pour ce pays. Nous ne partageons pas toutes les actions menées par l'Egypte mais l'essentiel cest d'avoir un pays, un grand pays comme l'Egypte, stabilisé pour assurer demain la sécurité globale de la zone. C'est le même combat que nous menons contre Daesh en Irak, que celui que nous menons avec l'Egypte pour assurer sa propre sécurité, que celui que nous menons aussi au Sahel pour assurer la sécurité du Mali, du Niger et du Tchad. C'est un combat global.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que nous pourrions à nouveau intervenir en Libye ?
JEAN-YVES LE DRIAN
La question ne se pose pas comme ça, il est certain qu'il y a aujourd'hui des risques en Libye. Il est certain aussi que la solution du chaos libyen ne peut être que politique. C'est-à-dire à la fois par la prise en compte de l'action des pays riverains : il y a l'Egypte mais il y a aussi l'Algérie, le Tchad, la Tunisie, le Niger. Et puis aussi par le fait que la communauté internationale puisse se saisir d'une solution politique. Il y a un envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies en ce moment en Libye qui essaye de faire en sorte que la paix puisse revenir et que les différentes parties en présence puissent sortir par une solution politique vers le haut. Nous souhaitons qu'il puisse aboutir. En tout cas c'est un enjeu pour la communauté internationale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Deux questions encore et je vous laisse. La première porte sur les frégates que nous devons vendre, que nous avons vendues mais que nous n'avons pas livrées à la Russie, compte tenu des accords de paix plus ou moins respectés pour l'instant apparemment respectés de Minsk. Est-ce que nous allons finir par les livrer ces frégates ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Ce ne sont pas frégates monsieur BOURDIN, ce sont des bateaux de commandement
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui pardon, c'est vrai. Des Mistral.
JEAN-YVES LE DRIAN
Et de projection. Ce n'est pas tout à fait le même format, c'est beaucoup moins armé. Enfin, des Mistral si vous voulez, c'est des bateaux de commandement et de projection. Ce n'est pas à l'ordre du jour, le président de la République avait estimé qu'il ne fallait pas livrer ces bateaux à la Russie parce que le cesser le feu n'était pas mis en place, parce qu'il y avait des risques pour la sécurité y compris pour la sécurité en Europe, parce que la Russie rompait ses engagements internationaux sur les frontières. A l'heure actuelle le cesser le feu est fragile, le processus de paix vient de commencer, nous nous en tenons là et
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour l'instant nous ne le livrons pas ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Ce n'est pas à l'ordre du jour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas à l'ordre du jour. Dernière question, elle est politique. Vous allez quitter votre ministère pour prendre la tête de liste en région Bretagne ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Vous savez monsieur BOURDIN en ce moment j'ai beaucoup de choses à faire. Et donc cette question ne se pose pas aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien ok, bon voyage en Egypte. Dites moi, dites moi, la vente en Egypte, ça veut dire qu'on va vendre ailleurs ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Ca veut dire qu'il y a d'autres prospects qui existent depuis un certain temps, qui peut-être du même coup vont se débloquer, mais pour l'instant
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca avance bien ?
JEAN-YVES LE DRIAN
Je garde sur ces dossiers la même logique que celle que j'ai eue pour l'Egypte, la discrétion et la maitrise des situations.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Merci Jean-Yves LE DRIAN. Merci à vous.
JEAN-YVES LE DRIAN
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 février 2015